Autant en emporte le vent (Moréas)/Vous avec vos yeux

Autant en Emporte le Vent (1886-1887)Léon Vanier, libraire-éditeur (p. 13-14).




V




Vous, avec vos yeux, avec tes yeux,
Dans la bastille que tu hantes !
Celui qui dormait s’est éveillé
Au tocsin des heures beuglantes,
Il prendra sans doute,
Son bâton de route
Dans ses mains aux paumes sanglantes.

Il ira, du tournoi au combat,
À la défaite réciproque ;
Qu’il fende heaumes beaux et si clairs.
Son pennon, qu’il ventèle, est loque !
Le haubert qui lace
Sa poitrine lasse,
Si léger ! il fait qu’il suffoque.


Ah, que de tes jeux, que de tes pleurs
Aux rémissions tu l’exhortes,
Ah laisse ! tout l’orage a passé
Sur les lys, sur les roses fortes.
Comme un feu de flamme
Ton âme et son âme,
Toutes deux vos âmes sont mortes.