L’Abîme (Rollinat)/Le Cœur blasé
LE CŒUR BLASÉ
Chacun prend du péché la dose nécessaire
Pour varier son sort hideusement égal :
La luxure contraste avec l’amour brutal,
Et mentir change un peu d’être toujours sincère.
Une tentation distrait notre misère,
Un vice nous dispute au dégoût radical :
On greffe la vertu sur l’opprobre natal
Et l’on reste un lépreux qui tient à son ulcère.
Le seul devoir, piteux régal !
À digérer ce mets frugal,
L’estomac du cœur se resserre.
Il faut à ce méchant viscère,
Qui trouve le Bien trop banal.
L’originalité du Mal.