Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Homme aux trois culottes (L’) ou la République, l’Empire et la Restauration, roman par Paul de Kock

Administration du grand dictionnaire universel (9, part. 1p. 364).

Homme aux trois culottes (L’) ou la République, l’Empire et la Restauration, roman par Paul de Kock (Paris, 1841). Ce roman repose tout entier sur trois culottes, léguées par un comédien à son neveu, dont elles font la fortune. L’idée est grotesque, mais vraie. La culotte rouge, accompagnée d’une coiffure à la Brutus, d’un vêtement négligé, d’un air terrible, c’est la Révolution, et le héros, affublé de cette première partie de son héritage, se fait aisément passer, dans une petite ville de province, pour un représentant chargé d’une mission patriotique. C’est à qui viendra fraterniser avec l’austère républicain ; avec sa culotte rouge pour talisman, notre héros se fait une position, trouve autorité, crédit, et parvient à sauver une jeune fille noble qu’il aimait. Lorsque l’Empire succéda à la République, la culotte de drap bleu et l’habit moitié militaire, moitié bourgeois, remplacent fort à propos la culotte rouge. Le neveu trouve encore son salut dans les sages dispositions de son oncle prévoyant, et reconnaît que, sur la grande scène du monde, les ingénieux changements de costume ne sont pas moins utiles que dans les coulisses du théâtre. Cependant il voit ses plus chères illusions déçues lorsque, croyant avoir acquis quelques droits sur la main de celle qui lui doit la vie, il ose réclamer cette juste récompense et ne reçoit qu’un dédaigneux refus. Mais il n’en bénit pas moins son précieux héritage, car c’est encore à ces chères culottes qu'il doit les moyens de faire élever une petite fille dont les parents, emportés par la tourmente révolutionnaire, lui ont confié l’avenir.

Enfin, la culotte de satin blanc lui sert de passe-port, sous la Restauration, pour pénétrer jusque dans les somptueux salons du noble faubourg Saint-Germain. Il retrouve encore l’ingrate qui lui a refusé sa main, et qui, maintenant, consentirait volontiers à la lui accorder ; mais la protégée de notre héros est devenue grande, et c’est une rivale redoutable qui l’emporte aisément sur les souvenirs à demi effacés d’une ancienne passion. Telle est la donnée de l''Homme aux trois culottes, donnée pleine d’originalité et que l’auteur a traitée avec son esprit habituel, sa verve et son inaltérable gaieté, quelquefois un peu triviale.