L’Ombre des jours/Renaissance

Comtesse Mathieu de Noailles ()
Calmann-Lévy, éditeurs (p. 55-56).


RENAISSANCE


Ah ! si tu peux, pauvre âme, oublie et sois encor
Naïve et confiante ainsi qu’au temps passé,
Sois ainsi jusqu’au jour de mourir, c’est assez ;
Car après, le tombeau ne veut aucun effort…

— Pourquoi rester avec cette amère mémoire
Des instants douloureux et tristes que nous eûmes,
Le jour est tiède ainsi qu’un oiseau dans ses plumes
Et l’été chancelant au bord de l’eau vient boire.


Je sais que tu tenais à garder prudemment
Cette émouvante peine au plus secret de toi.
Mais, mon âme, la vigne a rebordé les toits
Et l’abeille a repris son bel amusement.

Ne te refuse plus à la bonne semence
Qui tombe du ciel clair et des branches nouvelles,
Vois la vie et la joie, et retourne auprès d’elles
Puisqu’il faut bien qu’un peu de bonheur recommence…