La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition critique/Laisse 91

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XCI

As porz d’Espaigne en est passez Rollanz Aux défilés d’Espagne passe Roland
Sur Veillantif, sun bon cheval curant ; Sur Veillantif, son bon cheval courant.
Portet ses armes, mult li sunt avenant : Ses armes lui sont très-avenantes ;
1155 E sun espiet vait li bers palmeianz, Il s’avance, le baron, avec sa lance au poing,
Cuntre le ciel vait l’amure turnanz, Dont le fer est tourné vers le ciel,
Lacet en sum un gunfanun tut blanc ; Et au bout de laquelle est lacé un gonfanon tout blanc.
Les renges d’or li batent jusqu’as mains ; Les franges d’or lui descendent jusqu’aux mains.
Cors ad mult gent, le vis cler e riant.
Le corps de Roland est très-beau, son visage est clair et riant.
1160 E sis cumpainz après le vait sivanz, Sur ses pas marche Olivier, son ami ;
E cil de France le cleiment à guarant.
Et ceux de France, le montrant : « Voila notre salut, » s’écrient-ils.
Vers Sarrazins reguardet fièrement, Sur les Sarrasins il jette un regard fier,
E vers Franceis humeles e dulcement. Mais humble et doux sur les Français ;
Si lur ad dit un mot curteisement : Puis, leur a dit un mot courtois :
1165 « Seignurs baruns, suef pas alez tenant. « Seigneurs barons, allez au petit pas.
« Cist païen vunt grant martirie querant ;
« Ces païens, en vérité, viennent ici chercher grand martyre.
« Encoi averum un eschec bel e gent : « Le beau butin que nous aurons aujourd’hui !
« Nuls reis de France n’out unkes si vaillant. » « Aucun roi de France n’en fit jamais d’aussi riche. »
A cez paroles vunt les oz ajustant. Aoi. À ces mots, les deux armées se rencontrent.


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Vers 1152. — Il y a ici, dans le texte de Paris, trois couplets de plus que dans celui d’Oxford : ce sont les laisses cv, cvi, cvii de ce Remaniement. Je ne pense pas qu’elles aient été dans le texte original. On y voit Estoult de Langres, Engelier le Gascon et Turpin de Reims prononcer des discours et faire des prières. Ce sont là, suivant nous, des additions évidentes.

Vers 1154.Avenanz. O. Il faut avenant pour le sujet pluriel.

Vers 1155. — Au lieu de e, le Ms. porte mais. ═ Lire ber. ═ Palmeiant. O. Le cas sujet exige palmeianz. (V. la note du v. 611.)

Vers 1156.Turnant. O. Il faut turnanz. (V. la note du v. 611.)

Vers 1157.Laciet. O. V. la note du v. 1042.

Vers 1158.D’or n’est pas dans le Ms. Mais Venise IV donne li bande à or ; Paris : les laingnes d’or, et Versailles : les langues d’or. La correction est de Mu. ═ Josqu’as. O. V. la note du vers 510.

Vers 1161.Sun cumpaignun. O. Le cas sujet exige sis cumpainz. ═ Sivant. O. Pour le s. s., il faut sivanz.

Vers 1163. — Le manuscrit porte humeles. Nous ne savons pas pour quelle raison Mu. a supprimé l’s.

Vers 1165.Barons. O.

Vers 1166.Vont. O. ═ Matirie. O. Erreur due peut-être à une prononciation rapide.

Vers 1167.Avrum. Mu.

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