Biographie nationale de Belgique/Tome 2/BOMMEL, Corneille-Richard-Antoine VAN

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BOMMEL, Corneille-Richard-Antoine VAN



*BOMMEL (Corneille-Richard-Antoine VAN), évêque de Liége, né à Leyde le 5 avril 1790, mort à Liége le 7 avril 1852. Il appartenait à une famille de commerçants, ancienne et considérée, qui s’était toujours distinguée par un attachement inébranlable à la foi catholique. Sa mère, femme foncièrement pieuse et de grand mérite, dirigea sa première éducation, avec le concours d’un prêtre français, émigré en Hollande; mais cette instruction de famille dura peu. Ayant perdu son père en 1803 et sa mère deux ans après, il fut envoyé au collège de Willingshegge, près de Munster, où il fit d’excellentes études sous des prêtres français réfugiés, et plus tard au Borght, école supérieure, tenue par les mêmes professeurs. Quoique sa famille s’y opposât vivement, il résolut ensuite d’embrasser l’état ecclésiastique et s’y prépara sous la direction du célèbre Overberg, alors président du séminaire de Munster. L’abbé Van Bommel fut ordonné prêtre en 1816 par Mgr Gaspar Droste de Visschering, dont on connaît la belle conduite au prétendu concile de Paris.

Aussitôt qu’il fut de retour dans sa patrie, il s’occupa de mettre à exécution un projet que lui avaient inspiré le prélat et le pieux Overberg, celui de fonder en Hollande un collége catholique pour y former des jeunes gens à la piété et à la science. Avec le concours des abbés Camille de Wykerslooth[1] et Corneille van Niel[2], ses anciens condisciples et ses émules, il fixa cet établissement à Hageveld, près de Harlem, et lui imprima une direction excellente. En peu d’années la maison conquit une haute estime, non-seulement parmi les catholiques, mais même parmi les protestants de la Hollande septentrionale. Cependant les ministres du roi Guillaume avaient résolu de détruire toutes les écoles catholiques, celle de Hageveld fut fermée aussi par suite des funestes arrêtés de 1825, quoique le fondateur comptât de nombreux amis haut placés et même influents à la cour. Le roi Guillaume, que le caractère aimable et conciliant du jeune prêtre avait porté à croire qu’il l’amènerait aisément à ses vues, lui offrit la présidence du collége philosophique. Le prince se trompait. « Si le collége était établi avec le consentement du corps épiscopal et soumis à son autorité, répondit respectueusement l’abbé, j’en accepterais volontiers la direction, dont cependant je n’ignore pas les difficultés , mais je ne puis concourir à fonder un établissement renouvelé de Joseph II. » Sa franchise ne parut point blesser le roi, mais elle n’ébranla pas non plus ni ne modifia son opinion. Cet entêtement donna naissance à la célèbre union des catholiques et des libéraux, dont les droits étaient également méconnus, mais qui ne pouvait tendre alors qu’au redressement des griefs de la nation. Le fondateur du Hageveld y prit part avec tous les ennemis de l’oppression et de l’arbitraire. Justement effrayé alors, le gouvernement parut reculer; il promulgua le concordat conclu depuis quelque temps avec le pape Léon XII, et agréa pour les provinces méridionales trois nouveaux évêques, parmi lesquels l’abbé Van Bommel était désigné pour le diocèse de Liége. Cependant Guillaume n’agissait pas de bonne foi et reprenait d’une main ce qu’il semblait accorder de l’autre. C’est à cette occasion que l’élu de Liége publia, sous le titre de Trois chapitres sur les arrêtés du 20 juin 1829, un travail qui fit grande sensation. Il parut sous le voile de l’anonyme, mais peu de personnes en ignoraient l’auteur : il en avait fait remettre des exemplaires au roi et aux ministres et en agit de même pour son Essai sur le monopole de l’enseignement aux Pays-Bas, qui parut peu après.

Sacré évèque dans sa cathédrale le 15 novembre 1829, le nouveau prélat s’était à peine rendu compte de l’état de son vaste diocèse, quand éclata la révolution belge. Il n’y prit part que pour recommander à ses diocésains le maintien de l’ordre et de la tranquillité publique. Mais, quand les grandes puissances reconnurent l’indépendance de la Belgique, il se soumit au nouvel ordre de choses. En l’accusant de ne pas s’être retiré en Hollande, ses détracteurs ont prouvé qu’ils ignoraient les lois de l’Église et les devoirs d’un premier pasteur.

C’était une tâche bien ardue que celle de réorganiser un vaste diocèse privé de son évêque depuis plus de vingt ans, dont le chapitre était presque éteint, le séminaire réduit à un petit nombre d’élèves et les colléges détruits : mais grâce à une grande unité de vues, à une intelligence peu ordinaire et à un travail constant, le nouvel évêque, secondé par un excellent vicaire général, M. Barrett (voir ce nom), sut faire face à tout. Le nombre des chanoines fut heureusement complété et l’enseignement clérical, à tous ses degrés, établi sur les meilleures bases et dirigé par des règlements qui furent adoptés comme des modèles en des pays étrangers; surtout ceux du petit séminaire fondé à Rolduc, mais transféré plus tard à Saint-Trond. L’enseignement élémentaire, confié à des corporations religieuses, ne fut pas moins amélioré et différents catéchismes, composés avec le plus grand soin et proportionnés à l’âge des enfants, vinrent garantir le progrès de l’instruction religeuse. Ce fut encore sur la proposition de Mgr Van Bommel que les évèques belges prirent, en 1833, la résolution de fonder une université catholique.

Tant de travaux importants n’empêchaient pas l’infatigable prélat de remplir avec zèle les fonctions de l’épiscopat. Il prêchait fréquemment à Liége et dans les églises rurales qu’il parcourait dans ses tournées de confirmation; il traitait avec ampleur des principales vérités de la religion dans ses mandements, qu’on a recueillis en trois volumes[3] et il tint un synode provincial, dont les statuts marqués au coin d’une haute sagesse, furent loués par le pape Grégoire XVI dans le voyage que M. Van Bommel fit à Rome en 1845. L’année suivante il célébra avec une grande solennité l’anniversaire de l’institution de la Fête-Dieu, établie primitivement à Liége.

Un évêque aussi zélé qu’instruit ne pouvait manquer de rencontrer plus d’un détracteur à une époque où tous les sophismes trouvent des défenseurs. Ils s’en prirent surtout à son Sermon sur la primauté du souverain Pontife et à l’Exposé des vrais principes sur l’instruction primaire et secondaire, considérée dans ses rapports avec la religion. Deux ou trois ecclésiastiques déjà frappés de suspense et un plus grand nombre d’organes anonymes ou pseudonymes des loges figurant seuls parmi ses censeurs, le prélat eut tort, pensons-nous, de leur répondre et quelquefois sans la mesure que devaient lui imposer sa dignité et son caractère. Irréprochable dans ses mœurs, scrupuleux à remplir ses devoirs, d’une charité inépuisable, il pouvait se dispenser d’entrer en lice avec quelques pamphlétaires. Il mourut de la manière la plus édifiante, regretté vivement par tous les gens de bien.

J. J. De Smet.

Ulysse Capitaine. Nécrologe liégeois pour 1853. — Jacquemotte, Eloge funèbre. — L. Bellefroid, Oraison funèbre. — Annuaire de l’Université de Louvain pour 1853, etc.


  1. Mort évêque de Curium in partibus, en 1841.
  2. Décédé à Gand, le 30 novembre 1829.
  3. Le troisième volume est complété par les pièces funébres, le nécrologe par M. Lonay, etc., et a été publié par M. Vanderryst.