Journal (Eugène Delacroix)/8 octobre 1847

Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 1p. 333).

8 octobre. — Se rappeler l’impression d’un tableau de Jacquand[1], que j’ai vu un de ces jours à côté d’un tableau de Diaz, chez Durand-Ruel. Dans le premier, l’imitation minutieuse d’après nature des moindres objets, sécheresse, gaucherie ; dans l’autre, où tout est sorti de l’imagination du peintre, mais où les souvenirs sont fidèles, la vie, la grâce, l’abondance.

Le tableau de Jacquand représentait des moines de l’Inquisition, montrant l’entrée d’une espèce de trou à une femme assise à terre et qu’ils semblaient menacer. Le dos de cette femme était enfoncé dans la muraille, qui était derrière elle, etc. ; on eût dit ce tableau fait par un homme incapable du moindre souvenir des objets, et pour lequel le détail qu’il a sous les yeux est le seul qui puisse le frapper.

  1. Jacquand, peintre, né à Lyon en 1805. Il fit d’abord de la peinture historique, puis se livra à la peinture de genre et exécuta de nombreux tableaux, commandés par la liste civile ou acquis par les amateurs.