Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites

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Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites (La vie de Monsieur Jean-Baptiste de La Salle, instituteur des Frères des Écoles chrétiennes, tome 1, 1733, p.1-115)
Jean-Baptiste Machuel (p. Couv-115).

LA VIE

DE MONSIEUR

JEAN-BAPTISTE

DE LA SALLE,

INSTITUTEUR

DES FRERES DES ECOLES

CHRÉTIENNES

TOME I.

PAR MONSIEUR ***.

A ROUEN,

Chez JEAN-BAPTISTE MACHUEL,

ruë Damiette.

M. DCC. XXXIII AVEC APROBATION ET PRIVILEGE DU ROI

DISCOURS

SUR L’INSTITUTION

DES MAITRES

ET DES MAITRESSES

D'ECOLES CHRÉTIENNES

ET GRATUITES.

Où l’on montre l’importance de ces sortes d’établissemens, le besoin qu’en
a le Public ; & la vanité des Objections qu’on peut leur opposer.

I : L’importance des Intituts des Freres & des Sœurs des Ecoles Chrétiennes & gratuites, prise de l’importance de sçavoir & d’enseigner la Doctrine Chrétienne

QUEL est l’objet ? Quelle est la fin de l’Institution des Maîtres & Maîtresses des Ecoles Chrétiennes & gratuites ? L’instruction & l’éducation sainte de la jeunesse pauvre & abandonnée, Le bien du Royaume & de l’Eglise en dépend ; car ce sont les enfans qui remplacent les peres, & qui à leur tour deviennent membres de l’Eglise & de l’Etat. Generatio venit, generatio præterit, dit le Sage, une genération passe, & l’autre lui succéde. Les Peres laissent la place qu’ils occupent dans le monde, aux enfans qu’ils y ont mis, aussi-bien que leurs maisons & leurs biens. En vain tâcheroit-on de rapeller ceux-là au devoir, & de les faire changer de mœurs & de conduite : Les vices de la jeunesse crûs en eux avec l’âge ; les passions naissantes de l’enfance, fortifiées dans le cours des années ; les habitudes criminelles enracinées & vieillies avec leur sang, rendent cette réforme presque desesperée. Les hommes meurent, pour l’ordinaire, comme ils ont vécu. S’il y en a parmi eux qui se convertissent dans l’âge reculé, ils doivent cette grace à une miséricorde de Dieu particuliére, qui fait concourir bien des événemens dans l’ordre de la nature, & encore plus dans l’ordre de la grace, pour les détacher du monde & du péché.

L’arbre, quand il est vieux, n’est plus pliable ; ses racines étenduës de tous côtez dans la terre & fortifiées, le tiennent immobile, & ce n’est pas sans un grand travail qu’il peut être déraciné ou abatu. Quand il est jeune, docile à la main qui le manie, il se tourne & il prend les plis qu’elle lui donne : il croît par les retranchemens qu’elle en fait si elle est habile, & il profite de ses soins. Mieux il est élevé, plus il devient fort & robuste, & il porte des fruits plus abondans & de meilleur goût.

Simbole naturel de l’éducation de la jeunesse. L’âge tendre qui la rend susceptible des premières impressions qu’on lui donne, la rend flexible : elle prend des sentimens de pieté, quand elle trouve des Maîtres attentifs à les lui inspirer : elle apprend la science du salut en aprenant la Doctrine Chrétienne : elle montre un fond de Religion de crainte de Dieu, & d’horreur du péché dans les années avancées, lorsque dans les premières elle en a été imprimée ; & si dans la suite elle se dérange, la conscience lui reproche ses déréglemens, & l’oblige tôt ou tard de revenir de ses égaremens. Ces réflexions sont naturelles : le sçavant & pieux Gerson les a faites il y a long-tems[1].

C’est donc dans la bonne éducation de la jeunesse, qu’il faut chercher la formation de l’honnête homme & du bon Chrétien. Cette vérité est si évidente, qu’elle n’a pas besoin de preuve. D’ailleurs tant de mains sçavantes l’ont mise dans son jour, qu’il seroit inutile d’en parler. En suposant sa notorieté publique, j’en conclus l’importance des établissemens des Ecoles Chrétiennes & gratuites ; & par suite, de l’institution des Maîtres & des Maîtresses propres à les tenir. S’il faut ouvrir en faveur du public des Ecoles gratuites, il faut élever des maisons où les Maîtres & les Maîtresses propres à enseigner par charité les enfans pauvres de l’un & de l’autre sexe, puissent être formez. Or pour donner prix à ces sortes de Séminaires, il faut peser celui de la Doctrine Chrétienne ; car c’est pour l’enseigner, que sont, pour ainsi dire, créés ceux & celles qu’on y forme.

Il est vrai que les Maîtres & les Maîtresses des Ecoles charitables font profession d’aprendre à lire, à écrire, & l’arithmetique : mais ces fonctions sont subordonnées à l’autre. Celle-là est la principale, celles-ci ne sont qu’accessoires. Il est bien certain, que ni l’Eglise, ni l’Etat, n’ont pas besoin de nouvelles Congrégations destinées à former des Maîtres & des Maîtresses pour aprendre à lire, à écrire, & à chiffrer. Tous les siécles n’ont pas manqué de gens qui en font le métier, & qui le rendent lucratif ; mais la jeunesse ne trouve pas chez ces Maîtres qui vendent leurs services, le zéle qui est nécessaire pour enseigner la science du salut, & le rare talent de donner une éducation Chrétienne.

Il est encore bien certain, que les enfans du petit peuple, n’ont pas le moyen d’acheter les instructions qui leur sont nécessaires. Ainsi l’Etat, aussi-bien que l’Eglise avoit besoin de gens qui voulussent rendre ces services gratuits aux pauvres enfans des deux sexes. Comme c’est là le motif de l’institution des Séminaires des Maîtres & des Maitresses d’Ecoles gratuites ; c’est d’où il faut tirer tout ce qu’on peut dire en leur faveur. Pour le faire avec quelque ordre, je vais 1°. établir l’importance de l’institution de ces sortes de Séminaires, par l’importance d’enseigner & de sçavoir la Doctrine Chrétienne. 2°. Rendre sensibles les obligations que le public a à ceux & à celles qui se consacrent par vocation à tenir les Ecoles charitables, 3°. Faire voir par la nécessité d’instruire séparément les enfans des deux sexes, la nécessité des Instituts de Maitres pour les garçons, & de Maîtresses pour les filles. 4°. Montrer par la Doctrine & les exemples des Saints, l’estime qu’on doit faire de l’état des Maîtres & des Maîtresses d’Ecoles Chrétiennes, & le zéle qu’on doit avoir de les multiplier. 5°. Réfuter toutes Les objections qu’on peut former contre ces sortes d’Instituts.

CHAPITRE PREMIER.

L’importance de l’Institut des Freres & des Sœurs des Ecoles Chrétiennes, prise de l’importance d’enseigner & de sçavoir la Doctrine Chrétienne.


II.
Premiere preuve de l’importance des Instituts des Freres & des sœurs des Ecoles charitables, prise de la nécessité de sçavoir & d’enseigner la Doctrine Chrétienne.


AUtant qu’il est nécessaire au salut de sçavoir la Doctrine Chrétienne, autant l’institution des Maîtres & des Maîtresses propres à l’enseigner gratuitement, devient-elle importante & nécessaire à l’Eglise, au défaut de ses Ministres qui ne veulent pas, ou qui ne peuvent pas accorder à cette auguste Fonction, tout le tems qu’elle demande.

La seconde partie de cette proposition est si liée avec la première, que la preuve de l’une, fait la démonstration de l’autre. Ainsi en exposant l’obligation de sçavoir la Doctrine Chrétienne, on fait sentir l’importance de l’institution des Maîtres & des Maitresses des Ecoles charitables.

Mais est-il besoin d’entrer en preuve sur une vérité si claire ? Peut-il être indifférent de sçavoir, ou d’ignorer la Docttrine que Jesus-Christ nous a enseignée ? Peut-il être arbitraire de s’instruire, ou de ne pas s’instruire, de ce qui regarde Dieu, ses perfections, ses ouvrages, ses bienfaits, ses Mysteres, ses promesses, ses menaces, sa Loi, ses Sacremens, & l’œconomie de nôtre Rédemption ? Peut-on, sans conséquence, négliger la science du salut, les véritez révélées, les moyens d’acquérir la vie éternelle, la connoissance de ce qui doit nous arriver dans un autre monde, & ce que nous avons à craindre & à esperer dans le siécle à venir ?

Ce qui montre combien il est nécessaire de sçavoir & d’enseigner la Doctrine Chrétienne, c’est que 1. Le Fils de Dieu lui-même s’est chargé de l’enseigner. Math. 9. 35.

La Doctrine Chrétienne est de telle importance, que le Fils de Dieu humanisé s’est chargé de l’enseigner lui-même. Il a employé dans ce divin exercice les années de sa vie publique. Circuibat Jesus omnes civitates & castella docens in Sinagogiseorum & prædicans Evangelium regni. Il alloit à pied de Ville en Ville, de Village en Village, pour instruire, pour catéchiser, pour enseigner avec une simplicité sans exemple, sa celeste Doctrine. S’il marquoit tous ses pas par quelques offices de charité ; s’il arrosoit de ses larmes, ou de ses sueurs les endroits par où il passoit ; s’il laissoit sur tous ses vestiges des effets de sa Toute-Puissance, c’étoit pour autoriser sa Doctrine & la faire recevoir. Les Miracles étoient les témoignages que le Ciel rendoit pour l’accréditer, & disposer les peuples à l’écouter & à l’embrasser. Si non vultis mibi credere ; operibus credite, disoit-il aux Juifs qui le contredisoient.

Les enfans, comme les autres, étoient les objets de son zéle. Laissez-les venir à moi, disoit-il à ses Disciples, & ne les empêchez point de m’aprocher, car le Royaume des Cieux leur apartient. (Math. 19. 14.) Sa bonté à l’égard des petits étoit si publique, que les parens au raport de saint Marc. (10. v. 13. 14.) lui amenoient leurs enfans pour qu’il les touchât. Les Disciples voulant les en empêcher, ce doux Sauveur le trouva mauvais, & leur dit : Laissez les petits venir à moi & ne les en em- pêchez point ; car le Royaume des Cieux est pour ceux qui leur sont semblables. Il étend à leur égard sa prédilection jusqu’à dire, qu’il regarde comme fait à sa personne ce qu’on leur fait'. (Matth. 18. 5. 10.) & à faire les plus terribles menaces contre ceux qui les scandalisent. O ! très-pieux Jesus, s’écrie là-dessus le dévot Gerson, après un tel exemple de votre humilité & de votre charité à l’égard des enfans, qui aura honte desormais de s’abaisser à les instruire ? Aprés vous avoir vû étendre les bras pour embrasser les enfans, qui osera écouter le sentiment de l’orguëil & de la prétenduë grandeur qui porte à les mépriser ? (Loc. cit. consid. 4. circa initium.) Est-ce donc, dit encore ce pieux Auteur, que les enfans & les jeunes gens sont une vile portion de l’Eglise, eux à qui le Royaume des Cieux apartient (Ibid. Prolog. circa initium.) Cependant combien y a t-il de gens, remarque ce grand Zélateur du salut des enfans, qui croyent que la fonction d’instruire ces petits, ne convient pas, & est même indigne d’un grand Théologien, ou d’un Sçavant, ou d’un Ecclésiastique élevé en dignité….. Quant à moi, je ne connois rien de plus grand, ajoute-t-il, que d’arracher de la gueule du Lion infernal & des abîmes de l’enfer, & en particulier de travailler à cultiver celles des enfans, & d’y jetter de bonne heure la sémence de la vertu, & d’arroser avec soin cette précieuse partie du champ de l’Eglise. (Ibid. consid. 4. circa initium.)

En effet, le salut de la plûpart est attaché à ce soin ; & si un si grand nombre se perdent dans la suite de l’âge, c’est faute d’instruction. Tout ce que Jesus-Christ a fait & souffert pour enseigner la divine Doctrine, doit nous faire juger de son prix.

C’est pour en montrer l’importance & la nécessité, aussi-bien que l’excellence & la sainteté, qu’il dit 1°. Quelle est la Doctrine de Dieu son Père qui l’a envoyé : Mea Doctrina non est mea, sed ejus qui misit me Patris. 2°. Qu’il n’enseigne que ce qu’il a apris de son Pere, quæcumque audivi à Patre, nota feci vobis. 3°. Qu’il décide que tous ceux qui ne veulent pas la recevoir, sont déja condamnez, & qu’ils ne peuvent pas avoir la vie éternelle.

2. Cette Doctrine, est la Doctrine du Ciel, la science du salut, la science des Saints.

Cette Doctrine est apellée celeste, parce qu’elle vient du Ciel, parce que le Ciel l’a révélée, parce qu’elle n’a que le Ciel pour objet & pour fin, & parce qu’elle enseigne la voie d’y arriver. Elle est apellée divine, parce que non-seulement c’est le Fils de Dieu qui l’a enseignée, mais que c’est dans le sein de Dieu même qu’il l’a puisée, c’est-à-dire, que Dieu en est l’auteur, comme Jesus-Christ en est le Docteur. Elle s’apelle la science du salut, parce qu’elle renferme ce que Dieu a déterminé de toute éternité, que les hommes sçussent & fissent pour être sauvez. Elle est encore nommée la science des Saints, parce qu’elle rend Saints tous ceux qui la pratiquent à la lettre, & qu’on ne peut être saint, si on la néglige. Peut-il donc être indifférent de sçavoir ou d’ignorer la Doctrine de Dieu même, ces véritez éternelles qu’il a révélées par la bouche de son propre Fils, ces Mysteres adorables qui composent l’œconomie de la Redemption du genre humain, cette Loi si sainte, & cette Morale si pure, qui sont le fond de nôtre Religion ; ces Sacremens si précieux qui sont les canaux des graces & les moyens de salut ; enfin ces véritez si sublimes que la chair & le sang ne peuvent découvrir, & que le Pere céleste seul révele ?

Or si rien n’est plus nécessaire, ni plus important que la connoissance de cette Doctrine, qu’on avoüe donc que rien n’est plus important & plus nécessaire que l’institution des Ecoles, où l’on enseigne gratuitement & par pure charité.

Dans toutes les autres Ecoles, on aprend la Doctrine des hommes ; il n’y a que dans celle-ci où on enseigne la Doctrine de Dieu. Car enfin toute autre Doctrine est une Doctrine humaine ; par conséquent ou dangereuse, ou pernicieuse, ou inutile à Salut, ou défectueuse.

Toute autre Doctrine est la Doctrine, ou des hommes saints & pleins de Dieu, comme celle des Peres de l’Eglise, ou des hommes prétendus sages & sçavans, comme celle des Philosophes, ou des hommes malins & séducteurs, comme celle des hérétiques & des Novateurs ; ou des hommes passionnez, interressez, & sujets à se tromper & à tromper. Ainsi toute autre Doctrine ne peut pas porter le même caractére de divinité, de sainteté, d’infaillibilité, de vérité, d’autorité, ni par conséquent devenir nécessaire à sçavoir, ni obliger à sa pratique.

Toutes les Doctrines du monde, n’ayant pour objet que des choses périssables, n’ont pas une fin de plus longue durée. L’intérêt, le plaisir, l’honneur, la curiosité qui en font l’attrait ou le profit, se terminent au Tombeau. La Doctrine de Jesus-Christ est bien différente : le salut en est la fin directe & immédiate. Le Fils de Dieu n’est descendu du Ciel, que pour y élever les hommes. Toute sa Doctrine ne tend qu’à ce but. C’est pourquoi les noms, comme je l’ai dit, sont, la science du salut, la science des Saints, la science de Dieu, la science du Ciel.

C’est sur cette idée qu’il faut juger de l’importance de la fonction de Catechiste, & des personnes consacrées à tenir les Ecoles charitables. Les Professeurs de Philosophie n’ont point d’autre fin, que de donner une connoissance des choses naturelles à leurs Ecoliers : Les Professeurs en Medecine s’apliquent à enseigner à leurs Disciples la structure du corps humain, ses maladies & ses remedes : Ceux qui font des leçons de jurisprudence, d’éloquence, de Mathématique, &c. bornent leurs desseins à bien enseigner les Loix, les principes d’Euclide, & les régles de bien composer & de bien parer un discours. Ces Maîtres des sciences humaines, ne portent pas leurs vûës plus haut. Leurs leçons n’aprennent rien sur le salut, ni sur les moyens de le faire. Une fin si élevée, si noble, & si heureuse est réservée pour ceux qui enseignent la Doctrine Chrétienne.

3. Cette Doctrine renferme tout ce qu’il faut croire, éviter, faire, craindre, & desirer pour être sauvé.

En effet, que renferme la Doctrine Chrétienne ? Tout ce qu’il faut croire, éviter, faire, craindre, & desirer pour être sauvé. Qu’est-ce qu’aprend le Catéchiste ? Ce que Jesus-Christ a enseigné lui-même, & ce qu’ont enseigné les Apôtres après lui. De quelque côté qu’on envisage la Doctrine Chrétienne, elle presente les caractères de la sainteté, & de sa divinité. La sublimité de ses Mystéres, la pureté de sa Morale, l’équité de ses préceptes, la sainteté de ses maximes, la perfection de ses conseils, la terreur de ses menaces, l’étenduë de ses promesses, font sentir qu’un Dieu en est l’auteur.

Qu’on compare avec elle la doctrine des Philosophes & des Sages de la terre, si on veut sentir la différence de la doctrine des hommes & celle de Dieu. Celle-ci tient de son principe & ressemble à son Auteur ; elle a une perfection consommée. Rien en elle qui ne soit digne de Dieu, & qui ne sanctifie l’homme. L’esprit humain ne pouvoit être l’ouvrier d’un plan de doctrine si-bien lié & si-bien suivi d’idées si surnaturelles, de sentimens si nobles & si élevez, d’une Morale tout à la fois si conforme & si supérieure à la droite raison ; enfin d’un plan de conduite si sanctifiant. Il est impossible à l’homme d’imaginer un système de doctrine plus parfait. On peut dire qu’elle participe à la perfection infinie de celui qui en est le Maitre & le Docteur. Ses promesses ne peuvent être plus magnifiques, ni ses menaces plus terribles ; sa morale ne peut être plus pure, ni ses maximes plus saintes ni ses préceptes plus justes, ni ses conseils plus parfaits. La gloire de Dieu en est l’objet, la charité du prochain en est le lien, la sainteté de l’homme en est l’effet l’amour de Dieu en est le mérite, la félicité éternelle en est le terme. Cette doctrine est si raisonnable, qu’on cesse de l’être quand on ne la suit pas. Elle est si équitable, qu’il faut se déclarer pour le crime, si on la rejette. Elle est si convenable à l’homme, qu’on ne peut vivre content sans la pratiquer. Elle est si parfaite, qu’elle rend parfaits tous ses fidéles observateurs.

La Doctrine des hommes est bien différente. Défectueuse comme eux, ou elle n’a rien de solide, rien de vrai, rien de certain, ou elle n’a rien de digne d’une ame immortelle. Ou tout y est vain, idées, maximes, préceptes, morale ; ou tout y est chimérique, ridicule, impratiquable, speculatif, inutile pour une autre vie. Rien n’y fixe les desirs ; rien n’y régle l’intérieur ; rien n’y porte la réforme jusqu’au cœur. Rien n’y éléve l’homme au-dessus de lui-même ; rien ne l’y conduit à la derniere fin ; rien ne lui aprend à s’abandonner aux soins de sa divine Providence ; rien ne lui fait un devoir de se renoncer en tout ; rien ne l’oblige de ne desirer que le Ciel, de n’estimer que la pure vertu, de ne vivre que pour Dieu, & de se sacrifier tout entier à son Créateur. Pour ce qui est de la pauvreté parfaite, de l’obéissance, de la virginité, de la Priere continuelle, du pardon des injures, de l’amour des ennemis, de la charité parfaite, & des beatitudes Evangeliques, ce sont des vertus dont les Sages de la terre n’ont pas même euë l’idée. S’il y a dans leur Doctrine quelque chose de suportable ; c’est ce qui semble s’aprocher de la Chrétienne.

Faisons maintenant l’aplication de ce qui vient d’être dit en l’honneur de la Doctrine Chrétienne, à la fonction de l’enseigner. La gloire de l’une rejaillit sur l’autre & les deux font honneur à l’Institut des Freres & des Sœurs des Ecoles Chrétiennes. Catéchistes par état & destinez à aprendre la Doctrine de Jesus-Christ, ils ont en partage l’office d’enseigner la science du Salut, la science de la Religion, la science des Saints. C’est sur l’importance de cette science divine, qu’il faut mesurer l’importance de ces Instituts. Veut-on sçavoir combien ils sont nécessaires au public ; qu’on pése d’un côté la nécessité de la science du Salut ; & de l’autre, la nécessité d’avoir des Maîtres qui l’enseignent avec zéle, avec édification & avec succez. Qu’on considére d’une part, que l’ignorance de cette divine Doctrine fait la perte d’une infinité d’ames ; & de l’autre, que cette perte ne peut guére être réparée que par l’établissement des Ecoles Chrétiennes. Disons donc avec le sçavant Chancelier de l’Université de Paris, le célèbre Gerson, que ceux qui les calomnient & qui les décrient, rendent un grand service au démon, & donnent aux enfans un grand scandale, indirectement au moins, & d’une maniere oblique, s’ils ne le font pas manifestement & à face découverte. En effet, continuë le même Docteur, il y en a qui poussez par l’esprit du démon & qui, ajoûtant autant qu’ils le peuvent, péchez à péchez, semblent n’avoir d’autre soin que d’avoir des compagnons de leur damnation éternelle….. En ce tems, plus qu’en tout autre, le cœur de l’homme se tourne au mal dès la jeunesse, & les enfans succent le lait empoisonné du peché, presque dès qu’ils le peuvent commettre. Leur grand malheur est, qu’ils n’ont ni parens ni Maitres qui prennent soin de leur instruction, & de leur éducation. Il ne faut donc pas s’étonner s’ils se lassent si facilement entrainer au mal.[2]

La vie éternelle consistant à connoitre le seul vrai Dieu, & son Fils Jesus-Christ. (Joan. 17. v. 3.) Quel est le malheur de ces pauvres enfans qui demeurent faute d’instruction, dans la plus profonde ignorance de Dieu & de Jesus-Christ ? Peut-on assez le déplorer ? Peut-on avoir un peu de zéle, & ne pas desirer de voir des Ecoles Gratuites & Chrétiennes se multiplier de tous côtez, puisque ces établissemens sont le grand reméde contre l’ignorance du salut ? Que les Pasteurs se ressouviennent toûjours, dit le Catéchisme du Concile de Trente (en sa Préface, num. 13. initio) que toute la science du Chrétien consiste à connoître le vrai Dieu & son Fils Jesus-Christ. Tout leur soin par conséquent, doit être de leur en procurer la connoisance. C’est ce que le saint Concile de Trente avoit lui-même fort recommandé aux Evêques & aux Pasteurs, en leur promettant un Catéchisme propre à instruire les Fidéles des choses nécessaires à salut. (Sess. 24. Decreto de reformatione, 3. 7. initio.) Si nous voïons, se récrie le dévot Gerson, les hommes aller chercher aux extrêmitez du monde les choses périssables ; s’ils ont un si grand soin d’amasser les biens de la terre, qui au sentiment de l’Apôtre, ne font que du fumier ; combien la négligence des Chrétiens qui ne pensent point au salut d’une ame immortelle, est-elle déplorable ? Combien plus est criminelle la méchanceté de ceux qui cherchent querelle & qui médisent des personnes charitables, qui s’intéressent à gagner à Jésus-Christ les enfans, & à les retirer de la voie de l’enfer ? Peut-on donc voir avec indolence ces édifices spirituels & ces temples vivans du Saint Esprit, se soüiller par les vices, & devenir la proïe des flâmes éternelles ? (L. cit. consid. 3. Paulo post initium.)

Est-ce donc en vain, que le Saint Esprit recommande si souvent dans la sainte Ecriture, de bien instruire & d’élever saintement les Enfans ? Enseignez-les, & C. 7. v. 25 prenez-en un grand soin dès leur enfance, est-il dit dans l’Ecclésiastique, Enseignez vôtre Fils, si vous voulez en recevoir de la consolation, & qu’il devienne dans la suite l’objet de vos délices, dit le Sage (Prov. 29. 17.) ? Combien de fois est-il recommandé aux peres & aux meres, dans le Deuteronome, d’enseigner à leurs enfans la Loi de leur Seigneur, & les bienfaits dont la main liberale les avoit comblez ? Quand vôtre fils vous interrogera là-dessus, leur disoit Moïse, aïez soin de lui dire : C’est le Seigneur qui nous a délivrez de l’Egypte par la force de son bras ; Et après lui avoir raconté tous les prodiges qu’il a faits, & l’avoir instruit de la Loi, ajoûtez : Le Seigneur nous a commandé d’observer toutes ces Loix, & de nous conserver dans sa sainte crainte. (Deuter. 6. v. 20. & suiv.) Les enfans étoient pareillement obligez par la Loi de Moïse, de se faire instruire par leurs parens, & d’aprendre de leurs bouches, leurs devoirs & le détail des obligations qu’ils avoient à Dieu. Interrogez votre pere étoit-il ordonné à l’enfant, & il vous instruira. Interrogez vos ayeux, & ils vous aprendront ce que vous devez sçavoir. (Ibid. 32. 7.) Quanta mandavit patribus nostris, nota facere filiis suis, dit là-dessus le Prophête Royal. Combien de choses le Seigneur a-t’il commandé aux peres d’aprendre à leurs enfans. En effet, ils se sont acquittez de ce devoir, dit le même Roi Prophête, car nos peres nous ont instruits, & ne nous ont point laissé ignorer les œuvres du Seigneur. Ils nous ont raconté les prodiges qu’il a faits & toutes les merveilles. (Ps. 77. 3. & suiv.) Ainsi par la Loi du Seigneur, aussi-bien que par le devoir de la nature, les parens devoient instruire leurs enfans, & les enfans devoient demander à se faire instruire. Tandis qu’Israël fut fidéle à cette obligation, il fut fidéle à son Dieu, & heureux : A mesure qu’il la négligea, il devint malheureux en devenant impie. Les enfans sans instruction croupirent dans l’ignorance de la Loi de Dieu ; & cette ignorance funeste les laissa s’engager dans le culte des faux Dieux. Que fit le saint Roi Josaphat, pour retirer son peuple de cette infâme idolâtrie ? Il envoya dans toutes les Villes de Juda des Grands de sa Cour avec des Prêtres & des Levites, qui portans avec aux le Livre de la Loi du Seigneur, le lûrent, l’expliquérent, & en instruisirent le Peuple. (L. 2. des Paralip. 17. v. 1. & suiv.) Juda instruit reconnut son Dieu, & revint à lui de tout son cœur. Pourquoi l’avoit-il abandonné ? C’est qu’il l’ignoroit. Les parens négligent d’instruire leurs enfans les avoient livrez aux vices & aux passions de la jeunesse, en les abandonnant à l’ignorance de la Loi de Dieu. Quand on a été nourri des paroles de la Foi & de la bonne Doctrine, ce sont les termes de saint Paul (1. Timoth. 4. v. 6. & suiv.) 'on est en état de l’enseigner aux autres, de la méditer, & d’avancer dans les voies de Dieu. C’est ce défaut d’instruction qui fait la perte de la jeunesse, & par conséquent la plus grande plaie de l’Eglise. De sorte que le grand moïen, & peut-être l’unique, de chasser le vice & le peché, & de faire refleurir la piété Chrétienne, est de procurer l’instruction & l’éducation des enfans. Car celui-là ne se trompoit pas, dit trés-bien Gerson, qui assusuroit que si on vouloit essaier la réforme des mœurs des Chrétiens, il faisoit la commencer par les enfans. Non fallebatur ergo, qui affirmavit reparationem morum Ecclesiasticorum si quæratur fieri, inchoandam esse à parvulis. (L. est. consid. 2. post medium.)

Cette maxime étant certaine, il faut convenir que ceux qui mettent les premiers la main à ce grand Ouvrage de la réforme des mœurs, sont ceux qui instruisent & qui élévent saintement les enfans. Combien donc doivent devenir précieux aux yeux du public, les Maîtres & les Maîtresses d’Ecoles Chrétiennes & Gratuites qui lui rendent ce service ? Ils remplacent les parens négligens & incapables de s’acquitter de la plus essentielle de leurs obligations, qui est d’aprendre la Doctrine Chrétienne & la science du salut à leurs enfans, & ils deviennent à l’égard des enfans pauvres & abandonnez, leurs vrais pères & leurs véritables mères en Jesus-Christ.

III.
2. Preuve de l’importance des Instituts des Maîtres & des Maîtresses des Ecoles chrétiennes, prise de l’excellence de la fonction d’enseigner la Doctrine Chrétienne.

Quand il ne seroit pas autant nécessaire qu’il l’est pour être sauvé, de sçavoir la Doctrine Chrétienne, on ne seroit pas excusable de l’ignorer ; car elle mérite infiniment plus que toute autre d’être aprise & enseignée, étant toute divine. Ainsi pour peu qu’on fasse réflexion sur la dignité & son excellence, on conviendra de l’excellence de la vocation de ceux qui se consacrent à l’enseigner. En effet, de quelque côté qu’on envisage la Doctrine Chrétienne, tout y est divin, soit dans son objet, soit dans la fin, soit dans ses caractéres, soit dans ses premiers Maîtres.

On sçait que les sciences tirent leur excellence de leur objet. Plus celui-ci est noble & relevé, plus elles le sont elles-mêmes ; Et plus elles sont elles-mêmes nobles & relevées, plus elles anoblissent la fonction de les enseigner.

Dignité de la fonction d’enseigner la Doctrine Chrétienne.
I. Excellence du Catéchisme.

La Médecine regarde le corps humain ; & c’est de la qualité de cet objet, que ceux qui l’enseignent, se font honneur. La Philosophie s’occupe de la nature & de tout ce qui s’y passe ; & c’est de la noblesse de ces objets, que se glorifient ceux qui en font des leçons. L’Astrologie contemple les Astres, & observe leurs mouvemens, leurs influences, & leurs effets ; & c’est sur la dignité de ces objets, qu’elle mesure la sienne. La Jurisprudence est la science du droit, elle est nécessaire aux Magistrats pour rendre la justice, & a une infinité d’autres qui la mettent à intérêt. C’est ce double avantage qui la rend précieuse.

Or ces sciences & toutes les autres, n’ont que des objets naturels, temporels, passagers, caducs & périssables. La Doctrine Chrétienne seule a pour objet, Dieu, ses perfections, les promesses, ses menaces, sus révélations, ses mystéres incompréhensibles & les loix ; & pour tout dire en un mot l’Eternité. Il faut donc mettre entre la fonction de ceux & de celles qui enseignent la Doctrine Chrétienne, & celle d’un Philosophe, d’un Médecin, d’un Astrologue ; d’un Général d’Armée, d’un Juge, d’un Avocat, la différence qu’il y a entre la nature & la Grace, entre le Ciel & la Terre, entre le tems & l’Eternité.

Domine quis credidit auditui nostro & brachium Domini cui revelatum est ? Seigneur, serons-nous crûs, quand nous le dirons ? Le monde qui ne juge des choses que par l’éclat qui les environne, voudra-t’il convenir que la fonction aussi-bien que la vocation d’un pauvre Frere, souvent fort méprisé & à peine regardé des Grands, est si fort au-dessus de celle de l’Avocat qui brille dans le Barreau par l’éloquence de ses plaidoïers, du Juge à qui la réputation d’intégrité fait le plus grand honneur dans le monde, du Médecin que l’habileté & l’expérience rendent précieux au genre humain, du Philosophe à qui la science enfle tant le cœur, de l’Astronome & du Mathematcicien, à qui les inventions curieuses & savantes font un si grand nom auprès des hommes ; de l’homme de Guerre, que la valeur & l’habilité dans l’art Militaire comblent de gloire & élévent au plus haut rang.

Disons quelque chose de plus. En comparant l’usage que fait le Catéchiste, de la Doctrine Chrétienne, à celui qu’en fait un Théologien spéculatif, ou un Prédicateur trop fleuri ; il faut convenir que celui-là est le plus digne de Dieu, & le plus conforme à la fin, qui est d’éclairer d’instruire & de nourrir l’ame. Le premier ajoûte à la Doctrine de Jesus-Christ, bien du sien en la chargeant de subtilitez & de raisonnemens humains, qui souvent loin de l’éclaircir & de lui donner du lustre, l’obscurcissent & l’embroüillent. Le second, trop souvent la farde, ou comme parle saint Paul, l’altére & l’énerve, en la voulant trop parer. Trop souvent l’usage de la Théologie sert plus à la gloire du Théologien, qu’à celle de Jesus-Christ. Trop souvent il se réduit à des abstractions séches, à des raisonnemens subtils, à des disputes vaines, à des questions de nom, ou de peu de conséquence. Au lieu que le Catéchisme, sans donner de réputation à celui qui le fait, tend immédiatement à faire connoitre, aimer & servir Dieu, & n’a point d’autre effet.

Fruits qui suivent la fonction d’enseigner la Doctrine Chrétienne d’une maniere simple & familiere.
2. Excellence du Catéchisme.

Le Catéchiste donne la Doctrine de Jesus-Christ, telle qu’elle est. En l’exposant dans la nudité & dans sa simplicité, il la met dans son vrai jour, il la laisse dans sa grace & dans son onction. Il ne lui ôte rien de la divine beauté ; au lieu que le Prédicateur souvent en la parant avec excès, la défigure, & en ternit la pureté. Car après tout, la Doctrine Chrétienne n’a pas besoin d’ornemens étrangers. Elle n’est jamais mieux reçûë du cœur, que quand on la présente à l’esprit dans la primitive simplicité. La grace lui donne des agrémens, que tout l’art imaginable ne lui peut prêter.

J’ose dire, qu’elle est comme une belle femme qui n’a besoin pour plaire, que de se montrer, & qui laisse aux laides le fard & l’étude des parures. Ce qui sert à celles-ci à couvrir ou à réparer les défauts de la nature, ombrage & masque les agrémens de celle-là.

D’ailleurs, à combien de personnes les plus éloquens Sermons font-ils inutiles ? On ne peut desavouer que les trois quarts des Auditoires les plus célèbres, composée des personnes du sexe, & d’autres de tous états peu instruits de leur Religion, ont plus besoin de bons Catéchismes & d’instructions Chrétiennes simples & familieres, que de discours d’apareil ; & que plus ceux-ci sont étudiez & recherchez, plus ils deviennent inutiles au plus grand nombre qui les écoute.

Au Catéchiste, il coute peu de tems, peu de peines, peu d’étude, peu de préparation pour enseigner avec fruit la Doctrine Chrétienne. De plus, rarement il l’enseigne sans profit pour les ames. Il en coûte, au contraire, infiniment au Prédicateur, sans qu’il en recueille souvent grand fruit. Plus il fait de dépenses en esprit, plus il donne la torture à son imagination pour en faire sortir des idées brillantes & des tours ingénieux, plus il s’épuise le cerveau pour faire un discours achevé : plus, pour l’ordinaire, il se fait admirer & aplaudir ; mais par malheur pour son ministère, plus il se fait admirer & aplaudir, plus il se fait oublier de Dieu, & rend inféconde la semence qu’il a jettée dans le cœur des Auditeurs.

Avoüons donc, que la Doctrine Chrétienne n’étant jamais plus fructueuse ; que quand elle est nuë & simple ; que se plaisant à sortir du cœur plus que de la bouche de ceux qui l’annoncent pour surprendre le cœur de ceux qui l’écoutent ; que perdant la grace & son onction par l’art qu’on lui prête ; la fonction de Catéchiste est celle qui lui convient le plus. Elle est en effet celle que Jesus-Christ & ses Apôtres ont mis en usage, comme il sera dit bien-tôt.

Le Prédicateur enseigne la Doctrine Chrétienne aussi-bien que le Catéchiste ; mais ne puis-je pas dire que le Catéchiste imite de plus près Jesus-Christ dans la maniere de l’enseigner, simple & familiére ; & qu’en ce point il a l’avantage sur le Prédicateur qui orne trop ses discours.

Jesus-Christ est le premier Maître qui ait enseigné Doctrine Chrétienne.
3. Excellence du Catéchisme.

C’est Jesus-Christ qui est le premier Auteur & le premier Maître de la Doctrine Chrétienne : Il s’a aportée du Ciel : Il l’a enseignée sur la terre : Comment ?d’une maniere simple & familiere.

La Doctrine qu’on enseigne dans les Ecoles Chrétiennes, n’est la Doctrine d’aucun homme mortel, pas même d’un Ange. Elle est élevée au-dessus de celle de Moïse, autant que Jesus-Christ l’est au-dessus du Legislateur des Juifs.

Pour ce qui est des autres sciences elles ne méritent pas d’entrer en paraléle avec elle.

La Médecine croit devoir son origine à Esculape & à Hipocrate. La Philosophie nouvelle reconnoît Descartes pour son premier Maître ; l’ancienne fait honneur à Platon, à Aristote à Zenon, à Pitagore, & à plusieurs autres, de ses succès. L’éloquence admire comme ses modéles, Demosthenes & Ciceron. L’art Militaire reconnoit pour ses Heros, les Cesars, les Annibals les Scipions, les Alexandres. Archimede a mis la science des Mathématiques en grand crédit. La Théologie Scholastique honore comme les premiers Maîtres, S. Jean Damascene, Pierre Lombard, Saint Thomas, Saint Bonaventure. Tous les Disciples de ces différens Docteurs se font grosse de les avoir pour Maitres & pour modéles. Ils s’attachent à étudier leur Doctrine & à s’y rendre parfaits. Ce sont des hommes qui sont enseignés par d’autres hommes. Quelque excellente qu’ils vantent la Doctrine qu’ils ont reçûë ils ne peuvent en chercher l’origine dans le Fils de Dieu. La science du Salut est la seule que ce divin Maître ait enseignée. Lui seul est l’Auteur de celle qu’on aprend dans le Catéchisme.

Jesus-Christ n’a discouru ni sur les secrets de la nature comme Salomon ni sur l’art de bien dire, comme Ciceron & Quintillien ni sur la métode de bien raisonner, comme Aristote, ni sur le talent de bien gouverner & de bien policer une République, comme Platon ; ni sur l’art Poëtique, comme Horace ; ni sur celui d’atteindre au sublime, comme Théophraste : En un mot, il ne nous a laissé aucunes instructions sur ce qui est caduc & périssable. Dieu qu’il est, il ne nous a parlé que de Dieu & des choses de Dieu. Tout le reste lui a paru indigne de lui & de nous. Les véritez éternelles dont il a reçû la connoissance avec la génération éternelle, composent le corps de la Doctrine Chrétienne, & c’est la seule qu’on enseigne dans le Catéchisme.

Multifariam multisque modis olim Deus loquens Patribus in Prophetis, novissimè locutus est nobis in FilioAd Hebr. I, v. 1., dit saint Paul. La bouche des Patriarches & des Prophêtes servoit autrefois d’organe à la voix de Dieu. C’étoit Dieu qui parloit en eux & par eux dans la Loi de nature & dans celle de Moïse.

Mais dans la nouvelle, il a choisi celle de son propre Fils pour l’oracle de ses révélations & de ses divines volontez. Or ce qu’il a plû à Jesus-Christ nous révéler, c’est ce qu’on enseigne dans le Catéchisme. La personne qui le fait, n’est que l’Echo du Verbe fait chair. En enseignant ce que Jesus-Christ a dit par lui-même ou par la bouche de les Apôtres, on aprend tout ce que le Chrétien doit savoir, & a intérêt de savoir. La science de tout le reste ne lui est pas nécessaire. L’ignorance de tout le reste est sans conséquence pour faire fortune dans un autre monde.

C’est Jesus-Christ lui-même qui enseigne, quand on fait le Catéchisme en son nom & avec sa mission. Bien plus, ce n’est ni Pierre, ni Paul, ni Apollo, qui parle, quand on enseigne la Doctrine de Jesus-Christ, c’est Jesus-Christ lui-même. Autre caractére de divinité que porte la fonction de Catéchiste.

4. Excellence du Catéchisme. Non-seulement Jesus-Christ est l’Auteur, & le premier Maître de la Doctrine qu’on enseigne dans une Ecole Chrétienne ; mais de plus, il est le seul qui en instruit par la bouche de tous ceux qui ont mission pour le faire. Leur langue est son organe. Comme ils ne disent que ce qu’il a dit, ils ne le disent que dans sa personne & par son autorité. Ils le representent, & ils ne parlent que dépendemment de sa grace, de sa vertu & de son Esprit, qui parle en eux & par eux. Deo exhortante per nos.

Les Carthesiens qui enseignent le systême de Philosophie de Descartes, peuvent bien dire que leur Doctrine est celle de Descartes ; mais ils ne peuvent pas dire que Descartes parle lui même par leur bouche ; car ce Philosophe mort n’a plus d’autre langue que les écrits qu’il a laissez. Son esprit n’est pas reproduit dans celui de les Disciples, son ame n’anime pas leurs corps, elle ne fournit pas des lumieres à leurs esprits, elle ne remue par leur langue. C’est pourtant ce que fait Jesus-Christ en tous ceux qui enseignent comme il faut sa Doctrine. Il les éclaire de ses lumieres ; il les anime de son Esprit ; il leur fournit les termes ; il leur inspire les pensées ; il revêt de grace & d’onction leur parole ; il rend fructueuses leurs instructions, c’est lui qui parle en eux : Et en parlant en eux, il ne fait que répéter ce qu’il a lui-même enseigné sur la terre. Ainsi eux d’enseignant que ce que Jesus-Christ a dit, ils ne sont sujets ni à l’erreur, ni à l’illusion ni au mensonge. Autre caractére de la divinité de la Doctrine Chrétienne, & de l’excellence de la fonction de l’enseigner.

Infaillibilité de la Doctrine chrétienne. Cette divine Doctrine participe à l’infaillibilité de son Auteur, & la communique à ceux qui l’enseignent pure & telle qu’elle est. Tandis que le Catéchiste se tient dans les bornes de la fonction, & qu’organe de la Doctrine de Jesus-Christ, de ses Apôtres & de son Eglise, il n’y mêle rien du sien, il est infaillible dans ce qu’il dit, & ceux qu’il enseigne sont à l’abri de toute erreur.

5. Excellence du Catéchisme. Aucune autre Doctrine ne peut communiquer ce privilége. Nul autre Disciple qui puisse jurer sur les paroles de son Maître. Quand il se feroit une Loi de ne dire que ce qu’a dit son Docteur, & de le dire en mêmes termes, il ne pourroit pas se fêter de n’être ni trompé, ni trompeur. En s’attachant opiniâtrement aux opinions de son Maitre, il pencheroit souvent du côté de l’erreur, lorsqu’il croiroit saisir la vérité ; car toute opinion, quelque aparence de vérité qu’elle porte, n’en a pas souvent la réalité. Par sa propre nature d’opinion, elle est exposée à l’erreur. Or, tout ce qui n’est point fondé sur la Foi, ou sur l’évidence, n’est qu’opinion, & n’a point d’apui sur une autorité certaine. Par conséquent dans tout ce qui n’est point de la Doctrine Chrétienne, ou qui n’a nul caractère d’évidence & de certitude, les Disciples s’exposent à s’égarer en suivant par tout leurs guides.

Quelque haut rang que tiennent aujourd’hui dans l’Ecole, saint Augustin & saint Thomas, il n’y a aucun de leurs Disciples qui voulussent sans restriction, adopter toutes leurs paroles, ni qui voulussent sans aucune modification soussigner à tous leurs sentimens, comme à des véritez infaillibles. Le privilége de l’infaillibilité ne convient à l’homme que quand il est l’organe de Dieu, ou qu’il ne répéte que ce que Dieu a dit par la bouche de son Fils, ou par celles des Prophètes, des Apôtres, des Ecrivains sacrez, & de l’Eglise, c’est-à-dire, que quand il n’enseigne que la Doctrine Chrétienne. Cherchons maintenant quand, & où elle s’enseigne plus pure & telle qu’elle est ; n’est-ce pas dans les Catéchismes ? C’est donc ces instructions simples & familiéres qui aprochent de plus près de l’infaillibilité de la Doctrine Chrétienne.

Jesus-Christ est le premier, & le modéle des Catéchistes.
6. Excellence du Catéchisme.
Le dirai-je ? Pourquoi ne le dirai-je pas ? Le Fils de Dieu fait homme, est le premier de tous les Catéchistes. Son Evangile est nôtre Catéchisme. La maniere dont Jesus-Christ l’a publié, tient plus de la forme des Catéchismes, que de celle des Sermons.

Que renferme l’Evangile ? Les Dogmes de la Foi & les veritez éternelles qu’il faut croire ; La Foi, les Préceptes, les maximes, les conseils, la Morale qu’il faut observer ; Les promesses, les menaces, les avis, les fins dernieres, & les Instructions qu’il faut méditer ; L’histoire de la Vie, de la Naissance, de la Passion & de la mort, & des autres Mysteres de Jesus-Christ ; Ses actions, ses exemples, & ses vertus qu’il faut imiter ; enfin les Sacremens qu’il faut recevoir.

Ces cinq Parties de la Doctrine Chrétienne, sont l’Evangile tout entier. Il enseigne cela, & il n’enseigne que cela. Et ce qui releve la fonction de catéchiser, au-dessus de toute autre maniere d’annoncer la parole de Dieu, c’est que c’est celle dont J. C. & ses Apôtres ont fait usage.

Qu’on ne s’imagine pas, que le grand Maître de la verité, & ses premiers Disciples ayent fait des Sermons tels qu’on les entend aujourd’hui dans les Chaires publiques avec des Exordes, des partages de Points, des divisions & subdivisions, des Peroraisons, des transitions délicates, & autres parties du Discours liées ensemble, & enchassées les unes dans les autres. Cette maniere d’instruire si étudiée, si recherchée & si pénible, n’est venuë à la mode, que lorsque les tems de la simplicité Apostolique passez, l’éloquence des Prédicateurs a voulu briller, & que la délicatesse des Auditeurs a préféré les discours ornez à ceux qui sont sans art & sans parures.

Toutes les Instructions de Jesus-Christ & de ses Apôtres ne pouvoient être plus simples & plus familieres. Les quatre Evangiles sont un rapport fidéle, naïf & sans étude, de la vie, des actions, des Miracles, des souffrances, Mysteres, des maximes, de la Loi & de la Doctrine de Jesus-Christ. Les Dogmes y sont énoncez avec précision ; les veritez du salut y sont annoncées en peu de paroles ; la Morale en et claire ; les préceptes & les conseils sont surmels & sans ambiguïté ; les Instructions sont populaires ; les Mysteres sont rapportez dans leur substance & avec peu de circonstances ; les promesses les plus magnifiques, & les menaces les plus terribles, sont proposées sans emphase & sans pompe. L’institution des Sacrements est exposée sans appareil. Tout y fait sentir l’efficace du Saint-Esprit, qui n’a besoin ni de beaucoup de tems, ni de beaucoup de paroles, ni du tour des pensées, ni des agrémens du langage, ni des ornements du discours, pour enseigner.

Quels sens profonds, par exemple, ne renferment pas les huit béatitudes Evangéliques ? Elles peuvent servir de matiere à des années entières de réflexions. Cependant, chacune d’elles est présentée sous l’enveloppe de cinq ou six mots. J’en dis autant de ces maximes, & de ces préceptes. Renoncez à vous-même, le Royaume des Cieux souffre violence ; Il n’y a que les violents qui l’emportent ; Ne craignez point les hommes qui tuënt le corps ; mais craignez celui qui peut perdre le corps & l’âme et les envoyer dans l’enfer : Celui qui ne renonce pas à tout ce qu’il possede, n’est pas digne de moi : Faites pénitence, car le Royaume des Cieux est proche : Que sert à l’homme de gagner tout le monde, s’il perd son ame ?

Ces articles de la Loi de Jésus-Christ ne peuvent être plus clairs, plus précis, plus formels, plus absolus, & plus courts. On ne peut y ajouter un mot qui ne soit de trop, ni en retrancher un qui soit superflu.

Si j’appelle l’Instruction que Jesus-Christ fit sur la montagne un vrai Catéchisme, je lui donne son vrai nom. Si celui de Sermon lui a été donné par les Peres, c’est dans le sens qu’on prend ce mot pour une instruction simple & familiere, dans le sens qu’ils appelloient eux-mêmes Sermons, les instructions claires, courtes & simples qu’ils faisoient aux Fidéles.

En effet, ce sermon de Jesus-Christ sur la montagne est le précis de sa Morale exposée avec clarté, sans prélude, sans partage de Points, sans transitions, sans peintures, sans portraits, sans descriptions, & sans aucune figure. La verité s’y montre à nud, et laisse à la grace seule la vertu de la faire recevoir.

Les Apôtres sont les premiers Catechistes de l’Église. Le nom de Catechisme ne convient-il pas encore parfaitement au premier discours de Saint Pierre, fait après la descente du Saint-Esprit, qui gagna à Jesus-Christ près de trois mille ames ; & au second, qui en convertit cinq mille ? Le Prince des Apôtres paroit-il Orateur ces deux premieres fois qu’il porta la parole devant le peuple ? Prépare-t-il ce qu’il a à dire ? Étudie-t-il ce qu’il doit prouver ? 7. Excellence du Catéchisme. Cherche-t-il dans la force des raisonnemens, de quoi convaincre, ou de quoi plaire dans l’arrangement des paroles & dans la beauté du langage ? Non, le Saint-Esprit qui parloit par sa bouche, ne fait pas dépendre sa puissance sur les cœurs, de l’éloquence humaine.

Si Saint Pierre avait été un Orateur disert, ou un savant Philosophe, qui eût sçû ou persuader l’esprit par la force de ses raisons, ou surprendre le cœur par l’art de bien dire, le Saint-Esprit n’eût pas choisi sa langue pour son organe. Sans sciences humaines, sans talens d’esprit, sans industrie aucune, il était tel que le vouloit le Saint-Esprit, tel qu’il le falloit pour faire honneur à Jésus-Christ. Saint Pierre a converti huit mille ames les deux premieres fois qu’il parle ; quelle efficace de la parole ! Si huit mille Sermons ne convertissent pas aujourd’hui huit personnes, n’est-ce point parce qu’ils ont perdu l’onction & la vertu de ceux de Saint Pierre, parce qu’ils en ont perdu la simplicité, & que ce ne sont plus des Apôtres qui les débitent.

Examinez ces deux Sermons de Saint Pierre, ce sont deux Instructions courtes, simples & sans art, qui n’ont de sorte que celle qu’ils tirent de la grace & de l’onction du Saint-Esprit. Ce Prince du Collége Apostolique y raporte simplement les Prophéties ; il les applique sans art à la descente du Saint-Esprit & à Jesus-Christ ; il montre qu’il est le Messie ; il établit la verité de sa Résurrection, la nécessité de la Pénitence & du Baptême, en très-peu de paroles, très-simples & très-communes ; c’est-à-dire, qu’il catéchise.

Saint Paul fait-il autre chose, lorsqu’il parle devant le Proconsul Felix ? En posture de Client devant lui il fait trembler son Juge : trem factus Felix. Que lui dit-il ? Il lui déclare l’obligation de la chasteté, la verité du Jugement de Dieu, & la nécessité de rendre compte de sa vie ; c’est-à-dire, qu’il catéchise.

Regardons ce même Apôtre au milieu de l’Aréopage. Là en spectacle dans la Ville qui passe pour la mere des Sciences, & l’Academie des beaux Esprits : Tout le monde le sçait, Athenes étoit le berceau, ou le rendez-vous de tous les grands Philosophes & de tous les célèbres Orateurs, le théâtre des beaux Ouvrages d’esprit & de l’éloquence : Là, dis-je, l’Apôtre des Nations paroit devant le plus auguste Sénat de la Grece, & prétend confondre, ou convertir ses Magistrats, tous gens distinguez par leur mérite & leur réputation, tous gens d’un esprit orné des Belles Lettres, & cultivé par les Sciences : étudie-t-il ce qu’il va dire ? Prépare-t-il les preuves de ce qu’il va avancer ? Cherche-t-il dans la pureté du langage, dans le tour du raisonnement, dans la grace de la parole, des armes victorieuses en faveur de la verité ? Non, il croiroit faire injure à l’Esprit de Dieu qui doit parler en lui, & évacuër le fruit de la Croix de Jesus-Christ : Non in persuasibilibus humanæ sæpientiæ verbis, &c.

Il s’abandonne aux mouvemens du Saint-Esprit, & il dit tout ce que l’Esprit Saint lui inspire. Examinez ce qu’il dit devant le plus auguste & le plus sçavant Tribunal du monde : Il annonce aux Grecs le Dieu inconnu qu’ils adorent sans le savoir ; il les instruit de son Unité, de sa Toute-Puissance, de son Immensité, de sa Providence, de sa Spiritualité, du Jugement dernier, de la Résurrection de Jesus Christ, de sa qualité de Juge souverain, & de la Résurrection des Morts ; & cela en si peu de paroles, qu’on ne peut pas en dire moins ; c’est-à-dire, qu’il leur fait un Catéchisme, dont le fruit est la conversion de saint Denis l’Areopagite & de plusieurs autres.

Ce grand Apôtre fait profession lui-même de parler sans art, avec simplicité & sans aucun appareil de discours. « Pour moi, mes Freres (écrit-il aux Corinthiens, (1. 2. v. 1. & suiv.) lorsque je suis venu vers vous pour vous annoncer l’Évangile de Jesus-Christ, je n’y suis point venu avec des discours élevez d’une éloquence & d’une sagesse humaine. Car je n’ai point fait profession de sçavoir autre chose parmi vous, que Jesus-Christ & Jesus-Christ crucifié. Et tant que j’ai été parmi vous, j’y ai toûjours été dans un état de foiblesse, de crainte & de tremblement. Je n’ai point employé en vous parlant, les discours persuasifs de la sagesse humaine, mais les effets sensibles de l’esprit & de la vertu de Dieu ; afin que votre foi ne soit point établie sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu…. Nous n’avons point reçû l’esprit du monde, mais l’esprit de Dieu ; afin que nous connoissions les dons que Dieu nous a faits : & nous les annonçons, non avec les discours qu’enseigne la sagesse humaine, mais avec ceux que l’esprit enseigne, traitant spirituellement les choses spirituelles. »

L’unique but de ce grand Apôtre étant donc d’enseigner Jesus-Christ & sa diPage:Blain - Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites.pdf/17 Page:Blain - Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites.pdf/18 Page:Blain - Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites.pdf/19 Page:Blain - Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites.pdf/20 Page:Blain - Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites.pdf/21 Page:Blain - Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites.pdf/22 Page:Blain - Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites.pdf/23 Page:Blain - Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites.pdf/24 Page:Blain - Discours sur l'Institution des Maitres et des Maitresses d'Ecoles Chrétiennes et Gratuites.pdf/25 Page:Blain - 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Nous ne pouvions sur ce sujet suivre de meilleurs Guides que les Evangélistes, qui ont joint dans l’histoire de la Vie de J. C. le recit de ses actions communes, & de quantité d’exemples de vertus journalieres, à celui de ses Miracles & de ses vertus les plus divines. Quand on veut écrire la Vie des Saints, peut-on se proposer de plus parfaits modéles, que ceux qui ont prêté leur plume au Saint-Esprit pour faire la relation de la Vie du Saint des Saints ? Si cette histoire de la Vie de Mr De La Salle peut servir à exciter dans les Lecteurs l’horreur du vice & l’atrait de la vertu, le desir de la perfection & un grand courage pour y travailler : si de plus elle réüssit à inspirer un grand zéle pour multiplier les Ecoles gratuites & pour favoriser les Instituts, qui se consacrent à une œuvre si importante, je suis parvenu au but où je voulois arriver, & j’abandonne volontiers à la critique des Connoisseurs le stile, la forme & le plan de cet ouvrage. Je souscris dès-à-present & volontiers à leur mépris ou à leur censure. Content de n’avoir eû qu’un talent, & de l’avoir mis à profit pour le salut du Prochain, je prie le Lecteur d’oublier la maniere dont cette Histoire est écrite, pour ne faire attention qu’aux exemples de vertu qu’elle lui offre à imiter.

On avertit les Freres eux-mêmes de n’être pas surpris de voir ici plusieurs choses qu’ils ignoroient. Ceux-là seuls en ont eû connoissance, qui avoient avec le saint Instituteur un raport plus immédiat, & en qui il avoit plus de confiance, ou qui entroient avec lui dans le maniement de certaines affaires.

Il y a même quelques faits raportez ici, dont aucun des Freres n’avoit connoissance, ou n’en avoit qu’une connoissance confuse ; mais celui-là même, qui a écrit cette Histoire, en ayant été témoin, il n’a pas crû devoir les omettre.

Enfin, il me reste à avertir ici les Lecteurs, qu’en donnant souvent dans le cours de cette Histoire le nom de saint Homme, de saint Prêtre, de saint Instituteur à Mr De La Salle, nous ne le donnons que dans le sens que les Apôtres dans leurs Lettres le donnent aux Chrétiens ; que dans le sens qu’on en qualifie les ames éminentes en vertu, lors même qu’elles vivent encore sur la terre ; que dans le sens qu’on l’attribuë aux personnes décédées en odeur de sainteté, sans vouloir ni directement, ni indirectement, prévenir le jugement de l’Eglise Romaine, à qui il appartient de juger de la sainteté des Fidéles, & de déclarer Saints, ceux dont elle a examiné, approuvé & canonisé la vie. Personne n’est plus que nous soumis au Saint Siége, & plus inviolablement attaché à cette Pierre sur laquelle est bâtie l’Eglise. Nous en avons toujours fait une Profession déclarée, & nous sommes bien aise d’avoir occasion de la rendre publique, & de protester que nous voulons mourir comme nous avons vécu, dans une parfaite obéïssance à Nôtre Saint Pere le Pape, & à l’Eglise Romaine, centre de l’Unité, hors laquelle il n’y a point de salut.

  1. Quis nesciat primitias florentis ætatis sicut & in plantis & vincis & rebus cæteris acceptiores exsistere, ac proinde obsequia parvulorum gratiora esse, quam senum debilitatorum qui non vitia deserunt, sed a vitiis derelinquuntur… Plane non video quid se Satanisante juvene sperandum sit in senectute, quando perversis inclinationibus accesserit perversior consuetudo… Parvuli… apti sunt ad accipienda bonorum studiorum exordia. Utres sunt recentes pro liquoribus optimis. Novelle præterea plantationes, quæ sequuntur levis, quo ducentis manus deflexerit esse quoque poterunt aliorum doctores instructores, commodissimi maxime domesticorum.
    Gerson tract. de parvulis trahendis ad Christum. Consid. I. Paulo post initium.
  2. At….. qui ponunt scandalum non immediatè & apertè ante pusillorum pedes, sed velut à Latere….. ductoribus eorumdem et instructoribus insidiantur, eos subsannant, & infamant et calumniantur. Loc. supra cit. confid. I. Longe post medium. Idem, ibid.