Edouard Garand (74 Voir et modifier les données sur Wikidatap. 50).

XVII


Le lendemain Luther Howinstein n’eût rien de plus pressé que de faire répandre le bruit qu’Herman von Buelow avait fait assassiner sa femme et son enfant et qu’il était parti pour Cythère avec une jeune dame rencontrée récemment, une aventurière fort jolie et fort troublante.

Les journaux dévoués au nouveau maître se chargèrent d’ébruiter cette nouvelle et d’y donner une publicité de mauvais aloi.

Ce qui l’accrédita fut la disparition soudaine de l’ancien ministre des affaires étrangères qui, sa mission accomplie, s’embarqua pour l’Amérique au lieu de retourner en son pays.

Comme les morts ne parlent point, nul de ceux qui furent mêlés de près ou de loin au drame où Natalie et son fils perdirent la vie, ne purent démentir les inventions d’Howinstein. Ce dernier son forfait accompli, les avait fait disparaître, en les faisant égorger tous, sans merci, par des hommes à sa solde.

Quant à von Buelow, il apprit à Londres même les événements tragiques qui venaient de s’accomplir.

Il en demeura anéanti d’abord puis animé d’un désir de vengeance il voulut partir immédiatement pour Leuberg. On lui conseilla de n’en rien faire. À son entrée sur le sol uranien il serait arrêté et fusillé le lendemain sans forme de procès.

Ses biens depuis longtemps déjà étaient placés en Amérique et ce jusqu’au jour où les affaires uraniennes devaient se stabiliser d’une façon durable.

Il s’embarqua donc pour le Canada, traînant avec lui, son cœur lourd de deuil et de désirs de vengeance.

Une fois de plus, il attendrait. Si deux montagnes ne se rencontrent pas, deux hommes se rencontrent.

Un mois à peine après son arrivée Howinstein dut se sauver précipitamment. Il erra quelque temps dans diverses capitales d’Europe, et finalement, lui aussi s’embarqua pour l’Amérique.

Où ? Personne ne le savait pas au juste. Ce qu’il faisait ? Il conspirait. Il était né conspirateur. Il éprouvait un besoin physique d’activités fébriles. Il respirait mieux dans l’atmosphère trouble des complots.

Il lui fallait, dans sa vie, de l’aventure, du mystère, des dangers. Il vivait au milieu d’eux comme dans son élément naturel, avec l’espérance qu’un jour, il retournerait là-bas jouer une autre fois un rôle de premier plan.

J’ai appris par la suite qu’il s’était marié, avait perdu sa femme il y a trois ans, à la naissance de sa fille qu’il chérissait et idolâtrait.