Bibliothèque Canadienne/Tome I/Numéro 1/Phénomènes naturels

Bibliothèque Canadienne/Tome I/Numéro 1
La Bibliothèque Canadienne, Tome I, Numéro 1, Texte établi par M Bibaud, éditeur et propriétaire, Imprimerie J. LaneVolume I, Numéro 1 (juin 1825) (p. 34-35).

PHÉNOMÈNES NATURELS.


Au commencement de l’année dernière, la Perse a été en proie aux plus terribles tremblements de terre dont il avait été fait mention depuis à peu près un demi-siècle. Des montagnes ont été rasées, et ont disparu de la surface de la terre ; des villes entières ont été abîmées, et sous leurs ruines ont été ensevelis plus des trois quarts de leurs habitans. Au commencement de la présente année, le même phénomène a causé des désastres semblables dans le nord de la Barbarie, comme le témoigne, entr’autres renseignemens, la lettre suivante datée d’Alger, le 7 Mars, 1825.

« Mercredi, 2 du mois, cette ville et les environs ont éprouvé un tremblement de terre qui a continué, par intervalles, pendant les cinq jours suivans, et qui a renversé plusieurs maisons et en a endommagé beaucoup d’autres. Il a totalement détruit la ville de Blida, à une journée de marche d’ici, en ensevelissant dans ses ruines presque tous les habitans. Sur une population de 15,000 individus, la plupart Maures, Juifs et Arabes, il n’en a échappé qu’environ 300, et ceux-là même sont mutilés horriblement.

« Demain, je me propose d’aller voir les ruines de cette ville infortunée, où l’on me dit qu’il se présente une scène de dévastation affreuse. On a déjà retiré 7,000 cadavres des ruines. Dans un lieu où l’on suppose qu’était un séminaire juif, on a trouvé les corps de 280 enfans, et un nombre immense de corps dans les ruines des mosquées, où le peuple était assemblé, la catastrophe ayant eu lieu à l’heure de la prière (10 heures.)

« Dans le voisinage immédiat de la ville, il s’est formé des ouvertures de 8 à 10 pieds de largeur sur autant de profondeur : et il est digne de remarque que le même phénomène qui précède ordinairement les éruptions de l’Etna et du Vésuve ont eu lieu à Blida ; c’est-à-dire, que les puits et les fontaines se sont entièrement desséchés. »

La lettre ajoute que les troupes envoyées par le gouvernement pour empêcher le pillage, avaient été attaquées par des hordes nombreuses descendues des montagnes, et que le dey avait donné la liberté à tous les esclaves, et ordonné des actions de grâce solennelles de ce qu’Alger avait échappé à la destruction.

Les derniers journaux font aussi mention d’un tremblement de terre qui a eu lieu dans l’île de Luçon, le 26 d’Octobre de l’année dernière, et a abîmé une grande partie de la ville de Manille. Les casernes, plusieurs églises et un grand nombre de maisons furent abattues : les toits des bâtimens qui restèrent sur pied, furent enlevés par un ouragan qui passa ensuite. À quatre milles audessus de la ville, sur le bord de la rivière, la terre s’ouvrit avec un fracas horrible, et peu après, on vit la rivière couverte de poissons morts qui dérivaient vers la mer. Le nombre des personnes qui avaient péri sous les ruines, ou autrement, n’était pas connu, mais on le croyait très considérable.