E. Fasquelle (p. 53-56).
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XII


Au printemps, elle sent qu’il lui arrive la tiédeur de l’air, qu’elle est environnée du doux réveil de la vie, et, d’une écriture posée, elle aligne les phrases de cette brève description :

Le Printemps

« La nature se réveille. Elle semble s’étirer, elle sort de sa longue torpeur hivernale. Elle va renaître.

» Voici le jeune Printemps. Il est né. D’un coup de sa merveilleuse baguette magique, il remet à neuf tout l’univers.

» Le Soleil revient, plus brillant, plus riant. Il va rester longtemps avec nous, nous conviant à ses fêtes.

» La Terre donne tout ce qui est en elle. Un hymne continuel monte dans l’espace. Tout chante dans les buissons et dans les bois.

» L’herbe pousse. L’arbre verdit. Les fleurs vont éclore. L’insecte butine. Chaque coin est un nid. L’oiseau roucoule des mélodies d’amour.

» La cloche de l’église tinte plus divinement dans l’air léger. Les chemins sont plus doux, le ruisseau est plus clair, le ciel est plus bleu.

» L’air est tout embaumé par quelque chose d’inconnu, une brise qui vient de loin, qui a passé sur la mer, et qui apporte le parfum des îles.

» Les matins sont gais, et les soirs aussi sont joyeux, parce qu’ils annoncent, avec toutes leurs étoiles, la clarté du lendemain.

» Les nuits illuminées sont traversées tout à coup, quand tout dort dans le silence, par le chant du rossignol. Dans la feuillée, le petit oiseau invisible chante sa joie d’un instant, à faire croire qu’il pleure, qu’il s’évanouit, qu’il va mourir.

» Le crapaud aussi, dans l’ornière, soupire quelque chose d’une petite voix timide, toujours la même note de cristal. On dirait qu’il veut répondre au rossignol, et qu’il souffre de ne pouvoir faire monter sa plainte jusqu’à cette magnifique voix. Le grillon fait entendre sans arrêt sa cliquette. Les grenouilles bavardent autour de la mare.

» Ils sont tous à leur poste, nos compagnons printaniers. Ils vont vivre comme nous, heureux, puis malheureux. Le printemps, c’est l’enfance avec tout son espoir. Il est éphémère, mais il reviendra l’an prochain. Nous seuls ne reviendrons pas, mais d’autres reviendront. Bonjour donc au Printemps, et à tous les futurs printemps ! »