L’Encyclopédie/1re édition/PLAIDOYER

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PLAIDOYER, s. m. (Jurisprud.) est un discours fait en présence des juges pour la défense d’une cause.

Dans les tribunaux où il y a des avocats, ce sont eux qui plaident la plûpart des causes, à l’exception de quelques causes légeres qui ne roulent que sur le fait & la procédure, que les procureurs sont admis à plaider.

Une partie peut plaider pour elle-même, pourvu que le juge la dispense.

Un plaidoyer contient ordinairement six parties, savoir, les conclusions, l’exorde, le récit du fait, celui de la procédure, l’établissement des moyens, & la réponse aux objections.

Les anciens plaidoyers étoient chargés de beaucoup d’érudition ; on y entassoit les citations des textes de droit & des docteurs, les unes sur les autres. On peut dire des orateurs de ce tems qu’erubescebant sine lege loqui ; ils mêloient même souvent dans les plaidoyers le sacré avec le profane, & des passages tirés de l’Ecriture & des saints peres avec d’autres tirés des poëtes, des orateurs & des historiens.

Non-seulement les plaidoyers étoient ainsi surchargés de citations ; mais la plûpart étoient mal appliquées ; les orateurs de ce tems étoient plus curieux de faire parade d’une vaine érudition que de s’attacher au point solide de la cause.

Depuis environ un siecle on s’est corrigé de ce défaut ; on a banni des plaidoyers toutes les citations déplacées ; mais on est tombé dans une autre extrémité presque aussi vicieuse, qui est de négliger par trop l’usage du droit romain.

Parmi les anciens on doit prendre pour modele les plaidoyers de le Maître, de Patru & de Gauthier, & parmi les modernes, ceux d’Evrard, de Gillet, de Terrasson & de Cochin.

Autrefois les plaidoyers des avocats étoient rapportés, du moins par extrait, dans le vû du jugement ; c’est pourquoi les procureurs étoient obligés d’aller au greffe après l’audience pour corriger les plaidoyers, c’est-à-dire, pour vérifier si les faits rapportés par le greffier étoient exacts ; mais depuis l’établissement du papier timbré en 1674, on a cessé presque partout de rapporter les plaidoyers.

Les conclusions ne se prenoient autrefois qu’à la fin du plaidoyer ; le juge disoit à l’avocat de conclure, & le dispositif du jugement étoit toujours précédé de cette clause du style, postquam conclusum fuit in causâ ; mais depuis long-tems il est d’usage que les avocats prennent leurs conclusions avant de commencer leur plaidoyer : ce qui a été sagement établi, afin que les juges sachent d’abord exactement quel est l’objet de la cause.

Il y a cependant quelque chose qui implique de conclure avant d’avoir commencé la plaidoirie, & pour parler plus correctement, il faudroit se contenter de dire, la requête tend à ce que &c. & l’on ne doit régulierement conclure qu’à la fin du plaidoyer ; en effet jusques-là on peut augmenter ou diminuer à ses conclusions.

Aussi dans les causes du rôle qui sont celles que l’on plaide avec le plus d’apparat, & où les anciens usages sont le mieux observés, les avocats reprennent leurs conclusions à la fin de leur plaidoirie. Voyez Audience, Avocat, Cause, Conclusions, Rolles. (A)