L’Encyclopédie/1re édition/COSTUS

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COSTUS, s. m. (Botanique exot.) Le costus des Grecs, des Latins, des Arabes, est un même nom qu’ils ont donné à différentes racines, & qu’il est impossible de connoitre aujourd’hui. L’homonymie en Botanique, fait un chaos qu’on ne débrouillera jamais.

Les anciens qui estimoient beaucoup le costus, en distinguoient deux ou trois sortes, sur la description desquels ils ne s’accordent point. Horace appelle le plus précieux, Achæmenium costum, parce que les Perses, dont Achémenes étoit roi, en faisoient grand usage. Les Romains s’en servoient dans la composition des aromates, des parfums, & ils le brûloient sur l’autel, comme l’encens, à cause de l’admirable odeur qu’il répandoit. Nous ne trouvons point dans notre costus cette odeur forte & excellente dont parlent Dioscoride, Galien & Pline ; c’est pourquoi nous le croyons entierement différent. Il est vrai que nos parfumeurs distinguent, à l’imitation de Dioscoride, trois especes de costus, sous les noms d’arabique, d’amer, & de doux ; mais aucune espece ne répond au vrai costus de l’antiquité.

Celui que nos apoticaires employent pour le costus ancien d’Arabie, est une racine coupée en morceaux oblongs, de l’épaisseur du pouce, légers, poreux, & cependant durs, mais friables ; un peu résineux, blanchâtres, & quelquefois d’un jaune-gris ; d’un goût acre, aromatique, & un peu amer ; d’une odeur assez agréable, qui approche de celle de l’iris de Florence, ou de la violette.

Commelin prétend que c’est la racine d’une plante qui s’appelle tsiava-kua, dont on trouve la description & la figure dans l’Hott. Malabar. e. XI. pl. 15. Marcgraffe estime que c’est le paco-caatingua du Brésil.

Suivant ces deux auteurs botanistes, la racine de cette plante, dans le tems de sa seve, est blanche, tubéreuse, rempante, fongueuse, pleine d’un suc aqueux, tendre & fibrée ; celle qui est plus vieille & brisée, paroît parsemée de plusieurs petites fibres, d’un goût doux, fondant en eau comme le concombre, d’une odeur foible de gingembre. Il naît en différens endroits des racines, plusieurs rejettons qui s’élevent à la hauteur de trois ou quatre piés, & qui deviennent gros comme le doigt, cylindriques, de couleur de sang, lisses, luisans, semblables aux tiges de roseaux ; noüeux, simples, verds en dedans, & aqueux ; les feuilles sont oblongues, étroites, de la longueur de deux palmes, pointues à l’extrémité, larges dans leur milieu, attachées près des nœuds, ayant une nervûre ou une côte saillante en dessous, qui s’étend dans toute la longueur, & creusée en gouttiere en dessus, de laquelle partent de petites nervûres latérales & transversales. Ces feuilles sont très-souvent repliées en dedans, molles, succulentes, luisantes & vertes.

Cette plante croît dans les forêts de Malabar, du Brésil, & de Surinam. Linæus dans sa description du jardin de M. Clifford, en a détaillé fort au long la tige, la fleur, l’embryon, & la graine.

M. Geoffroy (mem, de l’acad. année 1740, p. 98.) pense que l’aunée est une racine fort approchante du costus ; car étant choisie, bien nourrie, sechée avec soin, & gardée long-tems, elle perd cette forte odeur qu’ont toutes celles de ce nom que nos herboristes nous apportent des montagnes, & elle acquiert celle du costus. Par M. le Chevalier de Jaucourt.

Costus, (Pharmacie & Mat. med.) Le costus des modernes, celui qu’on employe toûjours dans nos boutiques pour le costus verus ou arabicus, est une racine aromatique exotique dont nos medecins ne font presqu’aucun usage dans les préparations magistrales, quoique chez plusieurs de nos voisins, chez les Allemands, par exemple, elle soit employée dans les especes stomachiques, emmenagogues, antispasmodiques, &c.

Cette racine est mise, selon M. Geoffroi, mat. med. au nombre des remedes qui servent à l’expectoration, & des céphaliques & utérins ; elle atténue les humeurs & les divise ; elle provoque les urines & la transpiration. La dose est demi-gros en substance, & depuis deux gros jusqu’à demi-once en infusion.

On l’employe pour le costus des anciens dans la thériaque, le mithridate, l’orviétan, le grand philonium. Il donne son nom à un électuaire appellé caryocostin.

Les Apoticaires ont encore coûtume de substituer d’autres racines à la place de leur vrai costus, comme l’angélique, la zédoaire, &c. & même quelquefois une écorce connue sous le nom de cortex winteranus, costus corticosus. Voyez Ecorce de Winter.

Electuaire caryocostin. ♃ costus, gérofle, gingembre, cumin, de chaque deux gros ; diagrede, hermodates, demi once ; miel écumé, six onces : faites du tout un électuaire selon l’art. Cet électuaire est un purgatif hydragogue dont la vertu est dûe au diagrede & aux hermodates ; les autres ingrédiens ne sont employés que comme correctifs, selon la méthode des anciens.

Ce remede n’est presque d’aucun usage parmi nous. On pourroit l’employer cependant dans les cas où les hydragogues sont indiqués, depuis la dose d’un gros jusqu’à celle de demi-once. (b)