L’Encyclopédie/1re édition/BARONIE

Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 88-89).
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BARONIE, s. f. (Hist. mod.) seigneurie ou fief de baron, soit temporel soit spirituel. Voyez Baron. Dans ce sens baronie est la même chose que ce que l’on appelle honour en Angleterre.

Une baronie peut être considérée comme une seigneurie possedée à condition de quelque service, mais en chef par le roi : elle est ce qu’on appelle autrement grande sergenterie.

Les baronies d’Angleterre dans l’origine, étoient mouvantes du roi même, chef & seigneur de tout le royaume, & elles n’étoient pas tenues immédiatement d’un autre seigneur. Par exemple, le roi donnoit à un homme l’investiture d’une grande seigneurie dans le pays, pour que celui qu’il en investissoit en joüît, lui & ses héritiers, comme la tenant du roi & de ses successeurs. Par le service de baron, il faut entendre le service de vingt chevaliers, de quarante, de soixante, plus ou moins, suivant que le roi le déterminoit par l’investiture. Dans les tems qui suivirent de plus près la conquête, lorsqu’un grand seigneur, great lord, recevoit du roi l’investiture d’une grande seigneurie, cette seigneurie étoit appellée baronie, mais plus ordinairement un honneur, honour, comme l’honour de Gloucester, l’honour de Wallingford, l’honour de Lancaster, l’honour de Richemond, & de même des autres. Il y avoit en Angleterre des honours désignés par des noms Normands ou par d’autres noms étrangers, c’est-à-dire que quelquefois ils avoient un nom Anglois, quelquefois un nom étranger ; cela arrivoit quand la même personne étoit seigneur d’un honour en Normandie ou dans quelqu’autre province étrangere, & en même tems seigneur d’un honour en Angleterre ; par exemple, Guillaume de Forz, de Force ou de Fortibus étoit seigneur de l’honour d’Albermale en Normandie ; il étoit aussi seigneur de deux honours en Angleterre, savoir l’honour de Holderness & l’honour de Skipton en Cravene. En Angleterre on nommoit quelquefois ces honours du nom Normand, l’honour d’Albemarle ou l’honour du comte d’Albemarle. De même le comte de Bretagne étoit seigneur de l’honour de Bretagne en France, & de celui de Richemond en Angleterre. On appelloit quelquefois l’honour de Richemond du nom étranger, l’honour de Bretagne ou l’honour du comte de Bretagne, non qu’Albemarle ou la Bretagne fussent en Angleterre, mais parce que la même personne étoit respectivement seigneur de chacun de ces honours en France, & de chacun de ces honours en Angleterre. Voyez Madox, hist. des Baronies, &c.

Les baronies qui appartiennent à des évêques, & qui sont par quelques-uns dénommées regalia, parce qu’elles dépendent absolument de la pure libéralité du prince, ne consistent point en une seule baronie, mais en plusieurs ; car, tot erant baroniœ, quot majora prædia.

Suivant Bracton, une baronie est un droit indivisible ; c’est pourquoi s’il s’agit de partager un héritage entre co-héritiers, quoique l’on puisse diviser quelques maisons principales & les pieces de terre qui en dépendent : si néanmoins la maison principale est le chef-lieu d’un comté ou d’une baronie, on ne peut la morceler ; en voici la raison : le partage de ces sortes de biens anéantiroit insensiblement plusieurs droits privatifs des comtés & des baronies, ce qui tourneroit au préjudice de l’état, qui est composé de comtés & de baronies. (G)

* Baronies (les), Géog. contrée de France, dans le Dauphiné, ainsi appellée des deux baronies de Meuoillon & de Montauban, dont elle est composée.