L’Encyclopédie/1re édition/HAMAC

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 32-33).
◄  HAMA
HAMACHATES  ►

HAMAC, s. m. lit suspendu, dont les Caraïbes, ainsi que plusieurs autres nations sauvages de l’Amérique équinoxiale, font usage. Quoique la forme des hamacs soit à-peu-près la même, il s’en voit cependant de plusieurs sortes, qui different soit par la matiere dont ils sont faits, soit par la variété du travail, ou par les ornemens dont ils sont susceptibles.

Les hamacs caraïbes sont estimés les meilleurs & les plus commodes ; ils sont composés d’un grand morceau d’étoffe de coton, épaisse comme du drap, d’un tissu très-égal & fort serré, ayant la figure d’un quarré long portant environ huit a neuf piés de longueur sur cinq à six de largeur : il faut observer que cette largeur se trouve toûjours disposée suivant la longueur du hamac. Tous les fils de l’étoffe sur les bords des deux longs côtés excedent la lisiere d’environ sept à huit pouces, & sont disposés par écheveaux formant des especes de boucles, dans lesquelles sont passées de petites cordes de quatorze à dix-huit pouces de long, qu’on nomme filet, servant à faciliter l’extension & le développement du hamac. Toutes ces petites cordes sont réunies ensemble par l’une de leurs extrémités, & forment une grosse boucle à chaque bout du hamac : c’est dans ces boucles qu’on passe les rabans ou grosses cordes qui servent à suspendre la machine au haut de la case ou aux branches d’un arbre. Les plus grands hamacs sont nommés par les Caraïbes hamacs de mariage ; deux personnes de différent sexe pouvant y coucher aisément. Les plus petits étant moins embarassans, se portent à la guerre & dans les voyages. Quelques sauvages des bords de la riviere d’Orinoco font des hamacs d’écorce d’arbre, travaillés en réseau comme des filets de pêcheur.

Les créoles blancs & les Européens habitans l’Amérique, préferent les hamacs aux meilleurs lits ; ils y sont plus au frais, ne craignant point la vermine, & n’ont besoin ni de matelats ni d’oreillers, non plus que de couvertures, les bords du hamac se recroisant l’un sur l’autre.

Dans les isles françoises il est fort ordinaire de voir au milieu des salles de compagnie un beau hamac de coton blanc ou chamarré de diverses couleurs, orné de réseaux, de franges & de glands. Là nonchalamment couchée & proprement vêtue, une très-jolie femme passe les journées entieres, & reçoit ses visites sans autre émotion que celle que peut occasionner un léger balancement qu’une jeune négresse entretient d’une main, étant occupée de l’autre à chasser les mouches qui pourroient incommoder sa maîtresse.

Les femmes de distinction, allant par la ville, se font ordinairement porter dans des hamacs suspendus par les bouts à un long bambou ou roseau creux & léger que deux negres portent sur leurs épaules ; mais dans les voyages, au lieu d’un seul bambou, on fait usage d’un brancard porté par quatre forts esclaves.

Les Portugais du Bresil ajoûtent au-dessus du hamac une petite impériale, avec des rideaux qui les garantissent de la pluie & des ardeurs du soleil.

Sur les vaisseaux les matelots couchent dans des hamacs de grosse toile, communément nommés branles, qui different des précédens en ce qu’ils sont moins grands & garnis à leurs extrémités de morceaux de bois un peu courbes, percés de plusieurs trous, au-travers desquels passent les filets de façon qu’ils sont un peu écartés les uns des autres, & par conséquent le hamac reste toûjours suffisamment ouvert pour y recevoir une espece de matelas.