Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 16/Géométrie des surfaces courbes, article 2

GÉOMÉTRIE DES SURFACES COURBES.

Démonstration d’une propriété générale
des lignes de contact des surfaces courbes
avec les surfaces coniques circonscrites ;

Par M. F. Vallès, élève à l’École royale polytechnique.
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Dans tous les traités analitiques des surfaces du second ordre, on démontre que la ligne de contact de ces sortes de surfaces avec la surface conique circonscrite est une courbe plane ; mais cette proposition n’est qu’un cas particulier d’une proposition plus générale que nous allons démontrer, et qu’on peut énoncer comme il suit :

THÉORÈME. La ligne de contact d’une surface d’un ordre quelconque avec la surface conique circonscrite, appartient toujours à une surface d’un ordre inférieur.

Démonstration. Soit une surface d’un ordre quelconque à laquelle on ait circonscrit une surface conique, ayant son sommet situé où l’on voudra, par rapport à cette première surface. Soit pris ce sommet pour origine des coordonnées, auxquelles nous supposons d’ailleurs une direction quelconque. Les équations de l’un des élémens de la surface conique seront de la forme

et, pour que cette droite ne puisse pas être une quelconque des droites menées par l’origine, il sera nécessaire qu’il existe entre et une certaine relation que nous représenterons par l’équation

dans laquelle mettant pour et les valeurs données par les deux équations précédentes, on obtiendra, pour l’équation générale, des surfaces coniques ayant leur sommet à l’origine

équation qui, résolue par rapport à deviendra

dans laquelle désigne une fonction tout-à-fait arbitraire.

Les deux différentielles partielles de cette équation, prises tourà-tour par rapport à et sont

et représentent, à l’ordinaire, les deux coefficiens diffèrentiels partiels

En multipliant ces dernières équations en croix et réduisant, on obtiendra, pour l’équation différentielle partielle générale des surfaces coniques qui ont leur sommet à l’origine

ou bien en développant, réduisant et divisant par

(1)

Cela posé, supposons que la surface à laquelle cette surface conique est circonscrite soit de l’ordre et soit son équation

(2)

ses deux équations différentielles partielles seront

or, si l’on veut que la surface conique lui soit circonscrite, il faudra qu’en leurs points communs elles aient le même plan tangent et qu’on ait conséquemment

ce qui changera les deux équations différentielles partielles en celles-ci

(3)

Éliminant donc et entre les équations (1) et (3), on obtiendra, pour une des équations de la ligne de contact des deux surfaces

(4)

tandis que l’autre équation de cette même ligne sera évidemment l’équation (2).

Mais quand une ligne est donnée dans l’espace par les équations de deux surfaces, dont elle est l’intersection, elle est tout aussi bien donnée par l’intersection de l’une de ces surfaces avec une autre dont l’équation serait une combinaison quelconque des équations de ces deux-là. Tout se réduit donc à prouver que, de la combinaison des deux équations

on peut en déduire une troisième d’un ordre inférieur à l’ordre

Pour cela représentons généralement par

un quelconque des termes de l’ordre de l’équation et pouvant avoir toutes les valeurs positives possibles, depuis zéro jusqu’à Les dérivées successives de ce terme, par rapport à seront respectivement

Pour savoir ce que ce terme produira dans l’équation (4), il faudra prendre la somme des produits de ces trois dérivées par et ce qui donnera simplement ;

c’est-à-dire, ce terme lui-même multiplié simplement par Quant aux termes des ordres inférieurs, contenus dans l’équation il est manifeste qu’ils n’introduiront que des termes d’ordre inférieur à dans l’équation (4), de sorte que cette équation contiendra tous les termes de l’ordre de l’équation multipliés simplement par

Donc, si de cette équation (4) on retranche le produit par de l’équation tous les termes de l’ordre disparaîtront de l’équation résultante, qui sera ainsi une équation d’un ordre inférieur à mais ce sera aussi l’équation d’une surface qui contiendra la ligne de contact de la surface conique avec la surface de l’ordre à laquelle elle est circonscrite ; donc il est vrai de dire, comme l’annonce le théorème, que cette ligne de contact appartient à une surface d’un ordre inférieur à celui de la surface à laquelle la surface conique se trouve circonscrite. Donc, en particulier, cette ligne de contact est une courbe plane, si la surface conique est circonscrite à une surface du second ordre.

Cette proposition, étant indépendante de la distance du sommet de la surface conique à la surface à laquelle elle se trouve circonscrite, elle aura lieu également lorsque ce sommet en sera infiniment distant. Notre théorème conduit donc à ce corollaire.

Corollaire. La ligne de contact d’une surface d’un ordre quelconque avec une surface cylindrique qui lui est circonscrite appartient toujours à une surface d’un ordre inférieur.

Par des raisonnemens et des calculs analogues, on démontrera le théorème suivant :

THÉORÈME. Les points de contact d’une courbe plane d’un ordre quelconque avec toutes les tangentes qui peuvent lui être menées d’un même point quelconque de son plan, sont tous situés sur une courbe d’un ordre inférieur au sien.

Démonstration. Soit pris le point d’où sont issues toutes les tangentes pour origine des coordonnées, auxquelles nous supposerons d’ailleurs une direction quelconque, et soit alors

(1)

l’équation de la courbe dont il s’agit, que nous supposons de l’ordre Toute droite menée par l’origine aura une équation de la forme

(2)

mais en différentiant l’équation de la courbe dont il s’agit, on obtient

Afin donc que la droite menée par l’origine lui soit tangente, il faudra qu’on ait

ce qui donnera

(3)

éliminant donc entre les équations (2) et (3), on obtiendra, pour l’équation d’une courbe qui contiendra tous les points de contact

(4)

Cette équation, combinée avec l’équation (1), donnera les points de contact dont il s’agit.

Mais, quand des points sont donnés sur un plan, par l’intersection de deux courbes, ils sont tout aussi bien donnés par l’intersection de l’une d’elles avec une autre dont l’équation serait une combinaison quelconque des équations de ces deux-là. Tout se réduit donc à prouver que, de la combinaison des deux équations

on en peut déduire une troisième d’un ordre inférieur à .

Or, soit représenté généralement par

un quelconque des termes de l’ordre de l’équation pouvant avoir toutes les valeurs positives possibles, de zéro à les dérivées de ce terme, par rapport à et seront respectivement

En prenant la somme de leurs produits par et le résultat

sera ce que ce terme aura fourni, dans la formation de l’équation (4) ; et, comme il est manifeste que les termes des ordres inférieurs, contenus dans l’équation n’introduiront que des termes d’ordre inférieur à dans l’équation (4) ; il s’ensuit que cette équation (4) contiendra exactement tous les termes de l’ordre de l’équation multipliés simplement par .

Donc, si, de cette équation (4), ou retranche fois l’équation tous les termes de l’ordre disparaîtront de l’équation résultante, qui sera conséquemment d’un ordre inférieur à mais ce sera l’équation d’une courbe qui contiendra tous les points de contact ; donc, comme l’annonce le théorème, ces points de contact sont sur une courbe d’un ordre inférieur à celui de la proposée.

Le théorème ne devant pas cesser d’avoir lieu lorsque le point d’où les tangentes sont issues se trouve infiniment distant de la courbe proposée, il en résulte le corollaire suivant :

Corollaire. Les points de contact d’une courbe plane, d’un ordre quelconque avec toutes ses tangentes parallèle à une droite fixe, située d’une manière quelconque sur son plan, appartiennent toujours à une autre courbe d’un ordre inférieur au sien.