Description de la Chine (La Haye)/De quelques autres Drogues

Scheuerlee (3p. 607-615).


DE QUELQUES AUTRES DROGUES
EMPLOYÉES DANS LA MÉDECINE CHINOISE.



DU HIA TSAO TONG TCHONG.


Description de cette plante.

Cette plante pendant l’été est une herbe ; mais quand l’hiver arrive, elle devient un ver. En effet il n’y a qu’à la considérer, pour voir que ce nom ne lui a pas été donné sans raison. Rien ne représente mieux un ver, long de neuf lignes, et de couleur jaunâtre. On voit bien formés la tête, le corps, les yeux, les pieds, les deux côtés du ventre, et les divers plis qu’il a sur le dos. C’est ce qui paraît mieux, quand elle est encore récente ; car avec le temps, surtout si on l’expose à l’air, elle devient noirâtre, et se corrompt aisément à cause de la ténuité de sa substance qui est molle. Cette plante passe à Peking pour étrangère, et est très rare. On n’en voit guère qu’au palais ; elle croît dans le Thibet. On en trouve aussi, mais en petite quantité sur les frontières de la province de Se tchuen, qui confine avec le royaume de Thibet ou Laza, que les Chinois nomment Sang ly. On n’a pu connaître ni la figure de ses feuilles, ni la couleur des fleurs qu’elle porte, ni la hauteur de sa tige.


Ses vertus.

Elles sont à peu près semblables à celles qu’on attribue au gin seng, avec cette différence que le fréquent usage de cette racine ne cause pas des hémorrhagies, comme fait le gin seng. Elle ne laisse pas de fortifier, et de rétablir les forces perdues, ou par l’excès de travail, ou par de longues maladies ; c’est ce que j’ai éprouvé moi-même, dit le P. Parrenin : j’avais perdu l’appétit et le sommeil, et nonobstant divers remèdes qu’on m’avait donnés, j’étais dans un abattement et dans une langueur extrêmes, causés par les fréquents voyages qu’il me fallait faire durant les rigueurs d’une saison froide et humide. Le Tsong tou des deux provinces de Se tchuen et de Chen si étant venu en Tartarie rendre ses devoirs à l’empereur, apporta selon la coutume, ce qu’il avait trouvé de plus singulier dans son département, et entre autres choses, des racines de hiao tsao tong tchong. Comme je l’avais connu autrefois, il vint me voir. Touché de mon état, il me proposa d’user de sa racine, qui m’était tout à fait inconnue. Il la loua beaucoup, comme font d’ordinaire ceux qui donnent, ou qui croient donner des remèdes spécifiques, et il m’enseigna la manière de la préparer.

Il faut, me dit-il, prendre cinq drachmes de cette racine toute entière, avec sa queue, et en farcir le ventre d’un canard domestique, que vous ferez cuire à petit feu. Quand il sera cuit, retirez-en la drogue, dont la vertu aura passé dans la chair du canard, et mangez-en soir et matin, pendant huit ou dix jours. En effet, quand j’en eus fait l’épreuve, l’appétit me revint, et mes forces se rétablirent. Le Tsong tou fut ravi de voir, avant son départ, le succès de son remède.

Les médecins de l’empereur que je consultai sur la vertu de cette racine, me l’expliquèrent de la même manière qu’avait fait le Tsong tou ; mais ils me dirent, qu’ils ne l’ordonnaient que dans le palais, à cause de la difficulté qu’il y a d’en avoir, et que s’il s’en trouvait à la Chine, ce ne pouvait être que dans la province de Hou quang, laquelle, entre les plantes qui lui sont propres, en produit beaucoup d’autres qui croissent dans les royaumes voisins. J’écrivis à un de mes amis qui y demeure, et je le priai de m’en envoyer ; mais le peu de cette racine dont il me fit présent, était noir, vieux, et carié, et coûtait quatre fois son poids d’argent.


DU SAN TSI.


Description de cette plante.


Le san tsi est plus facile à trouver : c’est une plante qui croît sans culture dans les montagnes des provinces de Yun nan, de Koei tcheou et de Se tchuen. Elle pousse huit tiges, qui n’ont point de branches. La tige du milieu est la plus haute, et a le corps rond. Il en sort trois feuilles semblables à celles de l’armoise : elles sont attachées à la tige par une queue de grandeur médiocre : elles ne sont pas veloutées, mais luisantes : leur couleur est d’un vert foncé. Les sept autres tiges qui n’ont pas plus d’un pied et demi de hauteur, et dont le corps est triangulaire, naissent de la première tige qui les surmonte, trois d’un côté, et quatre de l’autre : elles n’ont chacune qu’une seule feuille à l’extrémité supérieure : c’est ce qui lui a fait donner le nom de san tsi, qui veut dire trois et sept, parce que la tige du milieu a trois feuilles, et les sept autres tiges n’en ont en tout que sept. Toutes ces tiges sortent d’une racine ronde, de quatre pouces de diamètre. Cette racine en jette quantité d’autres petites, oblongues, de la grosseur du petit doigt, dont l'écorce est dure et rude : l’intérieur est d’une substance plus molle et de couleur jaunâtre. Ce sont ces petites racines qu’on emploie particulièrement dans la médecine. La tige du milieu est la seule qui ait des fleurs blanches : elles croissent à la pointe en forme de grappe de raisin, et s’épanouissent sur la fin de la septième lune, c’est-à-dire, au mois de juillet. Quand on veut multiplier cette plante, on prend la grosse racine, qu’on coupe en rouelles, et qu’on met en terre vers l’équinoxe du printemps. Un mois après, elle pousse ses tiges ; et au bout de trois ans c’est une plante formée, qui a toute la grandeur et la grosseur qu’elle peut avoir.


Ses usages.


Les médecins chinois prennent les tiges et les feuilles vers le solstice d’été. Ils les pilent, pour en exprimer le jus, qu’ils mêlent avec de la chaux comme en farine, en sont une masse qu’ils sèchent à l’ombre, et s’en servent pour guérir les plaies. Ils usent de ce même jus mêlé avec le vin, pour arrêter les crachements de sang : mais ce remède n’a de vertu qu’en été, et qu’à l’égard de ceux qui sont sur les lieux. C’est pourquoi à la fin de l’automne ils arrachent les grosses racines, et coupent les petites oblongues, dont je viens de parler, puis les font sécher à l’air, pour être transportées dans les autres provinces. Les plus pesantes de ces petites racines, dont la couleur est d’un gris tirant sur le noir, et qui croissent en un terrain sec sur les coteaux, sont regardées comme les meilleures. Celles qui sont légères, d’une couleur tirant sur le jaune, et qui croissent sur le bord des rivières, n’ont presqu’aucune vertu. Ces petites racines pulvérisées, au poids d’une drachme, guérissent les crachements de sang, et les hémorragies. Si l’on en faisait l’analyse, on leur trouverait peut-être plusieurs autres qualités que j’ignore. Ce que je viens de dire est tiré d’un écrit chinois donné par un médecin botaniste, qui a demeuré dans le lieu où croît cette racine. Il en a transporté dans la province de Kiang nan, où il fait son séjour, et assure qu’elle y vient fort bien : mais il n’a pas encore éprouvé si elle aura les mêmes vertus.


DE LA RHUBARBE.


Description.


Je sais que cette plante et ses propriétés sont très connues en Europe : peut-être néanmoins verra-t-on volontiers la description que j’en vais faire, telle qu’on l’a reçue d’un riche marchand chinois qui va l’acheter sur les lieux, et qui vient la vendre à Peking. Elle sera du moins plus exacte que celle qui nous a été donnée par le Sieur Pomet dans son Histoire générale des drogues.

Le tai hoang, ou la rhubarbe, croît en plusieurs endroits de la Chine. La meilleure est celle de Se tchuen : celle qui vient dans la province de Chen si et dans le royaume de Thibet, lui est fort inférieure : il en croît aussi ailleurs, mais qui n’est nullement estimée, et dont on ne fait ici nul usage. La tige de la rhubarbe est semblable aux petits bambous[1]. Elle est vide et très cassante : sa hauteur est de trois ou quatre pieds, et sa couleur d’un violet obscur. Dans la seconde lune, c’est-à-dire, au mois de mars, elle pousse des feuilles longues et épaisses. Ces feuilles sont quatre à quatre sur une même queue, se regardant, et formant un calice ; ses fleurs sont de couleur jaune, quelquefois aussi de couleur violette. A la cinquième lune elle produit une petite semence noire, de la grosseur d’un grain de millet. A la huitième lune on l’arrache ; la racine en est grosse et longue. Celle qui est la plus pesante et la plus marbrée en dedans, est la meilleure et la plus estimée. Cette racine est d’une nature qui la rend très difficile à sécher. Les Chinois, après l’avoir arrachée et nettoyée, la coupent en morceaux d’un ou de deux pouces, et la font sécher sur de grandes tables de pierre, sous lesquelles ils allument du feu. Ils tournent et retournent ces tronçons jusqu’à ce qu’ils soient bien secs. S’ils avaient des fours, tels que ceux d’Europe, ils ne se serviraient pas de ces tables. Comme cette opération ne suffit pas pour en chasser toute l’humidité, ils font un trou à chaque morceau : puis ils enfilent tous ces morceaux en forme de chapelet, pour les suspendre à la plus forte ardeur du soleil, jusqu’à ce qu’ils soient en état d’être conservés sans danger de se corrompre.


Ses usages.


Les Chinois pensent à peu près comme les Européens sur l’usage qui se fait de la rhubarbe. Néanmoins il est rare qu’ils se servent de la rhubarbe crue et en substance. Elle déchire les boyaux, disent-ils : cela veut dire qu’elle cause des tranchées ; et comme les Chinois aiment mieux d’ordinaire ne pas guérir, que d’être secourus avec de grandes douleurs, ils prennent plus volontiers la rhubarbe en décoction, avec beaucoup d’autres simples, qu’ils allient selon les règles de leur art. Que s’il est nécessaire qu’ils la prennent en substance, ils la préparent auparavant de la manière que je vais dire.

Ils prennent une quantité de tronçons de rhubarbe, selon le besoin qu’ils en ont, et les font tremper un jour et une nuit dans du vin de riz (celui de raisin, s’ils en avaient, serait meilleur), jusqu’à ce qu’ils soient bien amollis, et qu’on les puisse couper en rouelles assez minces. Après quoi ils posent sur un fourneau de briques une espèce de chaudière, dont l’ouverture est de deux pieds de diamètre, et va en se rétrécissant jusqu’au fond en forme de calotte : ils la remplissent d’eau, couvrent la chaudière d’un tamis renversé, qui est fait de petits filets d’écorce de bambou, et qui s’ajuste avec l’ouverture de la chaudière. Sur le fond du tamis, ils posent les rouelles de rhubarbe, et couvrent le tout avec un fond de tamis de bois, sur lequel ils jettent encore un feutre, afin que la fumée de l’eau chaude ne puisse sortir. Ils allument ensuite leur fourneau, et font bouillir l’eau. La fumée qui s’élève par le tamis, pénètre les rouelles de rhubarbe, et les décharge de leur âcreté. Enfin cette fumée se résolvant, comme dans l’alambic, retombe dans la chaudière bouillante, et jaunit l’eau, que les Chinois gardent pour les maladies cuticulaires. Ces rouelles doivent demeurer au moins huit heures dans cette circulation de fumée, après quoi on les tire pour les faire sécher au soleil : on recommence deux fois la même opération, et pour lors la rhubarbe est préparée, et est de couleur noire. On peut la piler et en faire des pilules purgatives. Cinq ou six drachmes au moins font une prise, qui purge lentement et sans tranchées : l’urine ce jour-là est plus abondante, et de couleur rougeâtre ; ce qui marque, disent les Chinois, une fausse chaleur qui se dissipe par cette voie. Ceux qui ont de la répugnance à avaler tant de pilules, prennent la même quantité de rouelles sèches, et les font bouillir dans un petit vase de terre ou d’argent, avec neuf onces d’eau, jusqu’à la réduction de trois onces, qu’ils avalent tièdes : quelquefois ils y mêlent des simples.

M. Pomet, dans son Histoire, assure que l’endroit par où l’on enfile la rhubarbe, étant donné en poudre le matin à jeun, au poids d’un gros, dans un verre d’eau de rose ou de plantin, est un remède infaillible pour le cours de ventre. Un autre droguiste moins célèbre a imprimé la même chose. Mais un médecin chinois dit que la rhubarbe commence toujours à se corrompre par ce trou, que la poudre qui s’y trouve n’est de nul usage, et qu’on a grand soin de la jeter, pour ne se servir que de l’intérieur de la racine, qui est pesant, et bien marbré.


DU TANG COUE.


Cette racine est très aromatique, et mérite une attention particulière. Les médecins chinois, qui s’en servent, n’en reconnaissent pas tous les usages, parce qu’ils ne savent pas en faire l’analyse. Ils l’appellent tang coué : elle est toujours humide, parce qu’elle est huileuse. Sa vertu, disent-ils, est de nourrir le sang, d’aider à la circulation, de fortifier, etc. Il est aisé d’en avoir en quantité, et à bon marché ; on peut même la transporter sans craindre qu’elle se corrompe, pourvu qu’on prenne les mêmes précautions que les Chinois, qui de la province de Se tchuen en transportent dans les autres provinces des racines entières, qu’on garde dans les grands magasins. C’est là que les petits marchands qui ont des boutiques particulières, s’en fournissent : ils coupent cette racine, de même que toutes les autres, en morceaux très minces, qu’ils vendent en détail. C’est pourquoi, si des marchands d’Europe veulent acheter des drogues chinoises à Canton, ils ne les doivent prendre que dans les grands magasins, et non pas dans les boutiques, où les racines ne se vendent que coupées en petits tronçons.


DU NGO KIAO.


Sa description, et comment il se prépare.


La province de Chan tong a plusieurs métropoles, dont l’une se nomme Yen tcheou fou. Il y a dans son district une ville du troisième ordre, appelée Ngo hien. Près de cette ville est un puits naturel, ou un trou en forme de puits, de soixante-dix pieds de profondeur, qui communique, à ce que disent les Chinois, avec un lac, ou avec quelque grand réservoir d’eau souterraine. L’eau qu’on en tire, est très claire, et plus pesante que l’eau commune. Si on la mêle avec de l’eau trouble, elle l’éclaircit d’abord en précipitant les saletés au fond du vase, de même que l’alun éclaircit les eaux bourbeuses. C’est de l’eau de ce puits qu’on se sert pour faire le Ngo kiao, qui n’est autre chose qu’une colle de peau d’âne noir.

On prend la peau de cet animal tué tout récemment : on la fait tremper cinq jours de suite dans l’eau tirée de ce puits, après quoi on la retire pour la racler, et la nettoyer en dedans et en dehors : on la coupe ensuite en petits morceaux, et on la fait bouillir à petit feu dans l’eau de ce même puits, jusqu’à ce que ces morceaux soient réduits en colle, qu’on passe toute chaude par une toile, pour en rejeter les parties les plus grossières, qui n’ont pu être fondues : puis on en dissipe l’humidité, et chacun lui donne la forme qui lui plaît. Les Chinois la jettent en moule avec des caractères, des cachets, ou les enseignes de leurs boutiques.


Ses vertus.


Les Chinois attribuent beaucoup de vertus à ce remède : ils assurent qu’il dissout les phlegmes ; qu’il est ami de la poitrine ; qu’il facilite le mouvement des lobes du poumon, qu’il arrête l’oppression, et rend la respiration plus libre à ceux qui ont l’haleine courte, qu’il rétablit le sang, et tient les boyaux en état de faire leurs fonctions, qu’il affermit l’enfant dans le sein de sa mère, qu’il dissipe les vents et la chaleur ; qu’il arrête le flux de sang, et provoque l’urine, etc. Ce qu’il y a de plus certain, est que cette drogue, prise à jeun, est bonne pour les maladies du poumon ; l’expérience l’a confirmé plusieurs fois. Ce remède est lent, et il faut le continuer longtemps. Il se prend en décoction avec des simples ; quelquefois aussi en poudre, mais plus rarement.


DE LA CIRE BLANCHE.


FAITE PAR DES INSECTES, ET NOMMÉE
tchang pe la, c’est-à-dire, cire blanche d’insectes.


Ki dit : La cire blanche dont il s’agit ici, n’est pas la même que la cire blanche des abeilles. Ce sont de petits insectes qui la forment. Ces insectes sucent le suc de l'espèce d’arbres nommés tong tsin, et à la longue ils le changent en une sorte de graisse blanche, qu’ils attachent aux branches de l’arbre.

Il y en a qui disent que c’est la fiente de ces insectes, qui s’attachant à l’arbre, forme cette cire ; mais ils se trompent. On la tire en raclant les branches dans la saison de l’automne ; on la fait fondre sur le feu, et l’ayant passée, on la verse dans l’eau froide, où elle se fige, et se forme en pains. Quand on l’a rompue, on voit dans les morceaux brisés, des veines comme dans la pierre blanche, ou congélation nommée pe che cao ; elle est polie et brillante : on la mêle avec de l’huile, et on en fait des chandelles. Elle est beaucoup supérieure à celle que font les abeilles.

Chi tchin dit : Ce n’est que sous la dynastie des Yuen qu’on a commencé à connaître la cire formée par des insectes. L’usage en est devenu fort commun, soit dans la médecine, soit pour faire des bougies. Il s’en trouve dans les provinces de Se tchuen, de Hou quang, de Yun nan, de Fo kien, de Tche kiang, de Kiang nan, et généralement dans tous les quartiers du Sud-Est. Celle qu’on ramasse dans les provinces de Se tchuen et d’Yun nan, et dans les territoires de Hen tcheou, et de Yung tcheou est la meilleure.

L’arbre qui porte cette cire, a les branches et les feuilles semblables à celles du tong tsin. Il conserve sa verdure durant toutes les saisons : il pousse des fleurs blanches, en bouquets, durant la cinquième lune ; il porte des fruits en bayes, gros comme le fruit du kin rampant.

Quand ils ne sont pas mûrs, ils sont de couleur verte ; et ils deviennent noirâtres, lorsqu’ils mûrissent, au lieu que le fruit du tong tsin est rouge. Les insectes qui s’y attachent sont fort petits. Quand le soleil parcourt les quinze derniers degrés des Gémeaux, ils se répandent en grimpant sur les branches de l’arbre ; ils en tirent le suc, et jettent par la bouche une certaine bave, qui, s’attachant aux branches encore tendres, se change en une graisse blanche, laquelle se durcit, et prend la forme de cire. On dirait que c’est de la gelée blanche que le froid a durcie.

Quand le soleil parcourt les quinze premiers degrés du signe de la Vierge, on fait la récolte de la cire, en l’enlevant de dessus les branches. Si l’on diffère à la cueillir, que le soleil ait entièrement parcouru ce signe, il est difficile de la détacher, même en la raclant.

Ces insectes sont blancs quand ils sont jeunes, et c’est alors qu’ils font leur cire. Quand ils deviennent vieux, ils sont d’un châtain qui tire sur le noir. C’est alors que formant de petits pelotons, ils s’attachent aux branches de l’arbre. Ces pelotons sont au commencement de la grosseur d’un grain de mil : vers l’entrée du printemps ils commencent à grossir, et à s’étendre. Ils sont attachés aux branches de l’arbre en forme de grappes, et à les voir, on dirait que l’arbre est chargé de fruits. Quand ils sont sur le point de mettre bas leurs œufs, ils font leur nid de même que les chenilles. Chacun de ces nids ou pelotons contient plusieurs centaines de petits œufs blancs.

Dans le temps que le soleil parcourt la seconde moitié du Taureau, on les cueille, et les ayant enveloppés dans des feuilles de yo[2], on les suspend à différents arbres, après que le soleil est sorti du signe des Gémeaux. Ces pelotons s’ouvrent, et les œufs produisent des insectes, qui, sortant les uns après les autres des feuilles dont ils sont enveloppés, montent sur l’arbre où ils font ensuite leur cire.

On doit avoir soin d’entretenir le dessous de l’arbre toujours propre, et de le garantir des fourmis, qui mangent ces insectes. On voit deux autres arbres auxquels on peut attacher les insectes, et qui porteront également de la cire ; l’un, qui se nomme tien tchu, et l’autre, qui est une espèce d’arbre aquatique, dont les feuilles ressemblent assez à celles du tilleul.


Qualités et effets de cette cire.


Elle est d’une nature qui n’est ni froide ni chaude, et qui n’a aucune qualité nuisible. Elle fait croître les chairs, elle arrête le sang, elle apaise les douleurs ; elle rétablit les forces ; elle unit les nerfs, et rejoint les os ; prise en poudre, dont on forme des pilules, elle fait mourir les vers qui causent la phtisie.

Tchi hen dit : La cire blanche est sous la domination du métal : ses esprits corroborent, fortifient, et sont propres à ramasser et à resserrer. C’est une drogue absolument nécessaire aux chirurgiens : elle a des effets admirables, quand on la fait entrer avec de la peau de ho hoang, dans la composition de l’onguent, qui fait renaître et croître les chairs.


  1. Ce sont des cannes chinoises.
  2. Espèce de simple à larges feuilles.