Fragments pour un dictionnaire des termes de botanique


AVIS DES ÉDITEURS.
IL paroît par ces Fragmens, que le projet de M. Rouſſeau étoit de faciliter l’intelligence des termes uſités chez les Botaniſtes : il eſt fâcheux qu’il n’ait laiſſé ſur ce ſujet intéreſſant que des brouillons, peut-être auſſi incomplets par les articles qu’il a ébauchés, que par ceux qu’il n’a point traités. Mais nous avons penſé que, malgré leur imperfection, ces Fragmens méritoient de voir le jour, &, quelque défectueux qu’ils puiſſent être, nous n’avons voulu eſſayer, ni de ſuppléer aux articles qui manquent, ni de corriger ou finir ceux qui ſont faits ; tout au plus avons-nous oſé nous permettre de faire diſparoître quelques obſcurités, ou quelques défauts de ſtyle qui avoient échappé à la premiere compoſition.
INTRODUCTION.

LE premier malheur de la Botanique eſt d’avoir été regardée dès ſa naiſſance, comme une partie de la Médecine. Cela fit qu’on ne s’attacha qu’à trouver ou ſuppoſer des vertus aux plantes, & qu’on négligea la connoiſſance des plantes mêmes ; car comment ſe livrer aux courſes immenſes & continuelles qu’exige cette recherche, & en même tems aux travaux ſédentaires du laboratoire & aux traitemens des malades, par lesſquels on parvient à s’aſſurer de la nature des ſubſtances végétales, & de leurs effets dans le corps humain. Cette fauſſe maniere d’enviſager la Botanique en à long-tems rétréci l’étude au point de la borner preſque aux plantes uſuelles, & de réduire la chaîne végétal à un petit nombre de chaînons interrompus. Encore ces chaînons mêmes ont-ils été très-mal étudies, parce qu’on y regardoit ſeulement la matiere & non pas l’organiſation. Comment ſe ſeroit-on beaucoup occupe de la ſtructure organique d’une ſubſtance, ou plutôt d’une masse ramifiée qu’on ne ſongeoit qu’a piler dans un mortier ? On ne cherchoit des plantes que pour trouver des remedes, on ne cherchoit pas, des plantes mais des simples. C’etoit fort. bien fait, dira-t-on ; ſoit. Mais il n’en a pas moins réſulté que ſi l’on connoiſſoit fort bien les remedes, on ne laiſſoit pas de connoître fort mal les plantes ; & c’eſt tout ce que j’avance ici.

La Botanique n’étoit rien, il n’y avoit point d’étude de la Botanique, & ceux qui ſe piquoient le plus connoître les plantes n’avoient aucune idée, ni de leur ſtructure, ni de l’économie végétal. Chacun connoiſſoit de vue cinq ou six plantes de ſon canton auxquelles il donnoit des noms au hazard enrichis de vertus merveilleuſes qu’il lui plaiſoit de leur ſuppoſer, & chacune de ces plantes changée en panacée univerſelle ſuffiſoit ſeule pour immortaliſer tout le genre-humain. Ces plantes transformées en beaume & en en emplâtres diſparoiſſoient promptement, & faiſoient bientôt place à d’autres auxquelles de nouveaux venus, pour ſe diſtinguer, attribuoient les mêmes effets. Tantôt c’étoit une plante nouvelle qu’on décoroit d’anciennes vertus, & tantôt d’anciennes plantes propoſées ſous de nouveaux noms ſuffiſoient pour enrichir de nouveaux charlatans. Ces plantes avoient des noms vulgaires différens dans chaque canton, & ceux qui les indiquoient pour leurs drogues, ne leur donnoient que des noms connus tout au plus dans le lieu qu’ils habitoient ; & quand leurs récipés couroient dans d’autres pays on ne ſavoit plus de quelle plante il y étoit parlé ; chacun en ſubſtituoit une à ſa fantaiſie, ſans autre ſoin que de lui donner le même nom. Voilà tout l’art que les Myrepſus, les Hildegardes, les Suardus, les Villanova & les autres Docteurs de ces tems-là mettoient à l’étude des plantes, dont ils ont parlé dans leurs livres, & il ſeroit difficile peut-être au peuple d’en reconnoître une ſeule ſur leurs noms ou ſur leurs descriptions.

À la renaiſſance des Lettres tout diſparut pour faire place aux anciens livres ; il n’y eut plus rien de bon & de vrai que ce qui étoit dans Ariſtote & dans Galien. Au lieu d’étudier les plantes ſur la terre, on ne les étudioit plus que dans Pline & Dioſcoride, & il n’y a rien ſi fréquent dans les Auteurs de ces tems-là, que d’y voir nier l’exiſtence d’une plante par l’unique raiſon que Dioſcoride n’en a pas parlé. Mais ces doctes plantes, il faloit pourtant les trouver en nature, pour les employer ſelon les préceptes du maître. Alors on s’évertua, l’on ſe mit à chercher, à obſerver, à conjecturer & chacun ne manqua pas de faire tous ſes efforts pour trouver dans la plante qu’il avoit choiſie les caracteres décrits dans ſon auteur ; & comme les traducteurs, les commentateurs, les praticiens s’accordoient rarement ſur le choix, on donnoit vingt noms à la même plante, & à vingt plantes le même nom, chacun ſoutenant que la ſienne étoit la véritable, & que toutes les autres n’étant pas celle dont Dioſcoride avoit parle devoient être proſcrites de deſſus la terre. De ce conflit réſulterent enfin des recherches, à la vérité, plus attentives & quelques bonnes obſervations qui mériterent d’être conſervées, mais en même tems un tel cahos de nomenclature que les Médecins & les Herboriſtes avoient abſolument ceſſé de s’entendre entr’eux : il ne pouvoit plus y avoir communication de lumieres, il n’y avoit plus des diſputes de mots & de noms, & même toutes les recherches & deſcriptions utiles étoient perdues faute de pouvoir décider de quelle plante chaque au avoit parlé.

Il commença pourtant à ſe former de vrais Botaniſtes, tels que Cluſius, Cordus, Ceſalpin, Geſner, & a ſe faire de bons livres & inſtructifs ſur cette matiere, dans leſquels même on trouve déjà quelques traces de méthode. Et c’étoit certainement une perte que ces pieces devinſſent inutiles & inintelligibles par la ſeule diſcordance des noms. Mais de cela même que les auteurs commençoient à réunir les eſpeces & à ſéparer les genres, chacun ſelon ſa maniere d’obſerver le port & la ſtructure apparente, il réſulta de nouveaux inconvéniens & une nouvelle obſcurité, parce que chaque auteur réglant ſa nomenclature ſur ſa méthode créoit de nouveaux genres, ou ſéparoit les anciens ſelon que le requéroit le caractere des ſiens. De ſorte qu’eſpeces & genres, tout étoit tellement mêlé, qu’il n’y avoit preſque pas de plante qui n’eût autant de noms différens, qu’il y avoit d’auteurs qui l’avoient décrite ; ce qui rendoit l’étude de la concordance auſſi longue & ſouvent plus difficile celle des plantes même.

Enfin parurent ces deux illuſtres freres, qui ont plus fait eux ſeuls pour le progrès de la Botanique, que tous les autres enſemble qui les ont précédés & même ſuivis juſqu’a Tournefort. Hommes rares, dont le ſavoir immenſe & les ſolides travaux consacrés à la Botanique, les rendent dignes de l’immortalité qu’ils leur ont acquiſe. Car tant que cette ſcience naturelle ne tombera pas dans l’oubli, les noms de Jean & de Gaspard Bauhin vivront avec elle dans la mémoire des hommes.

Ces deux hommes entreprirent, chacun de ſon côté, une hiſtoire univerſelle des plantes, & ce qui ſe rapporte plus immédiatement à cet article, ils entreprirent l’un & l’autre d’y joindre une ſynonymie, c’est-à-dire, une liste exacte des noms que chacune d’elles portoit dans tous les auteurs qui les avoient précédés. Ce travail devenoit abſolument nécessaire pour qu’on pût profiter des obſervations de chacun d’eux ; car ſans cela il devenoit presque impossible de ſuivre & démêler chaque plante à travers tant de noms différens.

L’aîné a exécute à-peu-près cette entrepriſe dans les trois volumes in-folio qu’on a imprimés après ſa mort, & il y a joint une critique ſi juſte, qu’il s’eſt rarement trompé dans ſes ſynonymies.

Le plan de ſon frere étoit encore plus vaſte, comme il paroît par le premier volume qu’il en a donne & qui peut faire juger de l’immenſité de tout l’ouvrage, s’il eût en le tems de l’exécuter ; mais au volume près dont je viens de parler, nous n’avons que les titres du reſte dans ſon pinax, & ce pinax, fruit de quarante de travail eſt encore aujourd’hui le guide de tous ceux qui veulent travailler ſur cette matiere & conſulter les anciens auteurs.

Comme la nomenclature des Bauhins n’étoit formée que des titres de leurs chapitres, & que ces titres comprenoient ordinairement pluſieurs mots, de-là vient l’habitude de n’employer pour noms de plantes que des phraſes louches aſſez longues, ce qui rendoit cet nomenclature non-ſeulement traînante & embarraſſante, mais pédanteſque & ridicule. Il y auroit à cela, je l’avoue, quelque avantage, ſi ces phraſes avoient été mieux faites ; mais compoſées indifféremment des noms des lieux d’où venoient ces plantes, des noms des gens qui les avoient envoyées, & même des noms d’autres plantes avec leſquelles on leur trouvoit quelque ſimilitude, ces phraſes étoient des ſources de nouveaux embarras & de nouveaux doutes, puiſque la connoiſſance d’une ſeule plante exigeoit celle de pluſieurs autres, auxquelles sa phrase renvoyoit, & dont les noms n’étoient pas plus détermines que le ſien.

Cependant les voyages de long cours enrichiſſoient inceſſamment la Botanique de nouveaux tréſors, & tandis que les anciens noms accabloient déjà la mémoire, il en faloit inventer de nouveaux ſans ceſſe pour les plantes nouvelles qu’on découvroit. Perdus dans ce labyrinthe immenſe, les Botaniſtes forcés de chercher un fil pour s’en tirer, s’attacherent enfin ſérieuſement à la méthode ; Herman, Rivin, Ray, propoſerent chacun la sienne ; mais l’immortel Tournefort l’emporta ſur eux tous ; il rangea le premier ſyſtématiquement tout le regne végétal ; & reformant en partie la nomenclature, la combina par ſes nouveaux genres avec celle de Gaſpard Bauhin. Mais loin de la débarraſſer de ſes longues phraſes, ou il en ajouta de nouvelles, ou il chargea les anciennes des additions que ſa méthode le forçoit d’y faire. Alors s’introduiſit l’usaſge barbare de lier les nouveaux noms aux anciens par un qui quæ quod contradictoire, qui d’une même plante faiſoit deux genres tout différens.

Dens Leonis qui piloſella folio minus villoſo ; Doria quæ Jacobæa orientalis limonii folio : Titanokeratophyton quod Lithophyton marinum albicans.

Ainsi la nomenclature ſe chargeoit. Les noms des plantes devenoient non-ſeulement des phraſes mais des périodes. Je n’en citerai qu’un ſeul de Plukenet qui prouvera que je n’exagère pas. “ Gramen myloicophorum carolinianum ſeu gramen altiſſimum, panicula maxima ſpecioſa, è ſpecis majoribus compreſſiusculis utrinque pinnatis blattam molendariam quodam modo referentibus, compoſita, foliis convolutus mucronatis pungentibus ” Almag. 137.

C’en étoit fait de la Botanique ſi ces pratiques euſſent été suivies ; devenue abſolument inſupportable, la nomenclature ne pouvoit plus ſubſiſter dans cet état, & il faloit de toute néceſſité qu’il s’y fît une reforme ou que la plus riche, la plus aimable, la plus facile des trois parties de l’Hiſtoire naturelle fût abandonnée.

Enfin M. Linnæus plein de ſon ſyſtême ſexuel & des vaſtes idées qu’il lui avoit ſuggérées, forma le projet d’une refonte générale dont tout le monde ſentoit le beſoin, mais dont nul n’oſoit tenter l’entrepriſe. Il fit plus, il l’exécuta, & après avoir préparé dans ſon Critica Botanica les regles ſur lesquelles ce travail devoit être il conduit, il détermina dans son Genera plantarum ces genres des plantes, enſuite les eſpeces dans ſon Species ; de ſorte que gardant tous les anciens noms qui pouvoient s’accorder avec ces nouvelles regles & refondant tous les autres, il établit enfin une nomenclature éclairée, fondée ſur les vrais principes de l’art qu’il avoit lui-même expoſés. Il conſerva tous ceux des anciens genres qui étoient vraiment naturels, il corrigea, ſimplifia, réunit ou diviſa les autres ſelon que le requéroient les vrais caracteres. Et dans la confection des noms, il ſuivoit quelquefois même un peu trop ſévérement ſes propres regles.

À l’égard des eſpeces, il faloit bien pour les déterminer des deſcriptions & des différences ; ainsi les phrases reſtoient toujours indiſpenſables, mais s’y bornant à un petit nombre de mots techniques bien choiſis & bien adaptés, il s’attacha à faire de bonnes & breves définitions tirées des vrais caracteres de la plante, banniſſant rigoureuſement tout ce qui lui étoit étranger. Il falut pour cela créer, pour ainſi dire, à la Botanique une nouvelle langue qui épargnât ce long circuit de paroles qu’on voit dans les anciennes deſcriptions. On s’est plaint que les mots de cette langue n’étoient pas tous dans Cicéron. Cette plainte auroit un ſens raiſonnable, ſi Cicéron eût fait un traité complet de Botanique. Ces mots cependant ſont tous grecs ou latins, expreſſifs, courts, ſonores, & forment même des conſtructions élégantes par leur extrême préciſion. C’eſt dans la pratique journalière de l’art, qu’on ſent tout l’avantage de cette nouvelle langue, auſſi commode & néceſſaire Botaniſtes qu’eſt celle de l’Algebre aux Géometres.

Juſque-là M. Linnæus avoit déterminé le plus grand nombre des plantes connues, mais il ne les avoit pas nommées : car ce n’eſt pas nommer une choſe que de la définir ; une phraſe ne ſera jamais un vrai nom & n’en ſauroit avoir l’uſage. Il pourvut à ce défaut par l’invention des noms triviaux, qu’il joignit à ceux des genres pour diſtinguer les eſpeces. De cette maniere le nom de chaque plante n’eſt compoſé jamais que de deux mots, & ces deux mots ſeuls choiſis avec diſcernement & appliques avec juſteſſe, font ſouvent mieux connoître la plante que ne faiſoient les longues phraſes Micheli & de Plukenet. Pour la connoître mieux encore & plus réguliérement, on a la phrase qu’il faut ſavoir ſans doute, mais qu’on n’a plus beſoin de répéter à tout propos lorſqu’il ne faut que nommer l’objet.

Rien n’étoit plus mauſſade & plus ridicule lorſqu’une femme ou quelqu’un de ces hommes qui leur reſſemblent, vous demandoient le nom d’une herbe on d’une fleur dans un jardin, que la néceſſité de cracher en réponse une longue enfilade de mots latins qui reſſembloient à des évocations magiques ; inconvénient ſuffiſant pour rebuter ces perſonnes frivoles d’une étude charmante offerte avec un appareil auſſi pédanteſque.

Quelque néceſſaire, quelque avantageuſe que fût cette reforme, il ne faloit pas moins que le profond ſavoir de M. Linnæus pour la faire avec ſuccès, & que la célébrité de grand naturaliſte pour la faire univerſellement adopter. Elle a d’abord éprouve de la réſiſtance, elle en éprouve encore. Cela ne ſauroit être autrement, ſes rivaux dans la même carriere regardent cette adoption comme un aveu d’infériorité qu’ils n’ont garde de faire ; ſa nomenclature paroît tenir tellement à ſon ſyſtême, qu’on ne s’aviſe gueres de l’en ſéparer. Et les Botaniſtes du premier ordre, qui ſe croient obligés par hauteur de n’adopter le ſyſtême de perſonne & d’avoir chacun le ſien, n’iront pas ſacrifier leurs prétentions aux progrès d’un art dont l’amour dans ceux qui le profeſſent eſt rarement déſintéreſſé.

Les jalouſies nationales s’oppoſent encore à l’admiſſion d’un ſyſtême étranger. On se croit obligé de ſoutenir les illuſtres de son pays, ſur-tout lorſqu’ils ont ceſſé de vivre ; car même l’amour-propre qui faiſoit ſouffrir avec peine leur ſupériorité durant leur vie, s’honore de leur gloire après leur mort.

Malgré tout cela, la grande commodité de cette nouvelle nomenclature & ſon utilité que l’uſage a fait connoître, l’ont fait adopter preſque univerſellement dans toute Europe plutôt ou plus tard, à la vérité, main enfin à-peu-près par-tout, & même à Paris. M. de Juſſieu vient de l’établir au jardin du Roi, préférant ainſi l’utilité publique à la gloire d’une nouvelle refonte que ſembloit demander la méthode des familles naturelles dont ſon illustre oncle eſt l’auteur. Ce n’eſt pas que cette nomenclature Linnéene n’ait encore ſes défauts & ne laiſſe de grandes priſes à la critique ; mais en attendant qu’on en trouve une plus parfaite à qui rien ne manque, il vaut cent fois mieux adopter celle-là que de n’en avoir aucune, ou de retomber dans les phraſes de Tournefort & de Gaſpard Bauhin. J’ai même peine à croire qu’une meilleure nomenclature pût avoir déſormais aſſez de ſuccès pour proſcrire celle-ci, à laquelle les Botaniſtes de l’Europe ſont déjà tout accoutumés, & c’eſt par la double chaîne de l’habitude & de la commodité qu’ils y renonceroient avec plus de peine encore qu’ils n’en eurent à l’adopter. Il faudroit, pour opérer ce changement, un auteur dont le crédit effaçât celui de M. Linnæus, & à l’autorité duquel l’Europe entiere voulût ſe ſoumettre une ſeconde fois, ce qui me paroît difficile à eſpérer. Car ſi ſon ſystême, quelque excellent qu’il puiſſe être, n’est adopté que par une ſeule nation, il jettera la Botanique dans un nouveau labyrinthe, & nuira plus qu’il ne ſervira.

La travail même de M. Linnæus, bien qu’immenſe, reſte encore imparfait, tant qu’il ne comprend pas toutes les plantes connues, & tant qu’il n’eſt pas adopté par tous les Botaniſtes ſans exception : car les livres de ceux qui ne s’y ſoumettent pas, exigent de la part des lecteurs, le même travail pour la concordance auquel ils étoient forcés pour les livres qui ont précédé. On a obligation à M. Crantz, malgré ſa passion contre M. Linnæus, d’avoir, en rejettent ſon ſystême, adopte ſa nomenclature. Mais M. Haller, dans ſon grand & excellent traite des plantes alpines, rejette à la fois l’un & l’autre, & M. Adanſon fait encore plus, il prend une nomenclature toute nouvelle & ne fournit aucun renſeignement pour y rapporter celle de M. Linnæus. M. Haller cite toujours les genres & quelquefois les phraſes des eſpeces de M. Linnæus, mais M. Adanson n’en cite jamais ni genre ni phraſes. M. Haller s’attache à une ſynonymie exacte, par laquelle, quand il n’y joint pas la phraſe de M. Linnæus, on peut du moins la trouver indirectement par le rapport des ſynonymes. Mais M. Linnæus & ſes livres ſont tout-à-fait nuls pour M. Adanſon & pour ſes lecteurs, il ne laiſſe aucun renſeignement par lequel on s’y puiſſe reconnoître. Ainſi il faut opter entre M. Linnæus & M. Adanson qui l’exclud ſans miſéricorde, & jetter tous les livres de l’un ou de l’autre au feu. Ou bien il faut entreprendre un nouveau travail qui ne ſera ni court ni facile pour faire accorder deux nomenclatures, qui n’offrent aucun point de réunion.

De plus, M. Linnæus n’a point donne une ſynonymie complete. Il s’eſt contenté pour les plantes anciennement connues de citer les Pauhins & Clusius, & une figure de chaque plante. Pour les plantes exotiques découvertes récemment, il a cité un ou deux auteurs modernes & les figures Rheedi, de Rumphius & quelques autres, & s’en eſt tenu-là. Son entrepriſe n’exigeoit pas de lui une compilation plus étendue, & c’étoit aſſez qu’il donnât un ſeul renſeignement ſûr pour chaque plante dont il parloit.

Tel eſt l’état actuel des choses. Or sur cet expose je demande à tout lecture ſenſé comment il eſt poſſible de s’attacher à l’étude des plantes, en rejettant celle de la nomenclature ? c’eſt comme ſi l’on vouloit ſe rendre ſavant dans une langue sans vouloir en apprendre les mots. Il eſt vrai que les noms ſont arbitraires, que la connoiſſance des plantes ne tient point néceſſairement à celle de la nomenclature, & qu’il est aiſé de ſuppoſer qu’un homme intelligent pourroit être un excellent Botaniſte, quoiqu’il ne connût pas une ſeule plante par ſon nom. Mais qu’un homme ſeul, ſans livres & ſans aucun ſecours des lumieres communiquées, parvienne à devenir de lui-même un très-médiocre Botaniſte, c’eſt une aſſertion ridicule à faire & une entrepriſe impoſſible à exécuter. Il s’agit de ſavoir ſi trois cents ans d’études & d’obſervations doivent être perdus pour la Botanique, ſi trois cents volumes de figures & de deſcriptions doivent être jettés au feu, ſi les connoiſſances acquiſes par tous les ſavans, qui ont conſacré leur bourſe, leur vie & leurs veilles à des voyages immenſes, coûteux, pénibles & périlleux doivent être inutiles à leurs ſucceſſeurs, & ſi chacun partant toujours de zéro pour ſon premier point, pourra parvenir de lui-même aux mêmes connoiſſances qu’une longue ſuite de recherches & d’études à répandues dans la maſſe du genre-humain. Si cela n’eſt pas & que la troiſieme & plus aimable partie de l’Hiſtoire naturelle mérite l’attention des curieux, qu’on me diſe comment on s’y prendra pour faire uſage des connoiſſances ci-devant acquiſes, ſi l’on ne commence par apprendre la langue des auteurs & par ſavoir à quels objets se rapportent les noms employés par chacun d’eux. Admettre l’étude de la Botanique & rejetter celle de la nomenclature, c’eſt donc tomber dans la plus absurde contradiction.
FRAGMENS
POUR UN
DICTIONNAIRE
DES TERMES D’USAGE
EN BOTANIQUE.

ABRUPTE. On donne l’épithete d’Abrupte aux feuilles pintées, au ſommet deſquelles manque la foliole impaire terminale qu’elles ont ordinairement.

ABRUVOIRS, ou goutieres. Trous qui ſe forment dans le bois pourri des chicots, & qui retenant l’eau des pluies, pourriſſent enfin le reſte du tronc.

ACAULIS, ſans tige.

AIGRETTE. Touffe de filamens ſimples ou plumeux qui couronnent les ſemences dans pluſieurs genres de compoſées & d’autres fleurs. L’Aigrette eſt ou ſeſſile, c’eſt-à-dire, immédiatement attachée autour de l’embrion qui les porte, ou pédiculée, c’eſt-à-dire, portée par un pied appelle en latin Stipes qui la tient élevée au-deſſus de l’embrion. L’Aigrette sert d’abord de calice au fleuron, ensuite elle le pouſſe & le chaſſe à meſure qu’il ſe fane pour qu’il ne reſte pas ſous la ſemence & ne l’empêche pas de mûrir ; elle garantit cette même ſemence nue à de l’eau de la pluie qui pourroit la pourrir ; & lorſque la ſemence eſt mûre, elle lui ſert d’aîle pour être portée & diſſéminée au loin par les vents.

AILÉE. Une feuille compoſée de deux folioles oppoſées ſur le même pétiole, s’appelle feuille aîlée.

AISSELLE. Angle aigu ou droit, forme par une branche ſur une autre branche ou ſur la tige, ou par une feuille ſur une branche.

AMANDE. Semence enfermée dans un noyau.

ANDROGYNE. Qui porte des fleurs mâles & des fleurs femelles ſur le même pied, Ces mots Androgyne & Monoïque ſignifient abſolument la même choſe. Excepté que dans le premier on fait plus d’attention au différent ſexe des fleurs, & dans le ſecond à leur aſſemblage ſur le même individu.

ANGIOSPERME, à ſemences enveloppées. Ce terme d’Angioſperme convient également aux fruits à capſule & aux fruits à baye.

ANTHERE. Capsule ou boëte portée par le filet de l’étamine, & qui s’ouvrant au moment de la fécondation, répand la pouſſiere prolifique.

ANTHOLOGIE. Diſcours ſur les fleurs. C’eſt le titre d’un livre de Pontedera, dans lequel il combat de toute ſa force le ſyſtème ſexuel qu’il eût ſans doute adopté lui-même, ſi les écrits de Vaillant & de Linnæus avoient précédé le ſien.

APHRODITES. M. Adanſon donne ce nom à des animaux dont chaque individu reproduit ſon ſemblable par le génération, mais ſans aucun acte extérieur de copulation ou de fécondation, tels que quelques pucerons, les conques, la plupart des vers ſans ſexe, les inſectes qui ſe reproduiſent ſans génération, mais par la ſection d’une partie de leur corps. En ce ſens les plantes qui ſe multiplient par boutures & par caïeux peuvent être appelées auſſi Aphrodites. Cette irrégularité ſi contraire à la marche ordinaire de la nature, offre bien des difficultés à la définition de l’eſpece : est-ce qu’a proprement parler il n’exiſteroit point d’eſpeces dans la nature, mais ſeulement des individus ? Mais on peut douter, je crois, s’il eſt des plantes abſolument Aphrodites, c’est-à-dire, qui n’ont réellement point de ſexe & ne peuvent ſe multiplier par copulation. Au reſte, il y a cette différence entre ces deux mots Aphrodite & Aſexe, que le premier s’applique aux plantes qui n’ayant point de ſexe ne laiſſent pas de multiplier ; au lieu que l’autre ne convient qu’a celles qui ſont neutres ou ſtériles & incapables de reproduire leur ſemblable.

APHYLLE. On pourroit dire effeuillé, mais effeuillé ſignifie dont on a ôté les feuilles, & Aphylle, qui n’en a point.

ARBRE. Plante d’une grandeur conſidérable, qui n’a qu’un ſeul & principal tronc diviſé en maîtreſſes branches.

ARBRISSEAU. Plante ligneuſe de moindre taille que l’arbre, laquelle ſe divise ordinairement des la racine en pluſieurs tiges. Les arbres & les arbriſſeaux poussent en automne des boutons dans les aiſſelles des feuilles qui ſe développent dans le printems s’épanouiſſent en fleurs. & en fruits ; différence qui les diſtingue des ſous-arbriſſeaux.

ARTICULE. Tige, racines, feuilles, ſilique ; ſe dit lorſque quelqu’une de ces parties de la plante ſe trouve coupée par des nœuds diſtribués de diſtance en diſtance.

AXILLAIRE. Qui ſort d’une aiſſelle.

BALE. Calice dans les graminées.

BAYE. Fruit charnu ou ſucculent à une ou pluſieurs loges.

BOULON. Groupe de fleurettes amaſſées en tête.

BOURGEON. Germe des feuilles & des branches.

BOUTON. Germe des fleurs.

BOUTURE. Eſt une jeune branche que l’on coupe à certains arbres moëlleux, tels que le figuier, le ſaule, le coignaſſier, laquelle reprend en terre ſans racine. La réuſſite des boutures dépend plutôt de leur facilité à produire des racines, que de l’abondance de la moëlle des branches ; car l’oranger, le buis, l’if & la ſabine qui ont peu de moëlle, reprennent facilement de bouture.

BRANCHES. Bras plians & élaſtiques du corps de l’arbre, ce ſont elles qui lui donnent la figure ; elles ſont ou alternes, ou oppoſées, ou verticillées. Le bourgeon s’étend peu-à-peu en branches poſées collatéralement & compoſées des mêmes parties de la tige, & l’on prétend que l’agitation des branches cauſée par le vent eſt aux arbres ce qu’eſt aux animaux l’impulſion du cœur. On diſtingue,

1°. Les maîtreſſes branches, qui tiennent immédiatement au tronc, & d’où partent toutes les autres.

2°. Les branches à bois, qui étant les plus groſſes & pleines de boutons plats, donnent la forme à un arbre fruitier, & doivent le conſerver en partie.

3°. Les branches à fruits ſont plus foibles & ont des boutons ronds.

4°. Les chiffonnes ſont courtes & menues.

5°. Les gourmandes ſont groſſes, droites & longues.

6°. Les Veules ſont longues & ne promettent aucune fécondité.

7°. La branche aoûtée est celle qui, après le mois d’Août, a pris naiſſance, s’endurcit & devient noirâtre.

8°. Enfin, la branche de faux-bois eſt groſſe à l’endroit où elle devroit être menue, & ne donne aucune marque de fécondité.

BULBE. Eſt une racine orbiculaire compoſée de pluſieurs peaux ou tuniques emboîtées les unes dans les autres. Les bulbes ſont plutôt des boutons ſous terre que des racines ; ils en ont eux-mêmes de véritables, généralement preſque cylindriques & rameuſes.

CALICE. Enveloppe extérieure ou ſoutien des autres parties de la fleur, &c. Comme il y a des plantes qui n’ont point de calice, il y en a auſſi dont le calice ſe métamorphoſe peu-à-peu en feuilles de la plante, & réciproquement il y en a dont les feuilles de la plante ſe changent en calice : c’eſt ce qui se voit dans la famille de quelques renoncules, comme l’Anémone, la Pulſatille, &c.

CAMPANIFORME, ou Campanulée. Voyez Cloche.

CAPILLAIRES. On appelle feuilles capillaires dans la famille des mouſſes celles qui ſont déliées comme des cheveux. C’eſt ce qu’on trouve ſouvent exprime dans le ſynopſis de Ray, & dans l’hiſtoire des mouſſes de Dillen, Par le mot grec de Trichodes.

On donne aussi le nom de Capillaires à une branche de la famille des fougeres, qui porte comme elles ſa fructification ſur le dos des feuilles, & ne s’en diſtingue que par la ſtature des plantes qui la compoſent, beaucoup plus petite dans les capillaires que dans les fougeres.

CAPRIFICATION. Fécondation des fleurs femelles d’une ſorte de Figuier dioïque par la pouſſiere des étamines de l’individu mâle appelle caprifiguier. Au moyen de cette opération de la nature, aidée en cela de l’induſtrie humaine, les figues ainſi fécondées groſſiſſent, mûriſſent & donnent une récolte meilleure & plus abondante qu’on ne l’obtiendroit ſans cela.

La merveille de cette opération conſiſte en ce que, dans le genre du Figuier, les fleurs étant encloſes dans le fruit, il n’y a que celles qui ſont hermaphrodites ou androgynes qui ſemblent pouvoir être fécondées ; car quand les ſexes ſont tout-à-fait ſéparés, on ne voit pas comment la pouſſiere des fleurs mâles pourroit pénétrer ſa propre enveloppe & celle du fruit femelle juſqu’aux piſtils qu’elle doit féconder, c’eſt un inſecte qui ſe charge de ce transport. Une ſorte de moucheron particuliere au caprifiguier y pond, y éclos, s’y couvre de la pouſſiere des étamines, la porte par l’œil de la figue à travers les écailles qui en garnissent l’entrée, juſques dans l’intérieur du fruit, & là, cette pouſſiere ne trouvant plus d’obſtacle, ſe dépoſe ſur l’organe deſtiné à la recevoir.

L’hiſtoire de cette opération a été détaillée en premier lieu par Théophraſte, le premier, le plus ſavant ou, pour mieux dire, l’unique & vrai Botaniſte de l’antiquité, & après lui par Pline chez les anciens. Chez les modernes par Jean Bauhin, puis par Tournefort ſur les lieux mêmes, après lui par Pontedera, & par tous les compilateurs de Botanique & d’Hiſtoire naturelle qui n’ont fait que tranſcrire la relation de Tournefort.

CAPSULAIRE. Les plantes capſulaires ſont celles dont le fruit eſt à capſules. Ray a fait de cette diviſion ſa dix-neuvieme classe. Herba vaſculiſera.

CAPSULE. Péricarpe ſec d’un fruit ſec ; car on ne donne point, par exemple, le nom de capſule à l’écorce de la Grenade, quoiqu’auſſi ſeche & dure que beaucoup d’autres capſules, parce qu’elle enveloppe un fruit mou.

CAPUCHON, CALYPTRA. Coëffe pointue qui couvre ordinairement l’urne des mouſſes. Le capuchon eſt d’abord adhérent à l’urne, mais enſuite il ſe détache & tombe quand elle approche de la maturité.

CARYOPHYLLÉE. Fleur caryophyllée ou en œillet.

CAYEUX. Bulbes par leſquelles pluſieurs liliacées & autres plantes ſe reproduiſent.

CHATON. Aſſemblage de fleurs mâles ou femelles ſpiralement attachées à un axe ou réceptacle commun, autour duquel ces fleurs prennent la figure d’une queue de chat. Il y a plus d’arbres a chatons mâles qu’il n’y en a qui aient auſſi des chatons femelles.

CHAUME. (Culmus) Nom particulier dont on diſtingue la tige graminées de celles des autres plantes, & à qui l’on donne pour caractere propre d’être géniculée & fistuleuſe, quoique beaucoup d’autres plantes aient ce même caractere & que les Lêches & divers gramens des Indes ne l’aient pas. On ajoute que le chaume n’eſt jamais rameux, ce qui néanmoins ſouffre encore exception dans l’Arundo calamagroſtis & dans d’autres.

CLOCHE. Fleurs en cloche ou campaniformes.

COLORE. Les calices, les bâles, les écailles, les enveloppes, les parties extérieures des plantes qui ſont vertes ou griſes, communément ſont dites colorées lorſqu’elles ont une couleur plus éclatante & plus vive que leurs ſemblables, tels ſont les calices de la Circée, de la Moutarde, de la Carline ; les enveloppes de l’Aſtrantia : la corolle des Ornithogales blancs & jaunes eſt verte en deſſous & colorée en deſſus ; les écailles du Xeranthême ſont ſi colorées qu’on les prendroit pour des pétales, & le calice du Polygala, d’abord très-coloré, perd ſa couleur peu-à-peu, & prend enfin celle d’un calice ordinaire.

CORDON ombilical dans les capillaires & fougeres.

CORNET. Sorte de nectaire infundibuliforme.

CORYMBE. Diſpoſition de fleur qui tient le milieu entre l’ombelle & la panicule ; les pédicules ſont gradués le long de la tige comme dans la panicule, & arrivent tous à la même hauteur, formant a leur ſommet une ſurface plane.

Le corymbe differe de l’ombelle, en ce que les pédicules qui le forment au lieu de partir du même centre, par différentes hauteurs, de divers points ſur le même axe.

CORYMBIFERES. Ce mot ſembleroit devoir deſigner les plantes à fleurs en corymbe, comme celui d’ombelliſeres déſigne les plantes à fleurs en paraſol. Mais l’uſage n’a pas autorise cette analogie ; l’acception dont je vais parler n’eſt pas même fort uſitée, mais comme elle a été employée par Ray & par d’autres Botaniſtes, il la faut connoître pour les entendre.

Les plantes corymbiferes ſont donc dans la claſſe des compoſées, & dans la ſection des diſcoïdes celles qui portent leurs ſemences nues, c’eſt-à-dire, ſans aigrettes ni filets qui les couronnent ; tels sont les Bidens, les Armoiſes, la Tanaiſie, &c. On obſervera que les demi-fleuronnées à ſemences nues comme la Lampſane, l’Hyoſeris, la Catanance, &c. ne s’appellent pas cependant corymbiferes, parce qu’elles ne sont pas du nombre des diſcoïdes.

COSSE. Péricarpe des fruits légumineux. La coſſe eſt compoſée ordinairement de deux valvules, & quelquefois n’en a qu’une ſeule.

COSSON. Nouveau ſarment qui croît ſur la vigne après qu’elle eſt taillée.

COTYLEDON. Foliole ou partie de l’embrion dans laquelle s’élaborent & ſe préparent les ſucs nutritifs de la nouvelle plante.

Les Cotyledons, autrement appelles feuilles ſéminales, sont les premieres parties de la plante qui paroiſſent hors de terre lorſqu’elle commence à végéter. Ces premieres feuilles ſont très-ſouvent d’une autre forme que celles qui les ſuivent & qui ſont les véritables feuilles de la plante. Car pour l’ordinaire les cotyledons ne tardent pas à ſe flétrir & à tomber peu après que la plante eſt levée & qu’elle reçoit par d’autres parties une nourriture plus abondante que celle qu’elle droit par eux de la ſubſtance même de la ſemence.

Il y a des plantes qui n’ont qu’un cotyledon, & qui pour cela s’appellent monocotyledones, tels ſont les Palmiers, les liliacées, les graminées & d’autres plantes, le plus grand nombre en ont deux, & s’appellent dicotyledones ; ſi d’autres en ont davantage, elles s’appelleront polycotyledones. Les acotyledones sont celles qui n’ont point de cotyledons, telles les fougeres, les mouſſes, les champignons & toutes les cryptogames.

Ces differences de la germination ont fourni à Ray, à d’autres Botanistes, & en dernier lieu à Meſſieurs de Juſſieu & Haller la premiere ou plus grande division naturelle du regne végétal.

Mais pour claſſer les plantes suivant cette méthode, il faut les examiner ſortant de terre, dans leur premiere germination, & juſques dans la semence même ; ce qui eſt ſouvent fort difficile ſur-tout pour les plantes marines & aquatiques. Et pour les arbres & plantes étrangeres ou alpines qui refuſent de germer & naître dans nos jardins.

CRUCIFERE ou CRUCIFORME, diſpoſé en forme de croix. On donne ſpécialement le nom de crucifere à une famille de plantes dont le caractere eſt d’avoir des fleurs compoſées de quatre pétales diſpoſés en croix, ſur un calice compoſé d’autant de folioles, & autour du piſtil six étamines, dont deux égales entr’elles, ſont plus courtes que les quatre autres, & les diviſent également.

CUPULES. Sortes de petites calottes ou coupes qui naiſſent le plus souvent ſur pluſieurs Lichens & Algues ; & dans le creux deſquelles on voit les ſemences naître & ſe former, ſur-tout dans le genre appelle jadis hépatique des fontaines, & aujourd’hui marchantia.

CYME, ou CYMIER. Sorte d’ombelle qui n’a rien de régulier, quoique tous ſes rayons partent du même centre ; telles ſont les fleurs de l’Obier, du Chevrefeuille, &c.

DEMI-FLEURON. C’eſt le nom donne par Tournefort, dans les fleurs compoſées, aux fleurons échancres qui garniſſent le diſque des lactucées & à ceux qui forment le contour des radiées. Quoique ces deux ſortes de demi-fleurons ſoient exactement de même figure, & pour cela confondues ſous le même nom par les Botaniſtes, ils different pourtant eſſentiellement en ce que les premiers ont toujours des étamines & que les autres n’en ont jamais. Les demi-fleurons de même que les fleurons ſont toujours ſuperes, & portes par la ſemence qui eſt portée à son tour par le diſque ou réceptacle de la fleur : Le demi-fleuron eſt formé de deux parties, l’inférieure qui eſt un tube ou cylindre très-court, & la ſupérieure qui eſt plane, taillée en languette, & à qui l’on en donne le nom. Voyez, Fleuron, Fleur.

DIECIE oui DIŒCIE, habitation ſéparée. On donne le nom de Diécie à une claſſe de plantes compoſées de toutes celles qui portent leurs fleurs mâles ſur un pied, & leurs fleurs femelles ſur un autre pied.

DIGITÉ. Une feuille eſt digitée lorsque ſes folioles partent toutes du ſommet de ſon pétiole comme d’un centre commun. Telle eſt, par exemple, la feuille du Marronier d’Inde.

DIOIQUES. Toutes les plantes de la Diécie ſont Dioïques.

DISQUE. Corps intermédiaire qui tient la fleur ou quelque-unes de ſes parties élevées au-deſſus du vrai réceptacle.

Quelquefois on appelle diſque le réceptacle même comme dans les compoſées ; alors on diſtingue la ſurface du réceptacle, ou le diſque, du contour qui le borde & qu’on nomme rayon.

Diſque eſt auſſi un corps charnu qui ſe trouve dans quelques genres de plantes, au fond du calice, deſſous l’embrion ; quelquefois les étamines ſont attachées autour de ce diſque.

DRAGEONS. Branches enracinées qui tiennent au pied d’un arbre, ou au tronc, dont on ne peut les arracher ſans l’éclater.

ECAILLES ou PAILLETTES. Petites languettes paléacées qui, dans pluſieurs genres de fleurs compoſées, implantées ſur le réceptacle, diſtinguent & ſéparent les fleurons ; quand les paillettes ſont de simples filets, on les appelle des poils ; mais quand elles ont quelque largeur, elles prennent le nom d’écailles.

Il eſt ſingulier dans le Xeranthême à fleur double, que les écailles autour du diſque s’alongent, ſe colorent & prennent l’apparence de vrais demi-fleurons, au. point de tromper à l’aſpect, quiconque n’y regarderoit pas de bien près.

On donne très-ſouvent le nom d’écailles aux calices des chatons & des cônes : on le donne auſſi aux folioles des calices imbriques des fleurs en tête, tels que les Chardons, les Jacées, & à celles des calices de ſubſtance ſeche & ſcarieuse du Xeranthême & de la Catananche.

La tige des plantes dans quelques eſpeces, eſt auſſi d’écailles : ce ſont des rudimens coriaces de feuilles qui quelquefois en tiennent lieu, comme dans l’Orabanche & le Tuſſillage.

Enfin on appelle encore écailles les enveloppes imbriquées des bâles de plusieurs liliacées, & les bâles ou calices applatis des Schœnus, & d’autres graminacées.

ECORCE. Vêtement ou partie enveloppante du tronc & des branches d’un arbre. L’écorce eſt moyenne entre l’épiderme à l’extérieur, & le liber à l’intérieur. ; ces trois enveloppes ſe réuniſſent ſouvent dans l’uſage vulgaire ſous le nom commun d’écorce.

EDULE, EDULIS, bon à manger. Ce mot est du nombre de ceux qu’il eſt à déſirer qu’on faſſe paſſer du latin dans la langue univerſelle de la Botanique.

ENTRE-NŒUDS. Ce ſont dans les chaumes des graminées les intervalles qui ſéparent les nœuds d’où naiſſent les feuilles. Il y a quelques gramens, mais en bien petit nombre, dont le chaume nud d’un bout à l’autre eſt ſans nœuds, & par conſéquent ſans entre-nœuds, tel, par exemple, que l’Aira cærulea.

EPERON. Protubérance en forme de cône droit ou recourbé, faite dans pluſieurs ſortes de fleurs par le prolongement du nectaire. Tels ſont les éperons des Orchis, des Linaires, des Ancolies, des Pieds-d’alouettes, de pluſieurs Geranium & de beaucoup d’autres plantes.

EPI. Forme de bouquet dans laquelle les fleurs ſont attachées autour d’un axe ou réceptacle commun formé par l’extrémité du chaume ou de la tige unique. Quand les fleurs ſont pédiculées, pourvu que tous les pédicules ſoient ſimples & attaches immédiatement à l’axe, le bouquet s’appelle toujours épi ; mais dans l’épi rigoureuſement pris, les fleurs ſont ſeſſiles.

EPIDERME (l’). Eſt la peau fine extérieure qui enveloppe les couches corticales ; c’eſt une membrane très-fine, tranſparente, ordinairement ſans couleur, élaſtique & un peu poreuſe.

ESPECE. Réunion de pluſieurs variétés, ou individus, ſous un caractere commun qui les diſtingue de toutes les autres plantes du même genre.

ETAMINES. Agens maſculins de la fécondation ; leur forme eſt ordinairement celle d’un filet qui ſupporte une tête appelle anthère, ou ſommet. Cette anthère eſt une eſpece de capſule qui contient la pouſſiere prolifique. Cette pouſſiere s’échappe, soit par exploſion, ſoit par dilatation, & va s’introduire dans le ſtigmate, pour être portée juſqu’aux ovaires qu’elle féconde. Les étamines varient par la forme & par le nombre.

ETENDART. Pétale ſupérieur des fleurs légumineuſes.

ENVELOPPE. Eſpece de calice qui contient pluſieurs fleurs, comme dans le Pied-de-veau, le Figuier, les fleurs à fleurons. Les fleurs garnies d’une enveloppe ne ſont pas pour cela dépourvues de calice.

FANE. La fane d’une plante, eſt l’aſſemblage des feuilles d’en-bas.

FÉCONDATION. Opération naturelle par laquelle les étamines portent au moyen du piſtil jusqu’à l’ovaire, le principe de vie néceſſaire à la maturiſation des ſemences & à leur germination.

FEUILLES. Sont des organes néceſſaires aux plants pour pomper l’humidité de l’air pendant la nuit, & faciliter la tranſpiration durant le jour ; elles ſuppléent encore dans les végétaux au mouvement progreſſif & ſpontané des animaux, & en donnant priſe au vent pour agiter les plantes & les rendre plus robuſtes. Les plantes alpines ſans ceſſe battues du vent & des ouragans, ſont toutes fortes & vigoureuſes ; au contraire, celles qu’on éleve dans un jardin ont un air trop calme, y proſperent moins & ſouvent languiſſent & dégénerent.

FILET. Pédicule qui ſoutient l’étamine. On donne, auſſi le nom de filets aux poils qu’on voit ſur la ſurface des tiges, des feuilles & même des fleurs de pluſieurs plantes.

FLEUR. Si je livrois mon imagination aux douces ſenſattions que ce mot ſemble appeller, je pourrois faire un article agréable peut-être aux Bergers, mais fort mauvais pour les Botaniſtes. Ecartons donc un moment les vives couleurs, les odeurs ſuaves, les formes élégantes, pour chercher premiérement à bien connoître l’être organiſé qui les raſſemble. Rien ne paroît d’abord plus facile ; qui eſt-ce qui croit avoir beſoin qu’on lui apprenne ce que c’eſt qu’une fleur ? Quand on ne me demande pas ce que c’eſt que le tems, diſoit Saint Auguſtin, je le fais fort bien ; je ne le fais plus quand on me le demande. On en pourroit dire autant de la fleur & peut-être de la beauté même, qui, comme elle, eſt la rapide proie du tems. En effet, tous les Botaniſtes qui ont voulu donner juſqu’ici des définitions de la fleur ont échoué dans cette entreprise, & les plus illuſtres, tels que Meſſieurs Linnæus, Haller, Adanson, qui ſentoient mieux la difficulté que les autres, n’ont pas même tenté de la ſurmonter & ont laiſſé la fleur à définir. Le premier a bien donné dans ſa philoſophie botanique les définitions de Jungins, de Ray, de Tournefort, de Pontedera, de Ludwig, mais ſans en adopter aucune, & ſans en proposer de ſon chef.

Avant lui Pontedera avoit bien ſenti & bien expoſé cette difficulté, mais il ne put réſiſter à la tentation de la vaincre. Le lecteur pourra bientôt juger du ſuccès. Diſons maintenant en quoi cette difficulté conſiſte, ſans néanmoins compter ſi je tente à mon tour de lutter contr’elle, de réuſſir mieux qu’on n’a fait juſqu’ici.

On me préſente une roſe, & l’on me dit ; voilà une fleur. C’eſt me la montrer, je l’avoue, mais ce n’eſt pas la définir, & cette inſpection ne me ſuffira pas pour décider ſur toute autre plante ſi ce que je vois eſt ou n’eſt pas la fleur ; car il y a multitude de végétaux qui n’ont dans aucune de leurs parties la couleur apparente que Ray, Tournefort, Jungins ſont entrer dans la définition de la fleur, & qui pourtant portent des fleurs non moins réelles que celles du roſier, quoique bien moins apparentes.

On prend généralement pour la fleur la partie colorée de la fleur qui est la corolle, mais on s’y trompe aiſément ; il a des bractées & d’autres organes autant & plus colorés que la fleur même & qui n’en ſont point partie ; comme on le voit dans l’Ormin, dans le Bled-de-vache, dans pluſieurs Amaranthes & Chenopodium ; il y a des multitudes de fleurs qui n’ont point du tout de corolle, d’autres qui l’ont ſans couleur, ſi petite & ſi peu apparente, qu’il n’y a qu’une recherche bien ſoigneuſe qui puiſſe l’y faire trouver. Lorſque les bleds ſont en fleur, y voit-on des pétales colorés, en voit-on dans les mouſſes, dans les graminées ? En voit-on dans les chatons du Noyer, du Hêtre & du Chêne, dans l’Aune, dans le Noisetier, dans le Pin, & dans ces multitudes d’arbres & d’herbes qui n’ont que des fleurs à étamines ? Ces fleurs néanmoins n’en portent pas moins le nom de fleurs ; l’eſſence de la fleur n’est donc pas dans la corolle.

Elle n’eſt pas non plus ſéparément aucune des autres parties conſtituantes de la fleur, puiſqu’il n’y à aucune de ces parties qui ne manque à quelques eſpeces de fleurs. Le calice manque, par exemple, à preſque toute la famille des liliacées, & l’on ne dira pas qu’une Tulipe ou un Lis ne ſont pas une fleur. S’il y à quelques parties plus eſſentielles que d’autres à une fleur, ce ſont certainement le piſtil & les étamines. Or, dans toute la famille des cucurbitacées & même dans toute la claſſe des monoïques, la moitié des fleurs ſont ſans piſtil, l’autre moitié sans étamines, & cette privation n’empêche pas qu’on ne les nomme & qu’elles ne ſoient les unes & les autres de véritables fleurs. L’eſſence de la fleur ne conſiſte donc ni ſéparément dans quelques-unes de ſes parties dites conſtituantes, ni même dans l’aſſemblage de toutes ces parties. En quoi donc conſiſte proprement cette eſſence ; voilà la question. Voilà la difficulté, & voici la ſolution par laquelle Pontedera à tâché de s’en tirer.

La fleur, dit-il, eſt une partie dans la plante différente des autres par ſa nature & par ſa forme, toujours adhérente & utile à l’embrion, ſi la fleur à un piſtil, & ſi le piſtil manque, ne tenant à nul embrion.

Cette définition peche, ce me ſemble, en ce qu’elle embraſſe trop. Car lorsque le piſtil manque, la fleur n’ayant plus d’autres caracteres que de différer des autres parties de la plante par ſa nature & par ſa forme, on pourra donner ce nom aux Bractées, aux Stipules, aux Nectarium, aux Epines & à tout ce qui n’eſt ni feuilles ni branches. Et quand la corolle eſt tombée & que le fruit approche de ſa maturité, on pourroit encore donner le nom de fleur au calice & au réceptacle, quoique réellement il n’y ait alors plus de fleur. Si donc cette définition convient omni, elle ne convient pas ſoli, & manque par-là d’une des deux principales conditions requiſes. Elle laisse d’ailleurs un vuide dans l’eſprit, qui est le plus grand défaut qu’une définition puiſſe avoir. Car après avoir aſſigné l’uſage de la fleur au profit de l’embrion quand elle y adhere, elle fait ſuppoſer totalement inutile celle qui n’y adhere pas. Et cela remplit mal l’idée que le Botaniſte doit avoir du concours des parties & de leur emploi dans le jeu de la machine organique.

Je crois que le défaut général vient ici d’avoir trop conſidéré la fleur comme une ſubſtance absolue, tandis qu’elle n’eſt, ce me ſemble, qu’un être collectif & relatif, & d’avoir trop rafiné ſur les idées tandis qu’il faloit ſe borner à celle qui ſe préſentoit naturellement. Selon cette idée, la fleur ne me paroît être que l’état paſſager des parties de la fructification durant la fécondation du germe ; de-là ſuit que quand toutes les parties de la fructification ſeront réunies, il n’y aura qu’une fleur. Quand elles ſeront ſéparées, il y en aura autant qu’il y a de parties eſſentielles à la fécondation ; & comme ces parties eſſentielles ne ſont qu’au nombre de deux, ſavoir, le piſtil & les étamines, il n’y aura par conſéquent que deux fleurs, l’une mâle & l’autre femelle qui ſoient néceſſaires à la fructification. On en peut cependant ſuppoſer une troiſieme qui reuniroit les ſexes ſéparés dans les deux autres. Mais alors ſi toutes ces fleurs étoient également fertiles, la troiſieme rendroit les deux autres ſuperflues, & pourroit seule ſuffire à l’œuvre, ou bien il y auroit réellement deux fécondations, & nous examinons ici la fleur que dans une.

La fleur n’eſt donc que le foyer & l’inſtrument de la fécondation. Une ſeule ſuffit quand elle eſt hermaphrodite. Quand elle n’eſt que mâle ou femelle il en faut deux, ſavoir, une de chaque ſexe ; & ſi l’on fait entrer d’autres parties, comme le calice & la corolle dans la compoſition de la fleur, ce ne peut être comme eſſentielles, mais ſeulement comme nutritives & conſervatrices de celles qui le ſont. Il y a des Fleurs ſans calice, il y en a ſans corolle. Il y en a même ſans & ſans l’autre ; mais il n’y en a point & il n’y en ſauroit avoir qui ſoient en même tems ſans piſtil & ſans étamines.

La Fleur eſt une partie locale & paſſagere de la plante qui précede la fécondation du germe, & dans laquelle ou par laquelle elle s’opere.

Je ne m’étendrai pas à juſtifier ici tous les termes de cette définition qui peut-être n’en vaut pas la peine ; je dirai ſeulement que le mot précede m’y paroit eſſentiel, parce que le plus ſouvent la corolle s’ouvre & s’épanouit avant que les anthères s’ouvrent à leur tour, & dans ce cas il eſt inconteſtable que la Fleur préexiſte à l’œuvre de la fécondation. J’ajoute que cette fécondation s’opere dans elle ou par elle, parce que dans les Fleurs mâles des plantes androgynes & dioïques, il ne s’opere aucune fructification, & qu’elles n’en ſont pas moins des Fleurs pour cela.

Voilà, ce me ſemble, la notion la plus juſte qu’on puiſſe ſe faire de la Fleur, & la ſeule qui ne laiſſe aucune priſe aux objections qui renverſent toutes les autres définitions qu’on a tente d’en donner juſqu’ici. Il faut ſeulement ne pas prendre trop ſtrictement le mot durant que j’ai employé dans la mienne. Car même avant que la fécondation du germe ſoit commencée, on peut dire que la Fleur exiſte auſſi-tôt que les organes ſexuels ſont en évidence, c’eſt-à-dire, auſſi-tôt que la corolle eſt épanouie, & d’ordinaire les anthères ne s’ouvrent pas à la pouſſiere ſéminale dès l’inſtant que la corelles ouvre aux anthères ; cependant la fécondation ne peut commencer avant que les anthères ſoient ouvertes. De même l’œuvre de la fécondation s’acheve ſouvent avant que la corolle ſe flétriſſe & tombe : or juſqu’à cette chûte on peut dire que la Fleur exiſte encore. Il faut donc donner néceſſairement un peu d’extenſion au mot durant pour pouvoir dire que la Fleur & l’œuvre de la fécondation commencent & finiſſent enſemble.

Comme généralement la Fleur ſe fait remarquer par ſa corolle, partie bien plus apparente que les autres par la vivacité de ſes couleurs, c’eſt dans cette corolle aussi qu’on fait machinalement conſiſter l’eſſence de la Fleur, & les Botaniſtes eux-mêmes ne ſont pas toujours exempts de cette petite illuſion ; car ſouvent ils emploient le mot de Fleur pour celui de corolle, mais ces petites impropriétés d’inadvertance importent peu, quand elles ne changent rien aux idées qu’on a des choſes quand on y penſe. De-là ces mots de Fleurs monopétales, polypétales, de Fleurs labiées, perſonnées, de Fleurs régulieres, irrégulieres, &c. qu’on trouve fréquemment dans les livres même d’inſtitutions. Cette petite impropriété étoit non-ſeulement pardonnable, mais presque forcée à Tournefort & à ſes contemporains, qui n’avoient pas encore le mot de corolle, & l’uſage s’en eſt conservé depuis eux par l’habitude ſans grand inconvénient. Mais il ne ſeroit pas permis à moi qui remarque cette incorrection, de l’imiter ici ; ainsi je renvoie au mot Corolle à parler de ſes formes diverſes & de ſes diviſions[1].

Mais je dois parler ici des Fleurs compoſées & ſimples, parce que c’eſt la Fleur même & non la corolle qui ſe compoſe, comme on le va voir après l’expoſition des parties de la Fleur ſimple.

On divise cette Fleur en complete & incomplète. La Fleur complete eſt celle qui contient toutes les parties eſſentielles ou concourantes à la fructification, & ces parties ſont au nombre de quatre ; deux eſſentielles, ſavoir, le piſtil & l’étamine, ou les étamines ; & deux acceſſoires ou concourantes, ſavoir, la corolle & le calice, à quoi l’on doit ajouter le diſque ou réceptacle qui porte le tout.

La Fleur est complete quand elle eſt compoſée de toutes ces parties ; quand il lui en manque quelqu’une, elle eſt incomplete. Or la Fleur incomplete peut manquer non-ſeulement de corolle & de calice, mais même de piſtil ou d’étamines ; & dans ce dernier cas, il y a toujours une autre Fleur, ſoit ſur le même individu, ſoit ſur un différent, qui porte l’autre partie eſſentielle qui manque à celle-ci ; de-là la diviſion en Fleurs hermaphrodites, qui peuvent être completes ou ne l’être pas, & en Fleurs purement être complétés ou ne l’être pas, & en Fleurs purement mâles ou femelles, qui ſont toujours incompletes.

La Fleur hermaphrodite incomplete n’en eſt pas moins parfaite pour cela, puiſqu’elle ſe ſuffit à elle-même pour opérer la fécondation ; mais elle ne peut être appellée complete, puiſqu’elle manque de quelqu’une des parties de celles qu’on appelle ainſi. Une Roſe, un Œillet ſont, par exemple, des Fleurs parfaits & completes, parce qu’elles ſont pourvues de toutes ces parties. Mais une Tulipe, un Lis, ne ſont point des Fleurs completes, quoique parfaites, parce qu’elles n’ont point de calice ; de même la jolie petite Fleur appellée Paronychia eſt parfaite comme hermaphrodite, mais elle eſt incomplete, parce que, malgré ſa riante couleur, il lui manque une corolle.

Je pourrois, ſans ſortir encore de la section des Fleurs ſimples, parler ici des Fleurs régulieres, & des Fleurs appelées irréguliers. Mais comme ceci ſe rapporte principalement à la corolle, il vaut mieux ſur cet article renvoyer le lecteur à ce mot[2]. Reſte donc à parler des oppoſitions que peut ſouffrir ce nom de Fleur ſimple.

Toute Fleur d’où réſulte une ſeule fructification eſt une Fleur ſimple. Mais si d’une ſeule Fleur réſultent pluſieurs fruit, Fleur s’appellera compoſée, & cette pluralité n’a jamais lieu dans les Fleurs qui n’ont qu’une corolle. Ainſi toute Fleur compoſée à néceſſairement non-ſeulement pluſieurs pétales, mais pluſieurs corolles ; & pour que la Fleur ſoit réellement compoſée, & non par une ſeule agrégation de pluſieurs Fleurs ſimples, il faut que quelqu’une des parties de la fructification ſoit commune à tous les fleurons compoſans, & manque à chacun d’eux en particulier.

Je prends, par exemple, une Fleur de Laiteron, la voyant remplie de pluſieurs petites fleurettes, & je me demande ſi c’eſt une Fleur compoſée. Pour ſavoir cela, j’examine toutes les parties de la fructification l’une après l’autre, & je trouve que chaque fleurette a des étamines, un piſtil, une corolle, mais qu’il n’y a qu’un seul réceptacle en forme de diſque que les reçoit toutes, & qu’il n’y a qu’un seul grand calice qui les environne ; d’où je conclus que la Fleur eſt compoſée, puiſque deux parties de la fructification, ſavoir, le calice & le réceptacle, ſont communes à toutes & manquent à chacun en particulier.

Je prends ensuite une Fleur de Scabieuſe ou je diſtingue auſſi plusieurs fleurettes ; je l’examine de même, & je trouve que chacune d’elles eſt pourvue en ſon particulier de toutes les parties de la fructification, ſans en excepter le calice & même le réceptacle, puiſqu’on peut regarder comme tel le ſecond calice qui ſert de baſe à la ſemence. Je conclus donc que la Scabieuſe n’eſt point une Fleur compoſée, quoiqu’elle raſſemble comme elles pluſieurs fleurettes ſur un même diſque & dans un même calice.

Comme ceci pourtant eſt ſujet à diſpute, ſur-tout à cause du réceptacle, on tire des fleurettes même un caractere plus ſûr, qui convient à toutes celles qui conſtituent proprement une Fleur compoſée & qui ne convient qu’à elles ; c’eſt d’avoir cinq étamines réunies en tube ou cylindre par leurs anthères autour du ſtyle & diviſées par leurs cinq filets au bas de la corolle ; toute Fleur dont les fleurettes ont leurs anthères ainſi diſpoſées, eſt donc une Fleur compoſée, & toute Fleur ou l’on ne voit aucune fleurette de cette eſpece n’eſt point une Fleur compoſée, & ne porte même au ſingulier qu’improprement le nom de Fleur, puisqu’elle eſt réellement une agrégation de pluſieurs Fleurs.

Ces fleurettes partielles qui ont ainſi leurs anthères réunies, & dont l’aſſemblage forme une Fleur véritablement compoſée, ſont de deux eſpeces ; les unes qui ſont régulières & tubulées s’appellent proprement fleurons, les autres qui ſont échancrées & ne préſentent par le haut qu’une languette plane & ſouvent dentelée, s’appellent demi-fleurons ; & des combinaiſons de ces deux eſpeces dans la Fleur totale, réſultent trois ſortes principales de Fleurs compoſées, ſavoir, celles qui ne ſont garnies que de fleurons, celles qui ne ſont garnies que de demi-fleurons, & celles qui ſont mêlées des unes & des autres.

Les Fleurs à fleurons ou Fleurs fleuronnées ſe diviſent encore deux eſpeces, relativement à leur forme extérieure ; celles qui préſentent une figure arrondie en maniere de tête, & dont le calice approche de la forme hémiſphérique, s’appellent Fleurs en tête, Capitati. Tels ſont, par exemple, les Chardons, Artichauts, la Chauſſe-trape.

Celles dont le réceptacle eſt plus applati, en ſorte leurs fleurons forment avec le calice une figure à-peu-près cylindrique, s’appellent Fleurs en diſque Diſcoïdei. La Santoline, par exemple, & l’Eupatoire, offrent des Fleurs en diſque ou diſcoïdes.

Les Fleurs à demi-fleurons s’appellent demi-fleuronnées & leur figure extérieure ne varie pas aſſez régulièéement pour offrir une diviſion ſemblable à la précédente. Le Salſifis, la Scorſonere, le Piſſenlit, la Chicorée ont des Fleurs demi-fleuronnées.

À l’égard des Fleurs mixtes, les demi-fleurons ne s’y pas mêlent pas parmi les fleurons en confuſion, ſans ordre mais les fleurons occupent le centre, du diſque, les demi-fleurons en garniſſent la circonférence, & forment une couronne à la Fleur, & ces Fleurs ainſi couronnées portent le nom de Fleurs radiées. Les Reines-Marguerites & tous les Aſters, le Souci, les Soleils, la Poire-de-terre portent tous des Fleurs radiées.

Toutes ces ſections forment encore dans les Fleurs compoſées, & relativement au ſexe des fleurons, d’autres diviſions dont il ſera parle dans l’article Fleuron.

Les Fleurs ſimples ont une autre ſorte d’oppoſition dans celles qu’on appelle Fleurs doubles ou pleines.

La Fleur double eſt celle dont quelqu’une des parties eſt multipliée au-delà de ſon nombre naturel, mais ſans que cette multiplication nuiſe à la fécondation du germe.

Les Fleurs ſe doublent rarement par le calice, preſque jamais par les étamines. Leur multiplication la plus commune ſe fait par la corolle. Les exemples les plus-fréquens en sont dans les Fleurs polypétales, comme Œillets, Anémones, Renoncules ; les Fleurs monopétales doublent moins communément. Cependant on voit aſſez ſouvent des Campanules, des Primeveres, des Auricules, & ſur-tout des Jacinthes à Fleur double.

Ce mot de Fleur double ne marque pas dans le nombre des pétales une ſimple duplication, mais une multiplication quelconque. Soit que le nombre des pétales devienne double, triple, quadruple, &c. tant qu’ils ne multiplient pas au point d’étouffer la fructification, la Fleur garde toujours le nom de Fleur double ; mais lorſque les pétales trop multipliés font diſparoître les étamines & avorter le germe, alors la Fleur perd le nom de Fleur double & prend celui de Fleur pleine.

On voit par-là que la Fleur double eſt encore dans l’ordre de la nature, mais que la Fleur pleine n’y eſt plus véritable monſtre.

Quoique la plus commune plénitude des Fleurs ſe faſſe par les pétales, il y en a néanmoins qui ſe rempliſſent par le calice, & nous en avons un exemple bien remarquable dans l’Immortelle appellée Xeranthême. Cette Fleur qui paroît radiée & qui réellement est diſcoïde, porte ainsi que la Carline un calice imbrique, dont le rang intérieur à ſes folioles longues & colorées, & cette Fleur, quoique compoſée, double & multiplie tellement par ſes brillantes folioles qu’on les prendroit, garniſſant la plus grande partie du diſque, pour autant de demi-fleurons.

Ces fauſſes apparences abuſent ſouvent les yeux de ceux qui ne ſont pas Botaniſtes : mais quiconque eſt initié dans l’intime ſtructure des Fleurs, ne peut s’y tromper un moment. Une Fleur demi-fleuronnée ressemble extérieurement à une Fleur polypétale pleine, mais il y a toujours cette différence eſſentielle, que dans la premiere chaque demi-fleuron eſt une Fleur parfaite qui a ſon embrion, ſon piſtil & ſes étamines ; au lieu que dans la Fleur pleine chaque pétale multiplié n’eſt toujours qu’un pétale qui ne porte aucune des parties eſſentielles à la fructification. Prenez l’un après l’autre les pétales d’une Renoncule ſimple, ou double, ou pleine, vous ne trouverez dans aucun nulle autre choſe que le pétale même ; mais dans le Piſſenlit chaque demi-fleuron garni d’un ſtyle end’étamines, n’eſt pas un ſimple pétale, mais une véritable Fleur.

On me préſente une Fleur de Nymphéa jaune, & l’on me demande ſi c’eſt une compoſée ou une Fleur double ? Je réponds que ce n’eſt ni l’un ni l’autre. Ce n’eſt pas une compoſée, puisque les folioles qui l’entourent ne ſont pas des demi-fleurons ; & ce n’est pas une Fleur double, parce que la duplication n’eſt l’état naturel d’aucune Fleur, & que l’état naturel de la Fleur de Nymphéa jaune eſt d’avoir pluſieurs enceintes de pétales autour de ſon embrion. Ainsi cette multiplicité n’empêche pas le Nymphéa jaune d’être une Fleur ſimple.

La conſtitution commune au plus grand nombre des Fleurs, eſt d’être hermaphrodites ; & cette conſtitution paroît en effet la plus convenable au regne végétal, ou les individus dépourvus de tout mouvement progreſſif & ſpontané ne peuvent s’aller chercher l’un l’autre quand les ſexes ſont ſéparés. Dans les arbres & les plantes ou ils le ſont, la nature, qui fait varier ſes moyens, à pourvu à cet obſtacle : mais il n’en eſt pas moins vrai généralement que des êtres immobiles doivent, pour perpétuer leur eſpece, avoir en eux-mêmes tous les inſtrumens propres à cette fin.

FLEUR MUTILÉE. Eſt celle qui, pour l’ordinaire par défaut de chaleur, perd ou ne produit point la corolle qu’elle devroit naturellement avoir. Quoique cette mutilation ne doive point faire eſpece, les plantes ou elle a lieu ſe diſtinguent néanmoins dans la nomenclature de celles de même eſpece qui ſont completes, comme on peut le voir dans pluſieurs eſpeces de Quamoclit, de Cucuballes, de Tuſſilages, de Campanules, &c.

FLEURETTE. Petite Fleur complete qui entre dans la ſtructure d’une Fleur agrégée.

FLEURON. Petite Fleur incomplete qui entre dans la ſtructure d’une Fleur compoſée. Voyez Fleur.

Voici quelle est la ſtructure naturelle des fleurons compoſans.

1. Corolle monopétale tubulée à cinq dents, ſupere.

2. Piſtil alongé, terminé par deux ſtigmates réfléchis.

3. Cinq étamines dont des filets ſont ſéparés par le bas, mais formant par l’adhérence de leurs anthères un tube autour du piſtil.

4. Semence nue alongée ayant pour base le réceptacle commun, & ſervant elle-même par ſon ſommet de réceptacle à la corolle.

5. Aigrette de poils ou d’écailles couronnant la ſemence, & figurant un calice à la base de la corolle. Cette aigrette pouſſe de bas en haut la corolle, la détache & la fait tomber lorſqu’elle eſt flétrie, & que la ſemence accrue approche de ſa maturité.

Cette ſtructure commune & générale des fleurons ſouffre des exceptions dans pluſieurs genres de compoſées, & ces différences conſtituent même des ſections qui forment autant de branches dans cette nombreuſe famille.

Celles de ces différences qui tiennent à la ſtructure même des fleurons, ont été ci-devant expliquées au mot Fleur. J’ai maintenant à parler de celles qui ont rapport à la fécondation.

L’ordre commun des fleurons dont je viens de parler eſt d’être hermaphrodites, & ils ſe fécondent par eux-mêmes. Mais il y en a d’autres qui ayant des étamines & n’ayant point de germe, portent le nom de mâles ; d’autres qui ont un germe & n’ont point d’étamines, s’appellent fleurons femelles ; d’autres qui n’ont ni germe ni étamines, ou dont le germe imparfait avorte toujours, portent le nom de neutres.

Ces diverſes eſpeces de fleurons ne ſont pas indifféremment entremêlés dans les Fleurs compoſées ; mais leurs combinaiſons méthodiques & régulieres ſont toujours relatives ou à la plus ſure fécondation, ou a la plus abondante fructification, ou à la plus pleine maturification des graines.

FRUCTIFICATION. Ce mot se prend toujours dans un ſens collectif, & comprend non-ſeulement l’œuvre de la fécondation du germe & de la maturification du fruit, mais l’aſſemblage de tous les inſtrumens naturels deſtinés à cette opération.

FRUIT. Dernier produit de la végétation dans l’individu, contenant les ſemences qui doivent la renouveller par d’autres individus. La ſemence n’eſt ce dernier produit que quand elle eſt ſeule & nue. Quand elle ne l’eſt pas, elle n’eſt que partie du fruit.

Fruit. Ce mot a dans la Botanique un ſens beaucoup plus étendu que dans l’uſage ordinaire. Dans les arbres & même dans d’autres plantes, toutes les ſemences ou leurs enveloppes bonnes à manger, portent en général le nom de fruit. Mais en Botanique ce même nom s’applique plus généralement encore à tout ce qui réſulte, après la fleur, de la fécondation du germe. Ainſi le fruit n’eſt proprement autre chose que l’ovaire fécondé, & cela, ſoit qu’il ſe mange ou ne ſe mange pas, que la ſemence ſoit déjà mûre ou qu’elle ne le ſoit pas encore.

GENRE. Réunion de pluſieurs eſpeces ſous un caractere commun qui les diſtingue de toutes les autres plantes.

GERME, embrion, ovaire, fruit. Ces termes ſont ſi près d’être ſynonymes, qu’avant d’en parler ſéparément dans leurs articles, je crois devoir les unir ici.

Le germe eſt le premier rudiment de la plante, il devient embrion ou ovaire au moment de la fécondation, & ce même embrion devient fruit en mûriſſant ; voilà les différences exactes. Mais on n’y fait-pas toujours attention dans l’uſage & l’on prend ſouvent ces mots l’un pour l’autre indifféremment.

Il y a deux ſortes de germes bien distincts, l’un contenu dans la ſemence, lequel en ſe développant devient plante, & l’autre contenu dans la fleur, lequel par la fécondation devient fruit. On voit par quelle alternative perpétuelle chacun de ces deux germes ſe produit, & en eſt produit.

On peut encore donner le nom de germe aux rudimens des feuilles enfermées dans les bourgeons, & à ceux des fleurs enfermés dans les boutons.

GERMINATION. Premier développement ces parties de la plante, contenue en petit dans le germe.

GLANDES. Organes qui ſervent à la ſecrétion des ſucs de la plante.

GOUSSE. Fruit d’une plante légumineuſe. La gouſſe qui s’appelle auſſi légume, eſt ordinairement composée de deux panneaux nommés coſſes, applatis ou convexes, collés l’un ſur l’autre par deux futures longitudinales, & qui renferment des ſemences attachées alternativement par la future aux deux coſſes, leſquelles ſe séparent par la maturité.

GRAPPE, racemus. Sorte d’épi dans lequel les Fleurs ne ſont ni ſeſſiles ni toutes attachées à la rape ; mais à des pédicules partiels dans leſquels les pédicules principaux ſe diviſent. La grappe n’eſt autre choſe qu’une panicule dont les rameaux sont plus ſerrés, plus courts, & ſouvent plus gros que dans la panicule proprement dite.

Lorſque l’axe d’une panicule ou d’un épi pend en bas au lieu & s’élever vers le Ciel, on lui donne alors le nom de grappe ; tel eſt l’épi du groſeiller, telle eſt la grappe de la vigne.

GREFFE. Opération par laquelle on force les ſucs d’un arbre à paſſer par les couloirs d’un autre arbre ; d’oû il réſulte que les couloirs de ces deux plantes n’étant pas de même figure & dimenſions, ni places exactement les uns vis-à-vis des autres, les ſucs forcés de ſe ſubtiliſer en ſe diviſant, donnent enſuite des fruits meilleurs & plus ſavoureux.

GREFFER. Eſt engager l’œil ou le bourgeon d’une ſaine branche d’arbre dans l’écorce d’un autre arbre, avec les précautions néceſſaires & dans la ſaiſon favorable, en ſorte que ce bourgeon reçoive le ſuc du ſecond arbre & s’en nourriſſe comme il auroit fait de celui dont il a été détaché. On donne le nom de Greffe à la portion qui s’unir, & de Sujet à l’arbre auquel il s’unit.

Il y a diverſes manieres de greffer. La greffe par approche, en fente, en couronne, en flûte, en écuſſon.

GYMNOSPERME à ſemences nues.

HAMPE. Tige ſans feuilles deſtinée uniquement à tenir la fructification élevée au-deſſus de la racine.

INFERE, SUPERE. Quoique ces mots soient purement latins, on eſt obligé de les employer en françois dans le langage de la Botanique, ſous peine d’être diffus, lâche & louche, pour vouloir parler purement. La même néceſſité doit être ſuppoſée, & la même excuſe répétée dans tous les mots latins que je ſerai forcé de franciſer. Car c’eſt ce que je ne ferai jamais que pour dire ce que je ne pourrois auſſi-bien faire entendre dans un françois plus correct

Il y a dans les fleurs deux diſpoſitions différentes du calice & de la corolle, par rapport au germe dont l’expreſſion revient ſi ſouvent, qu’il faut absolument créer un mot pour elle. Quand la calice & la corolle portent ſur le germe, la fleur eſt dite ſupere. Quand le germe porte ſur le calice & la corolle, la fleur eſt dite inſere. Quand de la corolle on tranſporte le mot au germe, il faut prendre toujours l’oppoſé. Si la corolle eſt infère, le germe est supere ; si la corolle est supere, le germe est infere ; ainſi l’on a le choix de ces deux manieres d’exprimer la même choſe.

Comme il y a beaucoup plus de plantes ou la fleur eſt infere, que de celles ou elle eſt ſupere, quand cette diſpoſition n’eſt point exprimée, on doit toujours ſous-entendre le premier cas, parce qu’il eſt le plus ordinaire ; & ſi la description ne parle point de la diſpoſition relative de la corolle & du germe, il faut ſuppoſer la corolle infere : car ſi elle étoit ſupere, l’auteur de la deſcription l’auroit expreſſément dit.

LÉGUME. Sorte de péricarpe compose de deux panneaux dont les bords ſont réunis par deux ſutures longitudinales. Les ſemences ſont attachées attachées alternativement à ces deux valves par la ſuture ſupérieure, l’inférieure eſt nue. L’on appelle de ce nom en général le fruit des plantes légumineuſes.

LÉGUMINEUSES Voyez Fleurs, Plantes.

LIBER (le). Eſt compoſé de pellicules qui repréſentent les feuillets d’un livre ; elles touchent immédiatement au bois. Le Liber ſe détache tous les ans des deux autres parties de l’écorce, & s’uniſſant avec l’aubier, il produit sur la circonférence de l’arbre une nouvelle couche qui en augmente le diametre.

LIGNEUX. Qui a la conſiſtance de bois.

LILIACÉES. Fleurs qui portent le caractere du Lis.

LIMBE. Quand une corolle monopétale régulière s’évaſe & s’élargit par le haut, la partie qui forme cet évaſement s’appelle le Limbe, & ſe découpe ordinairement en quatre, cinq ou pluſieurs ſegmens. Diverſes Campanules, Primeveres, Liſerons & autres fleurs monopétales offrent des exemples de ce Limbe, qui eſt à l’égard de la corolle à-peu-près ce qu’est à l’égard d’une cloche la partie qu’on nomme le pavillon. Le différent degré de l’angle que forme le Limbe avec le tube eſt ce qui fait donner à la corolle le nom d’infundibuliforme, de campaniforme, ou hypocrateniforme.

LOBES des ſemences ſont deux corps réunis, applatis d’un côté, convexes de l’autre. Ils ſont diſtincts dans les ſemences légumineuſes.

LOBES des feuilles.

LOGE. Cavité intérieure du fruit ; il eſt à pluſieurs loges, quand il eſt partagé par des cloiſons.

MAILLET. Branche de l’année à laquelle on laiſſe pour la replanter deux chicots du vieux bois ſaillans des deux côtés. Cette ſorte de bouture ſe pratique ſeulement ſur la vigne & même aſſez rarement.

MASQUE. Fleur en maſque eſt une Fleur monopétale irréguliere.

MONÉCIE ou MONŒCIE. Habitation commune aux deux ſexes. On donne le nom de Monœcie à une claſſe de plantes compoſée de toutes celles qui portent des Fleurs mâles & des Fleurs femelles ſur le même pied.

MONOUQUE. Toutes les plantes de la Monœcie ſont monoïques. On appelle Plantes monoïques celles dont les Fleurs ne ſont pas hermaphrodites, mais ſéparément mâles & femelles ſur le même individu. Ce mot, formé de celui de monœcie, vient du grec & ſignifie ici que les deux ſexes occupent bien le même logis, mais ſans habiter la même chambre. Le Concombre, le Melon & toutes les cucurbitacées ſont des plantes monoïques.

MUFLE (Fleur en) Voyez Maſque.

NŒUDS. Sont les articulations des tiges & des racines.

NOMENCLATURE. Art de joindre aux noms qu’on impoſe aux plantes l’idée de leur ſtructure & de leur claſſification.

NOYAU. Semence oſſeuſe qui renferme une amande.

NUD. Dépourvu des vêtemens ordinaires à ſes ſemblables.

On appelle graines nues celles qui n’ont point de péricarpe, ombelles nues celles qui n’ont point d’involucre, tiges nues celles qui ne ſont point garnies de feuilles, &c.

NUITS-DE-FER. Noctes ferreæ. Ce ſont, en Suede, celles dont la froide température arrêtant la végétation de pluſieurs plantes, produit leur dépériſſement inſenſible, leur pourriture & enfin leur mort. Leurs premieres atteintes avertiſſent de rentrer dans les ſerres les plantes étrangeres, qui periroient par ces ſortes de froids.

(C’eſt aux premiers gels aſſez communs au mois d’Août dans les pays froids qu’on donne ce nom, qui, dans des climats tempérés, ne peut pas être employé pour les mêmes jours. H.)

ŒIL. Voyez Ombilic. Petite cavité qui ſe trouve en certains fruits à l’extrémité oppoſée au pédicule ; dans les fruits inſeres ce ſont les diviſions du calice qui forment l’ombilic, comme le Coin, la Poire, la Pomme, &c. dans ceux qui sont ſuperes, l’ombilic eſt la cicatrice laiſſé par l’inſertion du piſtil.

ŒILLETONS. Bourgeons qui ſont à côté des racines des Artichauts & d’autres plantes, & qu’on détache afin de multiplier ces plantes.

OMBELLE. Aſſemblage de rayons qui partant d’un même centre, divergent comme ceux d’un paraſol. L’ombelle univerſelle porte ſur la tige ou ſur une branche, l’ombelle partielle ſort d’un rayon de l’ombelle univerſelle.

OMBILIC. C’eſt, dans les bayes & autres fruits mous inſeres, le réceptacle de la Fleur dont, après qu’elle eſt tombée, la cicatrice reſte ſur le fruit, comme on peut le voir dans les Airelles. Souvent le calice reſte & couronne l’ombilic qui s’appelle alors vulgairement œil. Ainſi l’œil des Poires & des Pommes n’eſt autre choſe que l’ombilic autour duquel le calice perſiſtant s’eſt deſſéché.

ONGLE. Sorte de tache ſur les pétales ou ſur les feuilles, qui à ſouvent la figure d’un ongle & d’autres figures différentes, comme on peut le voir aux fleurs des Pavots, des Roſes, des Anémones, des Ciſtes, & aux feuilles des Renoncules, des Perſicaires, &c.

ONGLET. Eſpece de pointe crochue par laquelle le pétale de quelques corolles eſt fixé ſur le calice ou ſur le réceptable ; l’onglet des Œillets eſt plus long que celui des Roſes.

OPPOSÉES. Les feuilles oppoſées ſont juſqu’au nombre de deux, placées l’une vis-à-vis de l’autre, des deux côtés de la tige ou des branches. Les feuilles oppoſées peuvent être pédiculées ou ſeſſiles ; s’il y avoit plus de deux feuilles attachées à la même hauteur autour de la tige, alors cette pluralité dénatureroit l’oppoſition & cette diſpoſition des feuilles prendroit un nom différent Voyez Verticillées.

OVAIRE. C’eſt le nom qu’on donne à l’embrion du fruit, ou c’eſt le fruit même avant la fécondation. Après la fécondation l’ovaire perd ce nom & s’appelle ſimplement fruit ou en particulier péricarpe, ſi la plante eſt angioſperme ; ſemence ou graine, ſi la plante eſt gymnosperme.

PALMÉE. Une feuille eſt palmée lorſqu’au lieu d’être compoſée de pluſieurs folioles comme la feuille digitée, elle eſt seulement découpée en pluſieurs lobes dirigés en rayons vers le ſommet du pétiole, mais ſe réuniſſant avant que d’y arriver.

PANICULE. épi rameux & pyramidal. Cette figure lui vient de ce que les rameaux du bas étant les plus larges, forment entre eux un plus large eſpace, qui se rétrécit en montant, à meſure que ces rameaux deviennent plus courts, moins nombreux ; en forte qu’une panicule parfaitement réguliere ſe termineroit enfin par une fleur ſeſſile.

PARASITES. Plantes qui naiſſent ou croiſſent ſur d’autres plantes & ſe nourriſſent de leur ſubſtance. La Cuſcute, le Gui, pluſieurs Mouſſes & Lichens, ſont des plantes paraſites.

PARENCHIME. Subſtance pulpeuſe ou tiſſu cellulaire qui forme le corps de la feuille ou du pétal : il eſt couvert dans l’une & dans l’autre d’un épiderme.

PARTIELLE. Voyez Ombelle.

PARTIES DE LÀ FRUCTIFICATION. Voyez Etamines, Piſtil.

PAVILLON, ſynonyme d’étendard.

PÉDICULE. Baſe alongée qui porte le fruit. On dit pedunculus en latin, mais je crois qu’il faut dire pédicule en françois. C’eſt l’ancien uſage, & il n’y a aucune bonne raiſon pour le changer. Pedunculus ſonne mieux en latin & il évite l’équivoque de nom pediculus. Mais le mot pédicule eſt net & plus doux en françois, & dans le choix des mots, il convient de conſulter l’oreille & d’avoir égard à l’accent de la langue.

L’adjectif pédicule me paroît néceſſaire par oppoſition à l’autre adjectif ſeſſile. La Botanique eſt ſi embarraſſée de termes, qu’on ne ſauroit trop s’attacher à rendre clairs & courts ceux qui lui sont ſpécialement conſacrés.

Le pédicule eſt le lien qui attache la fleur ou le fruit à la branche ou à la tige. Sa ſubſtance est d’ordinaire plus ſolide que celle du fruit qu’il porte par un de ſes bouts, & moins que celle du bois auquel il eſt attaché par l’autre. Pour l’ordinaire quand le fruit eſt mûr, il ſe détache & tombe avec ſon pédicule. Mais quelquefois, & ſur-tout dans les plantes herbacées, le fruit tombe & le pédicule reſte, comme on peut le voir dans le genre des Rumex. On y peut remarquer encore une autre particularité. C’eſt que les pédicules qui tout ſont verticillés autour de la tige, ſont auſſi tous articules vers leur milieu. Il ſemble qu’en ce cas le fruit devroit ſe détacher à l’articulation, tomber avec une moitié du pédicule & laiſſer l’autre moitié ſeulement attachée à la plante. Voilà néanmoins ce qui n’arrive pas. Le fruit ſe détache & tombe ſeul. Le pédicule tout entier reſte, & il faut une action expreſſe pour le diviſer en deux au point de l’articulation.

PERFOLIÉES. La feuille perfoliée eſt celle que la branche enfile & qui entoure celle-ci de tous côtés.

PERIANTHE. Sorte de calice qui touche immédiatement la fleur ou le fruit.

PERRUQUE. Nom donne par Vaillant aux racines garnies d’un chevelu touffu de fibrilles entrelacées comme des cheveux emmêlés.

PÉTALE. On donne le nom de pétale à chaque piece entiere de la corolle. Quand la corolle n’eſt que d’une ſeule piece, il n’y a auſſi qu’un pétale ; le pétale & la corolle ne ſont alors qu’une ſeule & même choſe, & cette sorte de corolle ſe déſigne par l’épithète de monopétale. Quand la corolle eſt de plusieurs pieces, ces pieces sont autant de pétales, & la corolle qu’elles compoſent ſe déſigne par leur nombre tire du grec, parce que le mot de pétale en vient auſſi, qu’il convient, quand on veut compoſer un mot, de tirer les deux racines de la même langue. Ainſi les mots de monopétale, de dipétale, de tripétale, de térapétale, de pentapérale, & enfin polypétale, indiquent une corolle d’une ſeule piece, ou de deux, de trois, de quatre, de cinq, &c. enfin d’une multitude indéterminée de pieces.

PETATOIDE : Qui à des pétales. Ainſi la Fleur pétatoïde eſt l’oppoſé de la Fleur apétale.

Quelquefois ce mot entre comme ſeconde racine dans la compoſition d’un autre mot dont la premiere racine eſt un nom de nombre. Alors il ſignifie une corolle monopétale profondément diviſée en autant de sections qu’en indique la premiere racine. Ainſi la corolle tripétatoïde eſt diviſée en trois ſegmens ou demi-pétales, la pentapétatoïde en cinq, &c.

PÉTIOLE. Baſe alongée qui porte la feuille. Le mot pétiole eſt oppoſé à ſeſſile à l’égard des feuilles, comme le mot pédicule l’eſt à l’égard des fleurs & des fruit. Voyez Pédicule, Seſſile.

PINNÉE. Une feuille aîlée à pluſieurs rangs s’appelle feuille pinnée.

PISTIL. Organe femelle de la fleur qui ſurmonte le germe, & par lequel celui-ci reçoit l’intromiſſion fécondante de la pouſſiere des anthères : le piſtil ſe prolonge ordinairement par un ou pluſieurs ſtyles, quelquefois auſſi il eſt couronné immédiatement par un ou pluſieurs ſtigmates, ſans aucun ſtyle intermédiaire. Le ſtigmate reçoit la pouſſiere prolifique du sommet des étamines, & la tranſmet par le piſtil dans l’intérieur du germe pour féconder l’ovaire. Suivant le ſyſtême ſexuel, la fécondation des plantes ne peut s’opérer que par le concours des deux ſexes, & l’acte de la fructification n’eſt plus que celui de la génération. Les filets des étamines ſont les vaiſſeaux ſpermatiques, les anthères ſont les teſticules, la pouſſiere qu’elles répandent eſt la liqueur ſéminale, le ſtigmate devient la vulve, le ſtyle eſt la trompe ou le vagin & le germe fait l’office d’uterus ou de matrice.

PLACENTA. Réceptacle des semences. C’eſt le corps auquel elles ſont immédiatement attachées. M. Linnæus n’admet point ce nom de Placenta & emploie toujours celui de réceptacle. Ces mots rendent pourtant des idées fort différentes. Le réceptacle eſt la partie par ou le fruit tient à la plante. Le placenta eſt la partie par où les ſemences tiennent au péricarpe. Il eſt vrai que quand les ſemences ſont nues, il n’y a point d’autre placenta que le réceptacle ; mais toutes les fois que le fruit eſt angiosperme, le réceptacle & le placenta ſont différens.

Les cloiſons (diſſepimenta) de toutes les capſules à pluſieurs loges ſont de véritables placentas, & dans des capſules uniloges, il ne laiſſe pas d’y avoir ſouvent des placentas autres que le péricarpe.

PLANTE. Production végétal compoſée de deux parties principales, ſavoir la racine par laquelle elle eſt attachée à la terre ou à un autre corps dont elle tire ſa nourriture, & l’herbe par laquelle elle inſpire & reſpire l’élément dans lequel elle vit. De tous les végétaux connus, la Truffe eſt preſque le ſeul qu’on puiſſe dire n’être pas plante.

PLANTES. Végétaux diſſéminés ſur la ſurface de la terre pour la vêtir & la parer. Il n’y a point d’aſpect auſſi triſte que celui de la terre nue ; il n’y en à point d’auſſi riant que celui des montagnes couronnées d’arbres, des rivieres bordées de bocages, des plaines tapiſſées de verdure, & des vallons émailles de Fleurs.

On ne peut diſconvenir que les plantes ne ſoient des corps organiſés & vivans, qui ſe nourriſſent & croiſſent par intusſuſception, & dont chaque partie poſſede en elle-même une vitalité iſolée & indépendante des autres, puiſqu’elles ont la faculté de ſe reproduire[3].

POILS ou SOYE. Filets plus ou moins ſolides & fermes qui naiſſent ſur certaines parties des plantes ; ils ſont quarrés ou cylindriques ; droits ou couches, fourchés ou ſimples, ſubulés ou en hameçons ; & ces diverſes figures ſont des caracteres aſſez conſtans pour pouvoir ſervir à claſſer ces plantes. Voyez l’ouvrage de M. Guettard, intitulé Obſervations ſur les plantes.

POLYGAMIE, pluralité d’habitation. Une claſſe de plantes porte le nom de Polygamie, & renferme toutes celles qui ont des Fleurs hermaphrodites ſur un pied & des Fleurs d’un ſeul ſexe mâles ou femelles ſur un autre pied.

Ce mot de Polygamie s’applique encore à pluſieurs ordres de la classe des Fleurs compoſées, & alors on y attache une idée un peu différente.

Les Fleurs compoſées peuvent toutes être regardées comme Polygames, puiſqu’elles renferment toutes pluſieurs fleurons qui fructifient ſéparément, & qui par conſéquent ont chacun ſa propre habitation, &, pour ainſi dire, ſa propre lignée. Toutes ces habitations ſéparées ſe conjoignent de différentes manieres, & par-là forment pluſieurs ſortes de combinaiſons.

Quand tous les fleurons d’une Fleur compoſée ſont hermaphrodites, l’ordre qu’ils forment porte le nom de Polygamie égale.

Quand tous ces fleurons compoſans ne ſont pas hermaphrodites, ils forment entr’eux, pour ainſi dire, une Polygamie bâtarde, & cela de pluſieurs façons.

1°. Polygamie ſuperflue, lorſque les fleurons du diſque étant tous hermaphrodites fructifient, & que les fleurons du contour étant femelles fructifient auſſi.

2°. Polygamie inutile, quand les fleurons du diſque étant hermaphrodites fructifient, & que ceux de contour ſont neutres & ne fructifient point.

3°. Polygamie néceſſaire, quand les fleurons du diſque étant mâles & ceux du contour étant femelles, ils ont beſoin les uns des autres pour fructifier.

4°. Polygamie ſéparée, lorsque les fleurons compoſans ſont diviſés entr’eux, ſoit un à un, ſoit pluſieurs enſemble, par autant de calices partiels renfermés dans celui de toute la fleur.

On pourroit imaginer encore de nouvelles combinaiſons, en ſuppoſant, par exemple, des fleurons mâles au contour, & des fleurons hermaphrodites ou femelles au diſque ; mais cela n’arrive point.

POUSSIERE PROLIFIQUE. C’eſt une multitude de petits corps ſphériques enfermes dans chaque anthère & qui, lorſque celle-ci s’ouvre & les verſe dans le ſtigmate, s’ouvrent à leur tour, imbibent ce même ſtigmate d’une humeur qui, pénétrant à travers le piſtil, va seconder l’embrion du fruit.

PROVIN. Branche de vigne couchée & coudée en terre. Elle pouſſe des chevelus par les nœuds qui ſe trouvent enterres. On coupe enſuite le bois qui tient au cep, & le bout oppoſé qui ſort de terre devient un nouveau cep.

PULPE. Subſtance molle & charnue de pluſieurs fruits & racines.

RACINE. Partie de la plante par laquelle elle tient à la terre ou au corps qui la nourrit. Les plantes ainſi attachées par la racine à leur matrice ne peuvent avoir de mouvement local ; le ſentiment leur ſeroit inutile, puiſqu’elles ne peuvent chercher ce qui leur convient, ni fuir ce qui leur nuit : or la nature ne fait rien en vain.

RADICALES. Se dit des feuilles qui ſont les plus près de la racine : ce mot s’étend auſſi aux tiges dans le même ſens.

RADICULE. Racine naissante.

RADIÉE. Voyez Fleur.

RÉCEPTACLE. Celle des parties de la fleur & du fruit qui ſert de ſiege à toutes les autres & par où leur ſont tranſmis de la plante les ſucs nutritifs qu’elles en doivent tirer.

Il ſe divise le plus généralement en réceptacle propre, que ne soutient qu’une ſeule fleur & un ſeul fruit, & qui, par conſéquent, n’appartient qu’aux plus ſimples, & en réceptacle commun qui porte & reçoit pluſieurs fleurs.

Quand la fleur eſt inſere, c’est le même réceptacle qui porte toute la fructification. Mais quand la fleur eſt ſupere, le réceptacle propre eſt double, & celui qui porte la fleur n’eſt pas le même que celui qui porte le fruit. Ceci s’entend de la construction la plus commune ; mais on peut propoſer à ce ſujet le problême ſuivant, dans la ſolution duquel la nature à mis une de ſes plus ingénieuses inventions.

Quand la fleur eſt ſur le fruit, comment ſe peut-il faire que la fleur & le fruit n’aient cependant qu’un ſeul & même réceptacle ?

Le réceptacle commun n’appartient proprement qu’aux fleurs composſées, dont il porte & unit, tous les fleurons en une fleur réguliere ; en ſorte que le retranchement de quelques-unes cauſeroit l’irrégularité de tous ; mais outre les Fleurs agrégées dont on peut dire à peu dire à-peu-près la même choſe, il y a d’autres ſortes de réceptacles communs qui méritent encore le même nom, comme ayant le même uſage. Tels sont l’Ombelle, l’Épi, la Panicule, le Thyrſe, la Cyme, le Spadix, dont on trouvera les articles chacun à ſa place.

RÉGULIERES (Fleurs). Elles sont ſymétriques dans toutes leurs parties, comme les Cruciferes, les Liliacées, &c.

RÉNIFORME. De la figure d’un rein.

ROSACÉE. Polypétale réguliere comme eſt la Roſe.

ROSETTE. Fleur en roſette eſt une Fleur monopétal dont le tube eſt nul ou très-court & le lymbe très-applati.

SEMENCE. Germe ou rudiment ſimple d’une nouvelle plante uni, à une ſubstance propre à ſa convervation avant qu’elle germe, & qui la nourrit durant la premiere germination, juſqu’à ce qu’elle puiſſe tirer ſon aliment immédiatement de la terre.

SESSILE. Cet adjectif marque privation de réceptacle. Il indique que la feuille, la fleur ou le fruit auxquels on l’applique tiennent immédiatement à la plante ſans l’entremiſe d’aucun pétiole ou pédicule.

SEXE. Ce mot a été étendu au regne végétal & y eſt devenu familier depuis l’établiſſement du ſyvtême ſexuel.

SILIQUE. Fruit compoſé de deux panneaux retenus par deux futures longitudinales auxquelles les graines ſont attachées des deux côtés.

La Silique eſt ordinairement biloculaire & partagée par une cloiſon à laquelle eſt attachée une partie des graines. Cependant cette cloiſon ne lui étant pas eſſentielle ne doit pas entrer dans ſa définition, comme on peut le voir dans le Cléome, dans la Chélidoine, &c.

SOLITAIRE. Une fleur ſolitaire eſt ſeule ſur ſon pédicule.

SOUS-ARBRISSEAU. Plante ligneuſe ou petit buisson moindre que l’arbriſſeau, mais qui ne pouſſe point en automne de boutons à fleurs ou à fruits. Tels sont le Thym, le Romarin, le Groſeiller' ', les ' Bruyeres, &c.

SOYES. Voyez Poils.

SPADIX, ou RÉGIME. C’eſt le rameau floral dans la famille des Palmiers ; il eſt le vrai réceptacle de la fructification, entoure d’un ſpathe qui lui ſert de voile.

SPATHE. Sorte de calice membraneux qui sert d’enveloppe aux fleurs avant leur épanouiſſement, & se déchire pour leur ouvrir le paſſage aux approches de la fécondation.

Le Spathe eſt caractériſtique dans la famille des Palmiers & dans celle des liliacées.

SPIRALE. Ligne qui fait pluſieurs tours en s’écartant du centre ou en s’en approchant.

STIGMATE. Sommet du piſtil qui s’humecte au moment de la fécondation, poux que la pouſſiere prolifique s’y attache.

STIPULE. Sorte de foliole ou d’écailles qui naît à la baſe du pétiole, du pédicule, ou de la branche. Les Stipules sont ordinairement extérieures à la partie qu’elles accompagnent, & leur servent en quelque maniere de conſole : mais quelquefois auſſi elles naiſſent à côté, vis-à-vis, ou au-dedans même de l’angle d’inſertion.

M. Adanſon dit qu’il n’y a de vraies ſtipules que sont attachées aux tiges, comme dans les Airelles, les Apocins, les Jujubiers, les Tithymales, les Châtaigniers, les Tilleuls, les Mauves, les Câpriers : elles tiennent lieu de feuilles dans les plantes qui ne les ont pas verticillées. Dans les plantes légumineuſes la ſituation des ſtipules varie. Les Roſiers n’en ont pas de vraies, mais ſeulement un prolongement ou appendice de feuille ou une extenſion du pétiole. Il y a auſſi des ſtipules membraneuſes comme dans l’Eſpargoute.

STYLE. Partie du piſtil qui tient le ſtigmate élevé au-deſſus du germe.

SUC NOURRICIER. Partie de la ſeve qui eſt propre à nourrir la plante.

SUPERE. Voyez Inſere.

SUPPORTS. Fulera. Dix especes, savoir, la stipule, la bractée, la vrille, l’épine, l’aiguillon, le pédicule, le pétiole, la hampe, la glande & l’écaille.

SURGEON, Surculus. Nom donne aux jeunes branches de l’Œillet, &c. auxquelles on fait prendre racine en les buttant en terre loſsqu’elles tiennent encore à la tige : cette opération eſt une eſpece de Marcotte.

SYNONYMIE. Concordance de divers noms donne par différens auteurs aux mêmes plantes.

La Synonymie n’eſt point une étude oiſeuſe & inutile.

TALON. Oreillette qui ſe trouve à la baſe des feuilles d’Orangers. C’eſt auſſi l’endroit ou tient l’œilleton qu’on détache d’un pied d’Artichaut, & cet endroit a un peu de racine.

TERMINAL. Fleur Terminale eſt celle qui vient au ſommet de la tige, ou d’une branche.

TERNÉE. Une feuille tournée eſt compoſée de trois folioles attachées au même pétiole.

TÊTE. Fleur en Tête ou Capitée eſt une Fleur agrégé ou compoſée, dont les fleurons ſont diſpoſés ſphériquement ou à-peu-près.

THIRSE. Epi rameux & cylindrique ; ce terme n’est pas extrêmement uſité, parce que les exemples n’en ſont pas frequens.

TIGE. Tronc de la plante d’où ſortent toutes ſes autres parties qui ſont hors de terre : elle a du rapport avec la côte, en ce que celle-ci eſt quelquefois unique & ſe ramifie comme elle, par exemple dans la Fougere : elle s’en diſtingue auſſi en ce qu’uniforme dans ſon contour, elle n’a ni face, ni dos, ni côté déterminés, au lieu que tout cela se trouve dans la côte.

Pluſieurs plantes n’ont point de tige, d’autres n’ont qu’une tige nue & ſans feuilles qui pour cela change de nom. V. Hampe.

La tige ſe ramifie en branches des différentes manieres.

TOQUE. Figure de bonnet cylindrique avec une marge relevée en maniere de chapeau. Le fruit du Paliurus à la forme d’une Toque.

TRACER. Courir horiſontalement entre deux terres ; comme fait le chiendent. Ainsi le mot Tracer ne convient qu’aux racines. Quand on dit donc que le Fraiſier trace, on dit mal, il rampe, & c’eſt autre chose.

TRACHÉES DES PLANTES. Sont, ſelon Malpighi, certains vaiſſeaux formés par les contours ſpiraux d’une lame mince, plate & aſſez large, qui, ſe roulant & contournant ainſi en tire-bourre, forme un tuyau étranglé & comme diviſé en ſa longueur en pluſieurs cellules, &c.

TRAINASSE ou TRAINÉE. Longs filets qui dans certaines plantes rampent ſur la terre, & qui d’eſpace en eſpace ont des articulations par leſquelles elles jettent en terre des radicales qui produiſent de nouvelles plantes.

TUNIQUES. Ce ſont les peaux ou enveloppes concentriques des Oignons.

VÉGÉTAL. Corps organiſé doué de vie & privé de ſentiment.

On ne me pasſſera pas cette définition, je le ſais. On veut que les minéraux vivent, que les végétaux ſentent, & que la matiere même informe ſoit douée de ſentiment. Quoi qu’il en ſoit de cette nouvelle phyſique, jamais je n’ai pu, je ne pourrai jamais parler d’après les idées d’autrui, quand ces idées ne ſont pas les miennes. J’ai souvent vu mort un arbre que je voyois auparavant plein de vie, mais la mort d’une pierre eſt une idée qui ne ſauroit m’entrer dans l’eſprit. Je vois un ſentiment exquis dans mon chien, mais je n’en apperçois aucun dans un Chou. Les paradoxes de Jean-Jacques ſont fort célebres. J’oſe demander s’il en avança jamais d’auſſi fou que celui que j’aurois à combattre ſi l’entrois ici dans cette discuſſion, & qui pourtant ne choque personne. Mais je m’arrête & rentre dans mon ſujet.

Puiſque les végétaux naiſſent & vivent, ils se détruiſent & meurent, c’est l’irrévocable loi à laquelle tout corps eſt ſoumis ; par conſéquent ils ſe reproduiſent : mais comment ſe fait cette reproduction ? En tout ce qui eſt ſoumis à nos ſens dans le regne végétal, nous la voyons ſe faire par la voie de la fructification, & l’on peut préſumer que cette loi de la nature eſt l’également suivie dans les parties du même regne, dont l’organisation échappe à nos yeux. Je ne vois ni fleurs ni fruits dans les Byſſus, dans les Conſerva, dans les Truffes ; mais je vois ces végétaux ſe perpétuer, & l’analogie sur laquelle je me fonde pour leur attribuer les mêmes moyens qu’aux autres de tendre à la même fin ; cette analogie, dis-je, me paroit ſi ſure, que je ne puis lui refuſer mon aſſentiment.

Il eſt vrai que la plupart des plantes ont d’autres manieres de ſe reproduire, comme par caïeux, par boutures, par drageons enracinés. Mais ces moyens ſont bien plutôt des ſupplémens que des principes d’inſtitution ; ils ne ſont point communs à toutes, il n’y a que la fructification qui le ſoit & qui ne ſouffrant aucune exception dans celle qui nous ſont bien connues, n’en laiſſe point ſuppoſer dans les autres ſubſtances végétales qui le ſont moins.

VELU. Surface tapiſſée de poils.

VERTICILLÉ. Attache circulaire ſur le même plan & en nombre de plus de deux autour d’un axe commun.

VIVACE. Qui vit pluſieurs années ; les arbres, les arbriſſeaux, les ſous-arbriſſeaux ſont tous vivaces. Plusieurs herbes même le ſont, mais seulement par leurs racines. Ainſi le Chevre-feuille & le Houblon, tous deux vivaces, le ſont différemment. Le premier conſerve pendant l’hiver ſes tiges, en sorte qu’elles bourgeonnent & fleuriſſent le printems ſuivant mais le Houblon perd les ſiennes à la fin de chaque automne & recommence toujours chaque année à en pouſſer de ſon pied de nouvelles.

Les plantes tranſportées hors de leur climat ſont ſujettes à varier ſur cet article. Plusieurs plantes vivaces dans les pays chauds deviennent parmi nous annuelles, & ce n’eſt pas la ſeule altération qu’elles ſubiſſent dans nos jardins.

De ſorte que la Botanique exotique étudiée en Europe, donne ſouvent de bien fauſſes obſervations.

VRILLES, ou mains. Eſpece de filets qui terminent les branches dans certaines plantes, & leur fourniſſent les moyens de s’attacher à d’autres corps. Les Vrilles ſont ſimples ou rameuſes ; elles prennent, étant libres, toutes fortes de directions, & lorſqu’elles s’accrochent à un corps etranger, elles l’embraſſent en ſpirale.

VULGAIRE. On déſigne ordinairement ainſi l’ainsi l’eſpece principale de chaque genre la plus anciennement connue dont il a tiré ſon nom, & qu’on regardoit d’abord comme une eſpece unique.

URNE. Boëte ou capſule remplie de pouſſiere que portent la plupart des mouſſes en fleur. La conſtruction la plus commune de ces Urnes eſt d’être élevées au-deſſus de la plante par un pédicule plus ou moins long, de porter à leur ſommet une eſpece de coëffe ou de capuchon pointu qui les couvre, adhérent d’abord à l’Urne, mais qui s’en détache enſuite & tombe lorsqu’elle eſt prête à s’ouvrir ; de s’ouvrir enſuite aux tiers de leur hauteur, comme une boëte à ſavonnette, par un couvercle qui s’en détache & tombe à ſon tour après la chûte de la coëffe ; d’être doublement ciliée autour de ſa jointure, afin que l’humidité ne puisse pénétrer dans l’intérieur de l’Urne tant qu’elle eſt ouverte ; enfin de pencher & ſe courber en en-bas aux approches de la maturité pour verſer à terre la pouſſiere qu’elle contient.

L’opinion générale des Botaniſtes sur cet article, est que cette Urne avec ſon pédicule est une étamine dont le pédicule eſt le filet, dont l’Urne eſt l’anthère, & dont la poudre qu’elle contient eſt qu’elle verſe eſt la pouſſiere fécondante qui va fertiliſer la fleur femelle ; en conſéquence de ce ſyſtême on donne communément le nom d’anthère à la capſule dont nous parlons. Cependant comme la fructification des mouſſes n’eſt pas juſqu’ici parfaitement connue, & qu’il n’eſt pas d’une certitude invincible que l’anthère dont nous parlons ſoit véritablement une anthère, je crois qu’en attendant une plus grande évidence, ſans ſe preſſer d’adopter un nom ſi déciſif que de plus grandes lumieres pourroient forcer enſuite d’abandonner, il vaut mieux conſerver celui d’Urne donne par Vaillant, & qui, quelque ſyſtême qu’on adopte, peut ſubſister ſans inconvénient.

UTRICULES. Sortes de petites outres percées par les deux bouts, & communiquant ſucceſſivement de l’une à l’autre par leurs ouvertures comme les aludels d’un alambic. Ces vaiſſeaux ſont ordinairement pleins de ſeve. Ils occupent les eſpaces ou mailles ouvertes qui ſe trouvent entre les fibres longitudinales & le bois.

  1. Cet article Corolle, auquel l’Auteur renvoie ici, ne s’eſt point trouve fait.
  2. Voyez la note précédente.
  3. Cet article ne paroît pas achevé non plus que beaucoup d’autres, quoiqu’on ait raſſemblé, dans les trois paragraphes ci-deſſus qui compoſent celui-ci, trois morceaux de l’Auteur tous ſur autant de chiffons.