Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Achémènes 1


◄  Achée
Index alphabétique — A
Achémènes  ►
Index par tome


ACHÉMÈNES a été le père de Cambyses, et le grand-père de Cyrus, premier roi de Perse, si nous en croyons Hérodote[a]. Il y a d’autres passages où cet auteur semble parler d’un Achèmènes beaucoup plus ancien que celui-là ; car il dit que la nation persane était divisée en plusieurs espèces dont la plus illustre était composée des Pasargades, sous lesquels étaient compris les Achéménides, dont les rois de Perse descendaient[b]. Il introduit ailleurs[c] Cambyses, fils de Cyrus, exhortant au lit de la mort les principaux seigneurs de Perse, et surtout les Achéménides, à ne point souffrir que les Mèdes recouvrissent la royauté. Cela semble donner l’idée d’un Achémènes, tige de ces Achéménides, beaucoup plus ancien que l’aïeul de Cyrus. Étienne de Byzance fait mention d’un Achémènes, fils d’Égée, qu’il prétend avoir donné son nom à une province de Perse nommée Achéménie. D’autres disent que cet Achémènes fut fils de Persée[d] ; d’autres infèrent cela de ce que les rois de Perse étaient descendus de Persée (A). Presque tous les commentateurs d’Horace veulent que l’Achémènes dont il parle dans l’ode 12e. du IIe. livre comme d’un homme très-opulent, ait été un roi de Perse (B) ; mais, si cela est, il faut qu’il ait régné avant que les Mèdes eussent subjugué les Perses ; car, depuis que ceux-ci eurent fondé cette grande monarchie, que l’on compte pour la seconde universelle, on ne leur voit aucun roi de ce nom-là. Cyrus passe constamment pour leur premier roi ; et ceux qui veulent qu’il y en ait eu deux avant lui les distinguent fort nettement et de son père Cambyses et de son aïeul Achémènes [e]. Quoi qu’il en soit, l’épithète d’Achéméniens est souvent donnée aux Perses dans les anciens poëtes latins, et encore aujourd’hui la Perse se nomme Azemia [f], et les Perses Agemis[g].

  1. Herodot. lib. VII, cap. XI.
  2. Idem, lib. I, cap. CXXV.
  3. Idem, lib. III, cap. LXV.
  4. Nicolaüs. lib. II, Histor. apud Etymol. magni Autorem.
  5. Marsham. Chrono. Can. pag. 605, édit. Lips.
  6. Bizari, Hist. Pers. lib. I, pag. 5.
  7. Teixera in Itiner. Indiæ, cap. VI, apud Pinedo in Steph. Byz. pag. 145.

(A) De ce que les rois de Perse étaient descendus de Persée. ] M. Chevreau attribue à Hérodote d’avoir dit que les Persides, c’est-à-dire ceux de la maison de Persis, ou Persée, étaient sortis des Achéménides alliés des Pasargades[1]. Il assure dans la même page que, selon le témoignage d’Hérodote, les rois de Perse venaient de Persée ou Persis, et que les Persides étaient descendus des Achéménides, c’est-à-dire du premier qui eut le nom d’Achæmen dans cette famille. Tout cela est fort brouillé. Hérodote ne dit point en général que les Persides fussent sortis des Achéménides : il ne dit cela que des rois de Perse[2], c’est-à-dire, de Cyrus, et de ceux qui ont régné après lui[3]. Il distingue les Perses en plusieurs classes, parmi lesquelles il y en a une qu’il qualifie en particulier du nom de Perses ; une autre qu’il nomme les Pasargades, sous lesquels il met les Achéménides. Ailleurs[4], il dit bien que les Perses acquirent le nom de Perses depuis que Persée, fils de Jupiter et de Danaé, leur eut laissé son fils Persès qu’il avait eu d’Andromède ; mais il ne dit pas, comme le suppose M. Chevreau, que les rois de Perse tirassent leur extraction de Persée. Le raisonnement de M. Chevreau va là, que Cyrus n’était point inférieur en naissance aux rois de Médie ni aux rois de Perse, puisque ceux-ci descendaient d’Achémen aussi bien que Cyrus : il prouve qu’ils en descendaient, parce que les Persides en descendaient. Outre les faussetés que j’ai déjà relevées, il suppose celle-ci, que le premier qui porta le nom d’Achémen, était antérieur à Persée, fils de Jupiter. M. Dacier avait fort bien retenu ce qu’il cite de mémoire de cet endroit de M. Chevreau[5].

(B) Ait été un roi de Perse. ] M. Moréri dit bonnement qu’Achémènes a été le premier roi des Perses, et que de lui sont descendus tous les princes qui ont gouverné cette monarchie jusques à Darius. Mais d’abord je voudrais bien lui demander pourquoi, quand il parle de Cyrus, il lui attribue la première fondation de la monarchie des Perses ; et pourquoi, en donnant la liste des rois de Perse, il ne met point Achémènes au-dessus de Cyrus, mais celui-ci au-dessus de tous les autres. Il ne faut point se mêler de se tromper, ou il faut le faire conséquemment. Puis je voudrais bien qu’il me dît de quel Darius il parle ; car il y a eu deux ou trois rois de ce nom en Perse. Parle-t-il de celui qui fut vaincu par Alexandre-le-Grand ? Mais, en ce cas, il ferait trop le décisif ; les anciens ne demeurent pas d’accord que ce Darius fût de la famille royale. S’il parle de Darius fils d’Hystaspes, il s’exprime mal : ce terme de tous les princes n’est pas à propos, quand de plus de douze on ne veut parler que de deux. Je ne sais pourquoi M. Dacier borne l’épithète d’Achéménides au temps de Darius fils d’Hystaspes, quand il dit que les descendans d’Achémènes, roi de Perse, portèrent son nom jusqu’à ce Darius [6]. Je ne doute point qu’ils ne l’aient porté encore après lui ; car, outre que Xerxès son fils rapporte son extraction en ligne directe à Achémènes [7], nous voyons en ce même temps un Tigranes, général des Mèdes, qualifié Achéménide[8] : et nous trouvons un Achémènes, dont je parle ci-dessous, qui était frère de Xerxès. Je ne dis rien de Sapor, appelé Achemènes dans Ammien Marcellin : c’est un passage corrompu[9]. M. Chevreau, étonné sans doute de voir cinq générations entre ce Xerxès et Cyrus, croit que ce prince compte d’un côté ses ancêtres paternels, et de l’autre ses ancêtres maternels ; en sorte qu’il ne se fasse sortir d’Achémènes que du côté maternel : mais c’est ce qu’on ne trouve pas dans Hérodote ; à moins qu’on ne change le texte grec, selon la conjecture fort vraisemblable de M. de Saumaise[10].

  1. Chevreau, Hist. du monde, liv. I, chap. V. pag. 95, 96, édition de Hollande, en 1687.
  2. Herodot. lib. I, cap. CXXV.
  3. Περσῶν βασιλείς,... Ἀχαιμένης ἔκγονοι. Persarum reges.... ab Achæmene genus ducere. Plato in I. Alcibiad. pag. 440, L.
  4. Herodot. lib. VII, cap. LXI.
  5. Dacier sur Horace, tom. II, pag. 243.
  6. Dacier sur Horace, tom. II, pag. 243.
  7. Herodot. lib. VII, cap. XI.
  8. Ibidem, cap. LXII.
  9. Voyez M. de Valois in Amm. Marcell. lib. XIX, cap. II, pag. 210.
  10. Salmas. Exercit. Plinian., pag. 1183.

◄  Achée
Achémènes  ►