Dictionnaire de théologie catholique/TRITHÈME Jean

P. Séjourné
Texte établi par Alfred Vacant, Eugène Mangenot, Émile AmannLetouzey et Ané (Tome 15.2 : TRINITÉ - ZWINGLIANISMEp. 166-169).

TRITHÈME Jean, savant bénédictin, abbé de Spanheim, au diocèse de Mayence (1462-1519), est un polygraphe qui devrait intéresser les studieux d’histoire ecclésiastique, monastique et théologique, et qui jusqu’ici, il faut bien le dire, a été surtout fréquenté par les curieux de légendes et de sciences occultes. Né le 10 février 1462, au village de Trittenheim près de Trêves, et malmené par ses parents, il fit profession, le 21 novembre 1482, à l’abbaye de Spanheim, dont il devint abbé dès le 9 juillet de l’année suivante. Malgré des soucis constants d’ordre financier, il gouverna ce monastère de la congrégation de Bursfeld durant vingt-trois ans. Rejeté par ses moines, pour des raisons complexes, auxquelles il fait allusion dans ses lettres, cf. Busæus, Opera pia, p. 270-273, il fut presque immédiatement élu abbé de Saint-Jacques de Wurzbourg, où il mourut le 13 décembre 1516, entouré de la vénération publique.

Autodidacte et travailleur infatigable, grand collectionneur de manuscrits latins et grecs, — il en réunit deux mille à Spanheim, ce qui était une rareté pour l’époque, — il donna ses soins à la philosophie, au grec et à l’hébreu, à l’histoire, à l’hagiographie en particulier, à la théologie, dogmatique et morale, à trop de choses certes pour pouvoir exceller en aucune. Aussi les théologiens et historiens de l’Église qui veulent compulser ses nombreux ouvrages doivent le faire avec la plus extrême prudence ; mais ils ne s’y attarderont pas sans profit.

Parmi les cinquante-deux ouvrages dont il établit lui-même la liste en 1513, auxquels il en ajouta huit autres avant de mourir, nous ne pouvons signaler ici que ceux qui ont été le plus souvent réimprimés et étudiés.

Histoire ecclésiastique. — Il faut citer d’abord la Chronique d’Hirsau, qui s’étend de 830 à 1513, en 2 vol. édités en 1559, 1601, 1690 ; cette dernière édition, la seule complète ; publiée à Saint-Gall, sur le conseil de Mabillon, contient des détails importants pour l’histoire de l’Allemagne au xve siècle, mais aussi des récits tout à fait invérifiables par ailleurs sur l’histoire du célèbre monastère de Souabe, qui avait adapté et répandu les observances de Cluny en Bavière, en Autriche, en Saxe et jusqu’en Bohême. Cette richesse même de documents a suscité, en Allemagne, de nombreux examens critiques, depuis ceux de C. Wolff, Stuttgart, 1865, de Paul, Halle, 1867, et de H. Müller, Leipzig, 1871. Les modernes lui sont fort sévères, cf. R. Mittermüller, J. Trithemius, als Geschichtschreiber, dans Histor. pol. Blätter, t. lxii, 1910, surtout à propos de l’utilisation « des annales de Maginfrid », comme on le verra plus loin. On pourrait également lui faire un procès de tendances : celui d’avoir été comme gêné par le rôle de Guillaume d’Hirsau dans la lutte pour la papauté et de s’être montré infidèle à la tradition grégorienne de son propre monastère, empruntant avec complaisance aux pamphlets antigrégoriens. Cf. A. Nelson, Benso Albensis ou J. Trithème ? Stockholm, 1933.

Beaucoup plus stupéfiante serait, pour des Français, la lecture même hâtive des Origines de la nation des Francs, d’après Hunibald… On ne peut reproduire ce titre sans agiter la question, décidément fort gênante, des « falsifications de Trithème ». Dans ses deux grands ouvrages d’histoire, en effet, l’auteur se réclame, ici d’un annaliste allemand, Meginfrid, là d’un français Hunibald, auxquels il a donné place en son De scriptoribus ecclesiasticis. Or, ces deux chroniqueurs ne sont pas connus autrement. N’y a-t-il pas lieu de croire qu’ils ne figurent dans les œuvres de l’abbé que comme garants de ses propres inventions ? Déjà des écrivains du xvie siècle ont reconnu l’invraisemblance de certains détails et blâmé Trithème de son manque de critique. Au xviie siècle, d’autres l’ont ouvertement accusé de falsifications. Sans doute on a montré récemment qu’il affecte, à certains endroits, de se défier des données fabuleuses de son Hunibald, de son Meginfrid, et qu’il laisse subsister des contradictions entre leurs dires et les données qu’il avait par ailleurs. En somme, la preuve matérielle de la falsification est encore à faire ; cf. G. Mentz, Ist es bewiesen, dass Trithemius ein Fälscher war ? Iéna. 1892 : l’auteur de cet opuscule veut continuer à penser que ces deux sources seraient des compilations remontant au xiiie siècle, ce qui n’est pas fait pour donner plus d’autorité à deux ouvrages qui traitent du haut Moyen Age. D’ailleurs, la plupart des critiques, devant l’insuffisance de ces réponses, et sans tenir compte des procédés littéraires du xvie siècle, incriminent les intentions de l’écrivain, qui n’a peut-être eu d’autre tort que de se laisser prendre à son attrait maladif pour les légendes, du moment qu’il les lisait dans un manuscrit rare. Sur tout ce problème des sources, cf. U. Berlière, dans Revue bénédictine, 1892, p. 418-420.

On a certainement plus de respect, pour la Chronique de Spanheim, et la Chronique de Saint-Jacques de Wurzbourg, deux abbayes relativement récentes et dont l’auteur fut successivement le supérieur ; en effet, la meilleure part du récit est consacrée à l’œuvre personnelle de l’abbé Trithème. Sur la bibliothèque de Spanheim, voir Ziegelbauer, Historia rei litter. O. S. B., t. i, p. 490-498 ; P. Lehmann, Nachrichten von der Sponh. Bibliothek, dans Neues Archiv, t. xxxvi, p. 204, et Bibl. de l’École des Chartes, 1910, p. 112.

Ces fragments d’autobiographie sont à compléter par Nepiachus ou Histoire de ma jeunesse, et surtout par les Lettres dont l’auteur gardait dix volumes manuscrits ; elles ont été utilisées par le florilège d’Haguenau, 1536, les Miscellanea lipsiensia nova, t. ii, et les Studien und Mitteilungen aus dem Benedictiner Orden, 1883. Dans cette même revue, t. xxxvii, 1916, on les a abondamment citées, p. 288 sq., pour reconstituer le cercle des amis de Trithème. Sur le même sujet, cf. K. Hartfelder, Sybel’s Zeitschrift, 1882, p. 15.

Histoire littéraire. — Trithème a réalisé sa plus chère ambition, qui était de continuer la tâche encyclopédique d’Isidore de Séville : il en avait l’universelle curiosité et le goût de la classification patiente ; de même que le De viris illustribus de son devancier est un instrument de travail irremplaçable pour la fin de l’âge patristique, ainsi le De scriptoribus ecclesiasticis de J. Trithème, quoique sujet à caution à cause même de son étendue dans le temps et dans l’espace, à cause aussi de la coquetterie de l’auteur de ne jamais citer ses sources, reste un document unique en son genre pour toute la littérature latine du Moyen Age, surtout pour les ouvrages sortis des monastères et universités allemandes. Avec moins de souci littéraire que l’évêque de Séville, mais avec plus de soin à recopier les anciens catalogues de sa bibliothèque avec des bévues inexplicables, comme de placer sous les Othons le célèbre Smaragde, contemporain de Louis le Pieux, l’abbé de Spanheim y présente une série de 870 écrivains ou théologiens, rangés chronologiquement de 983 à 1494 ; pour chacun il donne quelques lignes de biographie et la liste de leurs œuvres avec l’incipit, quand il les a sous la main, avec leur seul titre pour beaucoup d’autres qu’il n’a pas lus. Le De scriptoribus publié à Bâle en 1494, puis à Mayence en 1497, complété à Paris en 1512, fut annoté par Aubert le Mire en 1718 pour la Bibliotheca latina mediæ et infimæ ætatis. Malgré ses lacunes et ses confusions, c’est pourtant cette nomenclature qui a mis Pez, Mabillon et leurs émules sur la voie d’identifications nombreuses, comme on peut le voir dans les préfaces de la Patrologie latine de Migne. Un ouvrage similaire : De luminaribus Germaniæ, Utrecht, 1495, fournit aussi des noms et des titres d’ouvrages inconnus par ailleurs. Un peu plus développées sont la Vie du Bx Raban Maur, insérée dans les Acta sanctorum des bollandistes, et l’Éloge de Rupert de Deutz, P. L., t. clxvii, col. 11-16. D’autres travaux bio-bibliographiques du même genre et tout juste de même valeur sont à chercher parmi les Opera pia dont nous parlerons ci-dessous, à savoir : De viris illustribus O. S. B., dont Baillet disait qu’ « il n’y a rien de moins exact », et la curieuse Histoire des carmes illustres, imprimée à part en 1593. On se dispensera de lire telle notice sur sainte Anne, saint Joseph et autres saints de l’Évangile, qui ne sont que des démarcations amplifiées des évangiles apocryphes : Trithème n’est pas un hagiographe.

Écrits ascétiques. — Ils constituent la partie la plus solide de son œuvre immense. Il faut mettre à part le Commentaire de la règle de saint Benoît, limité au prologue et aux sept premiers chapitres, explication docte et pieuse, qui témoigne, à la fois « des nombreuses lectures de l’auteur et de son ardent désir d’inculquer aux religieux le véritable esprit de leur vocation ». U. Berlière, Rev. liturg. et monast., 1927, p. 28. La correspondance de l’abbé de Spanheim mériterait aussi d’être consultée pour connaître ses idées sur la vocation monastique. Busæus, lettres 1, 4, 6, 9, 14 et 36, citées par U. Berlière, loc. cit., p. 30 sq. D’autres lettres concernent l’esprit de réforme ; l’organisation de la congrégation de Bursfeld, « si brillante en ses débuts », fut en grande partie l’œuvre capitale de J. Trithème, qui mit par écrit l’essentiel des délibérations de cette congrégation. Cf. U. Berlière, Les chapitres généraux de l’ordre de saint Benoît, dans Rev. bénéd., 1902, p. 52 sq. On y décida de lire au réfectoire, pendant la tenue des chapitres, son opuscule De ruina monastici ordinis. D’autres ouvrages, imprimés à part, mériteraient d’être lus et médités : par exemple, De vera sludiorum ratione, fol. 2, il donne ce conseil :

« Avant tout, il faut fuir l’oisiveté par une application

continuelle à l’étude : il y a tant à faire pour notre bien et le salut du prochain ! » Un autre livret est consacré à encourager et guider les moines dans la transcription des manuscrits.

Les seuls ouvrages d’édification qui soient accessibles sont ceux qui ont pris place parmi les vingt Opera pia et spiritualia publiés par le jésuite Busæus, en 1604, complétés l’année suivante par des Paralipomena. Citons : De religiosorum tentationibus, Busæus, t. i, p. 661-722, et De proprietate monachorum, ibid., p. 723-740 ; enfin De triplici regione claustralium. Il faut donner une attention particulière à ce dernier ouvrage de spiritualité monastique, parce que le chapitre annuel de 1499 décida de le faire réviser et imprimer conjointement avec l’Exercitium spirituale de l’abbé Thierry de Bursfeld, pour en constituer un livre officiel de la congrégation : « Il a plu à tous les Pères qu’une formule d’institution régulière conforme à la règle et aux cérémonies serait publiée pour servir de manuel à tous ceux qui dépendent de notre chapitre. » Recessus capitulorum annualium unionis Bursfeld, ms. de l’abbaye de Beuron, p. 68. D’un mot, la première « région claustrale » étant celle des monastères qui ne vivent pas selon la règle, les deux autres

« régions » correspondent sommairement à ce qu’on

appellera, un siècle plus tard, la voie illuminative et la voie unitive. « La lecture portera le moine à la méditation, et celle-ci engendrera en lui la componction, surtout la méditation de la passion du Sauveur. »

« L’entrée dans la région supérieure n’est possible

qu’à ceux qui, dans la seconde, se sont livrés au travail de la purification intérieure… » De cette dernière, Trithème, faute d’expérience personnelle prolongée, ne donne qu’une description assez imprécise, prise à la sainte Écriture : « Elle est tout repos et tranquillité ; c’est la vraie demeure des spirituels. On y goûte une félicité comparable à celle du ciel ; Dieu y est tout en tous… » Il y recommande une grande défiance à l’endroit des visions et des vocations particulières. Voir des citations abondantes dans Un écrivain ascétique de la fin du xve siècle, de la Rev. liturg. et monast., 1927, p. 64-78.

Un résumé de la doctrine de Trithème se lit dans l’une de ses premières lettres : Lectio sacra mentem provocat, meditatio compungit ; oratio quærit, contemplatio invenit. Lettre iv, Busæus, fol. 928. On en conclura que cet abbé de la fin du xve siècle « est bien de l’ancienne école bénédictine, qui suppose la séparation complète d’avec le monde, et qui consiste foncièrement en une vie d’étude faite en vue de la sanctification personnelle ». U. Berlière, Rev. liturg. et monast., 1927, p. 74. De même, en ce qui concerne la méthode d’oraison, « alors que les méditations méthodiques sont déjà en honneur chez Gérard Groot et Jean de Kastel, Trithème ne fait pas allusion à une telle méditation à heure déterminée, puisque la vie du moine, étant toute de recueillement, ne réclamait pas l’introduction d’un exercice plus systématique ». U. Berlière, op. cit., p. 76.

Enfin deux œuvres édifiantes de Trithème ont fait l’objet de travaux récents de la part de moines bénédictins ; mais ils relèvent plutôt du genre oratoire que du genre didactique. Ce sont d’abord, les Discours de Trithème aux chapitres généraux de la congrégation de Bursfeld. Quinze fois, au moins, de 1492 à 1516, l’abbé de Spanheim, puis de Wurzbourg fut appelé, par l’estime de ses confrères, à y prendre la parole sur l’état des monastères et les réformes à y introduire. Neuf discours nous sont parvenus : huit dans l’édition de Busæus, et un neuvième publié par dom Bonav, Thommen, d’après le ms. de Vienne, nat. 5172, dans Prunkreden des Abt J. Trilhemius, 2 fasc, Sarnen, 1933-1935. Ce dernier discours, prononcé en 1499, forme le t. ii de la publication ; dans le t. i, l’auteur donne une analyse développée des neuf sermons, en avertissant que le prédicateur, ayant en vue des réformes plus ou moins urgentes, est amené, par son cahier de visites, à insister sur les déficiences à corriger : de là son ton pessimiste. D’ailleurs toutes ces déclarations sont des discours d’apparat, conformes aux règles de la rhétorique de l’époque, sur le cursus le développement mesuré. Ils témoigneraient, s’il en était besoin, du zèle infatigable de l’orateur à revenir sur les points essentiels de cette vigoureuse réforme.

Un autre ouvrage du même genre oratoire : les Exhortations à ses moines de Spanheim, avait été édité en 1496 et en 1574 : dom Govino, moine bénédictin de Praglia, a donné des douze premières une élégante traduction italienne, publiée à Padoue en 1927. Ces Esortazioni, mieux encore que les Discours, dénotent chez Trithème un souci de la forme qui l’apparente aux écrivains spirituels de l’époque suivante.

Mais la doctrine de Trithème « reste éminemment traditionnelle ; et c’est ce qui lui donne sa place à part à ce tournant de l’histoire de l’ascèse, quand se clôt la période médiévale et que se développe l’humanisme qui ouvre les temps modernes. » U. Berlière, Introduction aux Esortazioni reproduite dans la Revue liturg. et monast., Maredsous, 1927, p. 78.

Opuscules théologiques. — Ils ont un certain mérite de méthode, nouveau également pour l’époque ; celui de revenir aux sources de l’Écriture et des Pères ; dans des lettres que Richard Simon publie avec éloge, Lettres choisies, t. iv, p. 131-140, l’abbé bénédictin s’élève contre les docteurs qui « citaient Aristote plutôt que Jésus-Christ ». Cependant, il n’a donné de sa méthode que des essais fragmentaires, comme Curiositas regia, 1511, 1515, 1522, 1533, …1603, réponse à huit questions théologiques proposées par l’empereur Maximilien, et XXXV quæstiones in Evangelium Johannis, adressées à Ulric Kreitwys, chanoine de Cologne, en 1496, retouchées en 1508, dont un manuscrit autographe est à Upsal ; cf. A. Nelson, Kyrkshistoriks Arsskrift, Upsal, 1932, p. 297. Du reste, Trithème prétendait que le théologien devait être familier avec les philosophes, les orateurs et les poètes : O utinam omnes theologi nostri temporis oratoriam colerent ! …Neque ignoramus quantam injuriam hodie suscipiani poetæ a theologis quibusdam indigeslis et crudis. Lettre à Morderer de 1492.

Œuvres scientifiques et pseudo-cabalistiques. — Ce sont peut-être les plus connues, celles en tous cas qui occasionnèrent à leur auteur le plus de désagrément. La plus ancienne en date est une diatribe contre la sorcellerie, Antipalus maleficiorum, édité bien plus tard, en 1555. Mais Trithème, toujours curieux, continua ses recherches en ce domaine réservé ; il donna : Philosophia naturalis de geomancia, en 1509 ; un Traité d’alchimie, traduit en allemand et imprimé en 1555 ; surtout sa Polygraphia en six livres remplis d’images cabalistiques et imprimés en 1518 à Oppenheim, édition devenue fort rare, traduite en français par G. de Collange et publiée à Paris en 1541, reprise mol pour mot par le fameux plagiaire hollandais D. de Hottinga en 1620 ; enfin la Steganographia, hoc est ars per occultam scripturam animi sui voluntatem absentibus aperiendi, Francfort, 1606. Là encore, les termes bizarres dont se sert l’auteur, par exemple spiritus diurni, spiritus nocturni, pour marquer, dans un chiffre donné, les lettres qui ne signifient rien, firent passer cet essai pour un livre de magie. De toute cette production, il ne faut dire ni trop de bien, ni trop de mal. Les bénédictins ont sans doute fait beaucoup d’honneur à l’abbé de Spanheim en le rangeant parmi les premiers interprètes des notes tironiennes, Nouvelle diplomatique, t. ii, p. 126 ; t. iii, p. 150. Mais ses ennemis, parmi lesquels d’abord un Français, Bouelles (Bovillus), eurent tort de voir de la diablerie dans son fait. Après ses premiers opuscules contre les sorciers, Trithème répondit ingénument aux attaques en disant qu’il n’aspirait « ni à pénétrer des mystères, ni à faire des prodiges » ; mais qu’il avait lu néanmoins des ouvrages de divination pour se mettre plus à même de les réfuter. Apparemment, le savant abbé s’était pris à son jeu, et y avait engagé ses lecteurs. Il se vit soupçonné d’erreurs graves et, dans ce milieu effervescent du début du xvie siècle, Il fut lui-même accusé de magie : le comte palatin Frédéric II livra aux flammes l’autographe de la Stéganographie. Bien plus, la renommée fit de Trithème un nécromancien, qui évoquait les morts et les démons, et le mêla à des histoires de sorciers pour lesquels ni les dates ni les lieux ne concordent. Sigismond, abbé de Séon en Bavière, prit sa défense : Trilhemius sui ipsius vindex, Ingolstadt, 1616. Sur ses recherches de sciences occultes, cf. Falk, Aus dem gelehrten Freundenkreise des J. Trithemius, dans Hist. pol. Blätter, t. lxx, p. 923-983. C’est Trithème qui fit le succès de la légende de Faust.

Biographies. — Horn, J. Trithemius, Wurzbourg, 1843 ; Ruland, J. Trithemius, dans Kunst und Leben, 1869 ; Müller, De Trithemii abbatis vitu et ingenio, Halle, 1863 ; Schneegans, Abt J. Trithemius und Kloster Spanheim, Kreuznach, 1882 ; J. Silbemagl, J. Trithemius, Ratisbonne, 1885, la meilleure ; J. Hermes, Ueber das Leben und die Schriften des J. Trithemius, Prüm, 1906.

Encyclopédies. — M. Ziegelbauer, Historia litteraria O. S. B., t. iii, p. 217 ; J. Janssen, Geschichte des deutschen Volkes, Fribourg, 1879 ; Gropp, Scriptores rerum Wirceburgensium, t. i, p. 218 ; Lexikon für Theol. und Kirche, t. x, 1938, p. 290-298.

Critique de ses œuvres historiques. — C. Wolff, J. Trithemius und die älteste Geschichte des Klosters Hirsau, Stuttgart, 1865 ; H. Müller, même sujet, Leipzig, 1871 et Halle, 1879 ; Paul, De fontibus a Trithemio in Ia parte chron. Hirs. adhibitis, Halle, 1867 ; L. Wocher, dans Studien und Mittheilungen O. S. B., 1910 ; surtout Roth, Studien zum J. Trithemius-Jubeljahr, même revue, 1916 ; R. Mittermüller, J. Trithemius als Geschichtschreiber, dans Hist. pol. Blätter, t. lxii.

Liste complète des œuvres imprimées dans Roth et J. Silbernagl, cités plus haut.

Éditions partielles. — Trithemii opera pia et spiritualia, éd. J. Busæus et Paralipomena, par le même éditeur, Mayence, 1604 et 1605 ; Trithemii opera historica, éd. Freher, Francfort, 2 vol. ; Annales Hirsaugienses, éd. J. Schlegel, Saint-Gall, 1690.

Influence. — P. Joachimsen, Geschichtsauffassung in Deutschland, t. i, Leipzig, 1910, p. 50-60 ; sur la congrégation de Bürsfeld en particulier, U. Berlière, Un écrivain ascétique de la fin du XVe siècle, dans Revue liturg. et monastique, Maredsous, 1927, surtout p. 64-69 ; Chevalier, Annales de philos. chrétienne, 1869.

P. Séjourné.