Chansons de route/Le Convoi de ravitaillement
LE CONVOI DE RAVITAILLEMENT
Là-bas, au loin, qu’est-c’ qu’on voit ?
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Là-bas, au loin, qu’est-c’ qu’on voit ?
Qu’est-ce donc que ce Convoi
Qui se déroule et se tord
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Qui se déroule et se tord
Comme un boa constrictor ?
C’est lGConvoi d’Ravitaill’ment,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
C’est l’Convoi d’Ravitaill’ment :
En v’ià pour deux heur’s seul’ment !
Si tu n’es pas trop pressé,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Si tu n’es pas trop pressé,
Assieds-toi, ça va passer :
Admire un peu les tringlots,
(Cahin-caha, hu-dia, hop-là !)
Admire un peu les tringlots,
Leurs mulets et leurs chevaux ;
Leurs « voitur’s de livraison »,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Leurs « voitur’s de livraison »
Sortant des meilleur’s Maisons ;
Pige-moi leurs omnibus,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Pige-moi leurs omnibus
Et leurs camions-autobus !
Yen a de tout’s dimensions,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Y en a de tout’s dimensions
Et de toutes les régions :
Ceux d’Bretagne et du Poitou,
(Cahin-caha, hu dia, hop là !)
Ceux d’Bretagne et du Poitou,
Ont des airs naïfs comm’tout ;
Ceux de Nice et de Menton
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Ceux de Nice et de Menton
Sent’nt le mimosa, dit-on ;
Ceux de Marseille et de Lyon,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Ceux de Marseille et de Lyon
Embaument l’ail et l’oignon ;
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Ceux d’Auvergne et du Berry
Ont l’air encore ahuri ;
Ceux de Paris, plus fringants,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Ceux de Paris, plus fringants,
Ont des p’tits airs arrogants…
Pourtant, ceux du Bon-Marché
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Pourtant, ceux du Bon-Marché,
Sont des étals de boucher ;
Cependant, ceux du Printemps,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Cependant, ceux du Printemps
Sont remplis d’haricots blancs ;
Pourtant ceux du Louvre sont…
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Pourtant ceux du Louvre sont
Remplis de boules de son ;
Ceux de la Place Clichy
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Ceux de la Place Clichy
Sont pleins de macaroni ;
Ceux du Petit-Saint-Thomas…
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Ceux du Petit-Saint-Thomas
De boîtes de « singe », en tas ;
Ceux de la maison Damoy,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Ceux de la maison Damoy
Sont pleins d’excellent « kahoua » ;
En v’là même un des Gal’ries
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
En v’là même un des Gal’ries
Qu’est plein de poudre et de riz ;
En v’ià deux d’la Ménagère
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
En v’là deux d’la Ménagère
Pleins de fromag’s de Gruvère ;
… Mais, tout à coup, patatras !
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Mais, tout à coup, patatras !
V’là l’Convoi dans l’embarras :
D’un camion de chez Potin,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
D’un camion de chez Potin
La roue casse avec potin ;
Un camion des Trois-Quartiers,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Un camion des Trois-Quartiers
Se brise en quatre quartiers ;
Un de la Bell’Jardinière,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Un de la Bell’Jardinière,
S’enlize au fond d’une ornière ;
La Samaritaine — aïe donc ! —
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
La Samaritaine aïe donc ! —
S’emboutit dans Pygmalion ;
Un vieux Pont-Neuf aplatit,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Un vieux Pont-Neuf aplatit
Un malheureux Gagn’-Petit !…
On répare… et l’on repart
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
On répare… et l’on repart
Avec une heur’de retard ;
Malgré la pluie et le vent,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Malgré la pluie et le vent,
La boue, la neige, en avant !…
Roulant, sacrant, nuit et jour,
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Roulant, sacrant, nuit et jour,
Le bon tringlot va toujours
Pour que les « gâs des tranchées »
(Cahin-caha, hu dia, hop-là !)
Pour que les « gâs des tranchées »
Aient à boire et à manger…
Aussi, crions, mes amis,
(Cahin-caha, hu-dia, hop-là !)
Aussi, crions, éblouis :
« Vive le Royal-Cambouis ! »
- ↑ La musique d’accompagnement est éditée par M. G. Ondet, 83, Faubourg Saint-Denis, Paris.