Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/ARRÊTE-BŒUF

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 524).
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ARRÊTE-BŒUF. s. m. Anonis spinosa, flore purpureo C. B. autrefois Ononis. Aresta bovis. Plante dont il y a deux espèces principales. Voyez le Diction. Économ. On appelle cette plante Arrête-bœuf, parce que les bœufs sont quelquefois arrêtés en labourant dans des terres où cette herbe est commune, soit parce que les piquans dont ses tiges sont hérissées blessent les bœufs, soit parce que les racines sont si profondes & si difficiles à rompre, qu’il faut, pour dégager la charrue, les couper. Elles sont longues, traçantes, plongées assez avant en terre, très-souples, & poussent de leurs collets plusieurs tiges, le plus souvent couchées par terre, longues d’un pied & demi environ, branchues & garnies par intervalles d’assez fréquens piquans, quelquefois uniques sur-tout vers le sommet des tiges, longs & minces, à la base desquels sont attachées des feuilles au nombre de trois, portées sur une même queue. Ces feuilles sont petites, crénelées sur leurs bords, arrondies quelquefois, un peu oblongues, d’un vert obscur, velues, visqueuses au toucher, & d’une odeur urineuse assez désagréable. Les fleurs sont purpurines, légumineuses, & sortent des aisselles des feuilles. A ces fleurs succèdent des gousses courtes, qui contiennent quelques semences rondes, & un peu plus grosses que celles de la moutarde. Cette plante est fort apéritive ; mais on se désabuse de la compter parmi les diurétiques, car rien ne tourmente tant ceux qui ont la pierre, que son usage. La décoction de l’arrête-bœuf est fort détersive, & l’on s’en sert aussi utilement dans le scorbut pour rincer la bouche & nettoyer les ulcères. On se sert sur-tout de ses racines. On les met dans les tisanes, & les aposèmes apéritifs.

Les Anciens l’appellent Anonis, ou plutôt Ononis, du mot grec ὄνος, âne, parce que les ânes aiment à manger l’Arrête-bœuf ordinaire ; d’autres Remora aratri, acutella, aresta bovis, Burgane eu Bugronde.

Il y a plusieurs espèces d’Arrête-bœuf. L’Arrête-bœuf ordinaire varie par la couleur de ses fleurs, qui sont tantôt rayées de lignes purpurines, & qui sont quelquefois toutes blanches. Ses tiges aussi manquent de piquans, ou bien sont très-foibles.

Dans le nombre des espèces d’Arrête-bœuf connues, il y en a dont les fleurs sont jaunes ; quelques espèces qui ont leurs tiges & branches ligneuses.

Il y a un Arrête-bœuf qui croît en Provence & en Dauphiné, qui est un arbrisseau haut de deux à trois pieds, dont la racine est grosse, blanche, tendre & acre, les branches tortues & faciles à ployer, les feuilles presque semblables à celles du fenu-grec, les fleurs odorantes, & d’un pourpre rouge, fort vif, le dedans lavé & rayé de blanc. Elles ont au milieu un style qui forme une gousse pendante, qui enferme plusieurs graines brunes, de la figure d’un rein. Dorat en fait une plus ample description dans ses Mémoires. On l’appelle aussi arrête charrue.