Librairie de L. Hachette et Cie (p. 132-133).

XLVI

PARABOLE DU FILET ET DES POISSONS.



« Le Royaume des Cieux peut encore être comparé à un grand filet qu’on jette à la mer et qui se remplit de poissons de toutes espèces. Lorsqu’il est plein, les pêcheurs le retirent, s’assoient sur le rivage, choisissent les bons poissons qu’ils mettent dans des baquets, et rejettent les mauvais. Il en sera de même à la fin du monde ; les Anges viendront pour séparer les méchants d’avec les justes, et ils jetteront les mauvais dans la fournaise ardente ; c’est là qu’il y aura des pleurs et des grincements de dents. »

Louis. Moi je trouve deux choses. D’abord, pourquoi Notre-Seigneur répète-t-il deux fois la même chose pour la fournaise, les pleurs et les grincements de dents ? Et puis, je trouve que les pauvres Juifs ne pouvaient pas comprendre les paraboles, puisque nous autres nous ne les comprenons pas ; et pourtant nous avons plus d’esprit que les Juifs.

Grand’mère. Je vais répondre à tes deux objections. D’abord, pour les répétitions en ce qui regarde l’enfer, Notre-Seigneur l’a fait exprès, et il le redit d’autres fois encore dans l’Évangile, car l’enfer est un mal trop affreux pour que Notre-Seigneur ne cherche pas à en bien faire comprendre toute l’horreur et tout le danger.

Et quant aux paraboles que tu trouves difficiles à comprendre, il faut dire que, dans les temps anciens, on parlait souvent par paraboles et par allégories.

Armand. Qu’est-ce que c’est, allégorie ?

Grand’mère. Allégorie est presque la même chose qu’une parabole ; une parabole est une chose plus sérieuse qu’une allégorie ; ainsi une fable est une allégorie ; on ne peut pas dire que ce soit une parabole. — Les Juifs avaient donc, plus que nous, l’habitude de deviner le sens des paraboles. En second lieu, Notre-Seigneur connaissait la malveillance méchante des Juifs à son égard ; il savait que lors même qu’ils reconnaîtraient en eux-mêmes la vérité de tout ce qu’il leur disait, ils n’en feraient rien voir au dehors, et que ses paroles n’ouvriraient pas les yeux à des gens que ses miracles n’avaient pas convertis. Enfin, tu te trompes quand tu crois que les Juifs avaient moins d’esprit que nous ; ils en avaient tout autant, seulement ils en faisaient un mauvais usage. La preuve qu’ils comprenaient, c’est que lorsque Notre-Seigneur eut fini ses paraboles, il ajouta :

« Comprenez-vous bien ce que je vous dis ?

— Oui, répondirent-ils. »