Dictionnaire de théologie catholique/LAURIA (Brancati de)

P. Édouard d’Alençon
Letouzey et Ané (Tome 9.1 : LAUBRUSSEL - LYREp. 14-15).

LAURIA (Brancati de), frère mineur conventuel et cardinal, était né le 10 avril 1612, dans la petite ville de Lauria (Calabres). Réduit à la dernière extrémité par une maladie grave, il avait fait vœu à saint François d’entrer dans son ordre, s’il revenait à la santé. En exécution de cette promesse, le 2 juillet 1630, il recevait l’habit religieux et changeait son nom de Jean-François en celui de Laurent. Après avoir achevé le cours de ses études et conquis le titre de maître en théologie, il enseignait à son tour dans plusieurs couvents et même à l’université de la Sapience à Rome. De bonne heure ses connaissances théologiques et canoniques lui valurent les charges de consulteur des Indulgences, des Rites, de la Visite, du Saint-Office, de la Consistoriale, d’examinateur du clergé et des évêques et de premier custode de la bibliothèque vaticane. Très estimé des papes Alexandre VII, Clément IX et Clément X, le P. Laurent était créé cardinal, du titre de Saints Apôtres, par Innocent XI, au consistoire du 1er septembre 1681, et bientôt après il était nommé bibliothécaire de la sainte Église. Il méritait cette dignité par ses précédents travaux, car, à peine investi de ces fonctions, il dédiait à sis collé gués du Sacré-Collège le dixième volume de ses œuvres Sous la pourpre, le cardinal Brancati continua sa vie laborieuse ; l’étude, disait-il, avait toujours été son meilleur repos, et, véritable enfant de saint François, il ne perdait pas pour cela l’esprit de sainte oraison et de dévotion. Sa charité était proverbiale, si bien qu’on l’accusait de prodigalité. Une inscription placée au couvent des Douze-Apôtres rappelle qu’il fut le bienfaiteur de cette maison, dont en particulier il avait fait construire la bibliothèque. Il contribua encore largement aux frais de la béatification de son confrère, l’humble Joseph de Cupertino. Enfin, plein de jours et de mérites, le cardinal Brancati s’endormit pieusement dans le Seigneur, le 30 novembre 1693.

Il laissait les ouvrages suivants : Epitome canonum omnium qui in conciliis generalibus ac provincialibus, in decreto Gratiani, in Decretalibus, in epistolis, in constitutionibus romanorum pontificum usque ad SS. D. N. Alexandri VII annum quartum continentur, in-fol. Rome, 1659, 2e édition, Venise, 1673, 1689, 1706 ; Cologne, 1683, 1684. Cet ouvrage est un simple index alphabétique, dans lequel il renvoie aux collections indiquées dans les préliminaires. Le barnabite Jean-Paul Paravicini, vicaire provincial d’Allemagne, le rééditait en y ajoutant les décisions principales, sous ce titre Polyanthea sacrorum canonum coordinatorum… olim opera Em. ac Rev. DD. Brancati de Laurea… in epitomen redacti… sublata fontis adeundi necessitate, 3 in-fol., Prague, 1708 ; Cologne, 1728. Son œuvre principale est la suivante : Commentaria in III et IV librum sententiarum Joannis Duns Scoti, 9 in-fol., Rome, 1653, 1682. Ces commentaires parurent dans un ordre assez bizarre, il commença par le IVe livre et le tome premier sur le IIIe livre parut le dernier. Roccaberti a inséré trois Disputationes, de decretis Ecclesiæ, de objecto materiali fidei in questionibus facti, de proponente legitime res fidei, extraites du t. III des Commentaires in IIIum librum, dans sa Biblioth. maxima pontificia, t. xv, p. 1-141, Rome, 1698.

Il publia ensuite Opuscula octo de oratione christiana ejusque speciebus, in tyronum orantium gratiam edita ab eorum amantissimo, in-8°, Rome, 1685 ; Venise, 1687 ; Brescia, 1697 ; Montreuil-sur-Mer, 1696, ouvrage très estimé et dont Benoît XIV faisait le plus grand cas déclarant ne pas connaître l’auteur « qui materiam orationis clarius, subtilius et tutius explicaverit » ; Opuscula tria de Deo quoad opera prædestinationis, reprobationis et gratiæ actualis, in commodum tyronum S. Augustini doctrinæ studiosorum elucubrata, in-4°, Rome, 1687 ; dans ces traités, écrit Hurter, il défend la grâce efficace par elle-même et la prédestination purement gratuite, comme la doctrine évidente de saint Augustin. Nous avons en témoignage de la piété du savant cardinal : Devota ad D. N. Jesum Christum precatio ; Devota laudis ad SS. Trinitatem oratio ; Gratulatoria humilis et devota oratio ad omnes cælestium civium ordines ; Devota ad beatam semper virginem Mariam salutatio, in-12, 1688, 1689, 1695

Brancati avait composé pour son usage un Index alphabeticus rerum et locorum omnium memorabilium ad annales card. Baronii, qu’il avait confié à un de ses admirateurs, le portugais Jean de Lima et Mello, marquis de Samandria, avec la permission de le faire imprimer ; l’impression était commencée quand mourut l’auteur. L’Index parut à Rome en 1694, in-4°. Dans sa préface l’éditeur annonçait que le P. Barthélémy Comando, conventuel, curé perpétuel des Douze-Apôtres, allait publier un autre ouvrage du cardinal dont il donnait un titre abrégé. C’est la Vita et Opera Jesu Christi, manu sanctorum evangelistarum scripta vel Contextus evangelicus, uno quatuor evangelistarum calamo sacram Jesu Christi describens historiam, in-12, Rome, 1695. Jean de Saint-Antoine rapporte que le même Comando édita un Compendium Nicolai de Lyra, du même auteur. Nous ne parlerons pas des manuscrits que Brancati laissait en mourant, ni d’autres œuvres littéraires ce que bous avons dit suffit à justifier le jugement de l’historien de la littérature italienne : « Il était tenu pour l’un des plus savants théologiens de son époque. »

Pour avoir confondu le cardinal Brancati, Brancatus, avec son contemporain et quasi homonyme Brancacci, Brancatius, également cardinal († 1675), Jean de Saint-Antoine lui a attribué plusieurs dissertations, dont celui-ci est l’auteur. La plus connue est celle qui a pour titre De chocolatis potu diatribe, in-4o, Rome, 1664 ; il y étudie cette question : an chocolates aqua dilutus, prout hodierno usu sorbetur, ecclesiasticum frangat jejunium, et répond que pris en petite quantité le chocolat ne rompt pas le jeûne. Éditée plusieurs fois, elle se trouve dans le volume des Dissertationes, de Brancacci, in-4o, Rome, 1672, avec les suivantes : De privilegiis quibus gaudent cardinales in propriis capellis ; De optione sex episcopatuum S. R. E. cardinalium ; De pactionibus cardinalium quæ vocantur conclavis capitula ; De sacro Viatico in extremo vitæ periculo certantibus exhibendo ; De regulis sanctorum Patrum ; De benedictione diaconali ; De altarium consecratione.

Le P. Comando publia Vita F. Laurentii Brancati de Laurea cardinalis bibliothecarii, in-4o, Rome, 1698 ; elle était aussi écrite en italien par l’abbé Gabriel Baba, in-4o, ibid., 1699.

Franchini, Bibliosofiae memorie letterarie di scrittori conventuali, Modène, 1693 ; Eggs, Purpura docta, Munich, 1714, l. VI, n. 98 ; Jean de Saint-Antoine, Bibliotheca universa franciscana, Madrid, 1732 ; Benoît XIV, De servorum Dei beatificatione, Bologne, 1734, l. III, c. xvi ; Mazzuchelli, Gli scrittori d’Italia, Brescia, 1763, t. ii, 4e part. ; Tiraboschi, Storia della letteratura italiana, Modène 1780, t. viii ; Hurter, Nomenclator, 3e édit., t. iv, col. 351-355.

P. Édouard d’Alençon.