La Source grecque/Note de l’éditeur

Gallimard (p. 7-8).

Note de l’Éditeur.

Ce recueil est formé de traductions du grec et d’études ou de fragments d’études concernant la pensée grecque. Deux de ces études sont des articles que Simone Weil publia dans des revues. Les autres textes sont tirés de ses cahiers.

L’article L’Iliade ou le Poème de la Force a été écrit en 1939-1940 et devait paraître dans la Nouvelle Revue française, quand se produisit l’offensive allemande. Il ne put être publié dans Paris occupé. Il le fut à Marseille, dans les Cahiers du Sud (décembre 1940 — janvier 1941), sous le nom d’Émile Novis, anagramme de Simone Weil. Les Cahiers du Sud l’ont de nouveau publié après la guerre (no 284, 1947), sous le nom véritable de l’auteur.

Le fragment sur Zeus et Prométhée a été probablement écrit en 1942-1943 ; Plaintes d’Électre et reconnaissance d’Oreste, en 1942. Dans le premier de ces textes, la traduction d’un passage d’Agamemnon est différente de celle qu’on trouve dans les Intuitions pré-chrétiennes, et elle est plus complète. Dans le second, ce qui est traduit d’Électre comprend beaucoup plus que les quelques vers de la scène de la reconnaissance qui étaient traduits dans les Intuitions pré-chrétiennes, et même ces quelques vers sont traduits un peu différemment ici.

L’article intitulé Antigone a été publié avant la guerre dans une petite revue d’usine : Entre nous, chronique de Rosières (16 mai 1936). Il a été retrouvé récemment par M. Jacques Cabaud, qui a cherché à Rosières, près de Bourges, cette revue introuvable ailleurs et fort rare là-bas. Une lettre publiée dans La Condition ouvrière (pp. 153-154), lettre que Simone Weil adressa en avril ou mai 1936 au directeur de l’usine, qui était aussi celui de la revue, montre dans quel dessein elle l’a écrit et en explique le caractère : « Je me demandais avec inquiétude comment j’arriverais à prendre sur moi d’écrire en me soumettant à des limites imposées, car il s’agit évidemment de vous faire de la prose bien sage, autant que j’en suis capable… Heureusement il m’est revenu à la mémoire un vieux projet qui me tient vivement au cœur, celui de rendre les chefs-d’œuvre de la poésie grecque (que j’aime passionnément) accessibles aux masses populaires. J’ai senti, l’an dernier, que la grande poésie grecque serait cent fois plus proche du peuple, s’il pouvait la connaître, que la littérature française classique et moderne. J’ai commencé par Antigone. Si j’ai réussi dans mon dessein, cela doit pouvoir intéresser et toucher tout le monde — depuis le directeur jusqu’au dernier manœuvre ; et celui-ci doit pouvoir pénétrer là-dedans presque de plain-pied, et cependant sans avoir jamais l’impression d’aucune condescendance, d’aucun effort accompli pour se mettre à sa portée. C’est ainsi que je comprends la vulgarisation. Mais j’ignore si j’ai réussi. »

La traduction du Printemps de Méléagre, qui termine la première partie, a été trouvée dans un des cahiers que Simone Weil laissa à New-York quand elle partit pour Londres en 1942.

Dieu dans Platon et les autres textes concernant Platon, ainsi que la traduction des fragments d’Héraclite et la note Dieu dans Héraclite, sont tirés des cahiers rédigés à Marseille et à New-York entre la fin de 1940 et le mois de novembre 1942.

Les notes sur Cléanthe, Phérécyde, Anaximandre et Philolaos ont été écrites à Londres en 1943. Elles ont été laissées dans l’ordre où elles se trouvent dans le manuscrit.

On a cherché à grouper dans la première partie ce qui concerne les poètes grecs, dans la seconde, ce qui concerne les philosophes. Dans la première partie, on a suivi l’ordre chronologique des auteurs grecs, mais il n’était pas possible de suivre cet ordre dans la seconde sans bouleverser parfois les textes de Simone Weil, et l’on a préféré suivre l’ordre chronologique des études elles-mêmes, non des sujets.

Il a semblé que ces textes, ainsi réunis, permettaient de saisir mieux qu’on n’avait pu le faire encore ce qu’est pour Simone Weil l’esprit de la Grèce et quelle part a la source grecque dans sa pensée.