L’Encyclopédie/1re édition/LANDINOS

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LANDINOS, (Hist. mod.) c’est le nom sous lequel les Espagnols désignent les Indiens du Pérou qui ont été élevés dans les villes & dans les bourgs ; ils savent la langue espagnole, & exerçent quelque métier : ils ont l’esprit plus ouvert & les mœurs plus reglées que ceux des campagnes ; cependant ils conservent presque toujours quelque chose des idées & des usages de leurs ancêtres. Il est sur-tout un préjugé dont les Chrétiens n’ont point pû faire revenir les Indiens du Pérou ; ils sont persuadés que la personne qu’ils épousent a peu de mérite s’ils la trouvent vierge. Aussi-tôt qu’un jeune homme a demandé une fille en mariage, il vit avec elle comme si le mariage étoit fait, & il est le maître de la renvoyer s’il se repent de son choix après en avoir fait l’essai ce repentir s’appelle amanaise. Les amans éprouvés se nomment ammanados. Les évêques & les curés n’ont jamais pû déraciner cet usage bisarre. Une autre disposition remarquable de ces indiens, est leur indifférence pour la mort ; ils ont sur cet objet, si effrayant pour les autres hommes, une insensibilité que les apprêts du supplice même ne peuvent point altérer. Les curés du Pérou exerçent sur ces pauvres indiens une autorité très-absolue ; souvent ils leur font donner la bastonade pour avoir manqué à quelques-uns de leurs devoirs religieux. M. d’Ulloa raconte qu’un curé ayant réprimandé un de ces indiens, pour avoir manqué d’aller à la messe un jour de fête, lui fit donner ensuite un certain nombre de coups. A peine la réprimande & la bastonade furent-elles finies, que l’indien s’approchant du curé, d’un air humble & naïf, le pria de lui faire donner le même nombre de coups pour le lendemain, parce qu’ayant envie de boire encore, il prévoyoit qu’il ne pourroit assister à la messe. Voyez l’hist. générale dès voyages, tom. XIII.