L’Encyclopédie/1re édition/TREMBLANT FORT

TREMBLE  ►

Tremblant fort, ou a vent perdu, (Luth.) représenté fig. 55, Pl. d’Orgue, est composé de deux soupapes ab & AB ; la soupape ab qui ne porte qu’un quart de pouce d’épaisseur, est attachée par la partie de la peau dont elle est doublée au haut de la fenêtre ec, qui est une ouverture quarrée faite dans une des faces du porte-vent vertical NO, & en-dedans du porte-vent ; à l’ouverture ec, que la soupape ab doit fermer exactement, est ajustée une boëte ecd, dont les deux côtés ecd sont des triangles rectangles en c, & le côté cd un parallélogramme ; ensorte que les arrêtes ed forment un talus qui décline du plan vertical d’environ 30d. Sur ce talus on ajuste la soupape extérieure AB aussi longue que les côtés ed, & l’épaisseur des planches, & aussi large que le porte-vent mesuré extérieurement. Cette soupape qui est faite avec un morceau de bois de chêne de quatre pouces d’épaisseur, est amincie dans les trois quarts CA de sa longeur BA, ensorte que du côté A, elle n’a pas plus de trois quarts de pouce d’épaisseur. Cette soupape, comme l’autre, est doublée de peau collée par le côté glabre, ensorte que le duvet qui est en-dehors puisse servir à fermer exactement l’ouverture ed ; lorsque la soupape est appliquée contre la boëte, on attache un morceau de peau sur le rebord de la partie de la soupape qui est plus épaisse ; cette peau qui fait la poche reçoit les morceaux de plomb dont on charge la soupape pour la faire battre à propos.

La soupape intérieure ab est tenue appliquée contre l’ouverture ec par le moyen du ressort fg, FGB de laiton élastique ; l’extrémité b de ce ressort qui est ployée en U, entre dans un trou qui est à la soupape, & est rivée par l’autre côté ; la même branche du ressort traverse l’anneau d’une piece de fil de fer Ii qui sert de guide au ressort FGB ; les deux extrémités de cette piece de fil de fer qui sont appointées, entrent dans la soupape, & sont rivées derriere ; l’autre extrémité F du ressort entre dans un trou fait à la partie intérieure du porte-vent, directement opposée au point de la soupape où l’autre extrémité entre : au-dessous de l’extrémité b du ressort TGB, est un anneau de fil de fer qui reçoit l’extrémité du ressort en boudin nb ; ce ressort est un fil de fer ou de laiton qu’on a roulé sur une cheville du même métal, & dont on a ensuite écarté les circonvolutions en le tirant par les deux bouts. L’autre extrémité de ce ressort est attachée à un morceau de laiton recuit qui traverse la planche du porte vent opposée à la soupape : on fait une boursette ou poche en cet endroit, pour empêcher le vent de sortir. Ce morceau de laiton est ammanché dans le bâton quarré PH qui communique, par le moyen d’un rouleau, des mouvemens au bâton quarré du clavier, par le moyen duquel on gouverne le tremblant.

Selon cette construction, si le ressort fgi, & le ressort hélicoïde ou en boudin nb poussent tous deux la soupape ab contre la fenêtre ec, ils y tiendront appliqués, & le vent qui vient, selon la suite des lettres GMNO, passera sans souffrir aucune altération ; mais si le ressort en boudin nb cesse de comprimer la soupape, ce qui arrive quand on retire le bâton quarré HP qui lui sert de point d’appui, & que l’autre ressort soit tellement ployé, qu’il ne comprime pas alors la soupape contre la fenêtre ec, mais laisse un petit passage bc à l’air condensé, dont le porte vent est rempli ; cet air passera dans la boëte edc, où il se condensera, jusqu’à ce que son ressort soit assez puissant pour vaincre la résistance que la soupape AB & les poids C dont elle est chargée, lui opposent ; laquelle résistance doit toujours être moindre que celle qui feroit équilibre avec le ressort de l’air contenu dans le porte-vent, car si elle étoit égale ou plus grande, jamais le vent ne pourroit lever la soupape AB.

Lorsque l’air qui s’est introduit dans la boëte ou chambre edc, a acquis un degré de condensation, dont le ressort est tant soit peu plus grand que la résistance que la soupape AB oppose, il force cet obstacle, & se raréfie dans la chambre edc au moyen de l’ouverture de la soupape AB. Cet air ainsi raréfié n’est plus en état de faire équilibre avec l’air contenu dans l’espace fgaO, qui est aussi condensé que celui qui est contenu dans le reste du porte-vent, & de soutenir la soupape ab par le côté i ; l’air condensé qui presse de l’autre côté, se dilatera donc, & repoussera la soupape ab contre l’ouverture ec de la boëte edc, ce qui donnera le tems à la soupape AB qui n’est plus soutenue (l’air dont la chambre edc étoit remplie étant raréfié par l’émission qui s’en est faite d’une partie) de retomber sur la boëte edc, & de la fermer de nouveau, aussi-tôt la soupape ab s’ouvre déterminée à cela par les ressorts fgi & nb, qui dans leur état neutre ou de repos, ne compriment pas la soupape contre l’ouverture ec, mais laissent une petite ouverture bc de 3 ou 4 lignes par où l’air contenu dans le porte-vent s’introduit de nouveau dans la chambre edc où il se condense pour recommencer le même effet.

Ce qu’on appelle l’état neutre ou de repos d’un ressort, est l’état où un ressort, par exemple, courbé en U ou en helice, se met de lui-même. Si on veut approcher les deux extrémités du ressort l’une de l’autre, on éprouve une résistance d’autant plus grande qu’on le comprime plus fortement ; si au contraire on veut les écarter, on sent de même croître la résistance, à proportion de l’effort que l’on fait pour les séparer ; de sorte qu’un ressort resiste également à la compression & à la dilatation qui dans ce cas est une compression particuliere.

Les alternatives de densité & de dilatation de l’air qui échappe par les soupapes du tremblant, se communiquent à l’air condensé contenu dans la laie & par les gravures dont les soupapes sont ouvertes aux tuyaux que l’on entend alternativement parler fort & parler foiblement, ou même parler & se taire avec une célérité telle que la soupape AB bat quatre ou cinq fois par seconde de tems, ce qui convient à certaines pieces de musique, & singulierement à celles qu’on exécute avec les jeux d’anches. Voyez Jeux.