Annales de pomologie belge et étrangère/Deuxième année/Nécrologie

NÉCROLOGIE.



La Commission royale de Pomologie a été, pour la première fois, frappée par la mort, le 21 mars 1854, en la personne d’un de ses membres, M. d’Avoine, docteur en médecine, à Malines, décédé, en cette ville, à l’âge de 51 ans.

Qu’il soit permis à celui qui, après avoir été son maître, fut ensuite son collègue et son ami, d’esquisser ici rapidement sa vie, et de payer ainsi à sa mémoire un légitime tribut d’estime et de regrets.

Pierre-Joseph d’AVOINE naquit à Anvers, le 23 février 1803. Il commença ses études sous mes auspices ; dès sa jeunesse, il montrait une vive intelligence et une grande ardeur au travail. Après avoir terminé ses humanités au collége de sa ville natale, il prit ses inscriptions à la faculté de médecine de l’université de Gand, où il obtint le diplôme de docteur, le 14 novembre 1829. Avant de se livrer à la pratique de son art, il voulut suivre, dans les hôpitaux de Paris, ces cours de clinique que donnent, avec tant d’éclat, les maîtres de la science. Bientôt après, il vint se fixer à Malines, où tout d’abord son mérite et son caractère lui conquirent la confiance de tous. Le choléra de 1832 mit en relief ses qualités d’homme et de médecin ; le gouvernement, voulant reconnaître le dévouement, le zèle infatigable et déterminé dont il avait fait preuve pendant toute la durée du terrible fléau, lui accorda la médaille d’or, destinée à cette occasion.

Le jeune docteur se reposait des fatigues de la vie active, en se livrant à des travaux historiques et de littérature médicale, et en concourant, par la rédaction de notices biographiques, à faire connaître cette pléiade de savants qui, dans le xve, le xvie et le xviie siècle, illustraient la ville de Malines. On a de lui un grand nombre d’Observations curieuses sur l’asthme nerveux, les péricardites, etc., l’Éloge de Dodonœus, suivi de la concordance des espèces végétales décrites et figurées par le célèbre botaniste, avec les noms que Linné et les auteurs modernes y ont donnés, un Essai sur Marguerite d’Autriche et des Notices sur Joachim Roelants, Thomas de Rye, Jean Storms, Charles Van Bouchout, célèbre chimiste, et Jean-Corneille Jacobs, président de la Société de médecine, chirurgie et pharmacie de Bruxelles.

Il appartient aux Annales de Pomologie de faire une mention particulière des travaux d’horticulture, des découvertes de pomologie par lesquels M. d’Avoine s’est fait connaître, et qui avaient déterminé le gouvernement à le nommer membre de la Commission royale, et à lui offrir les fonctions de membre du Comité de rédaction de ce recueil, que son état de santé ne lui permit pas d’accepter. Il présida, pendant plusieurs années, la Société des sciences naturelles de Malines, et fut un des fondateurs de la Société d’horticulture de la même ville, aujourd’hui si florissante sous la présidence de M. de Cannart d’Hamale ; il y remporta, le premier, le prix de belle culture, en exposant un Cypridium flavescens (Redouté) d’une végétation et d’une floraison des plus luxuriantes.

Il possédait une collection de plantes vivaces de pleine terre unique parmi celles des amateurs ; et il les cultivait d’une manière admirable.

M. d’Avoine avait enfin, aux portes de Malines, une pépinière renfermant près de 300 espèces et variétés de poiriers et de pommiers, un grand nombre de semis de poiriers provenant tous de nos meilleures nouveautés et notamment de la poire dite Joséphine de Malines.

La pomologie lui doit quelques bons fruits, entre autres l’excellentissime pêche Drap d’or, qu’il exhiba, pour la première fois, en 1848, à l’exposition de Vilvorde ; elle lui doit aussi, pour ainsi dire, le Beurré Tuerlinckx, le Beurré d’Avoine et la Calebasse de Bavay, dont il n’est pas l’auteur, mais qu’il découvrit dans les semis de M. Tuerlinckx, et qu’il engagea celui-ci à faire propager.

Dans la Commission de pomologie, comme dans toute sa carrière, il se distingua toujours par la rectitude de son jugement, par la justesse et la lucidité de ses appréciations.

Le corps médical perd en lui l’un de ses praticiens les plus distingués ; la ville de Malines, pour qui sa mort est un deuil public, un de ses meilleurs citoyens ; la science pomologique, un de ses plus instruits et de ses plus zélés propagateurs.

L. de Bavay.