Fabre dEnvieu - Noms locaux tudesques/Chapitre 3

E. Thorin ; Édouard Privat (p. 128-161).

CHAPITRE III

NOMS TIRÉS DE LA FLORE OU DU RÈGNE VÉGÉTAL (die Pflanzenwelt)
OU NOMS AYANT TRAIT AUX CONDITIONS, À LA CULTURE DU SOL (Beschaffenheit und Cultur des Bodens), AUX PRODUITS DU SOL (Bodenerzeugnisse).


Diverses contrées ont été, en effet, caractérisées par les produits du sol (die Erzeugnisse des Bodens). De nombreux noms géographiques rappellent en effet l’existence d’anciennes forêts.

Forêts et arbres (Wald und Baum ; — Gebüsch). — Les forêts, les arbres isolés (Wald und einzelne Bäume) et les essences particulières des forêts, occupent le premier rang dans les productions de ce genre. On désigne les forêts par les mots Wald, Holz, Busch, Horst, hart, Hag, Loh, Schatten, etc.

Wald, forêt, bois (anglo-sax. vold, angl. wood ; holl. woud ; dan. et suéd. wed ; en celt. gault, bois, v. fr. gault et gaut[1] ; en sanscrit Oudyana [parc], nom dont le radical se retrouve dans le mot orang-outang [homme des bois], en malais) :

Waldau (prairie de la forêt), Waldeck (coin du bois), Waldenburg (Burg ou château de la forêt), Waldenfels (rocher), Waldhausen (à la maison du bois), Waldheim, Waldkirch ; — Waldshut (la garde [die Hut], le chapeau [der Hut], c’est-à-dire le lieu couvert et fortifié de la forêt : weil sie des Waldes Hut ist ; et que cette ville est le lieu d’abri et de défense de la Forêt-Noire : der Schutz des Schwarzwalds). Les quatre Waldstædt (Vierwaldstätte) ou « Cantons forestiers » Statt, lieu, place), moins bien nommés Waldstädte (cités forestières : Stadt, ville), comprenant les quatre cantons primitifs : Uri, Schwytz, Unterwald[2] et Lucerne ; — der Vierwaldstättersee (le lac des Quatres-Cantons ou lac de Lucerne).

Le canton de Vaud (en all. Waad, Waadt, Waadland), jad. Waldensis comitatus, était occupé par une forêt très étendue (weil er von Waldungen den Namen führt). Le même radical se retrouve peut-être dans Vaubourg, Vaudru. Le Graisivaudan pourrait aussi se rattacher à Graswald (la forêt de l’herbage, de la pâture : Gras, herbage, verdure) ; mais ce nom est plutôt dérivé de Gratiani Vallis ; c’est de cette vallée que Titurel a pris le nom de Graswaldane (le thane ou le chef de la vallée de Gratien). Bodin croit que le nom du Valois dérive de l’allemand Wald et il pense qu’il y aurait eu beaucoup de forêts dans ce pays (Notitia Galliæ). Vaduz, jadis Valdulz (chef-lieu de la propriété de Lichtenstein), ne se rattache pas aux forêts : ce mot vient de Vallis dulcis :

Eberswald (forêt aux sangliers : Eber), Frankenwald (des Francs), Freienwalde (frei, libre ; étendu ; ouvert), Fürstenwald (Fürst, prince), Greifswald (Greif, griffon ; condor), Grindelwald (Grindel et Grendel, provinc. verrou, barre à verrouiller ; la barre, le levier de la charrue), montagne ainsi nommée parce qu’elle ferme de ce côté le pays du Hasli et en rend l’entrée difficile ; — Harzwald (forêt du Harz, voy. App. S), Hergischwald (? hergiessen, verser, répandre sur ; arroser : giessen, verser), village où l’on commence l’ascension du mont Pilate, près de Lucerne, et que l’on appelle aussi Hergottswald (forêt du Seigneur Dieu : Herr, Gott) ; — le Hochwald (hoch, haut, élevé), en Alsace !!

Lichtenwald (forêt éclaircie) ; — Mittenwald (mitten, au milieu ; mitt, qui est au milieu, moyen), Niederwald (près de Bingen et de la Germania prussifiée), Oberwald (ober, situé plus haut, supérieur), Odenwald (= der öde Wald, la forêt déserte, silencieuse, voy. plus loin), Ostwald (forêt de l’est : Ost), Rheinwald (forêt du Rhin), Schlackenwalde (? Schlacke, scorie ; — Schlag, taillis, coupe), Schönewald (schön, beau), Schwartzwald (forêt noire : schwarz, noir), Seigerwald (? Seiger, trebuchet), Sennwald (Senne, troupeau ; — P., p. 192), Sevenwald (les sept forêts, seven = sieben, sept), contrée des Pays-Bas, — Thüringerwald (forêt de Thuringe), Unterwald (p. 129).

Weald, wealt, wald, walt, wold, dans les noms géographiques de l’Angleterre désignent des localités situées auprès des bois : Waltham (jad. Weald-ham, Wealt-ham) est le nom d’une localité (ham) située auprès des bois (angl. wealds) ou parties boisées (woody parts) du comté de Kent.

À l’anglais wood (forêt) se rattachent : Woodstock (anglo-sax. u-uda, bois ; stoc, place, localité) ; Brentwood (= burnt-wood, bois brûlé ; burnt, burned, brulé ; to burn = brennen, brûler) ; — mais Brentford (ville Middlessex) est située près d’un gué (ford = Furt) sur la Brent.

Holz, bois, forêt (en plattdeutsch, holt, holl. hout) : Holzbach, Holzdorf (village du bois), Holzhausen et Holzhusen (abrév. Holzen, à la maison du bois), Holzheim (habitation du bois), Holzkirche (église), Holzkreis (Kreis, cercle), Holzzelle (cellule du bois), Holzplatz (place couverte de bois ; le chantier ; Alsace : Platz, place ; esplanade ; canton d’une forêt en coupe), Holzwihr (l’étang du bois : Weiher, étang, vivier), en Alsace ; Holzapfel (pommier silvestre ou sauvage), ville et comté de la Westphalie ; Aichholz (aich indique le chêne [Eiche] ou l’eau : ach), Bergholz (bois de la montagne), Bischholz (bois de l’évêque : Bischof), Buchholz (bois de hêtres), Eichholz (bois de chênes), Diepholz (bois profond, épais, bas : tief, holl. diep, bas, très bas ; creux ; profond ; épais), Französisch-Buchholz (bois de hêtres-français), Meerholz (= Sumpfholz : Moor, marais ; Meer, mer), Künholz (= Kienholz = Kien, bois inflammable, bois résineux ; plus part. bois de pin ou de sapin ; suéd. kinda, angl. to kindle, enflammer[3], allumer ; lat. incendere ; Stumpf dérive justement le mot Kienholz du celt. cynnen, enflammer), Schirholz (bas sax. schir, clair, pur ; schier, net, pur, propre), Vormholz (vor’m = vor dem, avant le), Westerholz (West, ouest) ;

Holte, Holten (= Holtheim), Holthausen, Holthum ; — Anhalt (? pour Anholt = ohne Holz, sans bois ; ou pour am Holz, près de la forêt), château qui était bâti sur une montagne escarpée et dénudée (voy. p. 53) ; — Houtheim (demeure du bois). En Belgique (holt, olt, hout) : Eckhout (forêt de chênes), Torhout (que l’on a interprété par Thori sylva, forêt du dieu Thor : et l’on a supposé que la forêt voisine était consacrée au dieu scandinave ; — mais ce nom peut avoir, comme le suivant, le sens de bois de la hauteur, et désigner un lieu fortifié et environné de bois), Turnhout ; celt. turn, hauteur, colline, tour ; v. tor).

Quelquefois la terminaison hold ou houd pourrait se rattacher à l’anglais to hold (all. halten, tenir) et signifier tenure, terre tenue à ferme ou en fief, métairie, propriété : ainsi, dans la Haute-Silésie Kœnigshuld (= propriété du Roi) ; Gentoud (gent, agréable ; d’un gentil), sur les bords du lac Léman.

En gothique, les Weiden (pâturage, pacage) se nommaient haldan (cfr. halten, tenir, garder), comme le grec νομή (pâturage ; distribution, partage, lot), de νέμειν (partager, distribuer ; faire paître, mettre en pâture) qui avait le sens de « posséder, tenir, avoir ; habiter ; cultiver » cfr. goth. niman ; all. nehmen, prendre, saisir ; s’approprier ; capere (tenere), captura ; præda, prædium.

La terminaison hald pourrait aussi avoir le sens de Halde (colline ; v. p. 53).

Busch (= Gehölz, Wald ; angl. bush, ital. bosco), touffe d’arbrisseaux, buisson, hallier ; bosquet, bocage ; arbrisseau isolé, arbuste, buisson). Ce radical se retrouve dans le bas latin boscus, dans le mot français bois, et dans le diminutif bosquet :

Buschweiler (hameau du bois) ; Weiherbusch (bois de l’étang, du vivier) ; — Bies-Bosch, (forêt, hallier de joncs : holl. bies = Binse, jonc), ’s Hertogenbosch (= Herzogenbusch = Silva Ducis, bois du duc, Bois-le-Duc, Herzog, duc), ville bâtie auprès d’un pavillon de chasse des ducs de Brabant.

Horst, buisson, hallier, forêt ; faisceau ; bouquet, touffe d’arbre (primit. amas, foule serrée, armée) ; nid d’un oiseau de proie (aire) — (prend la forme vurste). Ce mot se trouve dans un grand nombre de noms de l’Allemagne septentrionale, dans la Hollande, dans la Pomeranie, etc. :

Horst, Horstel (petit bois), Horsten (Heim, habitation), Blendenhorst (anglo-sax. blennen = blenden, aveugler ; Blendebaum [arbre dont le suc aveugle], agalloche), Elmenhorst (die Alm, pâturage de montagne ; et aussi, en suisse, montagne ; — forme de Alp et de Alb — montagne, pâturage de montagne), Falkenhorst (Falke, faucon), Gravenhorst ou Grauenhorst (bois du comte : Graf ; — ou Seniorum virgultum : grau, gris ; grisonnant ; ancien), Haselhorst (corylorum virgultum : Hasel, noisetier), Hohenhorst, Hohnhorst (hoch, haut), Kirchhorst (Kirche, église), Marhorst (= Sumpfhorst : Moor, marais), Oldenhorst (alt, vieux), Stafhorst, Stabhorst (hallier qui a de longues tiges : Stab, tige), Steinhorst (hallier pierreux), Windhorst (bois du vent : ein Horst, wo es sehr windig ist ; — v. F., p. 25).

Au mot Horst correspond l’anglais hurst (bosquet, touffe d’arbre, Gebüsch) : Chislehurst (bosquet des châtaigniers : the chestnut grove), Chesthurst (abondant en noisetiers), Elmhurst (bois d’ormeaux : elm, orme), Sandhurst (dans un lien sablonneux), Stonyhurst (pierreux, rocailleux).

Forst, forêt (? Camben prétend que ce mot signifie « demeure des bêtes féroces » forest adicitur quasi ferarum statio) ; dériverait plutôt de horst : Forst, Forstheim, Forstvelt (Feld, champ ; plaine), Forsteck (Ecke, coin) ; — Bettenforst (Bett, lit, gîte ; reposée [du gibier] ; terrier, repaire) ; — Sacy Forest (de Salcey, formé du lat. salicetum, bois de saules, saussaie ; salix, saule).

Hard (die), en suisse, pacage communal ; — m. h. all. hart, bois épais. Ce mot désigne des hauteurs boisées, des forêts : Spessart (la forêt des pics, et non pas des éperviers : Specht, pic, oiseau), Mannhart, etc.

Brühl, hallier marécageux, cfr. pag. 117 ; bas lat. brolium, franç. breuil, bois, lieu plein de broussailles ; petit bois, taillis, quelquefois servant de pâture ; un bois taillis placé dans un bas fonds ; jad. brugilus, v. Ducange. Ce mot a passé en Italie sous la forme broglio ; nous l’avons repris ainsi dans le composé imbroglio. Du même radical vient aussi notre verbe embrouiller ; le désordre d’un bois rempli de ronces ou d’épines, rappelle très bien la confusion d’une affaire : Brühl.

Lohe (die), flamme, chaleur ; loh, flamboyant ; Loh (der), bois ; — primitivement « flamme ; » ensuite : incendie d’une forêt ; le lieu de la forêt qui a été brûlé et qu’on a rendu apte à la culture ; hauteur boisée ; bois peu élevé, formé d’arbrisseaux (Busch, Hain) ; lat. lucus.

Loo, lo, le (hauteur boisée) est un suffixe très usité dans les noms de lieux des Pays-Bas : Ecloo (= bois de chênes sur une hauteur : ab altiusculo querceto veram sortita nominis rationem ; Eiche, chêne), Groenlo (grün, vert), Venlo (ven, holl. veen, tourbière, fagne), Waterlo (Wasser, angl. et holl. water, eau) ; Louvain, Löven pour Looven (non pas de Löwe, lion ; mais de lo [colline boisée] et de ven, tourbière)[4], Kesselloo, Westerloo, etc.

Le sens de « hauteur boisée » n’a pas été toujours conservé au mot lo et ce suffixe signifie simplement tantôt « hauteur, » et tantôt « bois[5]. »

Ainsi : 1o en roman lo signifie éminence, montagne, colline. On trouve aussi les formes lee, leew, leuw (qu’on a, à tort, confondues avec Löwe, lion). Ces formes se rattachent à l’anglo-saxon hlœw, hlaw, monceau, butte, levée de terre, colline. Dans la géographie britannique, low, lowe, loe (lo), lewe (tractus terræ paulatim ascendens) : Broadlaw (large coteau : broad = breit, large), Hunslow (canum tumulus, pour Hound’slaw), Winslow (pugnæ tumulus = anglo-sax. winn, combat, victoire ; P., p. 222 ; — ou pour Windeslow = ventosus tumulus : Wind, vent), etc. ; Lewesham (habitation du coteau), etc. En Écosse beaucoup de noms de hauteurs offrent le suffixe law, lawe.

2o Loh (en v. h. all., et les formes lohe [lon], loge, ont quelquefois le sens du lat. lucus, bois, forêt, bocage) : Bargeloh (bois situé dans la montagne, in den Bergen belegener Loh), Barkloh (pour Birkenloh, bois de bouleaux : Birke, bouleau), Wisloh (= Wiesenloh : Wiese, prairie), Kolloge (= kalter Loh : bas sax. kold = kalt, froid), Bekkeln (pour Bekloh, un bois où il y a un ruisseau : Bach).

3o Lo et loh ont ausssi la double acception de locus (lieu) et de lacus (lac) : Tessenderlo est probablement, d’après Grand-gagnage, le Taxandrialocus d’Ammien Marcellin (XVII, 8). Les formes lon, loen peuvent aussi être regardées comme des abréviations d’un datif pluriel (anc. frison, loch, datif pluriel logum ; anglo-sax. loh, lieu ; celt. llech [latebra], lle lieu ; irl. lag, legg, creux, caverne ; v. et m. h. all. luoc, luog, caverne ; lieu où l’on se tient à l’affût ; Loch, trou, cavité ; — proprement lieu où l’on couche, où l’on demeure, où l’on s’établit, où l’on campe ; celt. llehan [locare], all. legen, poser, coucher, étendre). Le bourg de Leuk ou Loiche est une des principales localités du Valais. En languedocien, on emploie la forme loc (luec, lioc), lieu : Belloc (= Beaulieu), Loc-Diou = Loc-Dieu = Lieu-de-Dieu.

4o Quelquefois lo ou loo signifie marais (voy. pag. 70 ; en cornique loe [lo], lac, marais ; irland. lough, lac ; celt. lug : Lug-dunum[6] ; Loh (das), provinc. marais, marécage ; peut-être pour Lache [mare, bourbier ; cfr. grec λάκκος, citerne ; fosse ; étang ; lat. lacus, lacuna ; franç. lac, lagune] ; trouée, clairière, laie : de lachen, inciser, faire une entaille, faire une laie ; layer ; — cfr. Leck, ouverture ; Loch, Lücke) :

East Lo, Loo ou Loe (vg. en Cornouailles : east = (Ost, est), Farrel (pour Farloh, un marais où se trouve un passage [Durchfahrt] ou un gué [Furt, endroit guéable] : fahren, aller, passer), Glandeloh ou Glandeloch (vallée des deux étangs, en irlandais).

5o Enfin, lo, loh, lohe représentent les mots loh (flamboyant) et Lohe (flamme, embrasement ; cfr. irl. logh, loch = lat. lux, lumière) : Hohenlohe (haute flamme, F., p. 178 ; ou pour Hohenloch), château situé à peu de distance de la ville d’Uffenheim.

Toutefois comme Lohe signifie aussi « jeune pousse (Laub) qui s’élève dans un taillis que l’on a émondé » ou « une forêt qui offre de jeunes pousses, » il est à croire que, dans les contrées qui ne sont pas marécageuses, la terminaison lohe offre plutôt le sens de « bois. » Il en est ainsi pour la ville de Hohenlohe (bois élevé) ; Eslohe et Eschenlohe (bois de frênes ; Esche, frêne), Buchlohe (bois de hêtres : Buche, hêtre), Tennenlohe (bois de sapins : Tanne, sapin), Buxlohe (Bux = Buchs, buis), etc.

Les suffixes el et le sont souvent employés pour loh : Nordel (Nord, nord), Bokkel (Buche, hêtre ; Bock, bouc) ; Ramesle (holl. ram, bélier ; Ramm, Rammbock, Rammler). Ln est quelquefois pour loen, lohen. Nivelles ou Nevele[7] (? holl. nieuw = neu, neuf, nouveau) ; loo : Baerle (de baer-loo = le bois nu, inculte, stérile : flam. baer, holl. bar, découvert, nu, stérile, aride ; bar, dépouillé de son enveloppe, ouvert ; pur, dépourvu, nu : barfuss, nu-pieds), hameau près de Tronchiennes.

D’après Folcuin (mort en 990), Lobach signifie umbraculi rivus (de lob-ach : Laube, lieu couvert, galerie ; cabinet de verdure, berceau ; bas-sax. löve, löving ; m. h. all. loube, leuff, bas lat. lobia, loupia, lobium, signifiaient hutte, lieu couvert ; cfr. Laub, feuillage ; angl. leaf, suéd. löf, dan. lov ; ces mots et le suffixe leben, que l’on trouve dans beaucoup de noms propres, pourraient se rattacher à une même racine qui signifiait « couvrir, » protéger ; cfr. lieben, aimer ; ce mot paraît avoir le sens primitif de protéger, couvrir : c’est ainsi que hold [jad. attaché, dévoué, fidèle ; auj. attaché, favorable, propice] et Huld [bienveillance, amitié] se rattachent à hüllen [couvrir] qui avait le sens de mettre à l’abri, protéger). Lobach peut se rattacher aussi à Loh-Bach.

Bram, Brame, Bräme, bord, bordure ; lisière boisée d’un champ, Waldrand, Waldgehege, Forstbann ; cfr. Brombeere, baie de ronce ; v. h. all. brâma, rubus, vepres, m. h. all. brame, épine ; Bram, corps long et pointu ; alène ; petit måt ; de l’anc. verb. bremen, piquer ; auquel se rattache le subst. Bremse, taon ; serre ; pinces ; tenailles : — Bram (riv.), Bramau, -bach, -felde, -first (First, sommet ; = ou pour Forst, forêt), Bramstedt ; — Brem, Breme, Bremen[8] ; — Brembach, Bremgarten (enclos du bord [de la Reuss]), ville dont on a transformé le nom en Pranggarten (prangen, briller), afin d’y trouver une étymologie qui permette de dire qu’elle est dans une belle situation.

Hag, haie ; improprement buisson[9] ; bosquet ; par extens. clôture ; lieu entouré d’une haie ; enclos (hegen ou hägen, entourer d’une haie ; clore ; = umzäunen, umfassen). Hagen a ainsi signifié agellus, prædium, domus, mansio, parce que l’on entourait les champs et les habitations de broussailles épaisses et buissonneuses (cfr. sepes, septum) ; das Gehäge, espace entouré d’une haie, enclos, parc. Quelquefois hag ou hagen désignait un bois ( c’est-à-dire l’entourage d’un bois réservé pour la chasse). La forme hac [et peut-être le celtique ac] a signifié ville [urbs] ; anglo-sax. haga = villa :

Hagenau (la forêt voisine portait le nom de Heilige Vorst (forêt sainte), à cause du grand nombre d’ermitages qui s’abritaient sous ses chênes) ; Hagenbach, Hagenbuch, Hagendorf, Hageneck, Hagenthal-le-Bas (jad. Agona Vallis ; — hagen pourrait peut-être cacher une forme de l’anc. celt. et signifier caverne), vg. du H.-R. ; — Hagen (Moselle), Les Hagnes (Seine-Inférieure) ; La Hagne (en Normandie et dans le comté de Comminges) ;

Haag = Graven Haage ou s’Gravenhage (l’enclos, le bois, la haie du comte : holl. graaf = Graf, comte ; haag, haie), ville de Hollande nommée aussi La Haye, Haga Comitis[10] ; — Copenhagen (l’enclos des marchands ; voy. p. 120), Greifenhagen (Greif, griffon ; condor), Kronhagen (Krone, couronne ; ou de Krahn, grue, cfr. franç. crone, celt. garan), Stadthagen, etc.

Hain (contract. de hagan), bois fermé par une clôture ; bocage, bosquet ; parc : — Hain, Haina, Hainspach (Bach ; — Ziegenhain (Ziege, chèvre), etc.

Le même radical a peut-être donné aux Anglais le suffixe hayne, que l’on trouve dans quelques-uns de leurs noms de lieux (Woodhayne = enclos du bois) ; et peut-être aussi la forme haw qui signifie un enclos, un champ. Dans Chaucer, haw signifie vallée.

Hagen a donné aussi han, comme dans Hanau, ville qui se nommait encore Hagenau en 1277 ; — Græfenhan (haie du comte).

En écossais hain et hane signifient « clore, défendre par une haie ; » et, dans ce même idiome, hain a le sens de port (Hafen). N’aurions-nous pas là une ancienne forme celtique ? Quoi qu’il en soit, le mot han nous paraît avoir donné le suffixe latin anus, et les formes an et en que l’on retrouve, en France, dans un grand nombre de noms de lieux ; formes qui, du reste, peuvent aussi provenir de la racine qui a donné Heim, ainsi que nous l’indiquons plus loin.

Hamm qui désigne un pays boisé (cfr. v. h. all. hama, couverture, ombrage ; — Heim) est peut-être une forme de Hain :

Hamm (dans le comté de la Mark) ; Ham (en France) ; Hambourg (le Burg de la forêt) ; — on a voulu rattacher le nom de cette ville à Jupiter Ammon ; à Ham (Cham), fils de Noé ; — à ἄμμος sable ; à amnis, fleuve ; aux Chamaves ; à Hemmen [empêchement] ; à Hamme, angl. ham, jambon ; à Hamen (truble ; — v. all. haman, prendre ; lat. hamus ; cfr. hemmen, arrêter, retenir).

Leuben et love ont aussi le sens de forêt, bois (Laube, espace couvert ; cabinet de verdure, bas sax. löve, m. h. all. loube ; bas lat. lobia, loupia ; Laub, feuillage ; angl. leaf, suéd. löf, dan. løv, m. h. all. loup). La forêt vierge formait comme un immense plafond de verdure (voy. p. 137).

Garten (primit. haie, clôture ; enclos), jardin (irl. gartan, petit jardin ; garry, jardin ; gort, gurt, gart, lieu cultivé, labouré, essarté, champ ; cfr. latin hortus) : Morgarten (l’enclos du marais : Moor).

Park, parc  ; cfr. bergen, Burg, Pferch (celt. parwg, enclos, champ clôturé ; irl. pairc, champ) : Parkmore (grand champ) ; Phœnix Park ne signifie pas « le parc du Phénix. » Les Anglais ont formé ce dernier mot de l’appellation irlandaise : Fionn-uisg, que l’on prononce finisk, et qui signifie belle eau, eau pure, limpide, claire. Ainsi Phœnix Parc signifie « Parc où il y a une belle source. »

Rain et Rein (bas sax. reen, suéd. ren), bande de terre non labourée qui marque la séparation de deux champs (abgrenzender Landstrich ; raie, dėrayure ; lisière [d’une forêt] ; gazon ; pacage, de hrinangrenzen, délimiter, séparer par des limites ; cfr. κρίνειν ; lat. cernere ; Rand, bordure) : Rain, Raindorf, Rainrod, Rein (Bavière et Steyermarck ou Styrie), Reinhausen, Reinheim ; — Hohenrain.

Sondern, séparer, sonder (jad. séparé ; prép. sans) et la forme sunder, désignent des terrains séparés, des portions d’une forêt qui ont été détachées, isolées (en Westphalie, ce radical signifie ein abgesondertes, aus der Markengenossenschaft ausgeschiedenes Gehölze). En Angleterre la ville de Sunderland (= terre séparée : sundered or separated land ; — terre privilégiée ; freehold land) a dû son nom à une séparation de ce genre : Sondheim, Sondershausen (peut-être pour Sandershausen ; Sander pour Alexander), Sondersitz ; — Sontheim — Sunderen, Sundermühlen, Sundern, Sunderhausen, Sundheim ; — Suntheim, Sunthofen.

Strang, corde. Ce mot, employé dans quelques noms de lieux, désigne une bande, une portion de terre étroite et allongée (ein schmales Stück Wald). La même signification se retrouve dans les noms de lieux : Strick (corde), am Strick, Strickenfeld, Strickgraben, Strickland.

Schacht, étendue de bois, touffe ; carré d’arbres (cfr. schichten, partager, séparer). En bavarois, der Schachen, Schacht signifient « portion de bois » ; en Suisse, on nomme Schachen des bas-fonds situés près de l’eau (v. h. all. scahho, partie avancée d’une chaîne de montagnes ; cap) : Schachen, Schachhof ; Schachten, Schachtenbeck, Schachtenburg ; —Schackstädt, Schackenthal, Scheckenhoffen ; — Schæchingen.

Stock, bâton, canne ; souche, billot, tronc, étage [d’une maison] ; amas ; bloc. Ce mot a désigné un endroit défriché où il reste encore des troncs d’arbres. Dans ce cas, Stock serait pour Stockach, Stöckich, d. i. Platz mit Wurzelstöcken von gefällten Bäumen. Ainsi stock pourrait désigner un taillis[11], un lieu où se trouvent des Wurzelstöcke (des tiges ou des troncs d’arbres avec leurs racines)[12]. Nous croyons toutefois que ce mot indiquait une localité défrichée (avec le sens de Reute, Rodung, Lichtung), ou une localité entourée de stocks. Ensuite ce mot a eu le sens de locus, lieu, endroit, place (anglo-sax. stoc, place) :

Stockach, Stockau, Stockenfeld, Stockenroth (Reute), Stockhausen, Stockheim, Stocksberg, Stockdorf, Stocksee, Stockstadt, Stockeim (Heim) ;

Stockholm (l’île des pilotis : Holm, suéd. holm, angl. holme, île, particulièrement île formée par les bras d’une rivière), ville dont les maisons sont bâties sur pilotis ;

Birkenstock, Birkenstamm (Birke, bouleau), Eibenstock (Eibe, if), Rostock (mal trad. par Rhodopolis, ville des roses : Rose), ville appelée jadis Rotzstock (? bâton rouge : roth), Wittstock, (voy. v. h. all. witu, bois).

Stock, stoke forment des terminaisons fréquentes dans les noms de villes ou de villages de l’Angleterre : Bishop’s Stoke (de l’évêque), Woodstock (sylvæ locus) ; Stockton, Stockwood, etc. En irlandais stuaic (que les Anglais prononcent stook) signifie un sommet pointu ; cfr. bas all. Stake, perche.

Lass, Lassbaum, arbre de réserve ; de laie (lassen, laisser) : Lassberg, Lassfelde.

Lund (suéd. et dan.), bois, bosquet (norois lundr) : Lund (ville de Suède) ; Lunden ; Lundenburg (Moravie), Lundy (île anglaise) ; — Christianlund, Frederickslund, etc.

Witu signifiait « bois » en v. h. all. (en anglo-sax. vudu ; en gallois gwydd) : Wittau (le pré du bois), Wittenberg (ad ligna), Wittenhorst, Wittmund, Witstock, Witham (Angleterre) = l’habitation du bois.

Quelquefois, witu s’est transformé en wied, qui a conservé le sens de bois dans le mot Wiedehopf, huppe (des bois) : Wied, Neuwied, etc. (cfr. Weide, pacage).

Le radical vitu a été conservé aussi dans le nom celtique Vitodurum (auj. Winterthur).

À la nomenclature forestière appartiennent aussi les noms formés de Schatten (ombre, ombrage ; — bavarois schatt ; angl. shade, shadow, ombre), mot qui indique une habitation à l’ombre d’un bois ou auprès de quelques arbres : Schattenhof, Schattbusch, Schattau.

À la même racine se rattache le nom de l’île de Skye (irland. skiach, nuageux ; cfr. grec σκιά, ombre ; lieu ombragé ; σκότος, obscurité ; suéd. sky, se préserver, se garder [propr. se couvrir, se mettre à l’abri] ; island. skye, nuage), et les noms de lieux formés du mot shaw (en Angleterre). Ce mot signifie bois, bosquet (en écossais et en anglais) ; cfr. le dan. skov, qui a la même signification. Les nuages et les forêts sont des objets qui couvrent. La forêt offrait un abri.

Pour ce qui concerne les noms celtiques des forêts de la Germanie, voy. Appendice S.


NOMS QUI INDIQUENT LES ESSENCES DES ARBRES
(besondere Arten von Bäumen) PROPRES A CERTAINES LOCALITÉS.

Ce n’est pas seulement la présence des forêts qui a fourni des dénominations locales. On a trouvé, dans les essences même des produits du terrain, des propriétés qui le caractérisaient. Les noms des différentes espèces d’arbres (Bäume), le chêne (Eiche), le hêtre (Buche), le tilleul, le pommier, le poirier, le prunier, le cerisier, la vigne, le houx, le jonc, etc., ont donné naissance à un grand nombre de noms de lieux. Quelquefois, des arbres isolés (einzelne Bäume) ont suffi pour former un nom topographique ; quelquefois aussi le nom d’une espèce d’arbres indique une forêt toute entière.

Le nom de « l’arbre » lui-même, considéré en général et comme isolé, se retrouve dans quelques noms.

Baum, arbre : — Baumbach (ruisseau planté d’arbres), Baumgarten (clos planté d’arbres fruitiers, verger, jardin fruitier)[13], Baumgartenberg, Baumholder (Holder = Holunder, sureau) — Baumen-Erlenbach ; Baumkirch (église des arbres).

Quelquefois on trouve Bohm, en souabe bom : Bombeck, Bomsdorf, Bohmstorf ; Bônhorst (bôn = bôm = Baum) ; Bierbaum (v. h. all. pir = Birne, poire, poirier ; Birnbaum, poirier), Birnbaum, Nüssbaum (noyer), Weichselbaum (pour Weichselkirschbaum, griottier, cerisier ; Weichsel [Kirsche], griotte), Kerschbaum (pour Kirsche, cerise ; cerisier) :

Ter, en vieux saxon et les formes tare, tar, tre (angl. tree) signifiaient arbre (cfr. celt. dero ; irl. dar, der, dara, dair, chêne ; daire, doire, derry, der, bois de chênes ; grec δρῦς, chêne ; arbre). Ce mot s’est conservé dans les noms de lieux suivants : Helder (?), Helderbach. Helder est une forme de Holder = Holunder = Hohlunder (sureau ; c’est-à-dire « bois creux » hohl, creux) ; angl. elder, sureau.

Certaines localités sont distinguées d’autres localités de même nom, par un nom d’arbre. Ainsi : Neustadt an der Linde, Neustadt an der Heide.

Buche, Büche, hêtre. Ce mot indique quelquefois, comme du reste en composition, une forêt de hêtres, et forme une abréviation de Buchenwald, Buchholz ; comme Tann est pour Tannenwald. De Buche dérive le subst. Buch (livre), qui fut ainsi nommé parce qu’on traçait les caractères ou les lettres sur l’écorce ou sur le liber de cet arbre : — Buch, Buchau, Buchboden, Buche, Buchen, Büchenberg, Buchenstein, Bücherthal, Buchheim, Buchhof, Buchholt et Buchholz, Buchhorst ; — Bochum et Bokum ; Bokholt (bois de hêtres) ; — Bülach, ville suisse (de buoh-lach : buoh, buoch, puoch sont des formes de Buche ; lach est une forme de loh, forêt) ; — le château de Bouchout (prononcez Boukoute), en Brabant ;

Aalbuch (près de l’Aal, rivière des Alpes de Souabe), Osterbuch (le bois de hêtres situé à l’est : der Buchwald gegen Osten), Sillenbuch (? le bois de hêtres de Sigilo, dimin. de Sigbert, Sigfrid, etc.), Waldenbuch (le hêtre de Waldo ou Walto, dimin. de Walther, etc).

Buckingham (anglo-sax. bucen, becen, boccen et buccen = angl. beechen, de hêtre ; beech, hêtre) doit son nom à une forêt de hêtres et, selon d’autres, aux daims et aux chevreuils (angl. buck, daim ; chevreuil) qui abondaient dans cette forêt. Selon d’autres étymologistes, Buckingham aurait le sens de Boch land (= charter-land) par opposition à la terre qui relevait d’un fief et était nommée copyhold. Ainsi Boch-ing (aurait signifié « prairie possédée d’après une charte) et se distinguant d’un copyhold que l’on appelait aussi Folk-land (mot que l’on trouve dans Folkingham). Mais le sens de l’angl. book (= Buch, livre) ne paraît pas se retrouver dans Buckland, Buckenham, Bockingham.

Eiche, chêne (anglo-sax. âc, aec, angl. oak, suéd. ek, dan. eg, holl. aik, eike, eck, flam. ecke). Ce mot prend aussi les formes Eich, Aich, aichen :

Eich, Eichau, Eichberg, Eiche, Eichen, Eichenbühl, Eichenhausen, Eichenhorn, Eichenzell, Eichheim, Eichhof, Eichmühl, Eichrod, Eichsfeld, Eichstædt (Quercipolis), Eichstedt, Eichwerder, etc. ; — Aich, Aiche, Aichberg, Aichstett, etc. On a dit que Eichsfeld n’a pas le sens de Eichenfeld [champ des chênes], mais celui de champ d’Eiko ou d’Agico (Feld eines Eiko, — P., p. 73) ; il en serait de même d’Eichstädt. Eichheim désigne à la fois un lieu situé auprès des chênes (Ort, an dem Eichen sind) et un terroir de chênes (Ort der Eichen) ; Lichteneichen (aux chênes éclaircis, aux chênes de la clairière : Licht), Siebeneichen (aux sept chênes : sieben, sept) ; — Sevenoke (sept chênes) en Angleterre, et Oakham (l’habitation du chêne).

Quelquefois, le mot eck est pour Ecke (coin ; lieu resserré) : Lübeck, Lobeck, Arneck.

Esche (jad. ask et Aesche, angl. ash), frêne (en celt. aesc, esk, chêne)[14]. Dans certains cas, sous cette orthographe se cache le nom d’une espèce de truite appelée Aesche, ombre (v. plus loin) :

Esch, Eschach, Eschau (prairie du frêne), Eschbach, Eschdorf, Esche, Eschen, Eschenbach, Eschenberg, Eschenfelden, Eschenthal, Escherde (Erde, terre), Eschwege ;

Eschveiler (hameau du frêne) ; — Asci-burgium (Tacite), nom que l’on a traduit par Eschenberg (le château des frênes)[15], Aschheim, Aschbach, Aschenbach, Asbach et Aspach (rivière des frênes).

Espe, tremble (suéd. asp, peuplier ; tremble). D’après Grimm, Esche et Espe n’étaient, à l’origine, que deux formes (ask et asp) d’une même racine, lesquelles, plus tard, ont servi à désigner des espèces voisines. Il y a beaucoup de noms terminés en aspe. Mais ce mot ayant, comme esch, signifié aussi un champ cultivé, nous indiquerons plus loin quelques noms géographiques qui se rattachent à l’une ou à l’autre de ces significations.

Tanne, sapin. Dans la toponomastique, ce mot indique tantôt un arbre isolé et tantôt une forêt de sapins (Tannenwald) ; en v. h. all. der Tan = Wald (forêt) :

Tann (en Bavière, en Vogtland), Tannenbach, Tannenberg, Tannenburg, Tannenhausen ; — Thann, ville du H.-R., qui doit son nom à une forêt de sapins où l’on avait élevé une chapelle en l’honneur de saint Thiedbaud (voy. P., p. 66) ; — Thannenkirch est une corruption de Sanct-Annenkirch (= église de sainte Anne)[16].

Fichte, pin : — Fichtberg, Fichtwerder, Fichtelberg, Fichtelsee.

Mantel (die), pin (jad. mandal) : Mantel, Mandelau, Mandelbeck (le ruisseau des pins), Mandelholz, Mandelkirchen (à l’église des pins), Mandelsee, Mandelsloh.

Kien, bois de pin ou de sapin ; bois inflammable (suéd. hinda, allumer, lat. in-cend-ere) : Kienbaum (pin), Kienberg. (v. p. 131).

Föhre, Fohre (provinc. forch, fuhr ; v. h. all. foraha, pinus sylvestris), pin : Forbach (le ruisseau des pins ; des truites : Fohre), Fohra (aha, ach, rivière), Föhrenbach ; — Forchdorf, Forchensee, Forchheim (— ? Forke, fourche).

Linde, tilleul, mot qui paraît dériver d’un adjectif qui signifie la douceur et la mollesse : lind, linde, poét. doux, tendre (lat. lenis) gelinde, doux (au toucher) ; lisse, souple, flexible, tendre. Le lilleul est, en Allemagne, l’arbre de l’amitié, parce que sa feuille a la forme d’un cœur : cette propriété et la force de son parfum lui valurent l’honneur de devenir un emblème de l’amour. En grec, cet arbre était nommé φιλύρα, du verbe φιλέω, j’aime). Les Grecs l’avaient consacré à Aphrodite et les Slaves à Lada, qui était leur Vénus. Les anciens peuples germano-tudesques plantaient des tilleuls sur les places (Marktplatz), sur les gazons réservés pour la danse (Tanzrasen), dans les cimetières (Kirchhof). Les tilleuls ornaient les avenues des forteresses (Burgen), des cloîtres (Klöster), et des châteaux (Schlösser) :

Lind, Lindach (fertile en tilleuls), Lindau[17], Linden, Lindenau, Lindenbronn (Brunn, Born, source), Lindenbusch, Lindenfels, Lindenhorst, Lindenkreuz, Lindow, Lindstedt ; — Lindorf, Linepe (auj. Lenepe) ; — Lintach, Lintelohe ; — Linz (en Autriche se nommait Lentia, du temps des Romains), Linzburg, Linzgau ; — Limbach, Limberg, Limburg[18] ; — Lindisfarn (en Angleterre) indique un lieu qui offre des tilleuls (locus tiliis ferax) et des fougères (Farn, angl. fearn, fougère) ;

Hohenlinden doit son nom à des tilleuls très hauts ou placés sur une élévation. La promenade la plus fréquentée de Berlin se nomme Unter den Linden (sous les tilleuls).

La même racine paraît se trouver aussi dans les noms suivants : La Linde (Dordogne), Le Lindois (Charente), Lindebeuf (Seine-Inférieure), Limbœuf (Eure), jadis Lindebue ; Lindelade (Flandre occidentale : de Lade, charpente ; Laden, boutique, magasin).

Quelquefois, lind se rapporte au mot vieux haut all. lint (anglo-sax. lid, v. norr. linn), auj. Lindwurm (de lind, flexible ; Wurm, ver), reptile, serpent ; dragon. Ce monstre était nommé « serpent ou dragon du tilleul, » parce que Siegfried l’avait, disait-on, tué sous cet arbre.

Limburg (jadis Lintburg, Lindpurg), offrirait un nom qui a été traduit par Drachenburg (le château du dragon : Drache). Mais c’est à tort, ainsi que nous l’avons vu, que l’on a donné à Lindau, la « Venise de la Souabe, » le sens de (Schlangenau, Schlange, serpent).

Le tilleul est nommé, en armoricain, til, en irlandais teile, mots qui désignent une substance souple avec laquelle on fait des cordes et des nattes, l’aubier du tilleul. Nous expliquerions par ce radical le nom de Dillingen (champ des tilleuls). Mais ce nom peut se rallacher au v. h. all. tillen (détruire) et signifier un lieu défriché. On peut aussi dériver Dillingen de Dill, Dille, aneth fétide.

Erle, aune. Ce mot sert de préfixe à plusieurs noms de lieux. Erlach (= Erlengebüsch ; — ou abondant en aunes), Erlangen, Erlau (pré des aunes), Erlbach, Erlebach, Erlesdorf, Erlingen. — Dans les Pays-Bas : Harlem (pour haerl-hem, l’habitation des aunes), Harlingen, Herlaar, Harlebecke (ruisseau des aunes[19].

Le mot Erle a pour synonymes Eller et Else. Remarquons toutefois que Els et Else signifient aussi alisier, sorbier, cornier ; et alose, poisson :

Ellerbeck, Ellerburg, Ellersbach, Ellershoffen, Ellersleben, Ellerstadt ;

Els, Elsdorf, Else (rivière), Elsgau, Elsholz, Elzteich (Teich, étang, vivier).

Birke, bouleau (angl. birch, holl. berke ; cambrien biarkan) : Birkbaum, Birckenau, Birkenberg, Birkenfeld, Berkenfels, Birkenholz (bois de bouleaux), Birkenwerder (îlot des bouleaux), etc.[20].

Ulme (ulmus), orme ; Ulm (dans le moyen-âge Hulma), ville dont le nom, d’après quelques géographes, est dérivé des ormes (von Ulmen). Quelques autres croient que Ulm a une origine romaine et confondent cette localité avec Alcimœnium. Il en est qui expliquent ce nom en le rapprochant de trois lettres indiquant que le quartier-général de la 5e légion romaine (V. L. M. = ULM) était en cet endroit ; — Ulmbach, Ulmen, Ulmerfeld.

Ilme, Ilm, Elme (= Ulme), orme : Ilm, Ilme (rivière), Ilmenau, Ilmengrund, Ilmen, Ilmerssee, Ilmersdorf, Ilmstadt ; — Elm (forêt), Elmeloh, Elmen, Elmenau, Elmendorf, Elmenhorst, Elmershausen, Elmlohe, Elmshorn. Wilmendorf ou Wilmersdorf ne proviennent pas du nom propre individuel Wilhelm, que l’on retrouve dans quelques localités nommées Wilmsdorf, — mais du mot Ilme, précédé d’une forte aspiration ; — Willmenroth, Willmersbach.

Hülse, houx (flam. hulst) : Hülseburg, Hülsebusch ; — Hülst, v. de la Flandre zélandaise, et Bauersch. in Preussen, Rgbz. Düsseldorf.

Buchs, Buchsbaum, buis (lat. buxus). Le buis aurait été jadis très commun en France, si on en juge par la multiplicité des noms de Bussy, Bussières, Boissières, Bossières, Boissy, Boissieu, Buxeuil, Bussiacum, Buxeriæ, Buxetum, Beuzek, etc. Mais la plupart de ces noms se rapportent à bois (boscus, ou breuil), plutôt qu’à buis.

Weide, saule ; et Weiden, pâturage, pacage[21] ; Wiede provinc. pour Weide, désignent aussi un bois marécageux ; — d’où le diminutif wedel (qui n’a rien à voir avec Wedel, queue ; balai ; aspersoir) : Weiden, Weidenau, Weidenbach, Weidenberg, Weidenhain ; — Wied, Wiedau, Wiedbach, Wieden, Wiedenbrück (pont du saule, du pacage ; du marais), Wiedenhausen ; — Neuwied (ville située au bord du Rhin, non loin de la rivière Wied) ; Weidelbach (de Weide, saule ; — pour Weidenbach), Salzwedel (le marais du sel), ville située dans un fonds marécageux.

Felbe, Falbe (provinc.) = Weide, saule : Felben (ad salices), Falbenthal.

Apfel, angl. apple, pomme ; Apfelbaum, pommier (en celt. affal, cambr. apal, irland. aval, pommier : Abalon) :

Apfelberg, Apfelstedt ; — Aplerbeck (ruisseau des pommes), Appeldorn (Dorn, épine ; arbre épineux), Appelhagen (haie de pommiers) ; — Apfeltrang, Apfeltrangen (du celt. affaltra = bois de pommiers : affal, pommier, tra = dero = bois ; angl. tree, arbre ; la finale est angen = wangen, flacher Hügel ; voy. wang), localité du canton de Thurgovie. Du même radical dérivent les noms de Affoltern (porté par deux localités du canton de Zurich) et d’Afforterscheuer (Scheuer, grange), Apfaltern (id.) ; Apple (en Suisse) ; — en Angleterre, Appledore, Apuldre (localités qui dérivent du celtique ou des formes anglo-saxonnes apulder, apuldur, apruldre, æpuldre, æppel-treow, apple-treow, angl. apple-tree, pommier, littér. arbre à pommes), Appleby (offre le danois by, ville ; et une contract. de l’ancien nom Aballaba, que cette localité portait sous les Romains : irland. abhal, pommier ; verger ; abh, rivière : l’eau du pommier), Appleton, Applegart ; Appledram (pour Appuldre-ham, l’habitation du pommier).

Birn, Birne, poire, poirier : Birnbach, Birnbaum (forêt), Birnbaumerwald, Birnfeld[22] ; — Dornbirn (pommier épineux, arbre épineux).

Krieche, crecque, prunelle hâtive (breton gregonek) : Kriechbaum ; Krichingen ; Créquy, localité qui doit son nom au créquier, arbuste sauvage et épineux (m. h. all. krise = Krieche ; cfr. lat. cerasus, Kirsche.

Schlehe, prune sauvage : Schlebusch, Schlechdorf, Schlechestein ; — Schleswig (? du wende ssliwa, prunier). Mais cette localité, appelée jadis Sliaswicus, Sliesthorp (bourg de la Slie), tire son nom de sa situation près de la rivière Schlei. Le nom de cette rivière ne dérive ni de Schleie (tanche, poisson), ni de Schlauch (gouffre ; outre), mais plutôt du celtique [irland.] slighe, slee, chemin, passage : on sait que les rivières sont des chemins qui marchent.

Kirsche, cerise ; cerisier ; Cerisemont ou Kirschberg (Meurthe), Kirsch, Kirschbaum, Kirschgart, Kirschholz, Kirschrod (Reut), Kirschschlagen (Schlag, taillis ; coupe), qu’il ne faut pas confondre avec Kirchschlagen (taillis de l’église).

Hasel, noisetier (angl. hasle, hazel, dan. hassel) : Hasel, Haselau, Haselbach, Haselberg, Haseldorf ; — Haslach, Haslau, Haslbach ; — Hassel, Hasselbach, Hasselfelde, Hasselhof, Hasselt ; — en Suisse, la vallée de Hasli.

Dorn, piquant ; épine ; arbre ou arbuste épineux : Dornach (terroir aux épines), Dornberg, Dornbeuren et Dornbiern (buron, habitation des arbres épineux), Dornburg, Dorndorf, Dornhan et Dornheim, Dornholzhausen, Dornick (= dornig, épineux, hérissé d’épines), Dornlach (Lachbaum, arbre de lisière ; arbre incisé : lachen, inciser, faire une entaille ; — ou de Lache, mare, bourbier), Dornmühl (moulin), Dornstatt, Oberschlehdorn ; — Thorne.

Lorch (corruption de Laureacum : lat. laurus, laurier ; ach, champ, terroir), ville de Bavière, ancienne abbaye.

Lilie, lis : Lilienfeld, Lilienstein, Lilienthal.

Rose, rose ; rosier : Rosenau, Rosenbach, Rosenfeld, Rosengarten, Rosenhagen, Rosenheim, Rosenhof, Rosenthal, Rosenwinkel[23].

Kork, liège : Kork, localité du duché de Bade.

Rohr, roseau : Rohr (pour Rorach ou Rohricht, terroir des roseaux, — wo Schilfrohr wächst), Rohracker (Acker, champ), Rohrau (Au), Rohrbach, petite ville du B.-R. (nom de plusieurs autres localités), Rohrberg, Rohrbruch (Bruch, marais), Rohrdorf, Rohrsheim, Rohrwiller (vg. du B.-R.).

Saar, Sahr, Sahrbache (die), Sarbake, Sarrbaum, Saarbaum, nom du Pappelweide (= saule-peuplier, dans la haute Allemagne et en Suisse ; v. h. all. sahar, herbe des marais ;bavar. sahr, saher, feuilles pointues des plantes marécageuses, du seigle et du froment ; celt. sar, cours d’eau) : Saar (rivière), Saarbrück, Saare (rivière), Saarmund, Saarwerden ; — Sahrendorf ; Sarau, Sarenthal, Saresdorf, Saringen, Sarstedt.

Schlote, Schlotte (die), spadice du roseau (cfr. Schlot, tuyau ; cfr. Röhre, tuyau, et Rohr, roseau), prend le sens de Schilfrohr (roseau, jonc) : Schlotenau, Schlotwiese, Schlotheim, Schlottendorf.

Kustrin (dont le nom primitif était Koztrzyn, c’est-à-dire corbeille de roseaux). Ce nom désigne très bien la situation de cette ville, qui est placée dans la fourche que forment l’Oder et la Warthe, et près de marais couverts de roseaux.

Binse, jonc (offre l’idée de lien, Binde, bas all. biese) : Binsfeld, Binsfurt, Binzen, Binzwangen, Bunzen ; — Biesdorf, Biesen, Biesenhorst, Biesenrode, Biesenthal ; — Bisdorf, Bisendorf, Bishausen, Biskirchen, Bismarck (voy. F., p. 174)[24].

Les plantes (Pflanzen). — Les plantes (Pflanze, plante ; lat. planta) et les petites productions (kleinere Gewächse) du sol, ont aussi laissé un souvenir de leur présence, de leur culture ou de leur abondance dans les noms de quelques localités. Les choux, les fèves, le houblon, l’avoine, le froment, les bruyères, les fougères, etc., sont représentés dans la nomenclalure géographique de l’Allemagne.

Kohl, chou (dan. kaal ; lat. caulis) : Kohlberg, Kohlfurth (gué des choux), Kohlhausen, Kohlstein ; — Kalau (en wende Kalawa, de kal), Kahlen, Kahlow, Kalwitz, etc. Quelques-uns de ces noms peuvent se rapporter à kahl (dénudé, chauve) ou à Kohle, charbon.

Hopfen, houblon (angl. hop) : Hopfau, Hopfgarten, Hoppensen (sen pour hausen).

Werck, chanvre (en Suisse) : Werch, Werchau, Werchen.

Rübe, rave, navet : Rübenau, Rüblingen, Rübgarten.

Runkel [Runkelrübe], bette-rave : Runkel, village situé sur la Lahn.

Bohne, haricot, fève (celtique ffaen ; lat. faba) : Bohndorf, Bohnenkamp, Bohnenland, Bohnhorst, etc. — Bahndorf, localité près de Kalau, dont le nom ne vient pas de Bahn (chemin, route), mais d’une forme de Bohne (celt. ffaen)[25].

Weizen et Waizen, froment : Waitzendorf, Waizenkirchen, Weizenrode.

Roggen, seigle (v. h. all. rogo, suéd. rog, isl. hrogn, angl. roe, roan) : Rogau, Roggau, Roggenbeuren, Roggenburg, Roggendorf, Roggenhagen ; Allrock (non pas de Rock, vêtement, mais du m. h. all. rocke = Roggen[26].

Hafer, avoine (dan. havre, angl. haver) : Hafferungen, Haferschlacht (Schlacht, tuerie ; combat ; — en bas all. abattis de broussailles), Habersdorf ; — Haverskerque (église de l’avoine : Kirche).

Gerste, orge : Gersthofen, Gerstungen.

Dinkel, épeautre : Dinkelsbühl, Dinkelscherben (Scherbe, Scherben, fente ; écuelle, pot).

Hirse, millet d’Italie (suéd. hers, bas sax. heerse) : Hirsau, Hirs ; Hirzberg ; — Herzbach, Hersefeld, Hersendorf, Hersfeld.

Heide, bruyère, plante ; lande couverte de bruyères : champ, plaine (jad. plaine couverte de sapins, etc., goth. haitja, champ ; dans les noms propres, on trouve les formes hede, ede ; anc. suéd. id, ed, forêt)[27] : Haydau, Haydenstadt ; — Heide, Heidenfeld, Heidenheim, Heidesee, Heideteich, Heidhof, Heidstrich (Strich, trait ; étendue ; contrée) ; Heidersbach ; — Heidelberg, Heidelsheim ; Heyst (abrév. de Heystede = habitation de la bruyère (ville de la Belgique) ; — Schönheide, etc.[28].

Brüsch, bruyère, erica vulgaris : Brüsch, ferme du canton de Zürich[29].

Farn, fougère (angl. fearn, fern) : Farnbach, Farnroda ; — Farnham (Anglet., jad. Fearnham) ; Farringdon (jad. Fearndun, du celt. dun, colline), Farringdon Street (à Londres) doit son nom à un orfèvre qui fut shérif de Londres. Le nom de ce magistrat avait été d’abord celui d’une localité.

Distel, chardon (holl. diestel ; flam. destel ; angl. thistle) : Distelow, Distelwitz ; — Diestelhausen ; — Destelbergen (habitation de la colline aux chardons), Desteldonck (colline aux chardons).

Dorp (provinc.), ivraie : Dorpat.

Bilse, jusquiame (celt. belinuntia) : Alten-Bilsen (ancienne abbaye), Münster-Bilsen (anc. commanderie de l’ordre dit teutonique).

Klee, trèfle : Kleebach, Kleeberg, Kleeburg.

Tille, Dille, aneth fétide : Tillemont, Tilliach, Tilly, Thieldonk, Thielt.

Borsch, v. h. all. borse (ledum palustre) : Borsbach, Borsdorf, Borsloh, Bursfeld (sur la Weser), etc.

Dost, Dosten (norvég. tost), origan ( plante) ; en bavarois, der dosten, buisson, touffe ; Tost, provinc. sommet, cime, houppe ; dost, fumier : Borntosten (Westphalie), etc.

Wiese, prairie (en bas all. wisch et wische) : Wiesen, Wiesenau, Wiesenbach, Wiesenbad, Wiesenberg, Wiesenburg, Wiesenbronn, Wiesenfeld, Wiesengrund, Wiesensteig, Wiesenthal ; — Wisch, Wischau, Wische, Wischendorf, Wischhaven, Wiesenthau (rosée des prairies : Thau) ; — Elbwiese (prairie de l’Elbe ou de la rivière), Langewiese (longue prairie), Nasswiese (nass, humide), Neuwiese (nouvelle prairie).

Matte, prairie (bas all. mäde, anglo-sax. maed ; angl. meadow : de mähen, faucher ; une prairie est un terrain que l’on peut faucher, wo gemäht werden kann) : Matt (vg. suisse où il y avait jadis de belles prairies), Matteburg, Mattendorf, Mattsee ; — Matterhorn (le pic de Matt), deux sommets qui sont séparés du mont Rosa par le Matterjoch ainsi nommé du village Zermatt (= bei der Wiese). L’ascension du plus grand de ces pics est très difficile. On le nomme Mont-Cervin — Hirschhornberg ; — Andermatt (village suisse) ; — Maden, Heumaden ; Medebach, Medingen ; Schmelmad (où il y a des Schmielen : Schmiele, canche, plante).

Bas-sax. gruse = Gras (gazon) : Gruson.

Dans les Pays-Bas, il y a beaucoup de localités qui offrent le mot drecht ou trecht (cfr. lat. tractus, traînée ; contrée, pays ; espace) avec la signification de végétation (Graswuchs) et de prairie. Ce mot a pris le sens de Trift (de treiben, pousser, mener, conduire [le bétail], mener paître ; chemin par où l’on mène le bétail au pâturage ; pacage) ; Moordrecht (pacage du marais), Zwindrecht (= Schweintrift ou pacage aux porcs), Ossendrecht (holl. os = Ochs, bœuf ; — ou pacage des bords de l’eau : os, ous, eau). Voy. Append. T.

Rasen et Wasen (gazon) entrent peut-être dans la composition de Rasdorf et de Wasenweiler. Toutefois, en bas all. Wasen signifie aussi vapeur, exhalaison ; en suéd. wäsa, en anglais ooze, en holl. waase, marais. Dans l’Allemagne méridionale, on trouve des localités nommées Wasen tout court et des composés tels que Wasenberg, Wasenbach, Wasenburg, Waseneck, Wasenhaus, Wasenmühle, Wasenstatt, Wasenstein.

Heu, foin : Heubach, Heuberg, Heudorf, Heuscheune (Scheune, grange).

Bister (du lat. pastura ; rhétique pistira) a le sens de pâturage, pacage : Bisterfeld, Bisterscheid (Scheid, séparation).

Aetzel signifie aussi pâturage (de ätzen, donner à manger ; paître ; essen, manger ; Atz, pâture) : Atzenbach, -dorf, -hain, -hof, -roth.

On emploie souvent, surtout dans le Voigtland et aux alentours du Fichtelberg, le mot Grün (das, le vert, la verdure) comme synonyme de Wiese und Wald : Grünau, Grünberg, Grüneberg, Grünefeld, Grünewald, Grünewiesen, Grünhagen, Grünhaus, Grünhain, Grüningen, Grünkraut (Kraut, plante), Grünsee, Grünstadt, Grünthal.

Moos, mousse : Moosberg, Mooshausen ; — Moosbrunn, Moosheimn ; Mouscron (vg. nommé jadis en flamand Mosgroen = vert de mousse ; on a vu, dans ce nom, une déformation de Mons Ceuteron ou Centeron, Mont des Centrons, ancienne peuplade belge).

La végétation marine n’est guère représentée dans les noms propres de villes et on en conçoit aisément la raison. Cependant le mot Wier (expression vulgaire qui signifie varech, herbe marine) se trouve dans : Wierum (auprès du varech), Lütkewierum, Engewierum.

Les noms de l’herbe, des fleurs et des fruits.Kraut, herbe, plante, végétal : Krautheim, Kraut-Sand, Krautenvalde.

Wurz, Wurzel, racine : Würzburg, dont le nom a été traduit en latin par Herbipolis. Mais Würz est regardé ici comme une corruption du nom propre Wirzo (P., p. 245).

Blume, fleur : Blumberg, Blumenau, Blumenbach, Blumendorf, Blumenfeld, Blumenhagen, Blumenholz, Blumenthal ; — Blomberg.

Rose (voy. p. 154), Lilie (voy. p. 154).

Beere, baie ; grain, graine : Beerbach, Beerdorf, Beerwalde ; — Beerenberg (mont des baies) ; – Erdbeeren (Erdbeere, fraise ; littér. baie de terre : Erde), Erdberenburg.

Eichel, gland (Eiche, chêne) : Eichel, Eichelberg, Eichelborn ; Eichelsdorf ; Aichelberg ; — Eickel, Eickelsheim, Eicklingen ; — Ekel, Eikele.

Korn, grain ; collect. grains, céréales, blé : Kornau, Kornberg, Kornburg, Kornhaus, Kornthal, etc.

Wein, vin ; — [plante qui produit le vin], vigne : Weinberg (coteau planté de vignes ; vigne, vignoble), Weinbrunn (fontaine de vin), Weingarten, Weinheim, Weinœrter (Ort, lieu, endroit), Weinsberg, Weinsteig (Steig, sentier) ; — Weimar (vinaria ; dans quelques endroits du Tyrol et dans quelques autres parties de l’Allemagne, ce mot signifie « raisin »).

Brett, planche : Bretheim, Bretleben, Brettach (Dach, toit ; cfr. bretèche), Brettachau, Brettachgau, Bretten, Brettenthal, etc.

  1. Diverses localités du centre de la France sont nommées le Gault ; dans le Tarn : les Gauts. Le nom propre d’homme Gautier signifie « forestier » (P., p. 20).
  2. Le canton d’Unterwalden (unter, bas, inférieur) est traversé par la forêt de Kern [du village nommé Kerns], qui partage la contrée en deux parties, dont l’une est appelée Ob (vieux, pour über, sur, au-dessus) dem Wald (au-dessus de la forêt) ou le Haut-Unterwalden, et l’autre Nidwald (le Bas- Unterwalden), c’est-à-dire Nid (pour nieder = unter, inférieur) dem Wald sous la forêt).
  3. La même racine se retrouve peut-être dans Kühnewald (forêt de sapins), Kühnau ; — Künberg, Künersberg ; Kienbaum, Kienberg.
  4. Louvain offrait encore au ixe siècle des bois sur la hauteur (loo) et des marais (ven, marécage) dans la plaine. Les collines du nord de la ville portent encore le nom de Loo. Les grandes prairies situées au pied de ces collines et traversées par la Dyle se nomment Broek (= Bruch, marais). On y trouve aussi la rue du Marais (Broekstraet) qui conduit à un terrain jadis marécageux et aujourd’hui converti en prairies et en jardins potagers. Ce sont les moines de Vlierbeeck (ruisseau des sureaux : holl. vlier, sureau) qui ont contribué à leur défrichement et à leur mise en culture.
  5. Van Loo, nom de famille peut se traduire par Dubois « ou de la hauteur boisée. »
  6. Le mot celtique llwch, lug se rattache au wende luz, lusha, qui signifie « marais, marécage » (d’où luka, prairie). De ce radical vient le mot wende Luzyzy que les Allemands ont transformé en Lausitz (la Luzace = pays des marais).

    Le nom du Lug-see, lac bordé par des prairies, offre l’idée d’un endroit marécageux, et se trouve ainsi en opposition avec le Werch-See, qui est entouré de hauteurs (en wende, werch, hauteur, sommet; métaphor. prince). Cfr. Berg.

  7. En flamand Nyvels, et dans le latin du moyen-âge Nivella, Niviala, Nivalis. La forme vels (peut-être de vallis, vallée) offrirait peut-être le mot vals (= welche, gallois, etc.) qui se prend quelquefois pour Gaulois.
  8. On a rattaché ce nom à Bräme, parce que cette ville était bâtie sur le bord, sur le rivage, sur la ligne qui sépare la terre de la mer. D’autres disent que Bremen était la frontière de l’empire allemand vers l’Océan et que, pour ce motif, elle fut nommée Bräme, quasi fimbria (bord). Dans ce cas, Bräm serait synonyme de Uferrande. Mais il peut se faire que ce mot se rattache à l’anglo-sax. et au vieux norois brim (flot, onde) ou qu’il vienne de prame, embarcation (holl. praam, prame, gabarre, bac) dont on faisait usage, en ce lieu, avant qu’on eût construit un pont sur la Weser. D’un autre côté brem a signifié « marécage, marais. »

    Quelquefois brem a remplacé le celtique bren, colline.

  9. En v. h. all. hagana, goth. ahana, signifiait barbe d’un épi de blé, paille, fétu ; et puis, buissons épineux, épines  ; cfr. lat. acus, paille ; aiguille ; aculeus, pointe, dard, épine, aiguillon ; acuo, je rends aigu, j’affile : grec ἄχυρον, paille, chaume ; ἀκή, pointe. En all. die Hecke, haie, palissade ; das Heck, perchis.
  10. Cette ville ne fut d’abord qu’un château de chasse bâti par les comtes de Hollande au milieu d’un bois qui faisait partie de la forêt de Merwede, et dont les arbres séculaires de la promenade dite du Bois, près de cette capitale, sont un reste. Ce château existe encore sous le nom de Binnenhof (Cour intérieure : binnen, dans l’espace de ; en compos. intérieur). Auprès d’un vivier voisin, se trouvent plusieurs allées et contre-allées d’arbres magnifiques : c’est ce qu’on appelle le petit Voorhout (avant-bois : vor, devant ; hout = Holz). Parallèlement à cette place, il en est d’autres qui forment le grand Voorhout (le grand avant-bois). On a donc pu dire, avec raison, que La Haye est un parc dont les allées sont bordées de villas et de palais.

    Il y a, près de Breda, un hameau nommé la petite Haye, et un endroit, près de Warneton, appelé groot Haegen (Grande-Haye).

  11. Taillis (portion de bois que l’on coupe périodiquement) et le languedocien tailhado qui a le même sens, se trouvent dans Taillebourg, Taillefontaine, Taillades (Vaucluse).
  12. Le mot Stamm (tronc, souche) a été employé dans le même sens : Stammheim = Stockheim ; — Stambach, Stamsried. On a aussi rattaché le nom de Glatz (tchèque Kladsko) à Klotz (billot ; souche ; tronçon ; bûche), mot qui aurait désigné un tronc resté debout lorsqu’on défriche la forêt. Mais il y a plusieurs autres étymologies.
  13. Une ancienne famille rhénane portait le nom de von Bongard (de Pomerio ; — mot qui avait le sens de Wiese mit Obstbäumen).
  14. Les Celtes nommaient aussi le chêne isc ; mot auquel se rattache le nom d’Iscy, ou Issy ; beaucoup mieux qu’au culte d’Isis ; chez nos ancêtres on avait aussi le mot iscol, latin esculus ou æsculus lieu planté de chênes.
  15. Tacite dit qu’Ulysse avait fondé cette ville, et un érudit a publié une dissertation qui a pour titre : Ulysses et Odinus unus et idem. Mais ce sont là des amusements et des jeux d’esprit. Il ne faut donc pas chercher à voir, dans Asciburg, l’outre (ἀσκός) qu’Éole remit à Ulysse. Du reste, le nom de la ville germanique se rattache plutôt à ask (forme celtique de uisce, eau), qui a donné asch, aches, ass.
  16. En armoricain tann signifie chêne. Avec ce mot et avec l’article ar, les Gaulois ont fait des noms qui se sont conservés dans les suivants : Ar-dennes (Aveyron), Har-tennes (Aisne), Ar-denay (Sarthe), Ar-tenay (Loiret). Stenay (Meuse) vient de stenaie (= Tchenaie = tenaie = chênaie).
  17. Lindau (ville située sur les bords du lac de Constance) se nommait jadis Lindunowa. Ce nom vient plutôt du celtique llyn, lynn, lin, lac, amas d’eau [cfr. Dublin = Dubh-linn = eau noire] et de dun (forteresse) ; owa (= Au) indique le territoire de cette ville. C’est ainsi que Lincoln, nommée par les Romains Lindecollina et Lindun Colonia, nous offre, dans l’ancien nom Lindun, l’ancien breton llyn (marais, lac) et dun (ville ; colline, hauteur).
  18. Lim représente peut-être ici le celtique lin (eau). Limburg du Luxemburg sur la Lahn et Limburg de la Westphalie est sur la Leine. En irlandais, leamh signifie ormeau : — ? Lemonum, Lemovices.
  19. On a traduit à tort Erlkönig, nom d’un célèbre personnage fantastique, par l’expression « roi des aunes, » en rapportant ce nom à Erle. Mais c’est un nom provenu du danois elverkonge que l’on aurait dû traduire en allemand par Elfenkönig (roi des elfes).
  20. Lottner remarque qu’il n’y a qu’un seul nom d’arbre identique dans le sanscrit et dans les autres langues indo-européennes, c’est le nom du bouleau. En sanscrit, on le nomme bhûrja, en anc. germ. biricha, lithuan. berzas, slave bereza, angl. birch (Zeitschrift, VII, 23).

    Les autres noms d’arbres ont tous changé de signification.

    Le sansc. drû (arbre) est devenue en grec δρῦς (cambrien derw), chêne ; le sanscr. vêtasa (arundo) correspond à l’anc. tudesque wîda (saule), au grec ἰτέα (saule), au lat. vitex (gatilier), etc.

  21. Weide et Weiden (pâture ; pâturage, pacage) se rattachent à l’irlandais fiad, auj. biadh = angl. food, nourriture, aliment ; Weide a aussi le sens de « chasse. »
  22. La forêt de Birnbaum, située dans la Carniole, était autrefois nommée Pyrn ou Byrn (formes de pyren-ées et de brenn, chef, sommet, hauteur). Les anciens ont aussi appelé ce pays tantôt Alpes Carnicæ et tantôt Alpes Juliæ.
  23. Toutefois, ce radical répond dans les noms topographiques, plutôt au mot armoricain raoz (roseau ; v. h. all. riusa) qu’au mot latin rosa. Ducange traduit, avec raison, rosaria, roscheria par arundinetum et juncetum ; en roman, rosières signifie des lieux couverts de roseaux (Rosières, ville du Loiret). Le mot celtique (holl. ruysche, roseau) est conservé dans le mot all. Reuse, nasse (primitiv. corbeille faite avec des roseaux). Le mot Reusche signifie ruche et provient du même radical : ces deux mots ont trait aux roseaux dont on se servait pour construire des ruches.
  24. En wende bes, bas signifient le « sureau noir, » dont les baies noires sont nommées besynki. Ce radical se conserve dans des noms de lieux comme Beeskow, et dans des noms formés de bies : Bieskau, Biesow, Biesnitz, Biesenthal (près de Berlin), Biesenbach, etc. Nous avons dit ailleurs (F., p. 174) que, en slave, le diable se nommait bies (noir). Dans beaucoup de noms propres wendes terminés en bus, se cache le mot bis ou bysch (maison, habitation) : Dobberbus, Trebbus.
  25. Bahndorf peut signifier « village du chemin » ou « endroit battu, aplati. » Bahn (route) se rattache, en effet, au mot bana (frapper, battre) duquel dérivent bahnen (battre [un chemin], aplanir ; ouvrir, frayer une route) et bohnen (polir, frotter avec de la cire).
  26. En wende, le seigle se nomme zyto (cfr. grec σῖτος, blé ; pain ; nourriture). De zytim se sont formés les noms de Stettin (ville de la Poméranie, d’origine wende, dont le nom latin est Sedinum), Seddin, Settin, Settinchen. On a aussi dérivé du même radical le nom de Sidow.
  27. En anglais, to hide signifie cacher, couvrir, et hide (peau, cuir) a le sens de « couvert » et de clôture. Le mot heid désigna ainsi un lieu abrité, un lieu où se trouvent des habitations, et, par suite, en vieil allemand heit, état (arrangement), totalité des personnes qui composent une société, peuple. Ce mot est encore usité en composition : Christenheit (chrétienté, pour chrétien-et-é) ; — cfr. Rohighed (le calme : ruhig, calme, paisible, silencieux), villa près de Copenhague où est mort le conteur danois Andersen. Le suffixe hed ou ed se retrouve peut-être dans des noms propres terminés en eda, ede : Helv-et-ia.
  28. Dans quelques noms de lieux Heide (païen) a le sens de païen et désigne, parfois, des constructions qui remontent aux Celtes ou aux Romains. Lorsque le Christianisme régnait dans les villes, les idolâtres ne se trouvant guère plus que dans les landes ou dans les champs, furent nommés Heiden. C’est ainsi que du latin pagus on a fait paganus et païen.
  29. Le mot bruyère, jad. bruguière (cfr. La Bruguière, dép. du Tarn), vient du celtique [kymr.] brwg, buisson : Brugelette (petite bruyère ; petit bois : bas lat. brua, bruella ; roman bruel, bois ; bruyère ; — la lettre g a disparu) : Bruges, Brügge, Bruggefeld, Brüggehof, Brüggen.