L’Encyclopédie/1re édition/VALLUM, AGGER, VINEAE, TURRES

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VALLUM, AGGER, VINEÆ, TURRES, (Art. milit. des Romains.) vallum étoit un retranchement que l’on faisoit avec des pieux, une palissade. Agger, élevation pour dominer la ville, que l’on faisoit avec des poutres & des branches d’arbres qu’on couvroit de terre. Vineæ, machines qui couvroient ceux qui travailloient à la sappe du mur. Turres, les tours, étoient de bois, & l’on y mettoit des machines pour lancer des pierres, des feux d’artifices, &c. (D. J.)

Vallum Adriani, (Géog. anc.) dans la 124e. année de J. C. l’empereur Adrien passa dans la grande-Bretagne pour y appaisser un soulevement, & après avoir battu les rebelles, il fit tirer pour la premiere fois, dit Spartian in Hadriani vitâ, c. xj. une muraille de 80 milles de longueur, pour empêcher les peuples sauvages du nord, de se jetter sur les sujets des Romains.

Cette muraille, ou ce retranchement, tenoit toute la largeur de l’île, depuis une mer jusqu’à l’autre ; c’est à-dire, depuis le bord de la Tyne, au voisinage de New-Castle, jusqu’au bord de l’Eden, près de Carlisle, dans le Cumberland, & de Carlisle jusqu’à la mer.

L’auteur des délices de la grande-Bretagne, page 1140, dit : « L’historien qui nous apprend cette circonstance, ne marque pas en quel endroit étoit cette muraille : mais les Ecossois ne doutent nullement, que ce ne fût entre les golfes de Glotta & de Bodotria, dans les mêmes endroits où Agricola avoit mis des garnisons 40 ans auparavant ; & ils sont persuadés que c’est la même muraille dont il reste des vestiges assez considérables, entre les golfes dont il vient d’être parlé, qui sont ceux de la Cluyd & du Forth ».

Mais il paroîtroit plutôt que c’est le Vallum de Sévere, dont nous ferons l’article, qui doit être placé entre ces deux golfes, & non celui d’Hadrien : car Spartian, in Hadriani vitâ, c. xj. dit positivement que le Vallum de Sévere fut bâti bien loin au-delà de celui d’Hadrien. D’ailleurs, si le mur de ce dernier avoit été entre les golfes de Cluyd & de Forth, il n’auroit pas eu 80 mille pas de longueur, mais seulement 32 mille pas, mesure qu’Aurelius Victor. Epitom. hist. Augustæ, & Eutrope, in Severo, l. VII. c. xix. donnent au Vallum de Sévere.

Quoi qu’il en soit, les restes de ce grand & merveilleux ouvrage font voir qu’il étoit digne de la puissance des Romains. D’abord Hadrien ne le fit faire que de gason ; mais dans la suite on l’a bâti de gros quartiers de pierre. Cette muraille étoit haute de 15 piés, & en quelques endroits large de 9, comme on le peut encore voir par les débris qui en restent. Elle comprenoit un espace d’environ cent milles de longueur à-travers des plaines, des vallées, des montagnes & des forêts : de-sorte qu’elle devoit avoir coûté des peines & des dépenses infinies. Elle étoit flanquée de tours, à la distance de mille pas les unes des autres : & tout du long, on avoit bâti une infinité de bourgs & de châteaux. Les Anglois l’appellent the Picts wall, c’est-à-dire, la muraille des Pictes ; parce que les incursions des Pictes furent la cause qui fit que les Romains penserent à un ouvrage de cette nature.

A Walvich, que l’on croit être l’ancienne Gallana, on voit des vestiges d’anciennes fortifications, & particulierement les ruines d’une grande forteresse. Près de cet endroit, la Tyne coupe la muraille, passant par une voute qu’on eut soin d’y construire ; & à quelque distance de la muraille, les deux Tynes se joignent, pour ne faire plus qu’une seule riviere. (D. J.)

Vallum Antonii Pii, (Géog. anc.) retranchement ou muraille élevée par l’empereur Antonin Pie, dans la grande-Bretagne, pour arrêter les incursions des Calédoniens. On n’est pas d’accord sur l’endroit où fut fait ce retranchement. Camden prétend qu’il passoit par la ville de Brumeria, aujourd’hui Brampton ; & selon la carte du pere Briet, il commençoit auprès de Berwick, à l’embouchure de la Twede, & entroit dans les terres vers le sud-ouest, en suivant à-peu-près les mêmes limites qui séparoient l’Ecosse de l’Angleterre. (D. J.)

Vallum Severi, (Géog. anc.) l’empereur Sévere étant passé dans la grande Bretagne avec ses deux fils, environ l’an 207 de Jesus-Christ, repoussa les Calédoniens ; & pour les empêcher de revenir dans la province des Romains, il fit élever une muraille qui tenoit toute la largeur de l’ile d’une mer à l’autre, entre les golfes de Glotta & de Bodotria, aujourd’hui les golfes de Cluyd & de Forth.

Cette muraille, ou plutôt ce retranchement, puisque Spartien & les autres auteurs anciens lui donnent le nom de vallum, fut apparemment forcé par les Calédoniens : car, sous l’empire de Dioclétien, Carausius, qui dans la suite eut la présomption de prendre la pourpre impériale, dépouilla les Calédoniens de leurs terres, & alla rétablir les bornes de l’empire romain entre les golfes de la Cluyd & du Forth : & soixante ans après ou environ, Théodose, pere de l’empereur Théodose le grand, marchant sur les brisées de Carausius, réduisit en forme de province tout le pays qui est entre l’Angleterre & les deux golfes en question. Il l’appella Valentia, du nom de l’empereur ; & pour en assûrer la possession aux Romains, il rétablit la muraille de Sévere entre les mêmes golfes. Voyez Valentia, Géog. anc. (D. J.)

Vallum-Stiliconis ou Murus-Stiliconis, (Géog. anc.) nom d’une muraille ou d’un retranchement, qu’on croit que Stilicon fit tirer dans la grande Bretagne le long du rivage, dans un espace d’environ quatre milles, depuis l’embouchure du Darwent jusqu’à celle de l’Elue, afin de défendre ces côtes contre l’irruption des Scoti, qui sortoient de l’Irlande pour se jetter sur ce pays là. (D. J.)