Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 06/Astronomie, article 3

ASTRONOMIE.

Examen de l’hypothèse d’un mouvement rectiligne et
uniforme, considérée comme moyen de parvenir à
la détermination des orbites des corps célestes ;

Par M. Gergonne.
≈≈≈≈≈≈≈≈≈

I. Si un point mobile parcourt dans l’espace, d’un mouvement varié quelconque, une courbe plane ou à double courbure, et si l’on n’a à considérer les circonstances de son mouvement que durant un intervalle de temps assez court ; il sera permis de supposer, sans crainte d’erreur sensible, que, durant cet intervalle de temps, le point dont il s’agit parcourt, d’un mouvement rectiligne et uniforme, la tangente à la trajectoire qu’il décrit réellement. Cette supposition, admise par tous les géomètres, et sur laquelle ils ont même fondé la méthode des tangentes, ne pourrait souffrir d’objection que dans le seul cas où la partie de trajectoire que l’on considère offrirait quelque point singulier, ou bien dans celui où la vitesse du mobile, entre les extrémités de cette portion de trajectoire, éprouverait quelque changement brusque et fini.

En admettant donc cette hypothèse, concevons que l’on ait trois observations complètes d’une planète, embrassant un intervalle de temps peu considérable ; ces trois observations feront connaître la situation de trois rayons visuels, dirigés de l’observateur vers l’astre ; ainsi que les temps qui leur correspondent ; et, généralement parlant, ces trois rayons visuels ne seront point dans le même plan. Dans l’hypothèse que nous admettons ici, la droite supposée parcourue par l’astre, d’un mouvement uniforme, se trouvera donc assujettie à cette double condition, 1.o d’être coupée à la fois par les trois rayons visuels ; 2.o d’être coupée par ces rayons en parties proportionnelles aux intervalles de temps écoulés entre les observations. Or, en vertu de cette double condition, la droite dont il s’agit se trouve déterminée et unique, et peut même être assignée par une analise fort simple.

Cette droite ainsi déterminée, le plan conduit par elle et par le centre du soleil peut être considéré comme le plan de l’orbite ; les points où il est percé par les rayons visuels sont les lieux de l’astre aux époques des trois observations. On peut donc obtenir facilement, pour les mêmes époques, les trois rayons vecteurs, ainsi que les angles qu’ils forment deux à deux ; or, il n’en faut pas davantage pour assigner les dimensions de l’orbite et la situation de la ligne des apsides[1]. Ainsi, par un calcul tout à fait élémentaire, on obtiendra tous les élémens de l’astre, sauf cependant l’époque du périhélie, pour laquelle il faudra nécessairement recourir aux lois de Képler.

Voilà à quoi reviennent à peu près, pour le fond, une multitude des méthodes indiquées, à diverses époques, comme propres à la détermination approchée des élémens des astres, à commencer par celle que Newton a donnée, dans son Arithmétique universelle. À la vérité, aucune d’elles n’a réalisé, dans les applications, l’espoir qu’en avaient conçu leurs inventeurs ; mais on a pu croire que leur non succès, dans la pratique, devait tenir ou au trop d’intervalle entre les observations, ou aux erreurs dont elles se trouvaient entachées ; erreurs d’autant plus influentes que l’intervalle qu’embrassent les observations est moins considérable.

À la vérité, dans l’un de ses mémoires sur les comètes, Lagrange a fait voir que, même dans l’infiniment petit, c’est-à-dire, à la limite, l’hypothèse d’un mouvement rectiligne et uniforme ne peut être admise ; mais, soit que les motifs sur lesquels s’est appuyé cet illustre géomètre n’aient point frappé également tous les esprits ; soit que l’idée qu’il a cherché à repousser ait paru trop séduisante à quelques-uns pour devoir être abandonnée, soit enfin que l’autorité de l’auteur de l’Arithmétique universelle ait exercé en ceci plus d’ascendant qu’il ne convient dans des matières de géométrie et de calcul ; on a continué, bien postérieurement, à la publication des mémoires de Lagrange, et dans des ouvrages très-recommandables d’ailleurs, à indiquer la méthode de Newton comme propre, tout au moins, à fournir une première approximation.

Des géomètres très-distingués, sans admettre proprement l’hypothèse d’un mouvement rectiligne et uniforme, ont pourtant fait à peu près l’équivalent ; c’est-à-dire, qu’après avoir d’abord attaqué le problème de front, par les principes de la gravitation, ils ont cherché, chemin faisant, à le simplifier, par diverses suppositions qui rentrent, pour le fond, dans l’hypothèse qu’ils semblaient vouloir éviter. Ils n’ont fait ainsi que parvenir, à travers les pénibles calculs que nécessite l’emploi des méthodes légitimes, à des résultats équivoques, qu’ils auraient pu se procurer directement à bien moins de frais[2].

Je pense donc qu’il pourra n’être pas tout à fait inutile de revenir de nouveau sur l’examen de l’hypothèse d’un mouvement sensiblement rectiligne et uniforme durant un intervalle de temps peu considérable, considérée comme moyen de parvenir aux élémens du mouvement des astres. Mais voyons d’abord quelles sont les formules analitiques qui résultent de cette hypothèse.

II. Soient prises respectivement pour axes des positifs les droites menées du centre du soleil à l’équinoxe du printemps, au solstice d’été et au pôle boréal de l’écliptique. Soient alors respectivement

Pour les époques

les rayons vecteurs de la terre,

ses longitudes,

les longitudes géocentriques d’un astre,

ses latitudes géocentriques.

ses coordonnées ;

ses distances à la terre.

nous aurons d’abord

(1)

nous exprimerons ensuite que les trois lieux répondent aux trois rayons visuels, en écrivant

(2)

et tout cela aura lieu indépendamment de toute hypothèse sur la nature du mouvement de l’astre et sur la nature de la trajectoire qu’il décrit.

Si présentement on suppose que l’intervalle qui sépare les observations extrêmes est assez court pour que, durant cet intervalle, on puisse considérer le mouvement de l’astre comme sensiblement rectiligne et uniforme, on aura

c’est-à-dire,

(3)

Mettant dans ces dernières équations les valeurs données (2 et 3), elles deviendront

desquelles il s’agira de tirer les valeurs de

On simplifie un peu ces équations en posant

(5)

elles deviennent ainsi

(6)

On en tire la valeur de en prenant la somme de leurs produits respectifs par

on en tire celle de en prenant la somme de leurs produite respectifs par

on en tire enfin celle de en prenant la somme de leurs produits respectifs par

En posant ensuite, pour abréger,

(7)
(8)

il vient

(9)

Ces valeurs étant calculées, les équations (1 et 2) feront connaître les coordonnées des trois lieux de l’astre. Considérant ensuite le plan de l’orbite comme un plan passant par l’origine et par les deux lieux extrêmes, on aura ; pour son équation

(10)

ce plan se trouvera donc entièrement déterminé ; et on achèvera la solution comme il a été dit ci-dessus.

On pourra aussi poser, pour l’époque  :

(11)

et avec ces six quantités on déterminera complètement les élémens de l’astre suivant ce qui a été dit (Annales, tome II, page 8).

III. Voyons présentement ce que deviennent ces résultats à la limite, c’est-à-dire, lorsque l’intervalle de temps qui sépare les observations extrêmes est infiniment petit ou nul. Posons d’abord, pour abréger,

(12)

Nous aurons conséquemment

(13)
(14)

Supposons en outre que les observations soient équidistantes et posons

d’où

en substituant toutes ces valeurs dans les formules (7 et 8), elles deviendront

(15)
(16)


de sorte qu’en posant

(17)

et substituant dans (9), il viendra

(18)

et par suite (1)

(19)

ce qui donne encore

(20)

et l’on a ensuite

(21)

Présentement, étant des fonctions de lesquelles deviennent ou lorsque devient ou il s’ensuit qu’on doit avoir

étant des fonctions de qui ne deviennent pas nulles lorsque est zéro.

On déduit de tout cela

d’après quoi, en posant pour abréger

il viendra

En conséquence, on aura (18 et 19)

(22)

résultats sur lesquels nous reviendrons tout à l’heure.

Si présentement on suppose que les observations coïncident, c’est-à-dire, si l’on suppose que l’intervalle de temps qui sépare l’observation moyenne des deux observations extrêmes est nul, il viendra, en adoptant, pour plus de simplicité les notations de Lagrange

(23)

IV. Si nous n’eussions eu en vue que de parvenir à ces derniers résultats, nous aurions pu les obtenir d’une manière incomparablement plus simple, ainsi que nous l’allons voir ; et il en serait résulté une nouvelle méthode qui, si l’hypothèse qui nous occupe pouvait être admise, paraîtrait devoir l’emporter de beaucoup sur la précédente, sous le rapport de la rigueur et de la brièveté.

Soient toujours, pour une époque quelconque le rayon vecteur de la terre, sa longitude ou celle du soleil augmentée de six signes, la longitude et la latitude géocentriques d’un astre ; en posant, pour abréger, comme ci-dessus,

seront des variables fonctions de et les équations des rayons visuels seront

(25)

or, en conservant toujours la notation des fonctions, l’hypothèse d’un mouvement rectiligne et uniforme revient à supposer à la fois

différentiant donc deux fois consécutivement, sous ce point de vue, les équations (24), on en tirera

Les deux dernières donnent sur-le-champ

(28)

On a ensuite, par les équations (26)

et enfin, par les équations (25),

(30)

Voici comment on tirerait parti de ces formules. Au moyen de plusieurs observations peu distantes, au nombre de trois au moins, mais qu’il serait utile d’avoir en plus grand nombre, on se procurerait une suite de valeurs de et conséquemment de Par les méthodes connues d’interpolation, on déterminerait chacune de ces quatre dernières quantités en fonction de de manière qu’elles soient amenées à cette forme

(31)

Les coefficiens numériques une fois déterminés, on aurait

Prenant alors pour, une époque qui soit à peu près moyenne entre celles des observations extrêmes, les formules ci-dessus feraient connaître, pour cette époque, les valeurs numériques de et on en conclurait, par les formules (28, 29, 30), les valeurs numériques de , desquelles enfin on déduirait (Annales, tom. II, pag. 8) tous les élémens du mouvement de l’astre.

On pourrait, au surplus, s’épargner la peine de deux interpolations en profitant des circonstances connues du mouvement de la terre pour exprimer en fonction de et comme l’a fait M. Laplace, dans sa méthode pour les comètes. On pourrait aussi, à l’exemple du même géomètre, dans le cas où l’on saurait que l’orbite est parabolique, ou à peu près, profiter de l’équation de condition

pour éliminer de nos formules celle des deux quantités que l’on soupçonnerait être déterminée de la manière la moins rigoureuse, à raison des variations trop peu sensibles des valeurs consécutives de ou de Ainsi, sous tous les rapports, cette méthode ne le céderait à aucune autre, sous le double point de vue de la rigueur et de la brièveté, ainsi que sous celui de la simplicité et de l’élégance de la théorie qui y aurait conduit, si l’on pouvait faire quelque fond sur l’hypothèse qui lui sert de base. Voyons donc, d’une manière plus particulière, ce qu’on doit penser de cette hypothèse.

V. Nous avons déduit les formules (23) des formules (22), en supposant que l’intervalle de temps qui sépare les observations était tout à fait nul ; mais, nous serions encore parvenus aux mêmes résultats, si nous eussions seulement supposé cet intervalle de temps assez petit pour qu’il fût permis d’en négliger les puissances supérieures à la première ; car tous les termes négligés dans les formules (22), pour parvenir aux formules (23), sont affectés de au moins ; donc, si les formules (23) étaient rigoureuses, dans le cas d’observations infiniment voisines, les formules (22), et conséquemment les formules (9), devraient s’éloigner peu de l’exactitude, lorsqu’on les appliquerait à des observations qui ne seraient point séparées les unes des autres par un intervalle de temps trop considérable ; si donc alors elles conduisent à des résultats tout à fait défectueux, il faut en conclure qu’elles ne sont pas exactes, même à la limite, et qu’ainsi elles sont en défaut dans l’application, moins par le trop d’intervalle entre les observations, que par le principe même sur lequel elles reposent.

Si tout mouvement varié et curviligne peut, durant un intervalle de temps assez court, être considéré, sans erreur sensible, comme uniforme et rectiligne, nous pourrons supposer tel le mouvement de la ferre, dans l’intervalle qu’embrassent les observations. On peut même remarquer que souvent cette supposition s’éloignera moins de la vérité pour la terre que pour l’astre observé, et c’est par exemple ce qui arrivera lorsque cet astre sera une planète inférieure ou une comète passant fort près du soleil. Voyons donc ce que deviennent nos formules dans cette hypothèse.

Si l’on pose, pour abréger,

(33)

les formules (7 et 8) deviendront, au moyen des transformations (13 et 14),

(34)
(35)

en conséquence de quoi les formules (9) deviendront

(36)

Cela posé, pour exprimer que le mouvement de la terre est rectiligne et uniforme, il faudra écrire

(37)

c’est-à-dire,

(38)

cette supposition rend donc nuls les numérateurs des formules (36) ; nous allons voir qu’elle anéantit également leurs dénominateurs.

On a, dans le cas actuel,

(39)

au moyen de quoi les équations (3) deviendront, en ayant égard aux équations (38),

Or, si, entre ces trois dernières équations, on élimine, comme inconnues, deux quelconques des trois quantités la troisième disparaît aussi, et il vient pour résultat final

ou

Il est donc certain que, dans l’hypothèse où le mouvement de la terre et celui de l’astre sont, l’un et l’autre, rectilignes et uniformes, les valeurs de et par suite celles des coordonnées de cet astre, se présentent sous la forme indéterminée mais on sait que quelquefois cette forme n’est qu’une sorte de masque que prennent certaines formules très-déterminées, lorsqu’on les applique à des cas particuliers pour lesquels elles n’avaient point été calculées ; il est donc nécessaire de faire voir que, dans le cas qui nous occupe, les valeurs de doivent nécessairement être indéterminées ; et c’est là une chose extrêmement facile.

Soient, en effet, trois lieux consécutifs de l’astre, et les lieux correspondans de la terre ; de manière que les rayons visuels dirigés de l’une à l’autre soient Si l’on suppose les mouvemens rectilignes et uniformes, on devra avoir

Cela posé, concevons par et deux plans parallèles ce qui est toujours possible ; par le point concevons un troisième plan parallèle aux deux premiers ; et soit le point où ce nouveau plan coupera la droite par la propriété connue des droites coupées par des plans parallèles, on aura

proportion qui, comparée avec la précédente, prouve que le point n’est autre chose que le point lui-même, et qu’ainsi le plan contient la droite Il demeure donc établi par là que, lorsque deux points parcourent, d’un mouvement uniforme, deux droites non comprises dans un même plan, la droite qui va de l’un à l’autre demeure perpétuellement parallèle à un même plan fixe.

Or, soit présentement une droite quelconque autre que et posant à la fois sur les trois rayons visuels et les coupant respectivement en ces trois points seront aussi ceux où cette droite percera nos trois plans parallèles on devra donc avoir

donc, si un point se meut sur cette droite de manière à parvenir en respectivement, en même temps que l’astre parvient réellement en et la terre en ce point sera mu aussi d’un mouvement rectiligne et uniforme ; donc enfin, en admettant le mouvement rectiligne et uniforme de la terre, la supposition que l’astre observé se meut uniformément sur une ligne droite, assujettit simplement cette droite à poser à la fois sur les trois rayons visuels, sans en fixer aucunement la situation.

Le calcul différentiel confirme parfaitement cette conclusion, et même d’une manière fort simple. Nous avons déjà vu (24) que les équations du rayon visuel variable étaient

(38)

or, dans l’hypothèse du double mouvement rectiligne et uniforme de la terre et de l’astre observé, on doit avoir

(39)

différentiant donc deux fois consécutivement les équations (38), en ayant égard à ces conditions, il viendra

Or, les deux dernières équations ne suffisent plus alors pour déterminer et  ; et elles ne peuvent plus subsister ensemble que sous la condition

qui, jointe aux deux conditions réduisent en effet les valeurs (28, 29, 30) à

Que doit-on donc penser de la validité d’une hypothèse qui, appliquée, dans une même question, à deux cas tout à fait semblables, donne, comme absolument indéterminées, des quantités qui, de leur nature, sont déterminées et uniques. En vain dirait-on que, du moins en n’appliquant cette hypothèse qu’à un seul des deux cas, on doit se promettre d’approcher mieux du but ; dès lors, en effet, qu’elle est défectueuse, on perd, en n’y recourant qu’une seule fois, la chance des compensations d’erreurs qu’on aurait pu du moins se promettre de son double emploi.

Mais voici de nouvelles considérations qui nous paraissent de nature à mettre dans le plus grand jour tout le vide de l’hypothèse dont nous cherchons à écarter l’usage. Considérons l’ensemble des rayons visuels dirigés sans cesse de la terre en mouvement vers un astre aussi en mouvement ; ces rayons visuels, considérés comme indéfinis, engendreront dans l’espace une certaine surface gauche, dont la nature dépendra de celle du mouvement simultané des deux astres. Soient tracées sur cette surface tant de courbes continues qu’on voudra, de manière que ces courbes, d’ailleurs quelconques, ne présentent, dans leur cours, aucun point de rebroussement. Soient alors une suite d’astres fictifs parcourant ces différentes courbes de telle manière qu’ils parviennent tous, en même temps que l’astre réel, sur chacun des élémens rectilignes de la surface gauche ; c’est-à-dire, de manière que, pour l’observateur, ils cachent sans cesse cet astre réel ou soient sans cesse cachés par lui. Les données fournies par l’observation seront constamment les mêmes pour tous. Or, s’il était permis, du moins pendant un intervalle de temps peu considérable, de supposer le mouvement de l’un d’eux sensiblement rectiligne et uniforme, ou devrait incontestablement jouir de la même liberté à l’égard de tous les autres. Or, en soumettant cette hypothèse au calcul, et ayant d’ailleurs égard au mouvement varié et curviligne de la terre, on trouverait que, pour un instant quelconque, ces astres sont tous situés au même point de l’espace, et qu’ainsi ils suivent perpétuellement la même route. L’hypothèse d’un mouvement sensiblement rectiligne et uniforme, pendant un temps très-court, ne saurait donc être admise, puisqu’elle tend à faire juger égales des quantités qui peuvent être d’ailleurs fort différentes.

Quelques géomètres ont pensé pouvoir du moins admettre cette hypothèse dans la recherche du plan de l’orbite, sauf ensuite à procéder d’une manière plus rigoureuse dans la recherche des dimensions de cette orbite et de sa position sur ce plan. Mais, ces derniers élémens étant inévitablement subordonnés au premier, cela revient à peu près à achever, avec beaucoup de soin et de précision, un calcul entrepris sur de fausses données.

D’autres ont cru faire une moindre erreur, en supposant seulement le mouvement de l’astre rectiligne sans le supposer uniforme ; mais cette hypothèse, se trouvant en contradiction formelle avec le principe des aires, semble devoir être plus fautive encore que la première. Si l’on faisait l’inverse, c’est-à-dire, si l’on supposait le mouvement uniforme, mais non rectiligne, cette hypothèse, combinée avec le principe des aires, reviendrait à attribuer à l’astre un mouvement circulaire autour du soleil ; et l’on sent qu’excepté dans le voisinage des apsides, cette hypothèse serait tout à fait insoutenable.

Les équations du mouvement d’une planète ou d’une comète sont comme l’on sait,

or, on voit que l’hypothèse d’un mouvement rectiligne et uniforme revenant à supposer cette hypothèse ne pourrait être admise, en toute rigueur, que pour le seul cas de Nous ne disconviendrons donc pas que cette hypothèse ne puisse être tolérable, pour une comète encore fort éloignée de son périhélie, et nous pensons que dans ce cas il serait bon de ne point faire usage d’observations trop rapprochées ; mais, comme d’ordinaire ce n’est point dans ces circonstances que les comètes peuvent être observées, la méthode ne pourrait être alors appliquée que dans des cas extrêmement peu fréquens.

  1. Ce problème a été élégamment résolu par M. le professeur Kramp, à la page 197 du IV.e volume de ce recueil.
  2. Il importe aussi de remarquer que, dans les procédés approximatifs, il ne suffit pas de s’assurer que les quantités que l’on se permet de négliger sont fort petites, mais qu’il faut de plus qu’elles ne soient pas d’une petitesse comparable à celle des quantités vis-à-vis de qui on les néglige ; et c’est là une chose à laquelle on ne fait pas toujours assez d’attention.