Alphonse Lemerre, éditeur (p. 81-82).

SOIR MYSTIQUE


En haut du parc, il est un sinueux canal
Qui dissout pâlement au lever de la lune
Les sanguines clartés du ciel. Triste, automnal,
Le lointain dort ; il naît une étoile, rien qu’une.

Vous avez froid, puis vous serrez votre manteau
Ma gentille tzarine, et la brume neigeuse
S’étale par là-bas comme une nappe d’eau,
Et cette profondeur semble marécageuse.


Par instants, on saisit les murmures tremblants
Des bois fous qui se sont heurtés, souples, sifflants,
S’inclinent les grands blés hautains, tout indolents.

Ce paysage lourd m’annihile et m’irrite.
Près la rive, une barque entr’ouverte s’effrite,
Et sur elle un jonc vert comme un long cil palpite.