Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 12/Trigonométrie, article 1

TRIGONOMÉTRIE SPHÉRIQUE.

Recherches sur les quadrilatères, tant rectilignes
que sphériques, inscrits au cercle ;

Par M. Guéneau d’Aumont, professeur, secrétaire
et conservateur de l’observatoire de la faculté des sciences de Dijon.
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§. I. Quadrilatère rectiligne.

Soient les côtés consécutifs d’un quadrilatère rectiligne inscrit au cercle ; soient les deux diagonales, la première se terminant aux sommets des angles et l’autre aux sommets des angles

Par la nature du quadrilatère inscrit, on aura

donc

équations d’où on tire

(1)

et par suite

(2)

Si, dans l’expression

on met pour la valeur que nous venons d’obtenir, il viendra, toutes réductions faites,

or, on a

donc, en substituant et divisant par

mais on a d’ailleurs

substituant donc et posant, pour abréger,

il viendra finalement

(3)

L’aire du quadrilatère dont il s’agit étant la somme des aires de deux triangles, dont l’un a pour ses trois côtés et l’autre pour les siens en représentant ce quadrilatère par on aura

c’est-à-dire, en substituant,

(4)

Si, dans cette expression, on suppose elle devient

qui est précisément celle de l’aire d’un triangle, en fonction de ses trois côtés[1].

Le cercle auquel est inscrit le quadrilatère dont il s’agit se trouvant en même temps circonscrit au triangle dont les trois côtés sont en représentant par le rayon de ce cercle, il est aisé de voir qu’on aura

mettant donc pour et les valeurs déterminées ci-dessus, et posant, pour abréger,

il viendra

[2](5)

Si ensuite, dans cette formule, on suppose on retombe sur l’expression connue du rayon du cercle circonscrit à un triangle en fonction de ses trois côtés.

La plupart des résultats auxquels nous venons de parvenir sont connus depuis long-temps. Si donc nous les reproduisons ici, c’est uniquement dans la vue d’en déduire et de leur comparer ceux qui vont faire présentement le sujet de nos recherches.

§. II. Quadrilatère sphérique.

Soient les côtés consécutifs d’un quadrilatère sphérique, inscrit à un cercle de la sphère ; soient les deux diagonales de ce quadrilatère ; la première étant celle qui se termine aux sommets des angles et la seconde celle qui se termine aux sommets des angles

Les cordes de ces quatre côtés et de ces deux diagonales, qui sont

sont les quatre côtés et les deux diagonales d’un quadrilatère rectiligne inscrit au même cercle ; d’où il suit qu’on pourra les substituer à la place de respectivement, dans les formules (1) précédemment obtenues. On aura ainsi, toutes réductions faites,

(I)

d’où ensuite

(II)

Dans le triangle sphérique dont les trois côtés sont on a

d’où

mais, on a généralement

donc

En mettant, dans ces deux formules, pour la valeur (I) que nous avons trouvée tout à l’heure, elles deviennent, en rassemblant d’une part tous les termes multipliés par et de l’autre tous les termes multipliés par


mais on trouve facilement

en substituant donc, mettant dans les dénominateurs pour et et et supprimant, haut et bas, le facteur il viendra

ou, en changeant respectivement, dans les numérateurs, et en et ,


mais



donc, en substituant

Le numérateur de la première fraction se décompose en ces deux facteurs

et le numérateur de la seconde en ces deux-ci :

de sorte qu’on a

or, on a

donc finalement

En faisant, pour abréger,

auquel cas et seront des fonctions symétriques des quatre côtés et en se rappelant que

on aura

(III)

d’où l’on voit qu’ici les angles opposés ne sont pas supplément l’un de l’autre, comme dans le quadrilatère rectiligne inscrit.

En changeant respectivement en il vient

mais on a

en substituant donc, et posant, pour abréger,

il viendra

cela revient à

d’où, par un développement ultérieur,

Ces deux fonctions étant symétriques, il en résulte que

et, par conséquent

c’est-à-dire que, dans tout quadrilatère sphérique inscrit, la somme de deux angles opposés est égale à la somme des deux autres angles ; propriété que le quadrilatère rectiligne inscrit partage, au surplus, avec le quadrilatère sphérique, avec cette différence seulement que, dans le premier, ces deux sommes sont constantes, tandis que, dans ce dernier, au contraire, elles sont variables.

Si l’on désigne par l’aire du quadrilatère, l’aire du triangle sphérique trirectangle étant prise pour unité, on aura, comme l’on sait,

ou bien, par ce qui vient d’être dit,

donc

et de là encore


(IV)

fonctions qui sont toutes symétriques.

Si l’on suppose le quadrilatère devient un triangle ; de sorte qu’en représentant par l’aire du triangle sphérique dont les trois côtés sont on a

formules connues, dont la dernière est due à M. Lhuilier, de Genève.

Si nous désignons par l’arc de grand cercle qui joint le pôle du cercle auquel notre quadrilatère est inscrit à l’un quelconque des points de sa circonférence, cet arc aura pour sinus le rayon même de ce cercle, de sorte que, pour obtenir il ne s’agira que de changer, dans la formule (5) précédemment obtenue,

respectivement en

Posant donc, pour abréger,

il viendra

(V)

Il est presque superflu d’observer que les résultats que nous venons d’obtenir, en dernier lieu, s’appliquent littéralement à l’angle tétraèdre inscrit au cône droit.

Dijon, le 20 décembre 1821.
  1. Sans connaître encore l’expression de l’aire d’un triangle en fonction de ses trois côtés, on peut prononcer, à l’avance, qu’elle en est une fonction symétrique ; attendu qu’avec les trois mêmes côtés donnés, on ne saurait former qu’un triangle donné. Mais, bien qu’avec les quatre mêmes côtés donnés on puisse former trois quadrilatères inscriptibles au cercle, non superposables, on peut néanmoins reconnaître, à l’avance, que l’expression de l’aire du quadrilatère inscrit, comme celle de l’aire du triangle est une fonction symétrique de ses côtés ; attendu que les trois quadrilatères résultant de la permutation des quatre mêmes côtés donnés, bien que non superposables, en général, sont néanmoins équivalens. Cela est d’abord évident pour le cas où l’on échange entre eux deux côtés consécutifs, puisqu’alors un des deux triangles dont se compose le quadrilatère reste le même, tandis que l’autre est seulement tourné en sens inverse ; et, quant à l’échange de deux côtés opposés, il doit encore en être de même, puisqu’on peut y parvenir par une suite d’échanges de deux côtés consécutifs. Ces mêmes considérations prouvent, en outre, que les trois quadrilatères sont-tous inscriptibles à un même cercle.
    J. D. G.
  2. D’après ce qui vient d’être dit, dans la précédente note, on ne doit pas être surpris de voir ici reparaître, de nouveau, une fonction symétrique des quatre côtés du quadrilatère.
    J. D. G.