L’Encyclopédie/1re édition/ZENDA VESTA

ZENDA VESTA, s. m. (Philos. & Antiq.) cet article est destiné à réparer les inexactitudes qui peuvent se rencontrer dans celui où nous avons rendu compte de la philosophie des Parsis en général, & de celle de Zoroastre en particulier. C’est à M. Anquetil que nous devons les nouvelles lumieres que nous avons acquises sur un objet qui devient important par ses liaisons avec l’histoire des Hébreux, des Grecs, des Indiens, & peut-être des Chinois.

Tandis que les hommes traversent les mers, sacrifient leur repos, la société de leurs parens, de leurs amis & de leurs concitoyens, & exposent leur vie pour aller chercher la richesse au-delà des mers, il est beau d’en voir un oublier les mêmes avantages & courir les mêmes périls, pour l’instruction de ses semblables & la sienne. Cet homme est M. Anquetil.

Le zenda vesta est le nom commun sous lequel on comprend tous les ouvrages attribués à Zoroastre.

Les ministres de la religion des Parsis ou sectateurs modernes de l’ancienne doctrine de Zoroastre sont distingués en cinq ordres, les erbids, les mobids, les destours, les destours mobids, & les destours de destours.

On appelle erbid celui qui a subi la purification légale, qui a lu quatre jours de suite, sans interruption, le izeschné & le vendidad, & qui est initié dans les cérémonies du culte ordonné par Zoroastre.

Si après cette espece d’ordination l’erbid continue de lire en public les ouvrages du zend qui forment le rituel, & à exercer les fonctions sacerdotales, il devient mobid, s’il n’entend pas le zenda vesta, s’il se renferme dans l’étude de la loi du zend & du pehlvi, sans exercer les fonctions de ministre, il est appellé destour. Le destour mobid est celui qui réunit en lui les qualités du mobid & du destour ; & le destour de destours est le premier destour d’une ville ou d’une province. C’est celui-ci qui décide des cas de conscience & des points difficiles de la loi. Les Parsis lui paient une sorte de dixme ecclésiastique. En aucun lien du monde les choses célestes ne se dispensent gratuitement.

Arrivé à Surate, M. Anquetil trouva les Parsis divisés en deux sectes animées l’une contre l’autre du zele le plus furieux. La superstition produit par-tout les mêmes effets. L’une de ces sectes s’appelloit celle des anciens croyans, l’autre celle des réformateurs. De quoi s’agissoit-il entre ces sectaires, qui penserent à tremper toute la contrée de leur sang ? De savoir si le penon, ou la piece de lin de neuf pouces en quarré que les Parsis portent sur le nés en certain tems, devoit ou ne devoit pas être mise sur le nés des agonisans. Quid rides ? mutato nomine de te fabula narratur ?

Que produisit cette dispute ? Ce que les hérésies produisent dans tous les cultes. On remonte aux sources & l’on s’instruit. Les anciens livres de la loi des Parsis furent feuilletés. Bientôt on s’apperçut que les ministres avoient abusé de la stupidité des peuples, pour l’accabler de purifications dont il n’étoit point question dans le zend, & que cet ouvrage avoit été défiguré par une foule d’interprétations absurdes. On se doute bien que ceux qui oserent révéler aux peuples ces vérités, furent traités de novateurs & d’impies. A ces disputes il s’en joignit une autre sur le premier jour de l’année. Un homme de bien auroit en vain élevé la voix, & leur auroit crié : « eh, mes freres, qu’importe à quel jour l’année commence ? elle commencera heureusement aujourd’hui, demain, pourvû que vous vous aimiez les uns les autres, & que vous ayez de l’indulgence pour vos opinions diverses Croyez-vous que Zoroastre n’eut pas déchiré ses livres, s’il eût pensé que chaque mot en deviendroit un sujet de haine pour vous ? » cet homme de bien n’auroit été entendu qu’avec horreur.

M. Anquetil profita de ces divisions des Parsis pour s’instruire & se procurer les ouvrages qui lui manquoient. Bientôt il se trouva en état d’entreprendre en secret une traduction de tous les livres attribués à Zoroastre. Il se forma une idée juste de la religion des Parsis ; il entra dans leurs temples qu’ils appellent derimers, & vit le culte qu’ils rendent au feu.

L’enthousiasme le gagna ; il jetta ses vues sur le sanskret, & il songea à se procurer les quatre vedes ; les quatre vedes sont des ouvrages que les bramines prétendent avoir été composés, il y a quatre mille ans, par Kreschnou. Ils se nomment le samyeda, le ridjouveda, l’atharnaveda & le raghouveda. Le premier est le plus rare. Il y avoit une bonne traduction de ces livres faite par Abulfazer, ministre d’Akbar, il y a environ deux cens ans, que M. Anquetil ne négligea pas. Il se procura des copies de trois vocabulaires sanskretains, l’amerkosch, le viakkeren & le nammala. Les deux premiers sont à l’usage des bramines ; le dernier est à l’usage des sciouras. Il conféra avec les principaux destours des lieux qu’il parcourut ; & il démontra par ses travaux infinis qu’il n’y a nulle comparaison à faire entre la constance de l’homme de bien dans ses projets & celle du méchant dans les siens.

Il apprit des auteurs modernes que la doctrine de Zoroastre avoit été originairement divisée en vingt & une parties ; il y en avoit sept sur la création & l’histoire du monde, sept sur la morale, la politique & la religion, & sept sur la physique & l’astronomie.

C’est une tradition générale parmi les Parsis qu’Alexandre fit brûler ces vingt & un livres, après se les être fait traduire en grec. Les seuls qu’on put conserver, sont le vendidad, l’izeschné, le wispered, les jeschts & les neaeschs. Ils ont encore une traduction pehlvique, originale du zend, & un grand nombre de livres de prieres, qu’ils appellent nerengs, avec un poëme de cent vingt vers, appellé barzournama, sur la vie de Roustoun, fils de Zoroastre, de Ssorab, fils de Roustoun, & de Barzour, fils de Ssorab.

Ce qui reste des ouvrages de Zoroastre, traite de la matiere, de l’univers, du paradis terrestre, de la dispersion du genre humain & de l’origine du respect que les Parsis ont pour le feu, qu’ils appellent athro-Ehoremesdaopothre, fils de Dieu. Il y rend compte de l’origine du mal physique & moral, du nombre des anges à qui la conduite de l’univers est confiée, de quelques faits historiques, de quelques rois de la premiere dynastie, & de la chronologie des héros de Ssillan & Zaboulestan. On y trouve aussi des prédictions, des traits sur la fin du monde & sur la résurrection, d’excellens préceptes moraux, & un traité des rites & cérémonies très étendu. Le style en est oriental, des répétitions fréquentes, peu de liaisons, & le ton de l’enthousiasme & de l’inspiré. Dieu est appellé dans le zend Meniossepeneste, & dans le pehlvi, Madonnadafzouni ou l’être absorbé dans son excellence. Le texte des vingt & une parties ou nosks du législateur Parsis s’appelle l’avesta ou le monde. Il est dans une langue morte tout-à-fait différente du pehlvi & du parsique. Les plus savans destours ne disent rien de satisfaisant sur son origine. Ils croient à la mission divine de Zoroastre. Ils assurent qu’il reçut la loi de Dieu même, après avoir passé dix ans au pié de son throne. M. Anquetil conjecture qu’il la composa retiré avec quelques collegues habiles entre des rochers écartés ; conjecture qu’il fonde sur la dureté montagnarde & sauvage du style. L’alphabet ou les caracteres de l’avesta s’appellent zend. Ils sont nets & simples ; on en reconnoît l’antiquité au premier coup d’œil. Il pense que le pehlvi, langue morte, a été le véritable idiome des Parsis, qui en attribuent l’invention à Kaio-Morts, le premier roi de leur premiere dynastie. Le caractere en est moins pur & moins net que le zend.

Le pahzend est un idiome dont il ne reste que quelques mots conservés dans les traductions pehlviques.

L’avesta est la langue des tems de Zoroastre, il l’apporta des montagnes ; les Parsis ne la connoissoient pas avant lui. Le pehlvi est la langue qu’ils parloient de son tems ; & le pahzend est l’avesta corrompu dont il leur recommanda l’usage pour les distinguer du peuple ; le pahzend est à l’avesta ce que le syriaque est à l’hébreu. Mereod dans l’avesta signifie il a dit, & c’est meri, dans pahzend. L’alphabet du pahzend est composé du zend & du pehlvi.

Les manuscrits sont de lin ou de coton enduit d’un vernis sur lequel on discerne le trait le plus leger.

Le vendidad sade est un in-f. de 560 pages. Le mot vendidad signifie séparé du diable, contraire aux maximes du diable, ou l’objet de sa haine. Sade signifie pur & sans mélange. C’est le nom qu’on donne aux livres zend, qui ne sont accompagnés d’aucune traduction pehlvique.

Le vendidad contient ; outre sa matiere propre, les deux traités de Zoroastre appellés l’izeschné & le wispered ; parce que le ministre qui lit le vendidad, est oblige de lire en même tems ces deux autres livres qu’on a pour cet effet divisés en leçons.

Le vendidad proprement dit, est le vingtieme traité de Zoroastre. C’est un dialogue entre Zoroastre & le dieu Ormusd qui répond aux questions du législateur.

Ormusd est défini dans cet ouvrage, l’être pur, celui qui recompense, l’être absorbé dans son excellence, le créateur, le grand juge du monde, celui qui subsiste par sa propre puissance.

L’ouvrage est divise en 22 chapitres appellés fargards ; chaque chapitre finit par une priere qu’ils appellent Eschem vohou, pure, excellente. Cette priere commence par ces mots. « Celui qui fait le bien, & tous ceux qui sont purs, iront dans les demeures de l’abondance qui leur ont été préparées ». Les deux premiers chapitres, & le cinquieme & dernier contiennent quelques faits historiques, la base de la foi des Parsis ; le reste est moral, politique & liturgique.

Dans le premier chapitre Ormusd raconte à Zoroastre qu’il avoit créé seize cités également belles, riches & heureuses ; qu’Ahriman, le diable son rival, fut la cause de tout le mal ; & que chacune de ces cités étoit la capitale d’un empire du même nom.

Dans le second chapitre, Djemchid, appellé en zend Semo, fils de Vivenganm, quatrieme roi de la premiere dynastie des Parsis, est enlevé au ciel où Ormusd lui met entre les mains un poignard d’or, avec lequel il coupe la terre, & forme la contrée Vermaneschné où naissent les hommes & les animaux. La mort n’avoit aucun empire sur cette contrée qu’un hiver désola ; cet hiver, les montagnes & les plaines furent couvertes d’une neige brûlante qui détruisit tout.

Djemhcid, dit Ormusd à Zoroastre, fut le premier qui vit l’être suprême face à face, & produisit des prodiges par ma voix que je mis dans sa bouche. Sur la fin de ce chapitre, Ormusd raconte l’origine du monde. Je créai tout dans le commencement, lui dit-il, je créai la lumiere qui alla éclairer le soleil, la lune & les étoiles ; alors l’année n’étoit qu’un jour ininterrompu ; l’hiver étoit de quarante. Un homme fort engendra deux enfans, l’un mâle, & l’autre femelle : ces enfans s’unirent, les animaux peuplerent ensuite la terre.

Il est parlé dans les chapitres suivans des œuvres agréables à la terre, ou plutôt à l’ange qui la gouverne, comme l’agriculture, le soin des bestiaux, la sépulture des morts, & le secours des pauvres. Le bon économe, dit Ormusd, est aussi grand à mes yeux, que celui qui donne naissance à mille hommes, & qui récite mille izechnés.

De l’équité de rendre au riche le prêt qu’il a fait, & des crimes appellés méherderoudis, ou œuvre de Deroudi, le diable, opposé à Meher, l’ange qui donne aux champs cultivés leur fertilité ; on peche en manquait à sa parole, en rompant les pactes, en refusant aux serviteurs leurs gages, aux animaux de labour leur nourriture, aux instituteurs des enfans leurs appointemens, aux paysans leurs salaires, à une piece de terre l’eau qu’on lui a promise.

Des morts, des lieux & des cérémonies de leur sépultuse, des purifications légales, des femmes accouchées avant terme. Ici Ormusd releve la pureté du vendidad, & parle des trois rivieres Pherar, Ponti & Varkess.

De l’impureté que la mort communique à la terre, de l’eau, & de toutes sortes de vaisseaux.

De l’impureté des femmes qui avortent, & de la dignité du médecin ; il promet une vie longue & heureuse à celui qui a guéri plusieurs malades ; il ordonne d’essayer d’abord les remedes sur les infideles qui adorent les esprits créés par Ahriman ; il prononce la peine de mort contre celui qui aura hasardé un remede pernicieux, sans avoir pris cette précaution, & fixe la récompense que chaque ordre de parsis doit au médecin ; il commence par l’athorne ou prêtre ; celui qui a guéri un prêtre, se contentera des prieres que le prêtre offrira pour lui à Dahman ou celui qui reçoit les ames des saints, de l’ange Sserosch, & qui les conduit au ciel.

De la maniere de conduire les morts au dakmé, ou au lieu de leur sépulture ; de la cérémonie de chasser le diable en approchant du mort un chien ; des prieres à faire pour le mort ; du peché de ceux qui y manquent & qui se souillent en approchant du cadavre ou en le touchant, & des purifications que cette souillure exige.

Les Parsis ont pour le feu différens noms tirés de ses usages, celui de la cuisine, du bain, &c. il faut qu’il y en ait de toutes les sortes au dadgah, lieu où l’on rend la justice.

Il parle de la place du feu sacré, de la priere habituelle des Parsis, de la nécessité pour le ministre de la loi, d’être pur & de s’exercer aux bonnes œuvres ; de l’ange gardien Bahman : c’est lui qui veille sur les bons & sur les juges integres, & qui donne la souveraineté aux princes afin de secourir le foible & l’indigent.

Pour plaire à Ormusd il faut être pur de pensées, de paroles, & d’actions ; c’est un crime digne de mort que de séduire la femme ou la fille de son voisin, que d’user du même sexe que le sien ; rompez toute communion, dit Zoroastre, mettez en piece celui qui a peché, & qui se refuse à l’expiation pénale, celui qui tourmente l’innocent, le sorcier, le débiteur qui ne veut pas s’acquitter de sa dette.

Il traite du destour mobid qui confere le barashnom, ou la purification aux souillés, des qualités du ministre, du lieu de la purification, des instrumens & de la cérémonie, des biens & des maux naturels & moraux ; il en rapporte l’origine & les progrès à la méchanceté de l’homme, & au mépris de la purification.

Il dit de la fornication & de l’adultere, qu’ils déssechent les rivieres, & rendent la terre stérile.

Il passe aux exorcismes ou prieres qui éloignent les diables instigateurs de chaque crime ; elles tiennent leur principale efficacité d’Honover, ou nom de dieu ; il enseigne la priere que les enfans ou parens doivent dire ou faire dire pour les morts ; il désigne les chiens dont l’approche chasse le diable qui rode sur la terre après minuit ; il indique la maniere de les nourrir ; c’est un crime que de les frapper ; celui qui aura tué un de ces chiens, donnera aux trois ordres de Parsis, le prêtre, le soldat, & le laboureur, les instrumens de sa profession ; celui qui n’en aura pas le moyen, creusera des rigoles qui arroseront les pâturages voisins, & fermera ces pâturages de hayes, ou il donnera sa fille ou sa sœur en mariage à un homme saint.

Les crimes pour lesquels on est puni de l’enfer, sont la dérision d’un ministre qui prêche la conversion au pécheur, l’action de faire tomber les dents à un chien exorciste, en lui faisant prendre quelque chose de brulant ; d’effrayer & faire avorter une chienne, & d’approcher une femme qui a ses regles ou qui allaite.

Il y a des préceptes sur la purification des femmes, la rognure des ongles & des cheveux, le danger de croire à un destour qui porte sur le nés le penon, ou qui n’a pas sa ceinture ; ce destour est un imposteur qui enseigne la loi du diable, quoiqu’il prenne le titre de ministre de Dieu.

Dans cet endroit, il est dit qu’Ahriman se révolta contre Ormusd, & refusa de recevoir sa loi ; & l’ange Sserosch qui garde le monde & préserve l’homme des embuches du diable, y est célébré.

Suit l’histoire de la guerre d’Ormusd & d’Ahrimane. Ormusd déclare qu’à la fin du monde les œuvres d’Ahriman seront détruites par les trois prophetes qui naîtront d’une semence gardée dans une petite source d’eau dont le lieu est clairement désigné.

Il est fait mention dans ce chapitre de l’éternité, de l’ame de Dieu qui agit sans cesse dans le monde, de la purification par l’urine de vache, & autres puérilités, de la résurrection, du passage après cette vie sur un pont qui sépare la terre du ciel, sous la conduite d’un chien, le gardien commun du troupeau.

Il est traité dans le suivant du troisieme poëriodekesch ou troisieme prince de la premiere dynastie, qui fut juste & saint, qui abolit le mal, & à qui Ormusd donna le hom, ou l’arbre de la santé ; du tribut de priere & de louange du au bœuf suprème & à la pluie.

Le vendidad finit par la mission divine de Zoroastre. Orsmud lui députa l’ange Nériossengul, en Irman. Va, lui dit-il, en Irman ; Irman que je créai pur, & que le serpent infernal a souillé ; le serpent qui est concentré dans le mal, & qui est gros de la mort. Toi qui m’as approche sur la sainte montagne, où tu m’as interroge, & où je t’ai répondu, va ; porte ma loi en Irman, je te donnerai mille bœufs aussi gras que le bœuf de la montagne Sokand, sur lequel les hommes passerent l’Euphrate dans le commencement des tems ; tu posséderas tout en abondance ; extermine les demons & les sorciers, & mets fin aux maux qu’ils ont faits. Voila la récompense que j’ai promise dans mes secrets aux habitans d’Irman qui sont de bonne volonté.

L’izechné est le second livre du vendidad-sade. Izechné signifie bénédiction. Ce livre a vingt chapitres appellés ha, par contraction de hatam, ou amen, qui finit chaque chapitre. C’est proprement un rituel, & ce rituel est une suite de puérilités.

Zoroastre y recommande le mariage entre cousins germains, loue la subordination, ordonne un chef des prêtres, des soldats, des laboureurs & des commerçans, & recommande le soin des animaux. Il y est parlé d’un âne à trois piés, placé au milieu de l’Euphrate ; il a six yeux, neuf bouches, deux oreilles, & une corne d’or ; il est blanc, & nourri d’un aliment céleste ; mille hommes & mille animaux peuvent passer entre ses jambes ; & c’est lui qui purifie les eaux de l’Euphrate, & arrose les sept contrées de la terre. S’il se met à braire, les poissons créés par Ormusd engendrent, & les créatures d’Ahriman avortent.

Après cet âne vient le célebre destour Hom-Ised ; il est saint ; son œil d’or est perçant ; il habite la montagne Albordi ; il bénit les eaux & les troupeaux ; il instruit ceux qui font le bien ; son palais a cent colonnes ; il a publié la loi sur les montagnes ; il a apporté du ciel la ceinture & la chemise de ses fideles ; il lit sans cesse l’avesta ; c’est lui qui a écrasé le serpent à deux piés, & créé l’oiseau qui ramasse les graines qui tombent de l’arbre hom, & les répand sur la terre. Lorsque cinq personnes saintes & pieuses sont rassemblées dans un lieu, je suis au milieu d’elles, dit Hom-Ised.

L’arbre hom est planté au milieu de l’Euphrate ; Hom-Ised préside à cet arbre. Hom-Ised s’appella aussi Zérégone. Il n’a point laissé de livres ; il fut le législateur des montagnes.

L’izechné contient encore l’eulogie du soleil, du feu & de l’eau, de la lune, & des cinq jours gahs ou sur-ajoutés aux 360 jours de leur année, qui a douze mois composés chacun de 30 jours. Il finit par ces maximes : « lisez l’honover ; réverez tout ce qu’Ormusd fait, a fait & fera. Car Ormusd a dit, adorez tout ce que j’ai créé, c’est comme si vous m’adoriez. »

Il n’est pas inutile de remarquer que Zoroastre n’a jamais parlé que de deux dynasties de Parsis.

Le second livre du vendidad est le visspered, ou la connoissance de tout.

Un célebre bramine des Indes, attiré par la réputation de Zoroastre, vint le voir, & Zoroastre prononça devant lui le visspered. Malgré son titre fastueux, & la circonstance qui le produisit, il y a peu de choses remarquables. Chaque classe d’animaux a son destour ; la sainteté est recommandée aux prêtres, & le mariage entre cousins-germains aux fideles.

Nous allons parcourir rapidement les autres livres des Bramines, recueillant de tous ce qu’ils nous offriront de plus remarquable.

Les jeschts sont des louanges pompeuses d’Ormusd. Dans un de ces hymnes, Zoroastre demande à Ormusd, quelle est cette parole ineffable qui répand la lumiere, donne la victoire, conduit la vie de l’homme, déconcerte les esprits malfaisans, & donne la santé au corps & à l’esprit ; & Ormusd lui répond, c’est mon nom. Ayes mon nom continuellement à la bouche, & tu ne redouteras ni la fleche du tchakar, ni son poignard, ni son épée, ni sa massue. A cette réponse, Zoroastre se prosterna, & dit : J’adore l’intelligence de Dieu qui renferme la parole, son entendement qui la médite, & sa langue qui la prononce sans cesse.

Le patet est une confession de ses fautes, accompagné de repentir. Le pécheur, en présence du feu ou du destour, prononce cinq fois le Jetha ahou verio, & s’adressant à Dieu & aux anges, il dit : Je me répens avec confusion de tous les crimes que j’ai commis en pensées, paroles & actions ; je les renonce & je promets d’être pur désormais en pensées, paroles & actions. Dieu me fasse miséricorde, & prenne sous sa sauve-garde mon ame & mon corps, en ce monde & en l’autre. Après cet acte de contrition, il avoue ses fautes qui sont de vingt-cinq especes.

Le Bahman Jescht est une espece de prophétie, où Zoroastre voit les révolutions de l’empire & de la religion, depuis Gustaspe jusqu’à la fin du monde. Dans un rêve, il voit un arbre sortir de terre & pousser quatre branches, une d’or, une d’argent, une d’airain, & une de fer. Il voit ces branches s’entrelacer ; il boit quelques gouttes d’une eau qu’il a reçue d’Ormusd, & l’intelligence divine le remplit sept jours & sept nuits ; il voit ensuite un arbre qui porte des fruits, chacun de différens métaux. Voilà de la besogne taillée pour les commentateurs.

Le virafnama est l’histoire de la mission de Viraf. La religion de Zoroastre s’étoit obscurcie, on s’adressa à Viraf pour la réintégrer ; ce prophete fit remplir de vin sept fois la coupe de Gustaspe, & la vuida sept fois, s’endormit, eut des visions, se réveilla, & dit à son réveil les choses les mieux arrangées.

Dans le boundschesch, ou le livre de l’éternité, l’éternité est le principe d’Ormusd & d’Ahriman. Ces deux principes produisirent tout ce qui est ; le bien fut d’Ormusd, le mal d’Ahriman. Il y eut deux mondes, un monde pur, un monde impur. Ahriman rompit l’ordre général. Il y eut un combat. Ahriman fut vaincu. Ormusd créa un bœuf qu’Ahriman tua. Ce bœuf engendra le premier homme, qui s’appella Gaiomard ou Kaio-morts. Avant la création du bœuf, Ormusd avoit formé une goutte d’eau, appellée l’eau-de-santé ; puis une autre goutte, appellée l’eau-de-vie. Il en répandit sur Kaio-morts, qui parut tout-à-coup avec la beauté, la blancheur, & la force d’un jeune homme de quinze ans.

La semence de Kaio-morts répandue sur la terre produisit un arbre, dont les fruits contenoient les parties naturelles des deux sexes unies ; d’un de ces fruits naquirent l’homme & la femme ; l’homme s’appelloit Meschia & la femme Meschine. Ahriman vint sur la terre sous la forme d’un serpent, & les séduisit. Corrompus, ils continuerent de l’être jusqu’à la résurrection ; ils se couvrirent de vêtemens noirs, & se nourrirent du fruit que le diable leur présenta.

De Meschia & de Meschine naquirent deux couples de mâles & de femelles, & ainsi de suite jusqu’à ce qu’une colonie passa l’Euphrate sur le dos du bœuf Staresscok.

Ce livre est terminé par le récit d’un événement qui doit précéder & suivre la résurrection ; à cette grande catastrophe, la mere sera séparée du pere, le frere de la sœur, l’ami de l’ami ; le juste pleurera sur le réprouvé, & le réprouvé pleurera sur lui-même. Alors la comete Goultcher se trouvant dans sa révolution au-dessous de la lune, tombera sur la terre ; la terre frappée tremblera comme l’agneau devant le loup ; alors le feu fera couler les montagnes comme l’eau des rivieres ; les hommes passeront à-travers ces flots embrasés, & seront purifiés ; le juste n’en sera qu’effleuré ; le méchant en éprouvera toute la fureur, mais son tourment finira, & il obtiendra la pureté & le bonheur.

Ceux qui desireront en savoir davantage, peuvent recourir à l’ouvrage anglois intitulé, the annual register, or a view of the history politicks and litterature of the year 1762. C’est de ce recueil qu’on a tiré le peu qu’on vient d’exposer.